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Full text of "Annales"

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ANNALES 


DE   LA 


SOCIÉTÉ  ACADÉMIOUE. 


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ANNALES 


DE    L4 


SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE 

DE  NANTES 


BT  DU 


DfiPARTElINT  DK  LA  LOIRI-INFÉRIEURB. 


TOME  XXI. 


TOME  1.*'  DE  LA  TKOÏSIÊAIE  SÉRIE. 


IMPRIMERIE  DE  M.-«  V.«  CAMILLE  MELLINET, 

lapriineaT  de  li  Soeiéti  AciMniqur. 

1850. 


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Acy6c 


ANNALES 

DE  LÀ  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  SÉANCES. 


SwffièmefM  au  i^oc^verM  de  to  itefioe.  du  S  Hnmkrt 

1849. 

DISCOCBS   D'iNStÀLLlTlOIf   ET  JD'àDIEDX  BE    V.    EUGÈNE 

LAMBERT  «  PBÉSIDENT   DE  Ll   SOCIÉTÉ   ACIDÉMIQVE 

DE    LA   LOIBE-IHFÉBIEURE. 

Messibveb  , 

Dans  toute  autre  position  que  celle  qui  m'est  faite ,  |)ar 
mon  élévation,  dans  la  hiérarchie  judiciaire,  au  siège  de 
conseiller  à  la  Cour  d'appel  de  Rennes ,  je  n'aurais  eu  à 
vous  adresser  aujourd'hui  que  Texpressbn  d'une  reconnais- 
sance sans  bornes  et  d'une  satisfaction  sans  mélange.  Pour- 


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—  6  — 

quoi  fiiutnl  «  mes  cbers  collègues ,  que  ce  qui  agrandit  ma 
carrière  de  magistrat  soit  en  même  temps  la  source  de 
bien  yik  et  bien  profonds  regrets.  Pourquoi  faut-il  que  je 
ne  vienne  prendre  possession  du  fauteuil  de  président  au- 
quel vos  suffrages  jont  biep  voulu  m*app^er ,  que  pour  le 
quitter  aussitôt  et*  vous  invitera  le  eonler  à  Tun  de  nos 
collègues  plus  heureux  que  moi.  C*est  qu'il  ne  saurait  ja- 
mais y  avoir  pour  l'homme  de  satisfaction  complète.  — 
DaQs  la  ^fUbtt  des  idées,  comme  daiis  le  eérclb  cfes  alTec- 
tioDS  ou  des  sentiments ,  labsolu  n'est  pas  de  ce  monde. 

Je  le  regrette  d'autant  plus ,  Messieurs ,  que  je  croyais 
comprendre ,  à  ma  manière ,  la  mission  attachée  à  la  pré- 
sidence de  la  Société  Académique  ;  et  tous  mes  efforts  eus- 
sent tendu  à  lui  maintenir  .sou  rôle,  à  la  fois  acientiiiyue  et 
littéraire ,  à  la  faire  persévérer  dans  la  voie  de  fusion ,  de 
protectorat  artistique ,  et  de  travail  en  commun  qu'elle  a 
déjà  entreprise,  et  surtout  à  sauver  son  avenir  du  décou- 
ragement ou  plutôt  de  riudifférence  à  laquelle  se  sont 
laissé  entraîner  une  ou  deux  de  ses  sections. 

Ce  n'est  pas,  en  définitive,  pour  rester  chez  soi,  les 
jours  de  réunion  générale  ou  de  réunion  partielle  des  sec- 
tions; ce  n'est  pas  pour  s  abstenir  de  tout  travail^  de  toute 
communication  intellectuelle  avec  ses  collègues,  qu'on 
s'est  fiiit  recevoir  à  la  Société  Académique.  —  Noblesse 
oblige ,  selon  un  vieil  adage  féodal  qu'appliquait  si  ingé- 
nieusement H.  Foulon  à  l'un  de  nos  poètes  qui ,  par  cela 
seul  qu'il  publiait  des  poésies ,  prenait ,  selon  lui ,  l'obli- 
gation, bien  remplie  d'ailleurs,  de  revêtir  des  pensées 
élevées  d'une  forme  par  excellence. 

Messieurs ,  il  est  un  mot  fatal  qu'il  fi^t  prononcer  toutes 


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—  7  — 

les  fois  qu*on  veut  explk|aer  le  mal  qui  afflige  nôtre  épo- 
que et  leà  signes  d'effaiUissement  moral  qui  frappent  tous 
les  yeux.  C*esl  le  mol  :  InêivldualiBme.  Égoiime  serait 
plus  juste  et  mieux  compris*  Sous  sa  dissolvante  influence, 
les  droits  et  les  devoirs  perdent  leur  équilibre ,  le  faisceau 
des  doctrines  se  divise,  et  le  flot  des  idées  générales  s'é- 
puise sans  rien  lëconder  dans  le$  canaux  trop  multipliés 
des  théories  personnelles. 

Heureusement,  chaque  époque  aussi  porte  en  etle- 
raéme  un  principe  de  sauvegarde,  et  dans  votre  organisa- 
tion ,  dans  votre  existence  qui  date  de  plus  de  cinquante 
années ,  je  trouve  un  autre  mot  consolateur  et  qui  remplit 
toutTavenir,  c'est  oelut  d'association ,  car  il  représente  le 
principe  le  plus  fécond  et  le  plus  salirtaire  pour  Torga- 
nisationet  la  perfectibilité  des  sociétés  humaines. 

Les  entreprises  isolées,  les  travaux  individuels  ne  sau- 
raient suffire  à  une  situation  pareille ,  et  pour  la  part  qu'il 
nous  est  donné  de  prendre  à  son  amélioration ,  il  est  cer-* 
tain  que  si  elles  n'existeiênt  pas  déjà ,  la  création  des  So<- 
ciétés  académiques ,  ces  associatioi»  désintéresuées  de  tra- 
vailleurs lîuéraires  et  scientifiques,  serait  une  précieuse 
conquête  sur  le  fractionnement  intellectuel  du  temps  où 
MOUS  vivons,  et  sur  cet  individualisme  fiital  qui  aCEnbUt  en 
les  divisant  les  forces  ntales  du  pays ,  car  il  laisse  flotter 
au  hasard  les  liens  brisée  des  idées  et  des  croyances,  saas 
puissance  pour  les  rattacher  entre  elles,  sans  une  main 
qui  las  rassemble,  un  nœud  qui  les  concentre 

Chacun  s  isole  dan^  son  cabinet  d'étude  et  de  travail , 
l'habite  avec  sa  seule  pensée  et  en  fiiit  le  centra  du  monde 
inteUectueL  —  Chactm  a  sa  tliéorie  piiilosophtque ,  son 


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_  8  — 

sysâème  littéraire /son  utopife  politique;  ~  On   invdnte 
UD9  religion ,  comme  si  une  révélfttioii  ptovideatieUe  pou-^ 
vwt  tomber  et  s'égarer  sur  le  front  isolé  d'ua  orgueîUeua^; 
—  on  (srée  «ne  forme  noovdie  de  sociobilité ,  sans  tenilr 
compte  ni  des  traditions  ni  des  mœurs  ^  ni  des  Uens  sa- 
crés de  la  &miUe ,  ni  des  sentiments  religieux  des  mas^ 
ses  :  —  Chacun   apporte  pour  uti  écfifiee  idéal  urn  pieroe 
qu'il  a  taillée  à  sa  manière ,  qu'il  a  choisie  sans  contrôle 
et  ^'il  adapte  sans  ciment  :  -^  Ce  n'est  plus  comme  aux 
temps  bibliques  la  confusion  des  biagues ,  c'est  celle  des 
doctrines  et  des  idéea;  c'est  .tottjours. la  tour  dcBabel^ 
Eh  bien  ,  Messieurs ,  fortifier  et  perfectionner  des  as-- 
soeiatioDS  telles  que  la  n6tre ,  n'est^œ  pas  créer ,  pour 
tous  les  hommes  de  savoir  et  d'étude  d'une  même  con^ 
trée ,  et  qui  devraient  avoir  k  direction  de  l'opinion  dans 
les  grands  centres  de  populatién  ,  robligatîoii  de.  cher- 
cher à  détruite  cette  diffusion  d'idées,  ce  oonflit  étraage 
de  doctrines ,  cet  essor  despotique  des  intérêts ,  ce  dé** 
cousu  de  vœux  et  de  sentiments  qu'on  ne  saurait  tropdéplo^ 
rer  7  —  N'est-ce  pas  appeler  un  eoncours  de  volontés  vers 
un  même  but  qui,  à  défaut  de  gloire ,  a  du  moins  son 
utilité^  et  ramener  avec  la  tempe  une  déâirable  fusion 
des  principes,  les  meilleurs,  par  une  sorte  de  travail  d'as- 
simihition  qui  enrichit  tout  le  naonde  sans  appawrir  per- 
sonne.—  L'idée  ainsi,  marclie  plus  souveraine  et  iitt  son 
oeuvre  plus  grande;  et  lorsqu'elle  se  mêle  à  une  autre 
idée,  c'est  pour  la  féconder  si  elle  a  de  Taveair ,  ou  pour, 
la  rectifier  dans  ce  qu'éite  a  de  systématique  et  de  trop 
absolu  :  les  angles  trop  saillants  s'effacebt  ;  les  théories  se 
pUent  à  la  possibilité  de  leur  réalisation  ;  et  o*est  ainsi 


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—  9  — 

qu'avec  de  la  foi  dans  la  miaiiefi  qai  leur  est  donnée ,  et 
de  la  perséféranoe  dans  leurs  travaux ,  les  Sooiétés  Aea- 
démique»  de  la  pvovince  peuvent  acquérir  assee  d'imtorité 
morale  pour  donnetr  aut  esprits  une  même  impirtsion,  aux 
âmes  une  mônse  espéi^ance. 

Et  savez  vous ,  Messieurs  ,  quels  sont  ii;s  éléments  de 
cet  heureux  résultat  ?  —  Ooi  ^  sans  doute,  puisque  vous  les 
possédez.  —  Ce  sont  les  sciences ,  les  lettres  et  les  arts 
qu'il  &ttt  aiaier  et  cultiver,  non'^seulettient  poor  enx«- 
mènes^mais  pour  les  jouissances  qu'ils  prooorentet  Ta* 
paMement  qu'ils  apportent  à  une  époque  aussi  lounnentée 
que  la  nôtre,  —  L'art  ^  la  anience)  la  poésie  ne  sont  pas 
seulement  des  questions  d'orgueil  national  et  d'avenir  in- 
tellectuel, mais  d'admirables  instruments  de  bten-^lreet 
de  moralisation  sociale. 

Conservez  donc,  Messieurs,  cet  admirable  terrain  neutre 
de  la  science  et  de  Tart  sur  lequel  les  partis  peuvent  en- 
core s'entendre  et  peut*étre  opérer  leur  réconciliation  ; 
—  et  que,  dans  un  coin  obsbur  de  cette  cité  industrieuse  et 
bruyante ,  il  y  ait  au  moins  un  sanctuaire  calme  et  in* 
spidrateur  où  les  études  apécuiatives  et  le  euke  de  l'art  ne 
soient  pas  oomplétemeni  abandonnée;  où  puisée  se  con- 
server ,  pure  et  sereine  ,  la  foculté  d'oublier  le  bruit  dis- 
cordant qui  se  fiiit  au  dehors  ,  et  de  s'y  réfcgîer  contre 
l'intoléranoe  des  partis,  leurs  puériles  exigences  et  Imt 
dédaigneose  partialité. -^  Ne  .vons  laisscts  pas  envahir  par 
les  passions  politiques  de  notre  âge  de  bruit  et  de  ma- 
térialisme brutal  :  vous  d€(  vous  appartiendriee  phis  à  vous- 
mêmes,  et  ne  seriez  phls  amttres  de  votre  route,  déjà  si  tonguo 
et  chaque  jour  mieux  éclairée;  oar>  po«lr  guétirnos  bles- 


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—  10  — 

sures  sociales ,  il  fout  l'idée  qui  coneenire,  plutôt  que  l'ac- 
tion qui  divise  ;  le  chant  qui  calme  et  endort  les  passions, 
plutôt  que  le  cri  qui  les  irrite  et  les  aigrit*  —  Quand  vous 
serez  seulement  trois  réunis ,  disait  le  Christ  aux  Apôtres  , 
comptez  que  j'y  serai  avec  vous  ;  eb  bien  ,  réunissez  trois 
lK»nmes  sur  le  terrain  de  l'art  et  de  la  science ,  et  vous 
verrez  naître  aussitôt  l'élément  de  sympathie,  la  corde  har- 
monique ;  et  s'ils  sont  inconnus  les  uns  aux  autres ,  ils 
se  reconnaîtront  aussitôt  pour  des  frères,  appartenant  à  la 
même  origine.  -^  Mais  jetez  au  milieu  de  ces  mêmes  faom* 
mes  une  des  questions  sociales  et  politiqaes  du  mo* 
ment,  et  sur  trois,  il  surgira  tout-àcoup  deux  ennemie  ir- 
réconciliables. —  Oui ,  si  TÀrioste  composait  aujourd'hui 
son  admirable  poème ,  ce  n'est  plus  l'amour ,  c'est  la  po- 
litique qu'il  jetterait  avec  la  discorde  dans  le  camp  d'A* 
gramaut. 

Vous  commissez,  Messieurs,  ma  prédilection  pour  les 
études  littéraires  dont  la  poésie  est  l'objet;  vous  les  avez 
quelquefois  encouragées  ;  —  eh  bien  !  permettez-moi  , 
quand  je  vous  parle  pour  la  dernière  fois ,  de  recom- 
mander encore  cet  élément  supérieur  de  la  pensée  bu* 
maine  à  vos  méditations ,  abstraction  foite  de  telle  ou 
telle  forme. 

11  est  bien  phisfiicile  de  direceque  n'est  pas  la  poésie,  que 
de  la  définir  complètement;  cela  se  sait  plutôt  que  cela  ne 
s'exprime  :  n'est-il  pas  en  chaque  chose  un  élément  intime, 
profond,  générateur t  précieux  et  nécessaire  à  sa  oonser- 
vation  :  c'est  dans  la  nature  une  perspective  choisie ,  dans 
la  plante  une  essence ,  dans  le  cûMir  de  l'homme  un  s^tt>* 
ment  inné,  qui  le  porte  sans  cesse  à  sortir  de  lui-^mème , 


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-  H   ^ 

et  lui  ùÀi  eqpérer  une  eiisUnee  meilleure  «t  plu»  pure  que 
celle-ci  ;  comme  il  est  dans  chaque  siècle  uu  monument 
plus  digne  de  lui  marquer  sa  place  ^  dans  chaque  histoire 
une  page  plus  merveilleuse,  promise  à  la  postérité;  et 
dans  les  arts  enfin,  un  plus  sublime  eflbrt,  une  forme  plus 
idéale  qui  saisissent  tout  d*abord ,  notre  àme  a^^ant  l'aver- 
tissement extérieur  des  sens —  eh  bien,  c*e9l  là  la  poésie  I 

C'est  l'essence  même  des  choses ,  c'est  Texpression  de 
tout  ce  qui  se  dég^e  pour  remonter  :  Fàme  du  corps ,  la 
flamme  du  foyer ,  le  parfum  de  la  fleur ,  Tencens  des  autds, 
la  prière  à  la  fin  du  jour;  —  c'est  ce  qui  plane  sur  toute 
chose  pour  la  colorer  d'une  auréole  et  lui  donner  le  soufSe 
de  la  vie.  —  Idiome  intermédiaire  entre  Thomme  et  Dieu! 
langage  entendu  de  tous  deux. 

Comment  se  &it-il  donc,  Messieurs,  que  ce  grand  mot 
de  poésie  I  ainsi  compris,  ne  soulève  autour  de  nous  que 
dérision ,  indifférence  et  mépris,  lorsque  c'est  peut-être  la 
seule  chose  de  notre  époque  qui  lui  devra  de  fixer  l'atteu* 
tion  de  la  postérité  !  -^  C'est  qu'aujourd'hui  la  Bourse  est 
le  seul  temple  où  se  presse  encore  la  foule,  que  les  intérêts 
ont  remplacé  les  principes,  que  le  fait  l'emporte  sur  l'idée, 
les  affaires  sur  les  sentiments,  les  droits  sur  les  devoirs  et 
I activité  du  corps  sur  la  méditation  de  l'esprit. --r  Oh! 
malheur  à  nous  alors,  car  le  matérialisme  des  faits  conduit 
naturellement  au  matérialisme  des  idées;  et  de  là  vient  ce 
dédain  du  plus  grand  nombre  pour  toute  pensée  qui  s'é- 
lève, pour  toute  inspiration  qui  remonte,  pour  tout  fî'ont 
qui  rayonne ,  pour  tout  œil  où  brille  une  espérance.  — 
Comment  voulez-vous  que  l'on  crpie  au  génie  ici  bas,  quand 
on  ne  eroit  plus  à  Dieu  là  haut?  Coaunent  voulez-vous  qu'on 


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-  15 - 

ak  foi  à  revenir  et  à  rimmarlÉlHé  ât  la  péhêé«  humaine , 
quand  la  ym  habhueiie  de  chacun  et  de  toAs  est  la  négation 
constante  de  l'àme  et  de  la  vie  future. 

Messieurs,  tout,  autour  de  nous,  se  laisse  entraîner  dans 

ce  ftital  courant  :  l'histoire,  qui  se  fiit  récote  du  fetalisme , 

la  glorification  eu  bit  accompli  ;  —  la  phrloso]^ie  que  le 

pknthéisine  domine  et  qui'se  laisse  envaiitr  et  absorber  par 

les  sectes  politiques  ;  —  le  drame ,  qui  ne  parle  qu'ftnx  yeux 

et  ne  vient  présenter  que  le  jeu  de  brutales  et  miitérielfes 

pasSHMis;  leroman^qui  fie  sait  ménager,  en  pénétrant  la 

vie  intime  de  chacun,  que  des  capitulattotis  de  conscience, 

et  abaisser  vers  le  mal  des  pentes  plus  fletiries  ;  — *  l'art 

enfin,  presque  tout  entier,  qui  se  matérialise,  stimule  la 

sensation  et  néglige  Tidéal.  —  Eh  bien,  au  milieu  dé  tous 

ce8dé8ord?es  du  domaine  de  la  pensée^  s'il  est  une  chose 

qui  soit  restée  pme ,  digne ,  élevée ,  spiritualiste  enfiti ,  c*est' 

encore  la  poésie.  —  Étudiez-la  dlins  les  grandes  œuvres 

qu'elle  a  produites,  vous  la  verrez,  à  délkut  du  mondé  qui 

s'abandonne  lui-même,  se  réfugier  dans  la  nature,  tout 

animer  «n  elle ,  spiriiualiser  te  création ,    et  l'admettre 

sans  cesse  en  tiers  dans  nos  pensées  pour  les  élever  à  sa 

tnmqville  majesté,  et  ta  mêler  à  nos  tristesses  pour  tes 

enivrer  de  ses  étemels  sourires.  -—  Elle  exprime  partout 

que  les  beautés  sans  nombre,  dont  la  nature  e^t  remplie, 

répondent  à  nos  plus  secrètes  et  intimes  impressions,  et 

qu'elle  est  feite  pour  le  développement  de  nos  instincts 

moraux ,  bien  phis  encore  que  pour  la  satis&ction  de  nos 

besoins  physiques,  parce    qu'elle  parle  incessamment  à 

notre  cœur   pour  en  épurer  la  -flamme ,  à  nos  passions 

pour  calmer  le  paroxisnrre,  à  nos  souvenirs  pour  adoucir 


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-  Iî5  - 

leurs  regrets,  à  nos  espérances  pour  alléger  leur  ailes. 
Théorie  ebarmante  et  <iouee,  philosophie  consolante  et  vraie 
que  cette  fusion  de  nos  deux  natures  pour  les  purifier  Tune 
par  l'autre ,  et  pour  endormir  les  souffrances  de  celle  qui 
est  périssable  par  le  dégagement  de  celle  (|ui  est  éternelle, 
lien  mystérieux  entre  nous  et  la  création  ,  lieo  brisii  trop 
souvent  par  I^  main  glacée  de  ce  sceptre  myope  et  90urd 
ifïon  appelle  le  scepticisme,  par  le  souffle  desséchant  de 
la  philosophie  de  l'esprit ,  mais  rattaché  puissaminent  par 
la  philosophie  du  cœur ,  c'est-à-dire  par  la  poésie. 

Pardonoe^-moi,  mes  chers  collègues,  de  m'ètre  ainsi 
laissé  entraîner  sur  cette  pente  si  attrayante  pour  moi.  — 
J*ai  bien  peur  c|Ue  vous  ne  voyez  là  qu'un  artifice  ingé- 
nieux du  langage  pour  retarder  d'autant  notre  séparation. 

—  Je  ne  m'en  défend»  pfts,  ^i  je  puis  vous  persuader  par 
là  de  quel  prix  étaient  pour  moi  vos  suffrages,  et  avec 
quel  sentiment  de  regret  je  vais  quitter  la  posiitîen  que 
vous  m'aviez  donnée  parmi  vous.  —  C'était  en  effet  un 
événement  pour  mot  que  votre  présidence;  c'était  une 
date  à  ma  vie,  une  signification  à  mon  passage  à  Nantes. 

—  Et  croyez  bien ,  Messieurs,  que  si  dans  toute  autre 
occasion  je  n'eusse  abordé  qu'avec  une  grande  hésitation 
les  graves  et  importantes  fonctioiis  auxqiwAles je  ^\m  ap- 
pelé dans  une  aovff  souveraine,  j'aurais,  grâce  à  \q^^ 
bien  moins  de  défiwce  de.  moi-cpén^i  fMurae.qiie  vai«» 
venez  de  me  rehausser  à  in^a  propres  yeux,  et  que,  dios 
toutes  les  circonstances ,  je  oip^tm  tous  mes  soins  à  mé- 
riter rhonneur  d'avoir  porté ,  ne  fut-ce  qu'on  seul  jouv* 
le  titre  de  votxe  Présent* 


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—  14  ~ 
Séance  extraordinaire  du  19  décembre  1849. 

PHÉSIDSIICS  DB   M.    LAMBERT. 

La  Société  procède  à  Télection  d*ua  président,  en  rem- 
placement de  M.  Lambert ,  démissionnaire. 

M.  Gély ,  vice-président,  est  éla  président  pour  1850. 

M.  Grégoire ,  membre  du  Comité  central ,  est  élu  vice- 
président,  en  remplacement  de  M.  Gélj. 

M.  Vandier  est  élu  membre  du  Comité  central  pour  la 
Section  des  Lettres,  en  remplacement  de  M.  Grégoire. 

Séance  du  mercredi  9  janvier  1850. 

ntAailKENCS   BB   M.  6ÉLT. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté 
après  rectifications. 

M.  Gély,  en  prenant  place  au  Bureau ,  8*exprîme  en  ces 
termes  : 

Mbssibubs^ 

En  m*appelant  à  Thonneur  de  vous  présider,  vous 
m*avez  donné  une  preuve  d'estime  et  de  bienveillance  dont 
je  suis  vivement  ému  et  pour  laquelle  je  ne  saurais  assez 
vous  exprimer  toute  ma  gratitude.  Je  ne  me  dissimule  point 
combien  cette  tâche  honorable  est  au-dessus  de  mes  forces, 
et  j'allais  dire  en  opposition  avec  les  travaux  professionnels 
qui  devraient  seuls  avoir  le  droit  de  me  détourner  des  exi- 
gences de  la  pratique.   Mais  le  témoignage  de  confiance 


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~  15  — 

que  vous  m*avez  donné  n'est  pas  de  ceux  qu'on  décKne, 
et  si  je  ne  devais  pas  rainl>itioBn|srf  je  dois  l'accepter,  en 
y  puisant  la  celitude  que  votre  tudidgente  bonté  me  ser-^ 
vira  d'appui,  et  me  rendra  facile  les  fonctions  qu'elle  me 
confie  aujourd'hui.  Je  dois  craindre,  Messieurs,  que  l'Aca- 
démie ne  trouve  point  en  moi  un  organe  digne  d'elle, 
surtout  quand  je  me  rappelle  le  nom  de  ceux  qui  se  sont 
succédés  à  la  présidence  depuis  quelques  années.  Naguères 
encore  vous  aviez  trouvé  un  brillant  interprète,  dans  If. 
Lambert,  dont  je  dois  plus  qu'un  autre  regretter  l'ab- 
sence, car  j'espérais  profiter  de  son  exemple  avant  d'a- 
border une  position  pour  laquelle  il  était  si  naturellement 
disposé. 

D'intéressants  travaux  littéraires,  consignés  dans  vos 
Annales,  Tavaient  depuis  longtemps  désigné  à  vos  suffrages. 
Vous  savez.  Messieurs,  quel  était  le  caractère  dominant  de 
ces  écrits,  quel  frais  coloris,  le  talent  de  notre  collègue 
savait  répandre  sur  tous  les  sujets  qu'il  traitait.  Vous  avet 
ccmservé  la  mémoire  de  son  compte  rendu^oomme  secré- 
taire général,  dans  lequel  il  déploya,  malgré  l'aridité  natu- 
relle à  un  pareil  sujet,  toutes  les  ressources  d'une  riche 
inoagination  et  d*un  style  fleuri.  Il  vous  a  donné  une  nou- 
velle preuve  de  son  talent.  Dans  cette  brillante  page,  qui 
sera  entre  vous  et  lui  comme  un  dernier  lien,  et  dans  la- 
quelle il  a  tracé  avec  de  si  vives  couleurs,  une  conviction 
si  grande  et  un  si  complet  suceès,  l'utilité  et  le  but  de  la 
poésie  au  sein  d'une  société  qui  s'oublie.  Mais  ce  n'était  pas 
seulement  le  littérateur  distingué  que  vous  aviez  trouvé  dans 
H.  Lambert,  c'était  encore  le  collègue  afiectùeux,  le  juris- 
consulte éminent,  l'ami  sûr  et  dévoué.  C'est  à  tous  ces  titres 


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-   16  - 

^M  Sun  élûignement  sem  plas  vivement  senti,  et  que  je 
suis  Assuré  d'être  rinterprèie  de  vos  eenitmeats  en  disant 
de  lui,  ^u*il  emporte  toute  notre  estime  et  nous  Imse  de 
bien  sincères  regrets. 


La  Société  a  reçu  : 

1.^  Institut  des  Provinces,  et  Société  française  pour  la 
conservation  des  monuments  hi8toriques.  1849. 

2.*'  Mémoires  de  TAcadémie  des  Sciences,  Arts  et  Belles** 
Lettres  de  Caeo.  1849. 

3.^  Procès-verbaux  des  séances  de  la  Société  d'Agrioiil^ 
ture,  Sciences  et  Arts  d'Angers.  1849. 

4."*  Mémoires  de  TAcadémie  des  Sciences,  Lettres  et 
Arts  de  Lyon,  Section  des  Sciences,  1849,  t«  11» 

5.""  Comptes-rendus  et  Extraits  des  procèa«verbaux  des 
séances  de  1* Académie  des  Sciences,  Lettres  et  Arts  de 
Lyon.  1849. 

6.""  Biographie  bretonne,  par  M.  Levot;  4/ ,  5/  «t  6.* 
liv. 

7."*  Dissertation  sur  les  deux  rocs  branlants  du  Nontro-* 
nais,  par  M.  Ch.  Desmoulins. 

Le  secrétaire  de  la  Section  de  Médecine  lait  connaître 
la  composition  du  bureau  de  cette  Section  pour  Tanoée 
1850. 

Préddmi^  MM.  PiH4if-DiiFfiUj[.AY* 

Yke-Présidml,  BoaAAir. 

SecriUxire^  Db  Bostâihi^  de  Rivas. 

Seerétaire  aifoint,  Rouxbau. 

Trésorier^  Més^m». 

Bibliothécaire ,  Duiouis. 


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~  17  — 

Comiié  de  rridodiM. 

MM.  Mahot,  Mabcé,  Héus,  titulaires;  HiGifiBi)  et  Gély, 
adjoints. 

Comité  d'administration. 
MM.  Lb  Roux,  Magitébo,  Mabbschal,  Saulart,  Mab- 

CHAND. 

Comité  de  vaccine. 

MM.  Habbschal;  Saluon  père;  Mabcé,  membre  sortant 
réélu. 

Comité  de  topographie. 

MM.  BoRAMT ,  Allabo  , 

Composition  du  bureau  de  la  Section  des  Lettres  pour 
1850: 

Président,  MM.  Hubttb. 

Yice-Président  j  Le  baron  de  Wismbs. 

Secrétaire,  Talbot. 

Secrétaire  adjoint  j  Vaubibb. 

M.  A.  Duplessix  demande  à  échanger  son  titre  de  mem- 
bre résidant  en  celui  de  membre  correspondant. 

MM.  L.  Guéraud ,  Charyau ,  Légal  et  Rouillard  adres- 
sent leur  démission  de  membres  de  la  Société. 

M.  Simon  offre  à  la  Société  les  deux  numéros  de  sep- 
tembre et  d'octobre  1849  du  bulletin  de  l'Association 
agricole  du  Sig. 

Le  même  membre  lit  ensuite  une  proposition  ayant  pour 
but  de  modifier  la  teneur  de  l'article  du  règlement  de  la 
Société  relatif  aux  concours.  Après  la  lecture,  la  propo- 

2 


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~  18  — 

sition  est  déposée  poor  être,  soifant  l'usage ,  renvoyée 
au  Comité  ceaUral. 

M.  Berlin  donne  communication  à  la  Société  d'un  in- 
téressant travail  sur  les  engrais  et  l'importance  de  leur 
choix  pour  assurer  l'abondance  des  récoltes. 


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—  20  ~ 

toujours  trouvé  leurs  premiers  germes  dans  les  sociétés  sa- 
vantes, toujours  ils  y  ont  reçu  une  vigoureuse  impulsion. 
Aussi ,  dans  toutes  les  villes  où  un  certain  nombre  d'hom- 
mes studieux  se  trouvent  réunis,  rencontre-t-on  de  ces  so- 
ciétés au  sein  desquelles  se  discutent  les  questions  du 
moment,  où  s'élabore  l'histoire  des  temps  passés.  Ces 
réunions  sont  surtout  profitables  aux  naturalistes,  car,  pour 
eux ,  il  ne  s'agit  pas  seulement  de  se  communiquer  des 
travaux  écrits,  chaque  jour  ils  ont  encore  à  faire  l'échange 
de  quelques  échantillons ,  résultat  de  l'excursion  de  la  veille 
ou  de  l'envoi  d'un  correspondant  bienveillant.  Aussi ,  ce  se- 
rait une  erreur,  si  l'on  pensait  que  la  Société  d'Histoire 
naturelle  n'existe  de  fait,  que  depuis  son  adjonction  à  la 
Société  Académique;  il  y  avait  déjà  plusieurs  années  que 
les  naturalistes  de  notre  ville  se  réunissaient;  mais,  il  est 
vrai,  sans  avoir  de  séances  régulières.  Nous  nous  rappe- 
lons tous  encore,  avec  un  plaisir  mêlé  de  reconnaissance, 
ce  jour  de  chaque  semaine  que  nous  consacrait  M.  Desvaux. 
Avec  quelle  complaisance  ce  botaniste  éminept  mettait  à 
notre  disposition  sa  vaste  érudition  ,  sa  riche  bibliothèque , 
et  ses  collections,  trésors  accumulés  par  de  longues  et  pé- 
nibles recherches. 

Mais,  lorsque  ce  savant  s  éloigna  de  Nantes,  combien 
ses  disciples  se  trouvèrent  isolés!  Ce  fut  alors  que  quel- 
ques-uns d'entre  eux  résolurent  de  fonder  une  Société  d'His- 
toire naturelle  permanente;  et,  pour  atteindre  ce  but,  ils 
firent  appel  à  tous  les  hommes  qui  s'occupaient  de  l'étude 
des  phénomènes  de  la  nature.  Une  première  réunion  eut  lieu 
dans  le  cabinet  de  M.  le  baron  Bertrami-Geslin,  notre  savant 
collègue. 


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—  21  — 

Quoique  cette  assemblée  fut  encore  peu  nombreuse, 
on  nomma  cependant,  afin  do  régulariser  la  discussion, 
M.  Bertrand-Geslin ,  président,  et  M.  Ducoudray-Bour- 
gault,  secrétaire.  On  résolut,  tout  d'abord,  que,  dans  la 
société  qu'il  s'agissait  d'organiser,  on  ne  s'occuperait  que 
de  zoologie,  de  botanique,  de  minéralogie  et  de  géologie. 
Sur  ce  point,  nulle  difficulté.  Il  n'en  fut  pas  ainsi,  lorsque 
l'on  traita  la  question  financière.  Et  une  longue  discussion 
n'ayant  servi  qu'à  démontrer  qu'une  société  particulière  ne 
pouvait  marcher  avec  ses  seules  ressources,  la  majorité 
arrêta  qu'une  demande  serait  adressée  à  la  Société  Acadé- 
mique de  la  Loire-Inférieure, afin  qu'une  section,  consa- 
crée exclusivement  aux  sciences  naturelles,  soit  organisée 
dans  son  sein.  Seulement,  on  remit  à  faire  les  démarches  né- 
cessaires, jusqu'au  moment  où  la  Société  Linnéenne  serait 
définitivement  constituée  ;  on  voulait ,  par  ce  moyen,  présen- 
ter à  l'admission  un  corps  organisé,  et  non  des  individus 
isolés.  On  nomma  donc  une  conunission  composée  de  MM. 
Moriceau,  Moride  etDelamare,  pour  préparer  un  règlement 
provisoire.  Ces  messieurs  firent  connaître  leur  travail ,  dès 
la  séance  suivante,  qui  eut  lieu  le  4  janvier  1847.  Aucun 
obstacle  n'existant  plus ,  il  fut  convenu  que  le  bureau  s'oc* 
cuperait  de  faire  agréer  par  la  Société  Académique  l'ad- 
jonction dont  le  vœu  avait  été  émis  précédemment. 

Bientôt, nous  apprîmes  que  notre  requête,  admise  d'a- 
bord par  votre  Comité  central ,  venait  de  letre  également 
par  la  Société  entière,  réjunie  en  assemblée  générale, 
après,  toutefois,  l'audition  d'un  de  ses  rapports  remarqua- 
bles, comme  sait  si  bien  les  faire  M.  le  docteur  Gély. 

La  Société  Linnéenne,  devenue  Section  des  Sciences 


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—  22  — 

naturelles ,  se  réunit,  pour  la  première  fois,  dans  le  local 
de  la  Société  Académique,  le  17  février  1847.  Dans 
cette  séance,  elle  composa  ainsi  son  bureau  :  M.  le  baron 
Berlrand-Gedia  ,  président  ;  M.  Moriceau,  vice-président  ; 
M.  Ducoudray-Bourgault ,  secrétaire  ;  M.  de  Tollenare ,  se- 
crétaire adjoint ,  et  M.  Delamare ,  trésorier-archiviste.  Une 
commission  fut,  en  outre,  désignée  pour  préparer  un  règle- 
ment dont  les  articles  ne  fussent  pas  en  désaccord  avec 
ceux  de  la  Société-mère.  MM.  Moriceau,  Deiamare,  de 
Boissy  et  Ducoudray-Bourgault  furent  chargés  de  ce  travail. 
Pendant  cette  môme  réunion ,  plusieurs  anciens  membres 
de  TAcadémie  annoncèrent  qu'ils  viendraient  partager  les 
études  de  la  Section. 

Cette  première  année  fut,  en  grande  partie,  consacrée 
à  la  discussion  des  règlements.  Cependant,  nous  lûmes  à 
la  Section  un  mémoire  sur  les  annes  et  défenses  des  ani- 
maux, et  M.  Pradal  fit  hommage  de  la  série  complète  des 
graminées  et  des  cypéracées  de  la  Loire-Inférieure ,  col- 
lection préparée  avec  le  plus  grand  soin.  M.  Ducoudray- 
Bourgault  communiqua  la  liste  d'un  certain  nombre  de 
végétaux  découverts,  pour  la  première  fois ,  dans  notre 
département ,  ou  du  moins  qui  n'y  avaient  été  trouvés , 
jusqu'à  cette  époque,  que  rarement.  Nous  rappellerons, 
entre  autres  :  VOrchis  chlorantha  custor ,  VBesperis  ma- 
IronaliSj  Lin.,  et  YAvena  pubescens,  Lin.,  recueillies  dans 
les  environs  du  Fallet  ;  puis  les  Carex  sîrigosa,  Huds. ,  et 
Maxima  >  Scop. ,  ainsi  que  six  beaux  échantillons  du  Se- 
rapias  iriloba  viviani  !  de  la  forêt  de  Toavois  ou  de  ses 
alentours. 

Le  20  décembre  1847  ,  la  Section  procéda  au  reilou- 


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—  25  — 

vellement  de  soir  bureau ,  qui  se  trouva  akiri  eonstitué  ; 
HH.  Moriceau,  présideot;  Dneoudniy-Bourgault ,  vice- 
président;  Delaœare,  secrétaipe;  de  Rostaing  de  Rivas, 
secrétaire  adjoint,  et  de  Tolienare,  trésorier-archiviste. 
Dans  le  courant  de  Tannée  où  Ton  veneiit  d'entrer,  les  es- 
prits furent  beaucoup  plus  pt éoecupés  de  la  lutte ,  chaque 
jour  renaissante,  de  la  civilisation  contre  la  barbarie ,  que 
de  travaux  académiques^  Aussi  n'avoos^nous  à  vous  vap^ 
peler  qu*un  seul  mémoire,  celui  de  M.  l'abbé  Delaiande, 
intitulé  :  Première  excur$i0H  boianique  à.  Poitiers ^  dans  la 
CharenU-Jnfériêure  et  aux  SaUeê-d'Ohnne^  en  septfembre 
1847. 

Telle  est,  Messieurs,  rhisloire  semaiaire  de  Torgaiiisa- 
tion  de  la  Section  des  Sciences  naturelles  et  le  titre  des 
différents  travaux  qui  y  ont  ont  été  lus  avant  i'aanée  iS49. 
Aucun  rapport  ne  vous  ayant  été  fait,  à  ce  sujet,  jusqu'à 
cette  époque,  nous  avons  cru  devoir  commencer  par  cet 
exposé,  avant  de  voi»  entretenir  des  travaux  de  Tannée 
qui  vient  de  s'écouler. 

Dans  la  séance  du  18  décembre  1848 ,  les  suffrages  de 
la  Section  pwtèrent  au  bureau  :  MM.  Duooudray-Bour* 
gault,  président;  Delamare,  vioe*président ;  de  Aostaing 
de  Rivas,  secrétaire;  Delalande ,  secrétaire  adjoint;  el  Pra- 
daU  trésorier. 

M.  Fr.  Cailliaud,  auquel  la  seience  est  déjà  redevable 
de  plusieurs  mémoinesremarqwbies,  nous  a  lu  nBeNotkê 
sur  le  genre  ClausUie,  de  la  cUme  des  moUtéê^ues  7ra- 
chaudes  Phytophages  (herbwêres)^  de  ta  fasmUe  des 
CoUmaeiSi  Le  nom  de  ClausHie,  nous  i^ipraid  M»  Cail- 
liaud, fut  d'abord  signifioatîf;  on  l'appliqua  à  des  coquiUks 


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-.  24  — 

dont  rouvertare,  à  une  certaine  profondenr  de  son  en- 
trée, est  fermée  par  une  pièce  particnlière. 

En  1825,  M.  de  Blainville  ne  citait,  dans  ce  genre, 
quedouae  espèces  seul^nent,  et  aujourd'hui  on  en  compte 
plus  de   150,  Plusieurs  naturalistes  ayant  bit   connattre 
Textérieur  de  ces  singulières  coquilles ,  Fauteur  que  nous 
analysons  a  surtout  eu  pour  but  de  décrire  le  clausilium , 
pièce  iutérieure  fort  peu  connue,  et  qu'il  regarde  comme 
un  caractère  constant.  Aussi  pense-t-il  que  toutes  les  co- 
quilles qui  ne  sont  pas  pourvues  de  cette  pièce  opercu- 
laire,  doivent  être  retirées  du  genre.  M.  Cailliaud  a  encore 
observé  que  Tanimal  ne  construit  cet  appareil ,  ainsi  que 
les Jamelles  et  les  dents  qui  obstruent  son  ouverture ,  que 
lorsqu'il  a  complété  sa  coquille ,  et  que ,  jusqu'à  cette 
époque,    il  reste  dépourvu  de  ses  moyens  de  défense. 
Notre  savant  collègue  ne  se  borne  pas  aux  descriptions 
anatomiques ,  entrant  dans  le  domaine  de  la  physiologie , 
il  signale  ce  iait ,  jusqu'à  lui  inconnu  ,  que  les  Clausilies 
sont  vivipares  :  «  Les  petits ,  dit-il ,  rejeté?  vivants  par  la 
Clausilie  minime ,  et  dès  la  naissance  pourvus  de  co- 
quille, ont  une  taille  telle  ,  qu'ils  ne  peuvent  être  recon- 
nus qu'au  microscope.  »  Cette  nouvelle  notice  renferme 
des  observations  du  plus  haut  intérêt  ;  aussi ,  nous  n'en 
doutons  pas,  viendra-t-elle  bientôt  se  placer  dans  l'opinion 
dés  conchyliologistes,  auprès  des  mémoires  si  populaires 
dans  la  science ,  et  que  M.  Cailliaud  a  publiés,  sur  les 
genres  Éihérie,  CkmigeUe  et  Gastrochène. 

En  terminant  le  récit  de  sa  Première  excursion  bota- 
nique dans  la  Charente-Inférieure,  M.  l'abbé  Delalande 
nous  avait  annoncé  un  second  voyage  dans  les  mêmes 


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—  35  — 

contrées.  II  a,  en  effet,  tenu  sa  parole,  en  nous  commu- 
niquant, cette  année ,  de  charmants  souvenirs ,  ayant  pour 
titre  :  Une  seconde  excursitm  botanique  dans  la  Charente- 
Inférieure^  en  août  et  septembre  1848.  Notre  excellent  col- 
lègue qui,  comme  il  le  dit  lui-même,  n'd  jamais  pu  com- 
prendre l'avarice  dans  aucun  cas,  encore  moins  en  histoire 
naturelle ,  ne  se  contente  pas  d'enrichir  les  collections  de 
ses  amis  du  fruit  de  ses  explorations ,  il  veut  encore  les 
initier  à  ses  émotions  de  touriste  naturaliste;  et,  disons-le 
de  suite,  ce  but,  il  Ta  parfaitement  atteint  dans  le  travail 
dont   nous   allons  vous  entretenir.   Tout  en   s'étendant 
sur  les  productions  naturelles    des   localités   qu'il   par- 
court ,  M.  Delalande  ne  dédaigne  pas  de  parler  des  mœurs 
des  habitants ,  des  monuments  remarquables  qu'il   trouve 
sur  sa  route  ,  ou  des  faits  historiques  qui  s'y  sont  passés. 
Le  i 6  août  1847,  il  arrive  à  la  Rochelle ,  et,  dès  le 
lendemain,  il  commence  ses  explorations  ;  mais  bientôt  il 
quitte  cette  ville  pour  retourner  dans  ce  bois  de  Surgères 
d*oû,  l'année  précédente,  il  nous  a  rapporté  une  si  abon- 
dante récolte.  Le  22 ,  il  fit  une  course  dans  les  bois  de 
Vandré ,  mais  sans  grands  résultats.  Puis,  après  avoir  tra- 
versé la  Charente,  à  Soubise,  il  se  trouve  bientôt  devant 
Brouage ,  patrie  du  célèbre  Champlain,  fondateur  et  pre- 
mier gouverneur  de  Québec.   Cette  petite  ville,  d'une 
grande  insalubrité,  est  aujourd'hui  déserte.  Quittant  enfin 
ce  triste  pays,  il  traverse ,  par  mille  circuits,  les  Maraù- 
GaU,  recueillant  toujoura  plantes  et  animaux ,  et  arrive 
dans  Marennes,  si  renonmiéepar  ses  huttres  vertes,  dont 
le  oommerce  y  est  évalué  à  plus  d'un  million  de  francs 
chaque  année.  11  s'embarque  ensuite ,  à  la  pointe  du  Gha- 


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-  26  ~ 

pufi,  pour  passer  dans  riIe-d'Okron.  Le  S  septembre,  il 
retourne  à  Rocbefort,  et  après  avoir  exploré  les  bois  si- 
tués entre  Nancraset  Sabianceaux,  il  arrive,  le  12,  à 
Saintes.  Après  être  retourné  à  Surgères,  et  quoique  les 
vacances  fussent  sur  le  point  de  finir,  il  voulut  cependant 
encore  parcourir  File  Ré.  Quelques  rapides  que  furent  ces 
excursions,  elles  permirent  cependant  à  M.  Delalaude  d'a- 
jouter à  la  Flore  du  département  de  la  Charente-Inférieure» 
un  grand  nombre  de  plantes  qui  avaient  encore  échappé 
aux  botanistes  de  la  localité.  Il  trouva ,  de  plus ,  le  ser- 
pent d'Ësculape  à  Nancras,  et,  à  Surgères,  deux  iqdividus 
de  la  couleur  glaucoïde. 

La  seconde  communication  que  M.  Tabbé  Delalande  ait 
faite  à  la  Section,  est  une  Notice  mr  l'Ue  d'Hmtai  {Mor- 
bihan) ,  et  sur  son  histoire  wUwéUe^  —  Une  chaloupe  de 
Houatais  devait  mettre  à  la  voile  et  rentrer  dans  le  port 
dllouat,  de  cette  ile  située 

Sous  ua  ciel  rigoorsuz. 
An  «ein  des  flots  impétaeux , 
rioa  loin  de  l'Armorique  j^ge. 

Notre  zélé  collègue  ne  pouvait  laisser  échapper  une  aussi 
bonue  occasion  de  visiter  une  localité,  dans  laquelle  le 
PQncrBiium  mariiimum  et  le  Crufnbem^iUma^  poussent 
en  abondance.  La  traversée  fut  longue;  le  vent  étant  très* 
faible,  il  fallut  treize  heures  pour  franchir  la  dÂstance  qui 
sépare  le  Palais  de  Houat.  Mais  déjà  le  curé,  à  laide  de 
sa  longue-vue ,  avait  reconnu  Téquipage  et  aperçu  1  étran- 
ger auquel  il  offrit  la  plus  cordiale  hospitalité ,  et  qu'il 
voulut  accompagner  dans  toutes  ses  courses ,  pendant  le 
séjour  sur  son  territoire. 


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—  27  ~ 

Houat ,  &it  partie  de  cette  ligne  granitique  de  rochers 
et  derécife  <foi,  de  la  pointe  de  Quibéron,  s*étend  jus- 
qu'aux Grands  et  Petits  Cardinaux.  Dans  cette  île ,  ne  se 
trouve  pas  un  seul  arbre;  les  hommes  né  connaissent  que 
leurs  bateaux  et  la  pêche  ;  aux  femnles  seules  est  abandon- 
née la  culture  des  terres  ,  le  soin  à  donner  aux  bestiaux  ; 
ce  bienheureux  pays  ne  connaît  pas  le  crime ,  aussi  n'y 
fait-on  ûBâge  ni  de  verroux  ni  de  serrures.  Le  bourg  est 
CMDposé  d'une  cinquantaine  de  pauvres  chaumières. 
De  cette  étrange  résidence 
Le  curé  ^  saiu  trop  d^embarras, 

exerce  tout^à-la  foisles  fonctions  de  maire,  de  syndic  des 
gens  de  mer,  de  capitaine  de  port,  de  notaire  et  déjuge 
de  paix»  De  tous  les  côtés  de  son  tle ,  on  vient  Ini  deman- 
der des  cDOseils  pour  soigner  bêles  et  gens.  Malgré  le 
cumul  de  tant  de  fonctions,  il  est  vrai,  non  rétribuées, 
M.  Deklande  fait  observer  que  la  cure  de  Houat  est  peu  re- 
cherdiée.  Nous  citerouB,  entre  autres  plantes,  découvertes 
par  notre  collègue  dane  cette  localité  :  Air^x  litîoraKs  L., 
LoxHUÊta  arb^ea  I.,  Damus  carola,  tar.  tMriiima, 
MeOcago  marina  et  i(rtcM>  olhanîhus  maritimusj  etc. 

Il  nous  reste  à  vous  rendre  compte  d*nn  dernier  travail 
de  M.  Delalaude,  intitulé  :  Nolit^e  biographiqtJLe  sur  M.  Jean 
Bwmipdj  huksmr^^audienoiér  prii  le  îrUMnàl  dvU  de 
Natdes^  et  botanitèe.  Pour  ce  mémoire,  Fauteur  s'est 
grandement  aidé  des  souvenirs  de  M.  Renou,  avocat  ac* 
tuelleàient  à  Caen  et,  lui-même,  botauistç  distingué. 

Toaihoame  utile  sent  qu'il  a  le  droit  d'occaperunepfaice 
parmi  ses  semblables  ;  el  quelque  petite  qu'on  la  sup- 
pose, ^ur  peu  qu'il  soit  juste,  il  en  sera  satisfait,  car 


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—  28  — 

elle  est  son  ouvrage.  C'est  ainsi  que  les  jalousies  s'éteignent 
par  le  travail ,  et  que,  malgré  Tinégalité  des  parts ,  la  con- 
corde se  forme  entre  les  citoyens.  Oui ,  la  première  récom 
pense  du  travail,  ce  n'est  pas  la  nourriture,  c'est  la  paix , 
le  contentement,  la  vertu.  Tel  fut  toujours,  Messieurs,  le 
sentiment  de  Jean  Bornigal,  né  à  la  Bénate,  commune  de 
la  Loire-Inférieure,  le  2  mai  1785.  Cet  homme  de  bien  a 
exercé  pendant  près  de  36 ans,  conmie  huissier-audiencier 
près  le  tribunal  civil  de  Nantes ,  et,  pendant  cette  longue 
carrière,  il  a  su  acquérir  et  conserver  une  réputation  sans 
tache.  Le  temps  que  n'exigeait  pas  les  devoirs  de  sa  pro- 
fession ,  il  le  donnait  à  Tétude  de  la  botanique  et  surtout  à 
la  partie  cryptogamique.  Ce  fut  un  des  premiers  qui,  dans 
ce  département,  donna  l'impulsion  à  cette  science,  encore 
si  obscure.  Quelle  reconnaissance  ne  devons  nous  pas  avoir 
à  ces  hommes  savants  et  modestes  nommés  Hectot ,  Pes- 
neau  »  Bornigal  qui ,  traversant  les  orages  révolutionnaires, 
transmirent  à  notre  génération  les  traditions  botaniques, 
qu'eux  mêmes  avaient  reçues  du  docteur  Bonamy,  dont 
les  travaux  avaient  ouvert  la  carrière,  et  qui  avait  ensei- 
gné la  science  des^plantes,  à  Nantes ,  pendant  45  ans,  sans 
jamais  avoir  reçu  dédommagements  ou  récompenses. 

Retracer  lalvie  de  Bornigal ,  énumérer  ses  utiles  travaux, 
c'était  foire  acte  de  justice.  Aussi  la  Section  des  Sciences 
naturelles,  voulant  s'y  associer,  a-t-elle  raaaercié  vive- 
ment H.  Delalande  d'avoir  été ,  en  cette  circonstance ,  l'é- 
diteur de  ses  propres  sentiments. 

Dans  des  notes  recueillies  pendant  un  txqfdgre  fàU  en 
France  et  en  Algérie  j  autnois  dCaaût  1847 ,  H.  Auge  de 
Lassus  nous  a  donné  de'  curieux  détails  sur  l'histoire  na- 


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—  29  ~ 

torellede  notre  colonie  africaine,  et  sur  quelques-uns  des 
établissements  qne  le  gouvernement  français  y  a  fondés. 
Pendant  son   excursion ,  notre  collègue  a  eu  occasion  de 
voir  la  carte  d'Algérie,  travail  immense  et  qui   avance  ce- 
pendant rapidement ,  sous  la  savante  direction  du  colonel 
de  Rorières.  A  Staouêll,  il  a  visité  les  trappistes  :  ces  pion- 
niers chrétiens  ont  dans  ce  lieu   un  établissement  qui, 
précédé  par  une  allée  et   un  faisceau  de  trois  palmiers , 
est  composé  d'édifices  dont  la  propreté  est  le  seul  orne- 
ment. Le  gouvernement  donne  à  ces  religieux  des  secours 
en  bestiaux ,  semailles ,  etc.  ;  non  sans  exciter  la  jalousie 
des  colons.  A  Médéah,   il  put  parcourir  le  jardin  d'accli- 
maCation  ,  que  l'administration  fait  cultiver  par  les  troupes  ; 
les  soldats  laboureurs  qu'il  y  rencontra  ,  lui  offrirent  plu- 
sieurs beaux    échantillons  botaniques.  Cet  établissement , 
parfaitement  entretenu  et  arrosé  par  des  sources  nom- 
brenses,  est  précieux  pour  le  pays.  M.  Auge  de  Lassus,  à 
son  retour  à  Alger,  fut  visiter  le  jardin  d*essai,  situé  entre 
la  route  et  la  mer,  à  une  demi-lieue  environ  de  Musta- 
pha. Pour  cette  belle  institution ,  le  gouvernement  a  fait 
les  plus  grands  sacrifices;  elle  est  aujourd'hui  la  pépinière 
des  colons.  Des  rigoles  en  pierre  font  circuler  dans  le  jar- 
din de  nombreux  cours  d'eau ,  et  un  de  ses  cdtés  est  orné 
par  une  allée  de  Casuarina.  Un  emplacement  considérable 
est  réservé  aux  Cactus  Nopals^  qui  réussissent  très-bien,  et 
sont  couverts  de  cochenilles  de   bonne  qualité  ;  enfin ,  un 
grand  nombre  de  carrés  contiennent  des  arbres  fruitiers. 
Vous  vous  rappelez  tous ,  Messieurs ,  le  prix  élevé  que  les 
céréales  atteignirent,  pendant  le  cours  de  Tannée  1846. 
Alors,  certains  commerçants,  pour  lesquels  tout  lucre  est 


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—  50  ^ 

bon,  même  quand  il  est  prélevé  sur  la  santé  des  popula^- 
tions,  ne  craignirent  pas  de  se  livrer  à  des  fraudea  criminel- 
les. Les  administrateurs  en  appelèrent  à  la  scianœ,  pour 
découvrir  ces  mélanges  funestes.  Â  cette  époque,  M.  Pra- 
dal  fit  des  observations  microscopiques  sur  lee  différentes 
farines  livrées  au  commerce ,  sur  le  pain  qœ  ces  fiurioe9  pro- 
duisent. Le  résumé  de  ce  travail,  ai  éminemment  philan- 
thropique, il  Ta  (ait  connaître  à  votre  Section  des  Scien- 
ces naturelles,  sous  le  titre  de:  Import(mc€  d$$  Mudês 
cryptogamiques.  11  constata  tout  d*abord  que  chaque  espèce 
de  farine  donne  naissance  à  un  champignon  particulier; 
ainsi,  dans  le  pain  fabriqué  avec  la  farine  da  mais,  il  re- 
connut Y  oïdium  aureum  ;  dans  celui  fait  avec  uo  mélavge  de 
farine  de  froment  et  de  fëverolles ,  il  aperçut  un  petit  agaric 
mêlé  au  mucor  sphasrocephalus.  Une  seule  fois,  sur  un 
pain  de  munition  qui, à  un  aspect  dégoûtant ,  joignait  un 
goût  détestable,  il  constata,  en  outre  des  trois  produotions 
végétales  dont  nous  venons  de  parler,  le  ^f$rotrioum  omê^ 
reum,  A  cet  intéressant  mémoire,  M.  le  docteur  Mallierbe 
a  joint  un  charmant  dessin  représentant,  avee  la  plus 
grande  exactitude,  les  champignons  qui  y  sont  décrite. 

Les  membres  de  la  Section  ne  veulent  pas  se  borner  k 
des  lectures,  ils  veulent  encore  réunir  dans  le  local  de  la 
Société  Académique  tous  les  végétaux  du  département  de 
la  Loire-Inférieure;  et  mén^e,  c^te  collection  terminée, 
travailler  à  un  herbier  général.  Une  oonunission  a  été  nom- 
mée, afin  d'étudier  ce  projet,  et  M.  Ducoiidray-Boarg«ult  a 
fait  connaître  les  bases  qu'elle  propose  povr  son  exécu- 
tion. 

Messieurs,  vous  pouvez  voir,  d*aprè$  U  résumé  que  nous 


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—  31   - 

venons  de  vous  lire,  que  votre  Section  des  Sciences  natu- 
relles se  livre  enfin  à  cette  activité  intellectuelle  qui  est 
Tâme  des  sociétés.  L'études  des  êtres  créés  étant  Tunique 
objet  proposé  à  son  assidue  contemplation ,  nous  avons  lieu 
d*espérer  qu'elle  s'effoscera  40  f  énétrer  de  plus  en  plus  dans 
les  mystères  de  leur  organisation,  de  leur  texture.  Elle  sait 
que,  malgré  les  belles  acquisitions  faites  par  les  naturalis- 
tes, dans  ces  derniers  temps,  le  champ  qu'ils  exploitent  est 
encore  loin  d'être  épuisé. 

Nantes,  24  octobre  1849. 


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HISTORIQUE 

ET  ÉTAT  ACTUEL  DE  LA  QUESTION 


DBS 


FOURNEAUX  FUMIVORES, 

PAR  M.  WOLSRI, 

INGÈHIBra  CITIL. 


Utilité  des  fourneaux  fumivores. 

Aujourd'hui  que  le  prix  de  revient  des  produits  fitbri- 
qués  est  Tobjet  d*études  incessantes,  la  réduction  de  la 
quantité  de  combustibles  que  les  moteurs  a  vapeur  con- 
somment est  une  question  de  première  importance. 

D'autre  part,  il  est  à  désirer  que  les  nombreuses  che- 
minées des  usines,  vomissant  une  fumée  noire  et  épaisse, 
cessent  de  couvrir  les  quartiers  populeux  des  villes  d'une 
atmosphère  malsaine,  et,  de  plus,  nuisible  à  certaines 
industries. 

Les  fourneaux  fumivores  sont  destinés  à  résoudre  ce 


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-^  55  — 

problème  sous  les  deux  points  de  vue  de  réconomie  et 
de  la  salubrité  publique. 

Division  du  mémoire  en  trm  chapitres,  savoir  :  partie 
théorique  j  l'historique  et  les  eondueions. 

Un  grand  nombre  de  savanfe  et  d'industriels  ont ,  par 
des  inventions  ingénieuses ,  cherché  {i  trouver  ta  solution 
de  cette  double  question.  Avant  de  nous  livrer  h  l'analyse 
de  leurs  travaux,  nous  étudierons  la  théorie  delà  combus- 
tion ,  les  causes  et  les  quantités  des  pertes  de  chaleur  par 
l'emploi  des  cheminées,  et,  dans  nos  conclusions,  nous 
exposerons  les  principes  qui  doivent  être  adoptés  dan^  la 
construction  des  fourneaux  ordinaires ,  pour  obtenir  une 
diminution  dans  la  consommation  du  combustible  et  dans 
la  quantité  de  la  fumée,  tout  en  donnant  les  moyens  d*aiv 
river  à  la  fumosité  absolue  à  ceux  qui ,  par  leur  position 
exceptionnelle,  auront  un  besoin  indispensable  dy  avoir 
recours. 

Nous  serons  heureux  si,  en  développant  quelques  appli- 
cations de  la  théorie  de  la  chaleur ,  nous  pouvons  être  utile 
aux  personnes  dont  l'esprit  infatigable  tend  à  sortir  da  la 
sphère  de  la  routine ,  et  offrir  un  guide  salutaire  à  celles 
qui  voudraient  suivre  strictement  les  principes  sanctionna 
par  la  pratique. 

Lois  de  laphysique  industrielle  relatives  au  chauffage. 

D après  les  lois  delà  physique  industrielle,  les  combus- 
tibles employés  dans  les  arts  sont  tenus  à  remplir  les  con- 
ditions suivantes  : 

!.•  Ils  doivent- être  facilement  brûlés  à  la  température 

3 


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—  34  — 

de  l'air  ambiant ,  leur  combustion  pouvant  se  soutenir  par 
elle-même. 

2.<*  Ils  doivent  être  abondants  et  au  prix  peu  élevé. 

3.^  Les  produits  de  la  combustion  ne  doivent  pas  alté- 
rer les  corps  sur  lesquels  la  chaleur  agit;  et,  répandus  dans 
l'atmosphère,  ils  ne  doivent  pas  être  nuisibles  àTéconomie 
animale  ou  végétale. 

Ces  conditions  n'admettent,  dans  le  rang  des  combusti- 
bles utilisables  dans  Tindustrie ,  que  ceux  qui  contiennent 
en  grande  quantité  du  carbone  et  de  l'hydrogène,  tels 
sont: 

Le  bois,  la  tourbe  et  la  houille. 

L'usage  du  bois  dans  Hnéustrie. 

L'emploi  du  bois  pour  le  chauffage  industriel  diminue 
de  plus  en  plus  à  cause  de  la  rareté  de  ce  combustible , 
qui  provient  de  la  dévastation  de  nos  forêts.  La  fiibrica- 
tion  des  métaux,  qui  n'employait  autrefois  que  du  char- 
bon de  bois ,  change  chaque  jour  ses  procédés  métallur- 
giques pour  arriver  a  s'en  passer  complètement,  et  pour 
y  substituer  un  chauffage  moins  coûteux.  Et  malgré  cela, 
si  la  législation  n'intervient  pas  pour  faire  boiser  les  terres 
non  cultivées ,  il  viendra  un  jour  où  TappAt  de  la  réali- 
sation des  capitaux  appauvrira  tellement  le  pays  de  ce 
combustible,  qu'il  ne  pourra  être  abordable  que  pour  le 
service  domestique  des  familles  riches. 

Lusage  de  la  tourbe. 

La  tourbe,  qui  n*est  que  le  bois  en  décomposition  mêlé 
de  terre  et  de  matières  accidentelles ,  étant  peu  répandue 
sur  récorce  du  globe ,  n'a  pas  été  l'objet  de  grandes  ap- 


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~  35  — 

plications  iodustriellë».  A  quelques  exceptions  près ,  elle 
est  généralement  en  usage  cbez  les  familles  pauvres  des 
populations  agglomérées  dans  le  voisinage  de  ses  gise- 
ments. 

Vusage  de  la  houille. 

L*usage  de  la  houille  augmente  de  jour  en  jour  ;  son 
prix  est  le  régulateur  industriel  ;  c'est  à  son  bon  marché 
que  l'Angleterre  doit  sa  prépondérance  dans  le  monde  ci- 
vilisé. Cette  matière  étant  seule  employée  pour  le  chauf- 
fage de  machines^  nous  nous  arrêterons  un  peu  sur  sa 
transformation  par  la  combustion. 

Coinbustion  de  la  houille. 

La  combustion  des  houilles  n'est  autre  chose  qu'une 
combinaison  de  ses  parties  constituantes  avec  Toxygène  de 
l'atmosphère,  combinaison  qui  ne  peut  avoir  lieu  qu'à 
une  haute  température.  L'oxygène  étant  indispensable  pour 
la  combustion,  on  doit  renouveler  l'air  au  fur  et  à  mesure 
qu'il  lui  est  enlevé  ;  il  en  résuite  la  nécessité  d  avoir  des 
fourneaux  dans  lesquels  on  puisse  entretenir  un  renouvel- 
lement d'air  suffisant. 

La  houille  se  compose  de  carbone  constituant  à  lui  seul 
75  à  96  parties  pour  cent,  d'hydrogène  de  5,45  à  0,44 ,  et 
d'autres  matières  volatiles  ou  pouvantétre  volatilisées  comme 
oxygène  et  soufre,  en  proportions  très* variables,  suivant 
la  nature  de  la  houille.  L'espèce  de  bouille  la  plus  inflam- 
mable est  celle  qui  contient  le  plus  d'hydrogène.  L'an- 
thracite et  le  coke  le  sont  peu ,  par  cela  même  qu'ils  ne 
contiennent  que  des  traces  d'hydrogène.  Les  matières  ter- 
reuses qui  se   tromvept  dans  la  houille  sont  :  la  silice, 


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—  36  - 

Taltimine,  la  ch«ux,  le  fer  et  une  foule  d'autres  corps  qui 
s'y  rencontrent  aceidenlellemeiit. 

Après  la  combustion  parfaite  qu'on  n'atteint  jamais  diiis 
rindustrie ,  on  recueille  les  produits  volatils  tels  que  l'acide 
carbonique,  vapeur  d*eau,  l'acide  sulfureux  et  l'azote;  le  ré- 
sidu porte  le  nom  de  cendres. 

Ce  qu'il  y  a  de  remarquable  dans  cette  combinaison  du 
carbone  avec  Toxygène,  c'est  que  le  volume  primitif  de  ce 
dernier  reste  le  même ,  la  densité  seule  étant  altérée.  Or,  la 
densité  de  l'acide  carbonique  étant  de  1,5277,  il  en  ré- 
sulte que  1  volume  de  la  nouvelle  combinaison  pèse  environ 
comme  1  1/2  volume  d'oxygène,  ou  que  3  kilogrammes 
d'acide  carbonique  contiennent  2  kilogrammes  d'oxygène  et 
1  kilogi  de  carbone.  Â  cet  effet,  les  analyses  cbiiniques 
ont  été  vérifiées  par  des  expériences  sur  la  houille  du  pays 
de  Galles,  qui  est  une  espèce  de  coke,  on  a  trouvé  qu'il 
fallait  environ  2  kilog.  d'oxygène  pour  saturer  1  kilog.  de  ce 
combustible.  Mais  comme  l'air  est  un  mélange  de  21  par- 
ties d'oxygène  gaz  comburant ,  et  de  79  ptrtie^  d'aasote  qui 
passe  par  le  fourneau ,  et ,  loin  de  produire  un  efet  fiiv o- 
rable,  absorbe  une  certaine  quantité  de  cbaleur  en  s'é- 
chauffiint  au  degré  de  la  température  do  lieu,  il  en  ré- 
sulte que  9,6  kilog.  euviron  d'air  doivent  entrer  dans  l6 
foyer  pour  fournir  tes  2  kilog.  d'oxygène  par  chaque  kilo- 
gramme de  charbon  brûlé,  et  cela,  en  supposant  que  tout 
l'oxygène  soit  employé  utilement,  ce  qui  n'arrive  jamais, 
même  dans  la  combustion  conduite  arec  le  plus  grand 
soin. 

En  langage  ordinaire,  on  dit  qu'un  fourneau  ne  fîune 
pas,  lorsqu'on  n'aperçoit  pas  s'éclmpfier  des  nuages  plus 


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—  57  — 

ou  moins  ooîrsdu  haut  des  ctMMdûn^;  OMiis,  dans^oe  der- 
nier cas ,  il  peut  e»eore  y  avoir  une  grande  perte  de  com- 
bustible, par  suite  de  la  formation  d'oxide  de  carbone, 
que  1  Qp  peut  appeler  une  fumée  invisible ,  et  qui  entraîne 
néanmoins  dans  l'atmosphère  des  quantités  notables  de 
carbone,  qui  pourrait  développer  encore  de  la  chaleur  en 
se  saturant  d'oxygène ,  et  passant  ainsi  à  l'état  d'acide  car- 
bonique. 

En  pratique,  la  houille,  par  sa  combustion ,  donne  nais- 
sance à  des  produits  volatils  tels  que  :  acide  carbonique , 
oxide  de  carbone,  oxygène,  hydrogène,  azote  et  souvent 
quelques  produits  sulfureux.  Ces  gaz  sont  accompagnés  de  la 
fumée  provenant  de  la  combustion  non  achevée  des  matiè- 
res bitumineuses  qui  se  trouvent  dans  la  houille,  et  qui 
n'ont  pu  brûler,  soit  par  suite  d'un  manque  d'oxygène,  soit 
par  un  mélange  imparfiiit  de  ce  gaz  comburant  avec  les 
particules  combustibles,  soit  enlin  parce  que  la  tempéra- 
ture n'était  pas  assez  élevée.  On  a  trouvé  que  celte  fumée , 
pour  être  brûlée,  exigeait  une  chaleur  au  moins  de  800 
degrés  centigrades  ;  elle  se  compose  de  carbone,  d'acide 
carbonique  et  d'oxide  de  carbone,  de  vapeurs  aqueuses  et 
bitumineuses,  et  enfin  d'autres  produits  volatils  de  la 
houille ,  en  proportions  variables,  comme  de  l'air  et  de  l'a- 
zote. On  y  rencontre  souvent  un  mélange  de  soufre,  d'am- 
moniaque et  de  cyanogène. 

La  matière  charbonneuse  qu'on  appelle  suie  est  un  amas 
de  fumée  qui  se  dépose  sur  les  surfaces  froides ,  humides, 
ou  dans  les  coudes  qu'elle  rencontre  dans  son  passage. 

Quant  à  la  quantité  des  cendres,  elle  varie  depuis  trois 
jusqu'à  15  pour  cent. 


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—  38  — 

Nous  ne  parlerons  |>as  des  escarbilles,  qui,  par  leur  ri- 
chesse en  coke  et  houille,  peuvent  être  utilisées. 

Tirage  des  cheminéei. 

La  combustion  plus  ou  moins  parfaite  se  fait  sur  des 
grilles  composées  de  barreaux  en  fer  ou  en  fonte ,  entre 
lesquels  passe  Tair  frais;  celui-ci,  après  avoir  été  dépouillé 
d'une  portion  plus  ou  moins  grande  de  son  oxygène,  circule, 
en  suivant  une  galerie  nommée  carneau ,  autour  du  géné- 
rateur, ou  passe  à  travers  les  tubes,  et  s'échappe  enfin  par 
la  cheminée  qui  est  destinée  à  produire  le  tirage,  et  à  por- 
ter à  une  certaine  hauteur  dans  l'atmosphère  les  produits 
volatils  de  la  combustion.  Ce  tirage  s  opère  par  la  dilatation 
de  Tair  chaud ,  qui ,  à  volume  égal,  devient  moins  dense  que 
Tair  non  chauffé ,  et,  en  vertu  du  principe  de  physique  gé- 
nérale qui  dit:  Un  corps  plongé  dam  un  fluide  perd,  en 
poids ^  le  poids  d'un  égal  volume  du  fluide  déplacé,  tend  à 
s'élever  avec  une  vitesse  d'autant  plus  grande  que  la  diffé- 
rence des  densités  est  plus  considérable ,  et  que  la  hauteur 
de  la  cheminée  est  plus  grande.  Les  calculs  et  les  nombreu- 
ses expériences  de  M.  Peclet,  savant  des  plus  compétents 
dans  cette  matière ,  prouvent  que  la  dernière  condition  est 
moins  rigoureuse  que  la  première.  La  diminution  de  la 
température,  à  Taide  d'un  tirage  factice  produit  par  un  ven- 
tilateur à  force  centrifuge,  pourrait  donner  des  avantages 
notables,  comme  cela  se  voit  au  bain  Vigier  de  Paris,  où 
un  homme ,  en  faisant  aspirer  les  produits  de  combustion 
refroidis  au  dépend  de  réchauffement  de  l'eau ,  économise 
environ  pour  35  francs  de  charbon  par  jour. 


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~  59  — 

Autel  du  fourneau. 

Entre  la  grille  et  le  carneau ,  on  établit  un  autel  du  foyer; 
c*est  un  petit  mur  en  briques  réfractai res ,  élevé  de  10  à  1 5 
centimètres;  cette  élévation  a  pour  but  de  retenir  le  com- 
bustible sur  la  grille  et  d'empêcher  les  fragments  d'être  en- 
traînés dans  le  carneau  par  le  courant  rapide  de  la  flamme , 
ou  par  toute  autre  cause. 

Cottff  de  la  perte  de  (Aakur  dam  les  fourneaux* 

Nous  avons  établi,  tout  à  l'heure ,  qu'il  fallait  théori- 
quement 9,6  kîlog.  d'air  pour  brûler  I  kilogramme  de 
houille «^en  convertissant  tout  son  carbone  en  acide  carbo- 
nique; en  pratique,  cette  quantité  est  toujours  trop  fai- 
ble, quoique  une  portion  de  carbone  soit  convertie  «en 
oxide  de  carbone  au  milieu  de  l'acide  carbonique ,  parce 
que  : 

i."La  rencontre  d'oxygène  ïivccle  c^irbone  ne  se  fait 
pas  atome  à  atome. 

2.^  La  combinaison  de  ces  atomes  manque  souvent  à 
cause  de  FinsufiSsance  du  degré  de  la  chaleur  du  lieu. 

M.  Peciet  a  reconnu  que,  dans  des  foyers  bien  disposés  , 
où  l'épaisseur  de  la  couche  de  combustible  et  le  tirage  sont 
convenables,  il  fiilhit  18  kilogr.  (23,50  mètres  cubes)  d'air 
par  kilogramme  de  houiHe.  Nous  rapporterons  plus  bas,  à 
cet  égard ,  les  résuhats  des  expériences  de  M.  Combes , 
inspecteur  général  des  mines. 

Il  résulte  de  l'étude  que  nous  venons  d'exposer  que  les 
causes  essentielles  de  la  perte  de  chaleur  dans  le  chauflhge 
des  chaudières  à  vapeur  sont  : 

l.<*  La  tafnpératufe  élevée  des  gaz  provenant  de  la  com^ 
bastion  de  la  houille  qui  s'échappent  par  la  cheminée. 


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—  40  - 

2.°  L'admission  dans  le  foyer  d'une  quantité  d'air 
plus  grande  que  celle  qui  est  indispensable. 

Enfin,  il  existe  une  troisième  cause  de  la  perte  de  cha- 
leur, pour  l'exposition  de  laquelle  nous  ferons  une  petite 
digression,  sans  nous  écarter  du  sujet. 

D'après  une  expérience  de  Rumford  il  paraît  que  tous 
les  corps,  quelle  que  soit  l'activité  avec  laquelle  ils  brù* 
lent,  peuvent  être  éteints  lorsqu'on  les  soumet  à  un  re- 
froidissement suffisant.  On  peut  même  arrêter  l'eiplosion 
de  la  poudre  à  canon  et  Ëdre  disparaître  toute  inflamma- 
tion ,  en  dirigeant  sur  la  flamme ,  qui  commence  à  se  pro* 
duire ,  un  violent  courant  d'air.  Voici  une  expériy ce  fort 
simple  qui  constate,  d'une  manière  assez  éléganie,  l'ac- 
tion du  froid  pour  éteindre  la  flamme.  Soit  une  flamme 
au^i  tenue  que  possible ,  d'un  millimètre  et  demi  environ 
de  diamètre ,  produite  par  un  fll  de  coton ,  plongeant  par 
un  bout  dans  de  l'huile.  Si  on  abaisse  sur  la  flamme  un 
anneau  de  deux  millimètres  et  demi  de  diamètre  formé 
d'un  tild'exceileut  fer  d'un  dixième  et  demi  de  millimètre 
tout  au  plus,  la  flamme  disparaîtra  instantanément  si 
l'anneau  est  froid;  et  cela  en  quelque  point  de  la  flamme 
qu'on  le  place.  Mais  si  l'on  tient  cet  t^qoeau  au-dessus  de 
la  flamme,  de  manière  aie  chauffer  légèrement,  la  flamme 
passera  dans  l'intérieur  de  l'anneau  lorsqu'on  viendra  à 
l'abaisser.  Ce  qui  prouve  que  l'effet  dépend  entièrement  de 
la  faculté  que  possède  le  métal  d'enlever  la  chaleur  à  la 
flamm«,  c'est  que,  si  on  remplace  ce  petit  anneau  par  un 
anneau  capillaire  en  verre,  de  môme  dimension ,  la  flamme 
ne  disparaîtra  point ,  comme  dans  le  cas  précédent  »  lors- 
qu'on abaissera  l'annoau  froid ,  le  verre  ét^pt  très-mauvais 


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—  41  - 

cooducteur  du  c(dorique«  GâfHBDdaoi  si  Ton  fugmeote  la 
grosseur  de.^et  annee^u,  en  idiininuaal  son  diamètre,  il 
agira  comme  le  premier  anneau  4e  métal,  et  il  faudra  le 
chauffer  légèrement  pour  que  la  fianune  puisse  continuer 
à  passer.  D*autre  part ,  si  Tair  n'amve  à  la  flamme  d'une 
bougie  ou  d'une  chandelle  qu'en  quantité  insuffisante ,  il 
se  produit  de  la  fumée ,  parce  qu'alors  Foxygëne  sera  ab- 
sorbé en  totalité  par  Thydrogène  de  la  flamme,  et  que  le 
carbone  en  excès  s'échappera  sous  forme  de  suie.  Il  en  sera 
de  même  si,  par  une  cause  ou  par  une  autre,  la  tempéra- 
ture de  la  flamme  se  trouve  abaissée  ;  car,  dans  ce  cas,  il 
ne  restera  plus,  après  la  volatilisation  et  la  décomposition 
des  matières  gazeuses,  assez  de  chaiedr  pour  produire- 
Fignition  du  carbone. 

Le  même  phénomène  s'observe  d'une  manière  plus 
complète  au  moyen  d'une  toile  métallique  en  fils  de  fer  en 
mailles  serrées.  Si  Ton  présente  cette  toile  au  milieu  de  la 
flamme,  elle  se  cpuvre  au^Uôt  d'une  oouc|ie  de  suie,  à 
cause  de  son  action  réfrigérante ,  qqi  epnnpéche  rjgpition 
du  carbone  provenant  de  la  décompos^ition  ;  mais  si  la 
toile  est  placée  au  sommet  de  la  ilamme,  on  ne.reo^arfjp^ 
plus  ^ucun  dépût  de  carbone ,  Içs  diverses  pi^riicules  ayant 
eu  le  temps,  dans  leur  ascension,  de  briUer  etdei^e  con- 
vertir eu  acide  carbonique  ,  en  se  combinant  avec  l'oixy- 
gène  de  l'iair. 

Ces  exemples  suffisent  po|u*  se  rendre  compte  de  ce. qui 
se  passe  dans  les  fourne^u^  ordinaires,  où  la  surface  de 
chauffe  se  :  trouve  toujours  près  du  lieu  de  U  cqmbustion  ; 
l'absorption  de  la  chalei^r  e$t  tellenjient  forte  ,  qu'une  por- 
tion des  produits  volaitîls  ae  di$ti(le  «t  iepn$tit|iie  des^o- 


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—  42  ~ 

con&  noirs  qui  se  dégagent  par  la  cheminée.  La  distance 
verticale  de  la  sarfiice  de  chauffe  à  la  grille  doit  donc  être 
robjetd*une  étude  approfondie;  les  bases  de  cette  étude 
sont  :  1.»  la  vitesse  du  courant  de  la  flamme ,  2.<*  la  qualité 
et  la  quantité  de  la  houille  en  ignition. 

Carneaux. 

Il  arrive  souvent  que ,  si  malgré  te  grand  tirage  engen- 
dré par  une  forte  température  de  la  cheminée^  sa  section 
ou  celle  des  carneaux  est  trop  faible  pour  laisser  éva- 
cuer librement  tes  produits  gazeux;  ou,  si  ces  gaz,  avant 
d*avoir  fini  leur  combustion ,  rencontrent  des  coudes , 
leur  frottement  et  le  changement  brusque  de  la  direction 
du  mouvement  font  naître  une  nouvelle  cause  du  dépôt 
de  la  suie  ,  et  du  dégagement  de  la  fumée  par  la  chemi- 
née. 

GriUes. 

L'exiguité  de  la  surface  de  la  grille  et  celle  des  vides 
laissés  entre  ses  barreaux  est  extrêmement  nuisible  ;  elle 
expose  le  chauffeur  à  être  obligé  d*y  maintenir  une  épais- 
seur très-grande  de  combustibles  ;  les  gaz  qui  s*en  déga- 
gent ne  sont  pas  assez  nourris  en  oxygène  pour  développer 
une  flamme  suffisamment  intense  et  propre  à  la  combus- 
tion du  carbone. 

Si  Ton  considère  toutes  les  imperfections  qui  peuvent 
se  rencontrer  en  quantité  plus  ou  moins  grande  dans  les 
constructions  des  fourneaux  des  chaudières  à  vapeur ,  on 
trouve  les  causes  des  énormes  quantités  de  charbon  qu'ils 
consomment,  et  de  la  fumée  noire  et  opaque  que  leurs 
cheminées  répandent  dans  l'atmosphère. 


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—  45  — 


A^lÂlYSB  DE    TOUTBS   LES  INVENTIONS    DES  FOUBNEAUX   ET 
APPAREILS  FVMIVORES. 


Dimion  des  procédés  employés  pour  rendre  les  fourneaux 
fumicores. 

Tous  les  procédés  employés  pour  prévenir  le  dégage- 
ment de  la  fumée  qui  se  produit  dans  les  fourneaux  ali- 
mentés avec  la  bouille  bitumineuse^  peuvent  être  divisés 
en  deux  parties.  La  première  comprend  l'absorption  de 
la  fumée ,  et  la  seconde  sa  combustion.  L'absorption,  en 
supposant  même  qu'on  pût  en  rendre  le  succès  complet, 
laisserait  toujours  subsister  la  double  perte  de  calo- 
rique que  fait  éprouver  la  production  de  U  fumée  ;  savoir  : 
1.*  perte  d'une  portion  du  calorique  existant ,  absorbée  , 
sans  utilité ,  par  la  fumée  et  les  autres  gaz  combustibles 
qui  l'accompagnent  ;  2.*  perte  du  calorique  rpie  dévelop- 
perait la  combustion  de  ces  produits. 

A  ces  pertes  on  doit  ajouter  celle  qui  doit  nécessaire- 
ment résulter  de  la  croûte  de  suie  qui ,  dans  les  car- 
neaux  supérieurs,  ne  tarde  pas  à  se  former  sur  les  parois 
de  la  chaudière ,  et  dont  Teffet  est  de  paralyser  Faction 
de  la  chaleur  sur  la  surface  de  chauffe. 

Par  la  combustion,  au  contraire,  le  problème  pour- 
rait être  résolu  sous  les  deux  points  de  vue  de  la  salu- 
brité et  d'économie  publique. 

PEBHIÈBE  PARTIE. 

Appareil  Numphry  Jeffrey. 
Le  premier  procédé  avait  été  l'objet  d'une  patente  que 


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-  44  — 

y.  Humpbiiy  Jeffrey,  de  Bristol,  a  pris  en  1&24.  C*cst 
une  condensation  ou  plutdt  une  précipitation  de  la  fumée 
par  le  moyen  d'une  pluie  d'eau.  Ce  procédé ,  qui  fut  ap- 
pliqué avec  succès  dans  différentes  circonstances ,  con- 
siste dans  l'emploi  de  deux  cheminées  ou  d'un  plus  gvand 
nombre ,  fermées  à  leur  sommet ,  où  elles  sont  reliées 
ensemibie  p^r  un  tuyau  transversal  de  comoiunication  , 
de  manière  à  présenter. la  forme  de  b  lettre  grecque  n. 
La  fumée  ou  les  gaz  non  brûlés  s'élèvent  dans  la  pre- 
mière de  ces  branches  verticales,  et  arrivent  dans  la  partie 
supérieure  de  l'autre  bi;ancbe  en  traversant  le  tuyau  boci- 
eontal.  Une  pluie  d'eau ,  qui  tombe  constamment  d'un 
réservoir  placé  au  haut  de  la  seconde  branche ,  reiicontre 
alors  cette  fumée  quelle  entraîne  avec  elle  dansua  bassin 
inférieur. 

Ce  procédé  est  un  des  plus  ^ffiqaces  poqr  condenser 
ks  vapeurs  délétères  qui  se  dégagent  dans  les  .ateliers  où 
l'on  se  sert  de  vitriol ,  dans  les  fcuri^eaiix  où  Ton  fond 
le  cuivre ,  et  en  général  dans  toutes  les  manu&ciures  qui 
donnent  des  produits  iuaestes  pour  la  santé  des  ouvriers. 
On  pourrait  l'employer  avec  avantage  dans  la  oiétallurgie 
des  métaux  précieux  pour  condenser  leurs  vapeurs,  afin 
d'augmenter  le  rendement  des  minerais. 

Pour  tirer  de  ce  pcQoédé  tout  le  parti  .possible,  il  fau- 
drait faire  passer  la  fumée  et  toutes  les  autres  .vapeurs 
par  une  série  de  tuyaux  cylindriques  ^p  [fer,  disposés  vier- 
ticaiement  et  reliés  alternativement  par  le  haut  et  par  le 
bas.  Chacun  des  tuyaux  descendants  serait  pourvu  d'un 
jet  d'eau  froide,  et  le  dernier  tuyau  ascendant  devrait  at- 
teindre uoe, hauteur  auffisante  pour  remplir  l'offiqe  dTune 
cheminée. 


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—  45  - 

Per^oûne,  à  notre  oonnaissatiee  ,  n*a  cherché  à  modi'- 
fier  rinvenlion  de  M.  Humpbry  Jeffrey.  Son  emploi , 
connue  nous  venons  de  le  voir ,  se  trouve  très-limité. 

SSCOIIBE  PABTIB. 

Sa  iixmtm  en  deux  catégùries, 

La  seconde  partie  qui  consiste  dans  les  moyens  à  em- 
ployer pour  consumer  la  fumée,  a  été  le  sujet  d'une  grande 
quantité  d^inventions.  Nous  nous  bornerons  à  analyser' 
les  principaux  systèmes  pouvant  être  considérés  comme 
types,  sans  nous  étendre  sur  leurs  modifications  quî  pré- 
sentent peu  d'intérêt. 

Ces  systèmes  peuvent  être  (Kvisés  en  deux  catégories  : 
Tune  comprenant  les  moyens  de  faire  brûler  la  fumée 
en  l'obligeant  de  passer  soit  à  travers ,  soit  sur  le  com- 
bustible incandescent  ;  lautre  ,  menant  au  même  résultat 
au  moyen  de  l'admission  dans  le  carneau  ou  conduit  de 
la  cheminée ,  et  quelquefois  dans  le  foyer  lui-même , 
d'un  courant  d  air  destiné  à  compléter  la  combustion  des 
éléments  imflammables  de  la  fumée  ;  mais ,  dans  le  pre- 
mier cas  ,  l'air  ,  qui  doit  fournir  la  quantité  voulue  d  oxy- 
gène ,  est  obligé  dé  se  frayer  passage  à  travers  le  feu,  ce 
qui  peut  se  faire  aisément ,  si  la  couche  du  combustible 
est  peu  épaisse  et  le  tirage  considérable  ;  et ,  dans  le 
second  cas  ,  l'admission  de  l'air  a  lieu  par  le  moyen  d'un 
ou  de  plusieurs  orifices  ménagés  tout  exprès. 

PBBHlÈftB  C4TtiS0Ott. 

Fourneau   d»  Papin. 
Papin^,  savant  physicien  français,  à9oîlas  naQhiAesà 


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-  46  ^ 

vapeur  doivent  leur  origine  applicable,  projeta  le  principe 
de  la  première  catégorie  des  fourneaux  fuinivores.  Il  pro- 
posa de  faire  descendre  la  fumée  à  travers  le  feu  au  moyen 
d'un  tirage  permanent,  obtenu  à  l'aide  d'un  ventilateur  à 
force  centrifuge.  L'histoire  nous  apprend  que  H.  Cheetham 
de  Staley-Bridge  a  appliqué  le  système  Papin,  et  qu'il  a 
effectué  la  combustion  des  parties  inflammables  de  la  fumée 
en  l'arrêtant,  au  moyen  d'un  ventilateur,  dans  la  partie  su- 
périeure du  canal  qui  conduit  à  la  cheminée,  et  en  la  re- 
foulant, mélangée  avec  l'air  atmosphérique,  dans  le  cen- 
drier, d'où  elle  remonte  en  traversant  le  combustible 
incandescent.  L'acide  carbonique  qui,  en  vertu  de  sa  pesan- 
teur spécifique  occcupe  la  partie  inférieure  du  canal,  n'est 
point  refoulée  par  le  ventilateur  dans  le  cendrier,  mais 
s'échappe  par  la  cheminée. 

L'année  dernière,  un  des  filateurs  de  la  Loire-Inférieure 
fit  l'usage  de  ce  système,  mais  sans  succès  ;  le  ventilateur 
dont  il  s'est  servi,  avait  bien  les  dimensions  suffisantes  pour 
éviter  l'obstruction  des  flocons  de  la  fumée,  mais  le  feu 
s'éteignait  toujours  au  bout  de  quelques  minutes  de  marche. 
En  se  rappelant  la  composition  des  gaz  qui  accompagnent 
la  fumée,  on  ne  sera  pas  étonné  de  ces  résultats.  En  effet, 
M.  Debette,  ingénieur  des  mines,  en  faisant  leur  analyse 
suivant  les  procédés  de  M.  Ebelmen,  a  trouvé  qu'il  se 
composait  de  12,97  d'acide  carbonique. 

0,75  d'oxide  de  carbone. 

6,30  d'oxygène  libre. 

0,58  d'hydrogène. 
79,40  d'aEQte  presque  pur. 

En  tout.  100,00 


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—  47  — 

Admettons^  pour  Tinstant,  qu'il  soit  possible  de  séparer 
tout  acide  carbooique  à  cause  de  sa  pesanteur  spécifiqueii 
il  n'en  sera  pas  de  môme  pour  Tazote  qui  est  un  peu  plus 
léger  que  Tair,  et  dont  la  grande  quantité  doit  nécessaire- 
ment étouffer  le  feu.  En  second  lieu,  les  moyens  méca- 
niques» dans  un  fourneau  à  courant  d'air,  ne  sufiisent  pas 
pour  éliminer  tout  l'acide  carbonique,  et  la  portion  qui 
revient  sur  les  combustibles  aide  l'action  de  Tazote.  Nous 
croyons ,  en  conséquence ,  que  ce  système  n*a  pas  d*a« 
venir. 

Procédé  de  Watt. 

Le  célèbre  Watt,  qui,  en  continuant  l'œuvre  de  Papin, 
nous  a  légué  les  bases  qui  sont  restées  immuables  jusqu'à 
ce  jour  dans  la  construction  des  machines  à  vapeur,  a  pris 
patente,  en  1785,    pour  obvier   aux    inconvénients  de 
la  fumée.  Son   procédé  consistait  à   introduire  le  com- 
bustible par  un  tube  conique,  en  forme  de  trémie,  fixé 
dans   le  massif  du  fouraeau  immédiatement  derrière  la 
porte  du  foyer,  et  à  faire  passer  un  courant  d'air  à  travers 
cette  porte  pour  alimenter  la  combustion.  Son  appareil  ne 
comportait  point  de  barreaux  de  grille  ;   la  houille   était 
disposée  sur  une  voûte  en  briques,  et  à  mesure  qu'elle 
tombait  de  la  trémie,  n'étant  encore  qu'échauffée,  elle 
était  traversée  par  le  courant  d'air.  Par  ce  moyen ,  les  gaz, 
que  la  chaleur  faisait  dégager,  se  mêlaient  avec  l'air  et  tra- 
versaient, dans  toute  sa  profondeur,  la  partie  incandes- 
cente du  combustible  que  l'on  devait  pouvoir  pousser  avec 
le  ringard  au  fur  et  à  mesure  qu'il  entrait  en  ignition. 
Cette  disposition  de  fourneau  fut  abandonnée  par  Watt 


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—   4«  — 

lui-même ,  à  cause  de  ta  difficulté  de  conduire  le  feu  avec 
de  la  houille  collante  qui '^  en  s'aglutjnant  «  obstruait  le 
passage  de  l'air.  11  eut  alors  recourB  à  une  plaque  fixe  ou 
plateau  qu'il  disposa  entre  les  barreaux  de  la  grfMe  et  la 
porte  du  foyer.  La  grille  et  le  plateau  se  trouvent  dalis  une 
direction  inclinée  à  partir  de  la  porte,  suivant  un  angle 
d'environ  25<>.  Le  charbon  est  d'abord  mis  sur  le  plateau , 
les  produits  gazeux  et  floconneux  qui  s'en  dégagent  pas- 
sent au-dessus  du  combustible  incandescent  de  la  grille , 
où  ils  sont  consommés  par  l'air  qu'ils  rencontrent  en  quan- 
tité suffisante  pour  accomplir  leur  combustion.  Le  coke, 
qui  reste  sur  le  plateau  comme  résidu ,  est  repoussé  sur 
la  grille  pour  remplacer  la  couche  qui  a  été  brûlée. 
Ce  procédé  est  très'^efficace  pour  prévenir  la  fumée,  quand 
on  entretient  le  feu  avec  soin.  MM.  Bôulton,  Watt  et 
compagnie  l'ont  appliqué  avec  stoecës  dà^ns  les  ateliers  de 
la  manufacture  de  vivres  à  Deptford.  D'après  MH.  Batail 
et  Julien ,  cette  nnéthode  a  été  mise  en  usage  à  Saho  de- 
puis un  demi-siècle ,  et  jamais  on  n'a  vu  de  fumée  sortir 
de  la  cheminée. 

Dêuœ  fourneaux  accouplés  de  William  Lash. 

En  1815,  M.  WilKaano  Losh,  de  Newcastel,  prit  une 
patente  pour  une  ingénieuse  combinaison  de  deux  four- 
neaux; ce  système  a  été  essayé  vers  llannée  1840  sur  les 
vaisseaux  de  la  compagnie  des  bateaux  à  vapeur  de  l'Es- 
pagne. 

Le  bateau  à  vapeur  le  Wiiliam  Fanxicetk  avait  la  dispo- 
sition suivante  :  les  fourneaux  étaient  placés  deux  par 
deux,  et  une  ouverture  se  trouvait  ménagée  dans  Pespace 


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-  49  - 

laissé  libre  eatre  chaque  paire  de  fouraeaux ,  de  manière 
à  ce  que  la  fumée ,  provenant  d*un  des  deux  fourneaux, 
put  traverser  un  tuyau  qui  venait  débaucher  dans  le  cen^ 
drier  du  second  fourneau.  Elle  se  mélangeait  alors  à  Tair, 
et  en  remontant  à  travers  le  combustible  incandescent  difr* 
posé  sur  la  grille,  elle  se  trouvait  consumée.  L'un  des 
fourneaux  opérait  ainsi  comme  une  espèce  de  cocnue 
chargée  de  produire  et  de  dégager  des  gaz,  tandis  que 
Tautre  agissait  comme  un  véritable  foyer  fumivore.  Il  y 
avait  un  registre  disposé  entre  les  deux  autels;  ce  registro 
était  fermé  lorsqu'on  veniiût  de  jeter  une  charge  de  houille 
sur  la  grille ,  interceptant  ainsi  le  passage  vers  la  cheipi- 
née,  de  manière  à  ce  que  la  fumée  fut  renvoyée  dans  l'au** 
tre  foyer;  mais  aussitôt  que  la  bouille  qu'on  avait  intro^ 
duite  se  trouvait  dépouillée  de  tous  ses  gaz ,  le  registre 
était  ouvert ,  et  le  tirage  vers  la  cheminée  s'établissait  im* 
médiatement  par  ce  fonroeau.  C'était  dans  le  second  fourw 
neau  que  l'on  jetait  alors  le  combustible ,  et  un  regisUpe 
pareillement  disposé  forçait,  en  se  refermant,  la  fumé^ 
à  s'écouler  par  le  premier  fQurneau.  Durant  cette  opérar 
tion  on  n'apercevait  aucun  dégagement  de  fumée  par  la 
cheminée.  Cependant-  il  était  fort  inconunode,  dans  la 
pratique,  de  régler  le  jeu  des  regi^res,  et ,  sous  ce  rap- 
port, les  foyers  fumivores  4e  William  Fawcette  sont 
moins  avantageux  que  beaucoup  d'autres. 

Deux  autels  dits  Vénitiens. 

Sur  le  bateau  le  Tage  on  a  employé  un  autre  système. 

Deux  autels ,  dits  Vénitiens,  sont  formées  de  tuiles  in* 

clinées  en  sens  contraire ,  et  séparées  Tune  de  l'autre  de 

4 


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—  50  ~ 

2  à  2  1/2  centimètres.  Ces  autels  ont  une  épaisseur  de  3 
décimètres  environ,  et  laissent  entre  eux  un  espace  li- 
bre. Les  tuiles  s'éliauffent  rapidement  par  la  flamme  qui 
les  traverse,  et  si  Ton  a  soin  de  n'avoir  qu'âne  couche  de 
combustible  peu  épaisse  sur  les  barres  de  la  grille,  il 
pourra  passer  une  quantité  suflP.sante  d'oxygène ,  à  travers 
la  masse  enflammée ,  pour  effectuer  la  combustion  des 
gaz  inflammables ,  au  moment  où  ils  traversent  les  espaces 
laissés  libres  entre  les  parois  chaudes  des  tuiles.  Les 
autels  sont  établis  sur  une  voûte,  fermée  par  une  porte  , 
de  manière  à  ce  qu'on  puisse  pénétrer  au-dessous  des  pas- 
sages de  fumée.  Nous  croyons  qu'eu  établissant  une  sé- 
rie d'autels  de  la  même  manière,  avec  un  fourneau  garni  de 
briques  réfractaires  et  un  bon  tirage,  on  pourrait  eflectuer 
la  combustion  complète  de  la  fumée,  si,  toutefois,  l'on 
avait  soin  de  maintenir  sur  la  grille  une  couche  peu  épaisse 
de  combustible^  et  de  n'employer  que  des  barreaux  très- 
étroits  et  assez  distants  l'un  de  l'autre.  Il  vaudrait  mieux 
que  les  tuiles,  au  lieu  d'être  plates,  fussent  concaves,  afin 
que  le  courant  fut  à  flamme  renversée.  On  sait,  en  eflêt, 
que  les  changements  de  direction ,  dans  l'écoulement  de  la 
fumée,  aide  puissamment  en  agitant  ses  diverses  couches, 
à  la  combustion  de  ses  parties  inflammables,  en  supposant 
toutefois  une  température  propre  à  cela. 

Grille  de  Nathan  Waddington. 

M.  Nathan  Waddington  a  disposé  les  barreaux  de  la 
grille  suivant  deux  plans  inclinés ,  dont  l'intersection  est 
parallèle  à  l'axe  de  la  chaudière.  La  houille  est  placée  à  la 
partie  supérieure  de  chacun  de  ces  plans  inclinés ,  de  ma- 


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—  Bl  — 

nière  qu'elle  a  perdu  déjà  une  assez  grande  partie  de  son 
gaz  avant  de  tomber  sur  les  barreaux.  On  doit  ménager 
un  écartement  assez  grand  entre  les  barreaux  de  la  grille  , 
an  point  d'intersection  des  deux  plans,  de  manière  à  ce 
qu'il  puisse  passer  toute  la  quantité  d'air  nécessaire  à  la 
combustion  des  gaz.  Cette  disposition  de  fourneau  ne 
nous  paratt  pas  être  très-heureuse,  et  nous  ne  croyons  pas 
qu'elle  soit  dénature  à  obtenir  un  grand  succès.  D'ailleurs, 
Fentretien  du  feu,  sur  les  bords  de  la  chaudière,  esta  peu 
près  impossible  dans  certaines  circonstances. 

Chaudière  sans  cameauœ  de  John  Smith. 

Le  système  de  chaudières  que  M.  John  Smith,  de  King- 
town,  près  de  Dublin,  a  présentéà  l'association  britannique 
de  Manchester  est  celui-ci.  La  chaudière  affecte  la  forme 
d'an  four,et  n'est  point  traversée  par  des  carneaux  ordi* 
naires.  C'est  dans  une  vaste  chambre  centrale  que  se  ren- 
deant  la  flamme  et  la  fumée ,  en  sortant  du  foyer  ;  elles  y 
arrivent  par  la  partie  supérieure ,  suivent  le  plafond ,  et  re- 
viennent sur  la  sole  pour  se  rendre  dans  la  cheminée  pla- 
cée près  du  foyer.  En  supposant  môme  l'accomplissement 
de  la  combustion  de  tous  les  produits  inflammables,  que 
nous  n'osons  pas  admettre,  nous  ne  sommes  pas  partisan 
de  cette  disposition,  surtout  pour  la  haute  pression  de  la 
vapeur ,  à  cause  de  son  peu  de  solidité. 

Grille  tournante  de  John  Steel. 

Un  procédé  qui  présente  beaucoup  de  chances  de  suc* 
ces  pour  arriver  à  la  combustion  de  la  fum^e  est  celui  qui  a 
pour  but  l'emploi  de  la  grille  tournante,  il  est  fréquemment 


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--  «a  — 

appliqué  dans  les  districts  manufiicturiers  de  la  Grande- 
Bretagne.  Il  a  été  décrit ,  pour  la  première  fms,  en  18t9, 
par  M.  John  Steel,  de  Darimouth;  il  a  été  présenté  par  lui 
devant  la  commission  spéciale  de  la  chambra  des  commu- 
nes; mais,  au  mois  de  décembre  de  la  même  année,  il  &it 
breveté  au  nom  de  M.  Brunton ,  de  sorte  qu*on  ne  sait  trop 
auquel  de  ces  deux  mécaniciens  Ton  en  est  redevable. 
MM.  Boulton  Watt  et  compagnie  ont  pertectionné  ce  sys- 
tème et  Tout  appliqué  en  1843  aux  chaudières  des  ma- 
chines de  la  banque  d'Angleterre.  Dans  celte  combinaison, 
la  grille  circulaire^  supportée  par  un  arbre  vertical,  est 
mise  en  mouvement  au  moyen  d*un  rouage ,  cette  grille 
reçoit  la  houille  qui  est  projetée  du  iond  d'une  trémie. 
L'ouverture  inférieure  de  la  trémie  affecte  une  forme 
oblongue,  de  môme  longueur  qu'un  des  rayons  de  la  grille, 
afin  de  régler  uniformément  la  quantité  de  houille  qu'elle 
laisse  tomber,  suivant  ce  rayon,  par  intervalles  égaux* 
La  grille  opère  une  révolution  complète  dans  une  minute, 
et  la  trémie  laisse  échapper  une  charge  de  bouille  par  in- 
tervalle de  quatre  à  cinq  secondes,  ce  qui  permet  d'obte- 
nir une  grande  régularité  dans  Talimentation  du  feu.  Afin 
de  proportionner  la  quaqtité  de  cbai4>on  aux  besoins  de  la 
machine,  un  tiroir  à  coulisse,  dont  la  tige  est  mise 
en  jeu  par  la  machine  elle-même,  augmente  pu  diminue 
le  passage  du  charbon,  suivant  le  degré  de  tension  de  la 
vapeur  dans  la  chaudière. 

Immédiatement  au-dessus  du  foyer  se  trouve  une  chau- 
dière supplémentaire ,  assez  basse  pour  qu'on  ait  pu  dis- 
poser la  trémie  par  dessus,  et  présentant  une  ouverture 
dans  son  milieu  pour  laisser  un  passage  libre  au  ohaièoQ 


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—  65  — 

qui  tombe  de  cette  trémie.  La  cbtydière  supplémentaire 
est  mise  en  communication  avec  la  chaudière  principale 
par  dfô  tuyaux  à  vapeur.  L'air  chaud  provenant  du  foyer, 
après  avoir  agi  sur  ce  premier  récipient ,  passe  dans  les 
carneaux  de  la  chaudière  principale^  qui  n'est  autre  chose 
qu  une  chaudière  ordinaire  en  chariot  de  Watt,  et  va  se 
perdre  dans  l'atmosphère  en  traversant  la  cheminée.  Une 
boîte  en  fonte,  scellée  dans  le  massif  inférieur,  sert  i 
contenir  les  rouages  d'angle  dentés ,  s'engrenant  à  angle 
droit,  qui  transmettent  le  mouvement  à  la  grille.  La  roue 
principale,  qui  communique  directement  le  mouvement, 
est  placée  immédiatement  au-dessous  des  barreaux.  La 
sortie  des  gaz  chauds  est  précisément  opposée  au  côté  de 
la  grille  où  le  charbon  est  projeté  ;  de  sorte  que  les  pro- 
duits gazeux ,  qui  se  dégagent  du  charbon  nouveau,  sont 
obligés  de  passer  sur  le  combustible  incandescent ,  placé 
de  Tautre  côté  de  la  giille,  et  se  trouvent  ainsi  consumés. 
L'ensemble  de  cette  construction  gagnerait  en  simplicité 
qu'on  doit  chercher  dans  toutes  les  combinaisons,  si  la 
grille  tournante  était  placée  dans  un  fourneau  de  même 
forme  que  ceux  des  locomotives  du  système  Stephendson 
ou  autres,  contenant  les  boîtes  à  feu.  Un  mur  assez  épais^ 
en  terre  cuite ,  percé  de  trous  pour  livrer  passage  à  la 
fumée  se  rendant  dans  les  tubes,  devrait  être  interposé 
entre  la  plaque,  où  les  tubes  sont  adaptés,  et  le  foyer,  dans 
le  double  but  de  préserver  la  plaque  des  tubes  de  l'action 
immédiate  de  la  chaleur,  et  de  rendre  la  combustion  plus 
complète.  II  est  très-présumable  que  des  chaudières,  que 
Ton  établirait  sur  ce  plan,  oflVi raient  de  grands  avan- 
tages. 


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—  «4  — 

Trémie  Stanley. 

M.  Stanley  fut  patenté,  en  1822^  pour  une  trémie  des- 
tinée à  recevoir  la  houille.  Le  coi  de  la  trémie  est  muni 
de  cylindres  à  canelures,  mis  en  mouvement  de  rotation 
par  la  machine,  à  TefFet  de  broyer  les  morceaux  de  char- 
bon, pour  le  réduire  à  la  grosseur  convenable^  avant  qu'il 
ne  tombe  dans  la  trémie.  L'écartement  des  cylindres  est 
réglé  au  moyen  d'une  vis.  Les  morceaux  de  charbon  tom- 
bent au  fond  de  la  trémie  sur  une  plaque  de  fer,  d*où  ils 
sont  projetés  par  un  appareil  rotatoire,  pour  retomber  en 
s'éparpillant  uniformément  sur  le  feu.  Le  mécanisme  qui 
communique  le  mouvement  à  cet  appareil  est  disposé  de 
manière  à  ce  que  sa  vitesse  propre  se  trouve  ralentie  lors- 
que celle  de  la  machine  devient  plus  rapide.  La  quantité 
de  charbon  qui  tombe  sur  le  foyer,  se  trouve  être  ainsi  en 
rapport  avec  les  besoins  de  la  machine,  pour  la  production 
de  la  vapeur. 

M.  Payen,  un  des  plus  célèbres  chimistes  manufacturiers, 
a  appliqué  le  système  Stanley  dans  ses  fabriques  de  Gre- 
nelle, et  il  a  trouvé  dans  son  emploi  de  notables  avantages, 
comme  conséquences  naturelles  de  la  suppression  de  la 
porte  du  foyer,  qui  le  refroidit  à  chaque  fois  qu'on  l'ouvre, 
et  de  la  distribution  uniforme  et  régulière  du  combusti- 
ble. M.  Payen  a  donné  à  cet  appareil  le  nom  de  distri- 
buteur. 

Appareil  Juckes. 

L'appareil  inventé  en  Angleterre  par  M.  Juckes  et  ex- 
ploité en  France,  depuis  quelques  années,  par  M.  Tailfer 
et  Comp.,  propriétaire  du  brevet  d'importation,  a  pour  but 


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~  55  ~ 

de  remplacer  la  grille  ordinaire  par  une  autre,  se  mouvaAl 
comme  nue  large  courroie  et  pouvant,  par  conséquent ,• 
prendre  le  nom  de  grille  sans  fin.  L'appareil  qui  la  contient 
est  porté  par  quatre  roues  mobiles  sur  un  petit  chemin 
de  fer,  ce  qui  facilite  son  mouvement  pour  être  retiré,  soit 
à  cause  de  sa  propre  réparation,  soit  à  cause  de  celles  de 
la  chaudière. 

Il  se  compose  d'un  bâti  formé  de  deux  flasques  en  fonte; 
il  porte,  à  chaque  extrémité,  deux  tambours  prismatiques, 
et  intermédiairement,  haut  et  bas,  deux  séries  de  rouleaux 
et  de  galets  de  friction.  La  grille  est  formée  d'éléments  en 
fonte  de  0  m.  30  c.  de  long  sur  0  m.  02  c.  de  large,  qui  se 
succèdent  dans  une  série  longitudinale  etse  juxtaposent  en 
séries  consécutives  dont  les  joints  se  croisent;  elle  présente 
deux  plans  à  jour,  se  réunissant  par  deux  demi-cylindres; 
le  combustible  repose  sur  le  plan  supérieur,  et  l'air  destiné 
pour  sa  combustion  passe  à  travers  les  deux  plans;  cha- 
que série  d'élément  forme  une  chaîne  articulée,  qui  s'en- 
roule sur  les  deux  tambours  et  la  grille  toute  entière  peut 
être  assimilée  à  une  étoffe  tendue  sur  deux  rouleaux,  dont 
l'un  lui  imprime  un  mouvement  de  courroie  qu'elle  trans- 
met à  l'autre.  L'articulation  est  produite  au  moyen  de 
tringles  en  fer  passant,  au  nombre  de  deux,  à  travers  cha- 
que élément ,  et  le  reliant  avec  lextrémité  de  chacun  des 
deux  éléments  voisins  de  la  série  adjacente. 

La  grille  fait  saillie  en  dehors  du  devant  du  foyer;  Tune 
des  flasques  de  son  bâti  porte  une  transmission  du  mouvement 
an  premier  tambour^  qui  imprime  à  la  grille  elle-même 
son  mouvement  de  translation* 

Au-dessus  de  la  grille  et  contre  la  paroi  antérieure  du 


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-  66  - 

liyarneau  se  trouve  placé  une  trémie,  qui  reçoit  le  com- 
bustible ;  une  vanne  en  tôle,  dont  la  hauteur  est  fixée  pdr 
)e  chauffeur,  règle  son  introduction.  L'esctrémité  opposée 


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—  57  — 

viennent  à  jouer  les  uns  par  rapport  aux  autres,  et  à  se 
disjoindre  momentanément  par  leurs  extrémités;  il  est  re- 
cueilli, avec  quelques  escarbilles  de  houille  qui  passent  à 
travers  la  grille,  dans  le  cendrier  ;  ces  escarbilles  encore 
propres  à  la  combustion  sont  séparées  facilement  par  le 
chauffeur  et  rechargées  en  mélange  avec  de  la  houille,  de 
telle  sorte  qu'aucune  partie  du  combustible  n'est  perdue. 

Pour  chaque  appareil  et  pour  chaque  effet  à  produire, 
le  chauffeur  a  trois  éléments  à  sa  disposition  :  la  hauteur 
de  la  vanne  ou  l'épaisseur  du  combustible,  la  vitesse  dé 
la  grille  etTouverture  du  registre  de  la  cheminée  ;  en  outre, 
it  peut  faire  marcher  momentanément  la  grille  à  la  main 
pour  parer  à  quelques  irrégularités  naturelles,  par  exem-» 
pie  lorsqu'il  faut  remettre  le  feu  en  pleine  activité  aprèi 
les  arrêts  nécessités  par  la  durée  des  repas.  Au  moyen  de  ces 
éléments,  il  est  &cile  de  régler  promptement,  par  tâtonne-^ 
ment,  les  meilleures  conditions  de  la  combustion,  qui  dé-^ 
pendent,  pour  la  même  chaudière,  de  la  quantité  de  vapeuf 
à  fournir  et  de  la  nature  de  la  houille. 

Une  grille  mécanique  de  cette  nature  a  été  adaptée ,  en 
1844,  pour  essai  aune  des  chaudières  de  la  manufacture 
des  tabacs ,  à  Paris ,  par  M.  Tailfer  lui-même ,  sous  là 
direction  de  M.  Combes,  inspecteur  général  des  mines.  Cettd 
chaudière  avait  46  m.  car.  de  surface  de  chauffe. 

La  surface  totale  de  sa  grille  était  de  2,"-  <l-  3368.  Elle 
était  formée  de  51  files  de  barreaux  réunis  par  des 
boukuie. 

Les  barreaux  avaient  0,  "**  02  de  largeur;  les  vides 
entre  eux  avaient  une  largeur  égale  au  1/6  de  la  leur.  Ce 
qui  donne  pour  la  smfaoe  tdtde  des  vides  0,  "^*  4*  40. 


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-  88  — 

On  brûlait  environ  200  k.,  par  heure,  de  houille  grasse 
d'Anzin.  On  a  commencé  à  régler  la  vitesse  de  lagrille  sans 
fin,  de  manière  à  ce  que  le  charbon  qui  s'y  distribuait  ne 
brûlât  pas  complètement  avant  d'arriver  à  Tautel,  mais  aussi 
à  ce  qu'il  ne  produisit  pas  de  m&chefer  par  sa  trop  grande 
quantité. 

Pendant  les  essais  comparatifs  des  deux  chaudières 
identiquement  semblables,  communiquant  avec  la  même 
cheminée,  dont  une  a  été  pourvue  de  la  grille  sans  fin  et 
l'autre  de  la  grille  ordinaire,  recevant  la  même  qualité  de 
charbon,  les  gaz  échappés  par  la  cheminée  contenaient: 


CHAUDIÈRE 

CHAUDIÈRE 

k 

k 

GRILLB  SAIfS  FUI. 

GRILLB  ORDIIIÂIRB. 

Acide  cabonique. .  • 

de  10,39  a  6,16  p.  Vo 

14,10  k  9,10. 

Oivffène 

12,57  k  8,45  p.  Vo 

10,80  k  6,52. 

^^•jb^"^ •• 

Ce  qui  donne  pour 
l'air  libre  en  moyen- 

ne  • 

63  p.  Vo 

43p.o/o. 
La  plus  grande  fu- 

mée laissait,  dans  les 

r 

produits  de  la  com- 
bustion, la  plus  gran- 

de  quantité  d'acide 

carbonique,  et  la  plus 

faible  d*oxygène,  et 

vice  versa» 

Un  kilogramme  de 

charbon  vaporisait. 

de  7  k.  à  5,k.  5  d'eau. 

6,k.8ftk6,k.4S 

Pendant  ces  expériences,  M.  Combes  a  observé  des  fietits 
qui  lui  ont  permis  de  tirer  les  conclusions  suivantes: 
l.""  L*appareil  de  Juckes  est,  en  général,  et  sauf  les  cas 


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—  69  — 

où  la  section  de  la  cheminée  senûl  extrêmement  petite, 
complètement  fumivore. 

2.**  Le  charbon  menu  doit  être  employé  de  préférence; 
il  Ëiut  casser  les  gros  morceaux,  qui  n'auraient  pas  le  temps 
de  brûler  dans  le  trajet  de  la  grille. 

3.®  Pour  une  vitesse  de  grille  donnée^  la  hauteur  du 
r^istre  la  plus  GEtvorable  à  Téconomie  du  combustible  n'est 
pas  toujours  celle  pour  laquelle  le  mâchefer  se  détache  d« 
lui-même  à  Textrémité  de  la  grille;  il  convient  de  régler 
Tépaisseur  de  la  couche  de  houille ,  de  manière  à  ce  que 
Textrémité  de  la  cliauffe  soit  recouverte  par  une  quantité 
de  ni&chefer  suffisante  pour  prévenir  Tintroduction  d'un  trop 
grand  excès  d'air,  et  alors  il  est  quelquefois  nécessaire  de 
décrasser  la  grille  avec  le  ringard,  toutes  les  quatre  ou  cinq 
heures* 

4.®  Les  grandes  vitesses,  avec  de  bibles  épaisseurs  de 
houille,  donnent  de  meilleurs  résultats  que  les  faibles  vi- 
tesses avec  de  fortes  épaisseurs.  Il  n*y  a  de  limite  à  la 
vitesse,  que  le  point  où  l'inflammation  latérale  ne  peut  plus 
se  propager  assez  rapidement,  de  sorte  qu'une  partie  du 
charbon  est  amené  à  l'état  noir  jusqu'à  une  distance  assez 
grande  du  registre,  ce  qui  oblige,  soit  à  lever  fréquenunent 
ce  dernier,  pour  ramener  le  charbon  avec  un  ringard,  soit 
à  débrayer  de  temps  en  temps  la  grille. 

Généralement  on  peut  dire  qu'il  convient  d'employer 
une  vitesse  d'autantmoins  considérable  que  le  charbon  est 
plus  gras.  Avec  le  charbon  d'Anzinlavitesse  maximum  était 
celle  d'environ  32  millimètres  par  minute:  elle  a  donné  les 
meilleurs  résultats  avec  une  épaisseur  de  couche  de  8  cen- 
timètres 1/2. 


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—  60  ~ 

En  1849,  kft  ihgéniMrs  de  FUsine  halionale  dln^ret 
ont  soumis  cet  appareil  aux  expériences  comparatives  à 
bord  d'un  bateau  à  vapeur  de  TÉtat.  M.  du  Chalard ,  in- 
génieur des  constructions  maritimes,  a  eu  l'obligeance  de 
nous  communiquer  leurs  résultats,  dont  nous  extrayons  les 
passages  suivants  : 

<r  Les  grilles  de  M.  Tailfer  avaient  été  montées  dans  les 
»  foyers  des  deux  chaudières  de  l'avant  du  PronuéthéB^  ba- 
ji  teau  à  vapeur  de  200  chevaux  ;  les  deux  chawlières  de 
»  l'arrière  étaient  munies  de  grilles  ordinaires. 

»  La  machine  donnait  le  mouvement  à  un  arbre  ré-^ 
»  gnant  sur  toute  la  fiiçade  des  chaudières,  lequd  le  tran- 
»  smeltait  lui-même  à  un  système  de  z6nes  d*engrenage 
»  destinées  à  faire  marcher,  avec  une  faible  vitesse ,  les 
»  tourteaux  sur  lesquels  viennent  s*enrouler  les  grilles  mo* 
È  biles. 

»  On  a  marché  pendant  plusieurs  heures  et  dans  les  mè- 
»  mes  circonstances  de  vent  et  de  mer,  tantôt  avec  les 
»  grilles  Tailfer,  tantéi  avec  les  grilles  ordinaires. 

j»  L'emploi  des  grilles  Tailfer  permet  de  réaliser  unre 
É  véritable  économie 'de  combustible.  La  commission  es- 
i>  time  qu'à  poids  égal  de  vapeur  produite ,  cette  économie 
â  doit  monter  à  10  ®}o* 

»  En  outre ,  l'emploi  de  ces  griHes  réduit  notablemeni 
»  la  fatigue  des  chauffeurs  et  abaisse  beaucoup  la  tcmpé- 
ji  rature  ordinairement  très-éievée  de  là  chambre  des  ma- 
A  chines.  L'opinion  gétiérale ,  à  Indret ,  est  néanmoins  que 
»  le  mécanisme  des  engrenages  est  trop  compliqué  pour 
j»  l'usage  à  la  mer,  et  qu'il  serait  souvent  sujet  aux  répara- 
»  tions.  Ce  système  de  grilles  est  plutôt  applicable  auic 


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~  61  — 

t  chaudières  de  machines  fixes.  Qo  l'a  mis  eo  activité  dans 
B  le  port  de  Cherbourg ,  pour  une  chaudière  d^  $^i^^  cbe-* 
»  Taux,  qui  économise  du  charbon,  j» 

En  présence  du  iéoioignage  de  MM.  Conibes  et  du  Cba* 
lard,  Dous  avons  peu  de  choses  à  ajouter  : 

L'appareil  de  Juckes  nous  paratt  plus  avaniagew  que 
celui  de  la  grille  circulaire,  d'abord  parce  qu'on  s'y  débar- 
rasée  plus  facil^mept  des  résidus  solides  de  la  combustion  i 
«asuitç  par<:e  que  lagglutMiation  de  la  houille  gvasse  y  est 
plus  difficile ,  et  p^rce  ii}u'il  joint  encore  Tavanlsage  du  pla* 
teau  de  Watt ,  qui  sert  pour  échauffer  la  houille,  et  la  cou? 
vertir  en  coke  avapt  sa  combustion. 

Nous  terminons  les  observations  sur  cet  appareil  en  indi- 
quant les  inconvénients  qu'il  peut  présenter  dans  son  em- 
ploi à  la  longue. 

l.""  ^vant  chaque  mise  en  train  de  la  machine,  il  feut  le 
fiiire  marcher  à  la  main  précisément  pendant  le  temps  oA 
le  conducteur  de  la  machine  doit  s'occuper  de  la  graisser  et 
visiter. 

2.''  Son  service  exige  réellement  moins  de  travail  qpe 
celtti  d'une  griHe  ordinaire  ;  mais  comme  sa  construction 
est  assez  compliquée,  et  que  la  vitesse  de  la  machine  ne 
peut  pas  régler  celle  de  la  ^ille ,  sa  conduite  demande  plus 
d'ÎDteUigence,  si  on  vent  conserver  une  marche  conveqable 
pour  réconomie  du  combustiUe ,  et  pour  éviter  TenAasse* 
ment  des  gros  morceaux  du  mâchefer  sur  {'auteUube ,  qu| 
occasionne  un  décrassage  plus  pénible  que  ealui  à'um  grîUe 
ordinaire. 

3.^  La  majeure  partie  de  c^  appareil  étant  couverte  de 
poussière  au  mjliea  d'une  température  très-élevée,  doit  se 


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—  62  ~ 

détériorer  assez  promptement ,  et,  la  plupart  des  fois,  d'une 
manière  imprévue,  et,  par  conséquent ,  doit  présenter  des 
chances  de  chômages  qui  sont  souvent  funestes  à  l'industrie. 
Pour  éviter  ces  chômages,  il  est  absolument  utile  d'avoir 
des  pièces  de  rechanges,  ce  qui  expose  les  propriétaires  à 
de  certaines  dépenses. 

Les  frais  occasionnés  par  Tentretien  de  cet  appareil  et 
par  les  arrêts  des  machines  pendant  les  réparations,  n*étant 
pas  encore  étudiés  suffisamment  pour  pouvoir  se  rendre 
compte  de  leur  valeur  relative  à  Téconomie  des  combustî* 
blés  qu'il  offre,  nous  nous  abstenons  de  porter  un  juge* 
ment  sur  sa  supériorité,  sous  le  rapport  industriel 

Grille  de  Cutler. 

Une  méthode  très-ingénieuse  pour  brûler  la  fiimée 
consiste  à  allumer  le  charbon  par  le  haut.  Il  y  a  queicpies 
années,  qu'on  introduisit  dans  les  foyers  des  appartements 
une  grille ,  dite  grille  de  Cutler,  disposée  de  manière  à  ce 
qu'on  pût  y  appliquer  cette  méthode.  L'inconvénient  prin- 
cipal de  ce  système  est  la  difficulté  que  l'on  éprouve  à  in- 
troduire la  houille  nouvelle  au-dessous  de  la  masse  en- 
flammée. 

En  1815 ,  M.  William  Moult  établit  un  fourneau  d'aprèa 
ce  principe ,  et  son  perfectionnement  consistait  à  fiûre 
passer  la  flamme  au-dessus  de  la  houille  nouvelle,  que  l'on 
plaçait  sur  un  plateau.  Ce  perfectionnement  ne  parait  pas 
avoir  obtenu  un  grand  succès. 

M.  Georges  Godson  a  repris  ce  procédé  et  Ta  appliqué  à 
Woolwicb.  Il  consiste  en  ce  qui  sûit: 

La  houille  est  introduite  dans  un  coffire  placé  aiwlesBOus 


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—  as  — 

du  fourneau ,  et  muni  (fun  piston  mobile ,  sur  la  tête  du- 
qviel  on  dispose  le  combustible.  L'ouverture ,  qui  est  mé- 
nagée dans  la  grille  pour  recevoir  le  coffre,  se  ferme  au 
moyen  de  deux  tiroirs  à  coulisses,  lorsqu'on  vient  à  retirer 
celui-ci  pour  le  remplir  de  bouille.  Quand  le  cofre  est  plein 
et  placé  dans  sa  position  habitueUe ,  on  ouvre  de  nouveau 
les  deux  tiroirs,  et  la  bouille  s*enflamme  par  le  haut.  A 
mesure  que  le  feu  gagne ,  le  piston  s'élève  dans  le  coffre 
afin  de  conserver  le  même  niveau  au  combustible  incan- 
descent. Les  gaz  que  la  chaleur  fait  dégager  sont  brûlés 
dans  le  passage  à  travers  la  masse  enflammée  répandue  sur 
la  grille.  Ce  genre  de  fourneau  agit,  en  quelque  sorte, 
comme  une  torche  qui  brûlerait  de  la  houille.  Tous  les 
avantages  qu'on  y  trouve  sont  dus  à  ce  que  les  gaz  qui  se 
dégagent  de  la  houille  entrent  en  combustion  sans  être  au- 
paravant mélangés  avec  Facide  carbonique  et  Tazote,  qui 
proviennent  de  la  combustion  des  parties  bitumineuses. 
L'air  arrive  par  un  grand  nombre  d'orifices ,  ménagés  tout 
autour  du  sommet  de  cette  espèce  de  torche,  pour  accom- 
plir la  combustion  des  gaz.  Nous  craignons  cependant  que 
dans  les  grands  fourneaux ,  il  ne  soit  difficile  de  régler  ren- 
trée de  l'air  de  manière  à  le  mélanger  avec  les  gaz  en  pro- 
portion suffisante  ou  du  moins  convenable.  Dans  les  foyers 
d'appartement,  cette  difficulté  n'existe  pas;  Ciir  le  feu  étant 
peu   considérable,  l'air  arrive  en  quantité  surabondante 
dans  le  foyer,  et  dans  tous  les  feux  ouverts ,  il  n'y  a  aucun 
inconvénient  à  ce  que  de  l'air  en  excès  s'échappe  par  la 
cheminée.  Mais,  dans  les  fourneaux  de  machines  à  vapeur, 
une  trop  grande  quantité  d'air  agit  d'une  manière  très- 
nuisible,  en  refroidissant  la  chaudière  ;  et  un  fourneau  qui 


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—  64  - 

présenterait  cet  inconvénient  ne  fonctionnerait  jamais  swec 
avantage.  Le  perfectionnepient  de  M.  Georges  Godson  aurait 
dû  être  mis  dans  la  seconde  catégorie,  nous  Tavons  classé  dans 
la  première,  à  cause  du  principe  de  son  invention  primitive* 

L'air  chaud. 

M.  Samnet  Halle  et  M.  Joseph  Williams  proposent  de 
faire  brûler  la  fumée  par  Talimentation  du  foyer  avec  l'air 
chaud.  N'ayant  pas  d'autres  renseignements  sur  cette  in- 
vention ,  nous  ne  nous  y  arrêterons  pas ,  car  elle  se  trouve 
implicitement  employée  dans  beaucoup  d'autres  contenus 
dans  ce  travail. 

Vapplieatitm  du  sysUtne  Watt  par  John  Walker  junior. 

Dans  le  rapport  fait  en  1819  par  une  Commission  spé- 
ciale de  la  Chambre  des  Communes,  on  trouve  la  des- 
cription d'un  projet  de  fourneau  combiné  avec  un  four  à 
coke  de  M.  John  Walker  junior.  Son  système  consistait  à 
réduire  la  houille  à  l'état  de  coke  ,  avant  de  la  faire  passer 
sur  la  grille  du  foyer ,  où  elle  devait  être  consumée.  Ce 
procédé  n'a  rien  de  neuf,  la  priorité  de  la  conception  de 
l'idée  principale  ,  comme  nous  l'avons  vu ,  est  due  à  W^att, 
et  l'application  de  M.  John  Walker  junior  ne  fait  que  com- 
pliquer la  construction  des  fourneaux  de  machines  à  va- 
peur. Cependant  il  est  indispensaj^le  pour  la  cuisson  de 
la  chaux  à  l'aide  de  la  houille  grasse ,  qui ,  par  le  moyen 
ordinaire  de  fabrication  ,  ferait  des  amas  avec  la  pierre 
calcaire  dans  le  fourneau ,  et  occasionnerait  ce  qu'on  ap- 
pelle des  rimures  ;  aussi  il  est  généralement  employées 
Angleterre.  A  cet  effet ,  autour  d'un  four  à  chaux,  on  éta- 


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—  6B  — 

blit  ane  grande  quantité  de  petits  founs  à  coke ,  d*où  ia 
chaleur  se  rend  pour  cuire  la  chaux  ;  le  coke  menu,  qui 
tombe  à  travers  des  grilles ,  est  mélangé  avec  la  pierre 
calcaire ,  qui ,  par  sa  combustion  ,  en  arrivant  dans  Tespace 
bien  cbaud  du  fourneau ,  facilite  le  dégagement  d*aeide 
carbonique  de  la  pierre  calcaire,  et  la  réduit  ainsi  en  chaux 
vive. 

Chauffage  à  flamme  perdue. 

Un  système  qui  ressemble  beaucoup  au  précédent  est 
quelquefois  mis  en  pratique  ,  c'est  celui  du  chauffage  des 
chaudières  à  vapeur  à  flamme  perdue  des  fours  à  coke. 
Tous  les  fondeurs  qui  emploient  de  grandes  quantités  de 
coke,  et  qui  ont  besoin  de  moteurs,  mettent  à  profit  cette 
chaleur  perdue ,  qui  contient  une  énorme  quantité  de  pro- 
duits combustibles. 

Mais  dans  des  circonstances  ordinaires ,  il  serait  très- 
vicieux,  à  notre  avis,  d'avoir  recours  à  ce  procédé,  à  cause 
du  surcroît  d'embarras,  et  parce  qu'ensuite  Ton  n'est  pas 
toujours  sûr  de  vendre  avantageusement  le  coke. 

La  chaleur  perdue  des  hauts  fourneaux  ainsi  que  celle 
des  fours  à  puddier  ou  à  affiner  le  fer,  est  très-souvent 
employée  comme  moteur  des  souffleries ,  des  laminoirs  ou 
autres  outils.  Dans  cette  application  une  grande  quantité 
de  fiimée  est  détruite ,  tantôt  par  un  petit  foyer  addition- 
nel et  tantôt  par  une  simple  admission  d'air  frais. 

Chaudières  de  Cornouailles. 

Nous  finirons  la  description  analytique  des  fourneaux 
de  la  première  catégorie  par  l'indication  des  dispositions 
spéciales  des  chaudières  de  CornouailleSi  qui  ont  toujours 

5 


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—  66  — 

excité  un  intérêt  légitime.  Le  principal  mérite  de  ces 
chaudières  est  d'engendrer  la  vapeur  en  ne  produisant  que 
fort  peu  de  fumée ,  et  en  réalisant  une  grande  économie 
de  combustibles.  On  attribue  généralement  ce  résultat  à 
la  lenteur  de  la  combustion ,  ainsi  qu'aux  grandes  pro- 
portions que  présentent  le  fourneau  et  la  chaudière  ;  et 
il  est  inconstestable,  en  effet ,  qu'un  des  points  importants 
à  observer  pour  arriver  à  la  combustion  de  kt  fumée , 
consiste  à  ménager  le  plus  long  espace  de  temps  et  de  lieu 
possible  à  Taccompiissement  de  la  combustion,  aussi  bien 
qu'à  rendre  parfaitement  homogène  le  mélange  des  diffé- 
rents gaz  qui  se  trouvent  dans  la  fumée.  Cependant,  une 
des  principales  causes  de  la  propriété  fumivore  des  chau- 
dières de  Cornouailles  doit  être  attribuée  à  la  nature  de  la 
houille  que  Ton  emploie  dans  ce  pays.  Cette  houille ,  étant 
presque  dépourvue  d'hydrogène,  ne  contient,  qu'en  faible 
portion,  les  matières  bitumineuses  qui  constituent  la  fumée. 
Quoiqu'il  en  soit  de  l'importance  relative  de  ces  diverses 
circonstances ,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  les  chau- 
dières ,  établies  sur  le  plan  de  celles  de  Cornouailles,  en- 
gendrent une  très-petite  quantité  de  fumée. 

DEUXIÈME    CATÉGORIE. 

La  seconde  catégorie  comprend  les  systèmes  de  four- 
neaux ,  qui ,  pour  diminuer  la  quantité  de  combustibles , 
et  pour  consumer  la  fumée,  font  arriver  un  courant  d'air 
dans  les  carneaux  ou  dans  la  cheminée. 

Procédé  de  WiUiams  Thompson. 
Nous  citerons  en  première  ligne  Finvention  pour  laquelle 


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-  67  — 

M.  Williams  Thompson ,  de  Bow-Lane ,  prit  une  patente 
en  1796  ;  elle  consiste  dans  l'admission  d'un  courant  d'air 
derrière  Tautel ,  à  l'effet  de  brûler  la  fumée.  C'est  le  pre- 
mier projet ,  fondé  sur  ce  principe ,  qui  paraisse  avoir  été 
mis  à  exécution.  Des  patentes  furent  accordées  plus  tard 
à  Scheffield  Gregson  et  autres ,  pour  diverses  modifica- 
tions insignifiantes  apportées  au  système.  Il  y  avait  une 
grande  difficulté  à  proportionner  la  quantité  d'air  à  ad- 
mettre indépendamment  de  celle  que  réclamait  l'alimen- 
tation du  feu*  En  effets  quand  le  fourneau  venait  d'être 
chargé  de  charbon ,  il  se  produisait  plus  de  fumée,  et  une 
admission  d  air  plus  considérable  devenait  nécessaire  pour 
sa  combustion.  Si  donc  le  registre  du  soupirail  à  air  était 
réglé  de  manière  à  fournir  la  quantité  d'air  voulu,  l'ou- 
verture du  registre*  n'était  plus  convenable  quand  la  fumée 
avait  diminué.  Ainsi,  à  moins  que  le  chauffeur  ne  fut  ca- 
pable d'une  attention  plus  soutenue  qu'on  ne  peut  l'espérer 
dans  la  pratique ,  la  quantité  d'air  admise  dans  le  foyer 
était  généralement  ou  trop  grande  ou  trop  petite,  ce  qui 
entravait  la  marche  de  la  combustion. 

Régulateur  de  Murray. 

M.  Murray ,  de  Leeds ,  a  inventé  un  mécanisme  très- 
ingénieux  qui  sert  à  régler  l'ouverture  du  soupirail ,  afin 
de  faire  varier  l'admission  de  l'air  dans  les  proportions 
nécessaires.  Ce  mécanisme  a  été  décrit  dans  le  London 
Journal  de  l'année  1H21.  Dans  ce  système,  l'air  nécessaire  à 
la  combustion  de  la  fumée  pénètre  par  un  tube  muni  d'une 
valve  à  étranglement.  Cette  valve  s'ouvre  lorsqu'on  ouvre 
la  porte  du  foyer  par  suite  d'une  liaison  convenablement 


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—  68  — 

établie  ;  elle  se  ferme  au  moyen  d'une  roue  à  girouette 
faisant  l'office  d'un  régulateur  à  fumée.  Là  girouette  est 
mise  en  mouvement  par  le  courant  d*aif  qui  traverse  le 
tube  pour  se  rendre  dans  le  foyer  ;  et  |  en  tournant ,  elle 
tend  à  fermer  la  valve.  Lorsque  la  porte  du  foyer  est  ou- 
verte et  la  grille  chargée  de  charbon  ,  la  valve  s'ouvre 
comme  nous  Tavons  dit,  et  livre  passage  à  une  quantité 
d*air  suffisante  ;  mais  Tair ,  en  entrant ,  fait  tourner  la 
roue  y  et  ferme  graduellement  la  soupape  à  mesure  que  la 
fumée  diminue;  de  sorte  que,  au  moyen  d'un  mécanisme 
bien  approprié  à  là  qualité  du  charbon  employé  et  à  la 
quantité  introduite  à  chaque  fois ,  on  peut  arriver  à  régler 
l'admission  d'air  avec  un  assez  grand  degré  d'exactitude. 

Régulateur  de  Pritchard. 

M.  Pritchard,  de  Leeds,  se  proposa,  dans  la  même 
année ,  d'atteindre  le  même  résultat  que  H.  Hturray  au 
moyen  d'un  piston  descendant,  sous  l'action  delà  gravité, 
dans  un  cylindre  à  air ,  muni  d'un  petit  orifice  qui  lais- 
sait sortir  lair  en  quantité  nécessaire  pour  obtenir  la  vi- 
tesse du  piston  qui  serait  en  rapport  avec  la  quantité  d'air 
à  introduire  dans  le  carueau.  La  remonte  de  ce  piston  est 
probablement  occasionnée  par  l'ouverture  de  la  porte  du 
foyer. 

C'est  une  véritable  cataracte  des  machines  à  vapeur  à 
simple  effet  de  Cornouailles. 

En  1844,  M.  Debette,  ingénieur  des  mines,  a  expéri- 
menté, sous  la  direction  de  M.  Combes,  aux  frais  de 
l'État,  le  $}-stème  de  Williams  Thoinpson ,  dans  deux  éta- 
blissements de  Paris.  Voici  l'extrait  de  ces  opérations  : 


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—  69  - 

1.''  Fourneau  de  VmÈrepôt  dei  markres. 

La  chaudière  étail  cylbdriquo,  à  deux  bouUIeors  en 
tôle,  timbrée  pour  une  pression  de  8  atmosphères,  pré- 
sentant une  surface  de  chauffe  de  1 5  niètres  carrés. 
La  sur&ce  de  la  grîUe  était  de  0,6525  ■°-  ^* 
La  somme  des  vides  entre  les  barreaux  de  0,165  "■•  ^' 
La  cheminée  en  briques  élait  conique,  de  la  hauteur  de 
20  mètres. 

La  section  de  son  orifice  supérieur  était  de  0,  "*  19& 
On  ménagea,  dans  la  partie  du  massif  de  maçonnerie 
du  fourneau,  comprise  entre  la  grille  et  la  cheminée,  au- 
dessous  des  bouilleurs  de  la  chaudière ,  un  vide  intérieur 
ou  chambre  à  air ,  qui  fut  recouverte  par  des  plaques  en 
fonte  percées  de  trous.  Elle  communiquait  avec  l'air  exté- 
rieur par  un  tuyau  en  fonte  de  0,"^*  16  de  diamètre. 

Afin  d'apprécier  le  degré  d'influence  qu'exerçait  la  dif-  > 
fusion  de  l'air  introduit  par  un  grand  nombre  de  trous  et 
obtenir  un  terme  de  comparaison  avec  un  mode  d'intro- 
duction plus  simple ,  deux  conduits  furent  ménagés  dans 
l'épaisseur  de  la  maçonnerie,  un  de  chaque  côté  de  la 
grille;  ils  s'ouvraient  sur  le  devant  du  fourneau,  à  droite 
et  à  gauche  des  portes  du  foyer,  et  débouchaient  au-delà 
de  Tautel,  à  0,"*  195  au-dessus  du  niveau  de  b  grille; 
l'entrée  de  chacun  de  c^s  ouvreàux,  à  l'avant  du  fourneau, 
était  un  rectangle  de  0,*"- 13  de  base,  sur  0,"*  11  de  hauteur; . 
leur  débouché  derrière  la  grille  était  également  un  rec- 
tangle de  0,  ^'  195  de  base  sur  0,  "-  065  de  hauteur.  L*air 
pénétrant  par  ces  conduits  jaillissait  ainsi  en  lames  minces 
des  deux  côtés  opposés  du  fourneau,  dans  une  direction 
perpendiculaire  au  courant  des  produits  gaseux  de  la 


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—  70  — 

combustion.  La  section  du  débouché  de  Tair  par  les  deux 
conduits  était  de  254  centimètres  carrés  ;  c'est  un  peu 
moins  que  le  sixième  de  la  somme  des  vides  existant  en* 
tre  les  barreaux  de  la  grille.  Ces  conduits  pouvaient  être 
fermés  à  volonté  par  des.  briques  munies  de  poignées  en 
fer. 

On  brûlait  sur  la  grille  de  42  à  92,7  kilogrammes  de 
houille,  suivant  l'activité  du  feu. 

Cela  correspond  à  : 

l.<*  De  0,66  à  1,42  kil.  de  houille  par  décimètre  carré 
de  sur&ce  de  grille  ; 

2.®  De  2,65  à  5,74  kil.  par  décimètre  carré  du  vide 
compris  entre  les  barreaux  de  grille  ; 

S.""  De  2,19  à  4,74  kil.  par  décimètre  carré  de  lair  de 
Torifice  supérieur  de  la  cheminée,  par  heure  de  chauf- 
fage. Chaque  charge  se  composait  de  13  kil.  de  houille  en 
moyenne. 

Les  premiers  essaies  démontrèrent  que  Faction  de  lair 
introduit  par  les  ouvreaux  ménagés  des  deux  côtés  de  la 
grille.»  était  au  moins  aussi  efiicace  pour  brûler  la  fumée 
que  celle  de  Tair  introduit  par  les  trous  des  plaques  de 
fonte.  En  conséquence,  dans  les  expériences  ultérieures, 
Tair  fut  toujours  introduit  par  les  ouvreaux,  et  le  tuyau 
mettant  la  chambre  à  air  en  communication  avec  l'atmos- 
phère ,  fut  tenu  constamment  fermé. 

Lorsque  les  ouvreaux  adducteurs  de  l'air  étaient  fer- 
més, la  cheminée  émettait  une  fumée  noire  et  épaisse  « 
immédiatement  après  la  charge  et  après  le  ringardage. 
La  fumée  s'éclaircissait  graduellement,  à  mesure  que  la 
houille  était  brûlée  ou  transformée  on  coke ,  et  finissait 


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—  71   ~ 

par  devenir  ualle.  La  moyenne  des  observations  a  donné 
les  résultats  suivants  : 


GOHBUSTIOff 

LBlfTB 

produisant  une  évaporation 


de  24  à  30  kilog. 


14  kilog. 


d'eau  par  un  mètre  carré  de  surface 
de  chauffe  et  par  heure. 

Dans  l'espace  d'une  heure  on  a  remar- 
qué l'émanatioa  de  la 


Fumée  noire  pendant.. 

Fumée  légère  id* 

Fumée  nulle 


Total  du  temps    de 
comparaison...... 


18  \/1  minutes. 

14  i2 

27 

60  minutes. 


2  1/2  minutes. 
10 

47 

60  minutes. 


Si  Ton  ouvrait  les  carneaux  adducteurs  de  Tair  au  mo- 
ment où  la  fumée  était  la  plus  noire,  on  voyait,  par  le 
regard  ménagé  à  la  partie  postérieure  du  fourneau ,  les 
particules  charbonneuses  qui  chargeaient  le  courant  de 
gaz  et  le  rendaient  entièrement  opaque ,  s'enflammer  im- 
médiatement par  le  mélange  de  l'air  atmosphérique,  de 
sorte  qu'une  flamme  longue  et  brillante  succédait  brus- 
quement à  Tobscurité.  La  cheminée,  une  fois  purgée  de 
la  fumée  dont  elle  s'était  remplie  pendant  que  les  carneaux 
étaient  fermés,  ne  dégageait  la  fumée  noire  que  pendant 


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—  72 


une  minute,  k  fumée  légère  jaunâtre  pendant  25,  et  la  fu- 
mée invisible  pendant  34  ,  en  prenant  toujours  une  heure 


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—  75  — 

qu*a?aDi  la  charge  suivante  il  s'élevait  à  17  2/3  m.  cub. 
Parles  ouvreaux,  il  arrivait ea quimtité de  11  1/3  m* cub. 
euviroo  par  minute.  Ce  qui  dpnne  en  moyenue  une  con- 
soromatioa  d  ur  de  20  1/3  m*  cub.  environ  par  kilogramme 
de  cbarboQ  brûlé  avec  une  combustion  d'ii^tensité  paie- 
ment moyenne. 

IjSl  quantité  d*eau  évaporée  par  kilogramnte  de  bouiUe 
brûlée  peut,  être  comprise  psur  ce  taMeau. 


COMBUSTION  LëUTB. 

GOMBOSTIOM  AGTiVfi. 

GUVREàUX,  govusaux 

FIRMES.              OUTSETS* 

OUVKBAUX 

F£Elf£S. 

OUVBEA(iX 

0CV£KTft. 

5,  k.  371     j     4,k.  874 

5  k  5  ,  30 

5k.  k5,k.30 

On  y  voit  qu'il  n'y  a  pas  de  différence  considérable 
entre  les  quantités  d'eau  va|K>risées  par  la  combustion  d'une 
même  quantité  de  hoyiUe ,  suivant  que  ks  ouvre«ux  ad- 
ducteurs de  l'air  étaient  tenus  ouverts  ou  Sârmés,  bien 
que,  dans  le  premier  cas,  la  quantité  d'air  introduite  fut 
beaucoup  plus  considérable.  Il  devait  donc  s'opérer  une 
compensation  entre  la  chaleur  développée  par  la  combus- 
tion de  la  Aiinée  et  b  déperdition  de  chaleur  occasion^ 
née  par  Técoulement  d'une  plus  grande  quantité  de  gaz 
échauffé. 

2.>'  Manufacture  des  tabacs  à  Paris. 

Pendant  les  expériences  &i(es  ultérieurement  à  la  ma- 
n(\(acture  des  tabacs  ,  on  à  été  obligé  de  brûler  plus  que 


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—  74  — 

7  kilog.  de  charbon  de  terre  par  décimètre  carré  de  la 
surface  supérieure  de  cette  cbeminée,  pour  foire  fonctionner 
convenablement  le  moteur.  Dans  le  but  de  faire  varier  à 
volnnti^.  Ia  vnlnnne  d'air  atmosnhérinue .  on   fit  appîvi^r  r-ftt 


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—  76  — 

gazeux  du  foyer  sans  déterminer  la  combustion  de  la  fu- 
mée ,  refroidissait  le  courant ,  et  diminuait  le  tirage  et  la 
quantité  d'air  aspiré  à  travers  la  grille.  Ces  phénomènes 
étaient  d'autant  plus  visibles,  que  la  quantité  d'air  affluant 
par  les  ouvreaux  était  plus  considérable,  et  il  fut  même 
impossible  de  soutenir  une  marche  continue  avec  tous  les 
ouvreaux  constamment  ouverts  :  le  courant  refluait  quel- 
quefois vers  les  portes  du  foyer  quand  on  les  ouvrait. 

Il  résulte  de  ces  remarques  que  le  défaut  du  tirage  est 
dû  à  Fexiguité  de  la  section  supérieure  de  la  cheminée 
comparativement  à  la  quantité  de  combustible  sur  la 
grille. 

Fourneau  Lefroy. 

Vers  Tan  1830,  M.  Lefroy,  ingénieur  en  chef  des  mines, 
a  été  chargé  de  faire  construire  un  fourneau  pour  la  des- 
^cation  du  ciment  romain ,  opération  qui  se  réduit  à  sou- 
mettre la  matière  avariée  à  une  forte  température,  pour 
en  dégager  l'eau  et  le  peu  d'acide  carbonique  qu'elle  a  ab- 
sorbé par  suite  d'une  longue  exposition  dans  un  lieu  hu- 
mide. Pour  effectuer  ce  travail  au  meilleur  marché  pos- 
sible ,  il  s'est  proposé  de  brûler  la  fumée  sortant  du  foyer, 
et  à  cet  effet  il  a  combiné  un  fourneau  comme  suit  : 

Le  ciment  à  revivifier  se  mettait  dans  une  moufle  très- 
allongée,  chauffée  seulement  à  sa  surfoce  extérieure  par 
des  cameaux  qui  Tenveloppaient.  La  chauffe  était  placée 
en  avant  et  sur  le  côté  de  la  moufle  ;  le  point  de  serre- 
ment pour  opérer  le  mélange  immédiat  de  l'air  atmosphé- 
rique avec  lu  fumée  était  pratiqué  à  l'entrée  des  carneanx 
inférieurs ,  au  sortir  du  foyer;  ainsi ,  c'est  l'ouverture  par 
laquelle  la  flamme  se  rendait  sous  la  moufle  qui  était  le 
point  d'étranglement. 


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—  7Ç  — 

L'admission  de  Tair  à  aptioa  périodique  se  Cjùsait  au 
moyen  de  trois  ouvertures  munies  de  registres  »  pratiqués 
sur  les  flancs  et  dans  la  partie  supérieure  de  la  chauffe  ; 


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n 


2.''  La  somme  des  espaces  libres  laissés  entre  les 
barreaux  de  la  grtUe ,  et  la  distance  d'un  barreau  à 
l'autre;  la  grandeur  de  la  grille  et  sa  position  relative; 

3.*  La  grandeur  de  la  section  de  chacune  des  colonnes 
d'ahr  atmosphérique  à  action  continue  et  intermittente; 

4.^  La  grandeur  de  la  section  du  point  de  serrement  ; 

Ont  établi  que  : 

Sur  une  grille  deO  m.,  14  en  contre-bas  du  point  de 
serrement ,  et  ayant  d'une  barre  à  Pautre  un  intervalle  de 
0  m. ,  025 ,  avec  une  intermittence  entre  les  charges  de  5  à 
6  minutes,  la  combustion  complexe  d'une  quantité  N  x  (16 
kilogrammes)  de  houille  peu  grasse  ou  sèche,  mais  à  flamme 
longue,  pouvait  avoir  lieu  dans  une  heure,  en  donnant  les 
dimensions  suivantes  : 


DÉGIMËTRES. 

GABUto 


pour 

16  kil. 

de  houille. 


pour 

10  kil. 

de  houille. 


!••  1  la  secliOQ  de  la  che- 
minée....  0,91  X  W 

'!.•  A  la  teclioo  de  la  co- 
loone  d*air  atmosp.  à  ac- 
tion cooiiQue 0;32  X  K 

3.<»  A  la  section  de  la  co- 
lontie  d*air  atmotp.  &  ac- 
tion périodique 0,14  X  ^ 

4.«  A  la  section  du  point 
de  tarremeot 0^14  X  N 


14,6 
5,1 

2.3 


9,1 
3.2 

1.4 
1,4 


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—  78  — 

On  a  aussi  trouvé  : 

l.*"  Que  dans  le  moment  de  la  charge  l'admission  de 
Tair  à  action  périodique  ne  devait  avoir  lieu  que  pendant 
une  à  une  demi  minute,  et  que  les  registres  de  ces  ouver- 
tures devaient  se  fermer ,  à  moitié  au  bout  d'une  demi 
minute,  au  2/3  au  bout  d'une  minute,  et  entièrement  au 
bout  d'une  minute  et  demie.  Même  on  a  reconnu  que 
l'ouverture  pratiquée  à  la  partie  supérieure  de  la  chauffe 
n'aurait  pas  d  effet  dans  certaines  circonstances ,  on  aurait 
donc  pu  la  supprimer  et  diminuer  ainsi  d'un  tiers  la  quan- 
tité d'air  intermittente. 

2.^  Que  ,  quand  on  fourgonnait  le  feu ,  il  suffisait  d'ou- 
vrir les  registres  à  moitié  pendant  une  minute  environ. 

En  plaçant  un  thermomètre,  à  air  comprimé,  dans  la 
partie  supérie?}re  de  la  cheminée ,  il  a  été  constaté  que 
la  température  de  l'air  chaud  qui  s'en  dégageait ,  s'élevait 
seulement  dans  le  moment  de  la  charge,  de  25  à  30  de- 
grés centigrades ,  tandis  que,  entre  les  deux  charges,  elle 
était  moyennement  de  245  degrés. 

M.  Lefroy  ajoute ,  qu'en  regardant ,  par  l'un  des  trous 
pratiqués  à  l'extrémité  des  carneaux  inférieurs ,  il  a  observé 
que  la  fumée  disparaissait  et  reparaissait  de  nouveau  par 
suite  de  l'ouverture  ou  la  fermeture  des  registres  adaptés  aux 
ouvertures  destinées  aux  passages  d'air  intermittent.  Il  en 
conclut  que  c'est  bien  au  point  de  serrement  que  s'opère  la 
combustion  de  la  fumée.  Il  me  semble  que  la  section  des 
ouvreaux  destinés  pour  l'admission  intermittente  d'air  était 
trop  grande ,  et  que ,  si  les  expériences  avaient  eu  poar 
but  la  recherche  de  la  quantité  comparative  du  combus- 
tible, elles  auraient  démontré  son  augmentation  à  cause  du 


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—  79  — 

refiroidissement  dans  les  carneaux,  augmenlation  qui  est 
d'ailleurs  démontrée  par  riodication  thermométrique  à  la 
partie  supérieure  delà  chemitiée.  Eofin,  M.  Lefroy,  par 
des  recherches  théoriques ,  à  l'aide  des  analyses  chimiques , 
est  arrivé  à  déterminer  que  la  fumée ,  qui  se  dégage  dans 
des  fourneaux  ordinaires,  peut  développer  28  centièmes  de 
la  quantité  de  chaleur  que  serait  susceptible  de  produire 
la  houille  brûlée  totalement.  Les  résultats  des  expériences 
de  M.  Combes  sont  de  nature  à  guider  les  industriels  qui, 
par  leurs  recherches,,  voudraient  arriver  à  une  solution 
complète  du  maximum  de  l'économie  qu'on  puisse  atteindre 
en  consumant  cette  matière  floconneuse. 

Fourneau  Cartereau. 

Il  y  a  environ  deux  ans  que  M.  Cartereau  aîné  a  été 
breveté  à  Paris  pour  une  combinaison  de  fourneau  très- 
ingénieuse.  La  disposition  de  son  foyer  est  la  même  que 
celle  qu'on  adopte  ordinairement,  sa  grille  est  sensible- 
ment inclinée  vers  un  premier  autel  nommé  faux-autel, 
qui  forme  l'arrière  du  cendrier,  et  contre  lequel  elle  s'ap- 
puie. Cet  autel  est  élevé  de  manière  à  ne  laisser  à  la 
flamme  qu'un  passage  égal  au  tiers  environ  de  la  distance 
de  la  grille  aux  bouilleurs.  Sur  son  sommet  vient  s'appuyer, 
en  se  recourbant ,  une  plaque  en  fonte  percée  d'une  quan- 
tité de  petits  trous  placée  presque  horizontalement  dans 
Tintérieur  du  fourneau,  et  formant  ainsi  avec  lui  une  ca- 
vité inférieure  dite  chambre  chaude  sur  toute  la  largeur 
du  fourneau  à  un  tiers  enTiron  de  sa  longueur;  son  bord 
postérieur  s'appuie  sur  le  sommet  d'une  cloison  qui  li- 


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—  80  — 

mite  cette  chambre  (1).  A  une  certaine  distance  de  cette 
cloison  s'élève,  depuis  la  sole  jusqu'aux  bouilleurs,  une 
cloison  en  briques  réfractaires  nommée  Tautel  proprement 
dit;  elle  est  percée ,  depuis  sa  base  jusqu'au  deux  tiers 
de  sa  hauteur,  de  trous  dont  les  sections  correspondent 
avec  celles  des  cameaux  dé  la  chaudière.  Une  troisième 
chambre  communiquant  avec  la  première  par  sa  partie 
supérieure  se  trouve  ainsi  renfermée  de  trois  côtés  par  la 
sole,  la  cloison  delà  chambre  chaude  et  celie  que  nous 
venons  de  citer.  Les  trous  de  cet  autel ,  qui  se  trouve  en- 
viron vers  le  milieu  de  la  longueur  de  la  chaudière ,  com- 
muniquent directement  avec  le  cameau  qui  circonscrit  la 
chaudière. 

Lorsque  la  fumée,  en  s'éloignant  du  foyer,  a  dépassé 
le  faux-autel  et  le  dessus  de  la  plaque  crible,  elle  rencontre 
la  cloison  qui  coupe  sa  marche  directe,  et  la  force  à  se 
renverser  dans  Tintérieur  de  la  troisième  chambre  pour 
s'échapper  par  les  trous  de  cette  cloison  ;  c'est  au  moment 
de  ce  renversement  qu'elle  subit  Tinfluence  du  procédé  de 
M.  Cartereau.  La  chambre  chaude  est  destinée  à  échauffer 
l'air  avant  qu'il  ne  passe  à  travers  la  plaque  crible ,  pour 
ajouter  une  nouvelle  quantité  d'oxygène  nécessaire  à  la 
combustion  des  parcelles  charbonneuses  qui  se  sont  échap- 
pées de  la  grille  sans  être  atteintes  par  le  courant  d'air. 

L'introduction  d'air  dans  la  chambre  chaude  est  &ci- 
litée  par  deux  tubes  d'un  diamètre  proportionné  à  la  force 


(i)  La  chambre  chaude  n'est  catre  chose  que  la  chambre  k  air 
de  la  disposition  de  OiM,  Débatte  et  Combes,  du  Sonmeaa  de  Ten- 
trepôt  de  marbres. 


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—  M  — 

da  générateur  que  t^on  place  àun^  le  cendrier,  de  telle 
sorte  que  l'un  des  orifices  soit  en  communication  avec  l'air 
pmh  l'avant  du  faurneau,  et  que  l'autre  pénètre  à  travers 
la  cloison  des  briques  dans  Tîntérieur  de  la  chambre 
cbaode.  Des  Tegistres ,  dont  chacun  de  ces  tobes  est  muni , 
aervent  à  régkr  le  passage  de  l'air. 

L'appel  de  l'air  dans  fa  chambre  chaude»  est  d'autant 
plus  énergique  que  la  température  de  cette  chambre  se 
trouve  constamment  maintenue  à  un  degré  trës-élevé  par 
l'aetien  de  la  flamme  du  foyer  qui  se  renverse  le  long  des 
{Mirois  de  la  plaque  crible,  il  s'ensuit  qu^eix  sortant  des 
tubes  qui  hii  oui  donné  passage,  l'air  se  dilate  avec  rapi- 
dité et  acquiert  un  volume  considérable  qui  jfeciltte  son 
égale  f^Mfftition  par  la  nombreuse  quantité  de  trous  dont 
la  plaque  eat  peroée;  puis  il  se  mèie  avec  ia  flamme ,  et  en 
passant  enseaoble  à  travers  les  ouvertures  de  l'autel ,  qui 
sont  autant  de  carneaux  brûlants,  son  oxygène  achève  la 
eombostion  des  molécules  charbonneuses  de  la  fumée. 
Nous  manquons  dé  données  positives  sur  tes  résultats  de 
Ywpçikttàcm  de  ce' procédé. 

Nous  présumons  que  sa  construction  ofl^e  quelques 
diaiiees  âiverables  à  ia  feunostté  et  à  l'économie  de  com- 
bustibles, mais  nous  croyons  qu'pile  est  impraticable  dafis 
rindustrie  ordinaire  à  çausedesa  oomplication  et  de  Tim- 
possibilité  de  la  eonaerviition  intégrale  de  ses  détails. 
D'aillenrs ,  dans  .no&eonclasiens,  nous  donnerons  les  ob- 
servations qui  sant  appltcaUes  à  tous  les  procédés  de 
cette  catégorie.  : 

Fùuniiàii  de  Çhwf1$$  Wf/e  WiOiam. 

Le  foyer  Carnivore  dç  M.  Charles  WyeAViUiims  a  été 

6 


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—  82  •— 

^,  il  y  a  quelques  années,  avee  le  plus  grand  re- 
tentissement. 
Messieurs  Debette  et  Combes  ont  appliqué  «  en  1844, 


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—  85  — 

foyer  de  droite  pataait  devant  le  cendrier  du  foyer 
ganche. 

A  ce  fourneau,  on  a  adapté  un  appareil  du  système  de 
M.  Gb.  Williams  Wye ,  en  choisissant  la  disposition  qui  pa- 
raissait la  plus  appropriée  à  sa  forme.  Cet  qipareil  se  com- 
posait de  : 

t.*  Un  tuyau  de  prise  d'air  en  fonte  ayant  0  m.  28  de 
diamètre,  et  traversant  le  cendrier  de  droite,  son  extrémité 
qui  débouchait  dans  ratmoqphère  était  terminée  jpar  un 
èraaement  de  forme  rectangulaire  propre  à  recevoir  un  re- 
gistre; l'autre  extrémité  était  ouverte  dans  une  chambre  à 
air  ménagé  dans  le  massif  de  maçonnerie  du  fourneau ,  der- 
rière le  cendrier  et  Tautel. 

2.®  Trois  plaques  en  fonle,  assemblées  à  feuillures, 
recouvrant  la  chambre  ci-dessus  et  placées  au  niveau  des 
grilles. 

3.»  Quatorze  tuyaux  prismatiques  à  6  pans,  dont  deux 
étaient  ei^gés  dans  le  mur  de  refend  qui  séparait  la  sole 
en  deux  compartiments;  ces  tuyaux  étaient  coiffés  de  cha- 
peaux pleins,  et  étaient  percés  sur  leurs  fiices  latérales  de 
trous  de  15  millimètres  de  diamètre,  par  lesquels  Fair  at- 
mosphérique ,  arrivant  de  la  chimibre  située  aunlessous  des 
prismes,  se  répandait  dans  l'intérieur  du  fourneau  et  se  mê- 
lait aux  produite  gaaeux  de  la  combustion  de  la  houille. 
Lea  chapeaux  de  ces  tuymix  se  trouvaient  à  0  m.  35  en 
contre-bas  du  fond  de  la  chaudière. 

L'empbi  de  cet  appareil  a  produit  une  augmentation 
dans  la  consommation  de  combustible  et  pas  de  dinmiuiion 
sensible  dans  la  quantité  de  fomée;  les  gaz  non  brûlés  pro- 
venant de  la  combustion  imparfeite  de  la  hooiUe  ne  s'en- 


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—  SA  — 

flamimient  que  d'une  maaière  itieeniplète  au-desbus  de  la 
sole,  et  s'éteignaient  totalement  à  leur  entrée  dans  le  todbe 
îmérieur  en  tôle;  tonte  la  flamme  cessait  d'ailleurs  de  pa- 
raître lors  du  ehapireiBfint  du  emnbustibie  sur  les  srilles. 


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—  85  — 

gnait  dans  le  compartiment  de  droite  à  cause  du  mapique 
de  tirage. 

5.**  Que  la  flamme  s^éteignait  complètement  en  eatrant 
dans  le  tuyau  horizontal  à  FintérieuF  en  tôle,  dont  les  pa- 
rois étaient  constamment  rafraîchies  par  le  contact  d^  l'eau 
de  la  chaudière. 

D'après  M.  Combes,  la  différence  si  grande,  entre  Ips  ré- 
sultats qui  précèdent  et  ceux  qu'on  a  obtenus  à  F£ntf  epôt 
des  marbres,  doit  être  attribuée  au  défaut  du  tirage  d^  à  de 
trop  petites  dimensions  de  la  cheminée  et  à  la  disposition 
du  fourneau.  Il  appuie  son  opinion  sur  ce  que  la  timée 
s'enflammait  et  se  brûlait  partiellement  daais  la  chaufTe  de 
gauche,  tandis  qu'elle  ne  s'enflammait  pas  du  tout  d^ns  la 
chaufFe  de  droite,  où  le  tirage  était  moins'  actif  qi^e  ckns  la 
première.  Nous  ajouterons  que«  dans  cette  disposition  du 
fourneau,  Timpossibilité  de  régler  la  quantité  d'air  ad- 
mis dans  les  cendriers  était  tipès-pré|udiciable  pour  cette 
étude. 

En  comparant  les  dimensions  du  fourneau  et  de  1^  che- 
minée de  Chaillot  à  celles  du  fourneau  et  de  la  chemioée  de 
l'Entrepôt  des  marbres,  on  arrive  aux  résultats  saWants  : 


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86  — 


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—  87  — 

quantité  de  bouille  brûlée  et  aux  autres  dimensions  du  four- 
neau ,  une  section  beaucoup  plus  petite  que  celle  de  l'en- 
ttepbt  des  marbiies  ;  une  quantité  d'air  beaucoup  moindre 
passait  dans  le  foyer  pour  une  même  quantité  de  char- 
bon brûlé,  et  le  tirage  de  la  cheminée  était  probablement 
insuffisant  pour  amener  derrière  la  grille ,  par  le  tuyau  de 
fente ,  un  volume  d'air  suffisant  pour  la  combustion  com- 
]dète  de  la  fumée.  Tdie  est  la  cause  qui  parait  avoir  prin- 
cipalement contribué  an  résultat  négatif  des  essais  tentés 
à  Chaillot. 

Il  est  à  désirer  que  les  expériences  sur  ce  système  de 
l'appareil  fumivore  soient  reprises,  celles  que  nous  venons 
de  rapporter  fourniront  aux  expérimentateurs  les  données 
nécessaires  pour  leur  efficacité. 

Fourneau  d'Argaud  de  WUUams. 

On  a  frit  récemment  des  expériences  à  Saho  afin  d'é- 
prouver l'efficacité  d'un  fourneau  de  M.  C.  Williams ,  dit 
fourneau  d'Argaud.  Ce  fourneau  était  destiné  à  produire 
la  combustion  de  la  fumée  au  moyen  de  l'admission  d'un 
courant  d'air  dans  le  conduit  de  la  cheminée,  percée  à  cet 
effet  d'un  certain  nombre  d'ouvertures.  La  chaudière  or- 
dinaire qui  était  en  usage  à  Saho,  fut  chauffée  avec  de  la 
houille  d'une  certaine  qualité ,  pendant  une  période  de 
quatre  mois  ;  on  nota  avec  soin  l'effet  obtenu  et  la  cùù- 
sommation  du  combustible.  On  appliqua  ensuite  les  per- 
fisctionnements  de  M.  Williams  en  employant  la  même  es- 
pèce de  houille ,  en  conservant  le  même  chauffeur ,  et  en 
rendant  toutes  les  autres  circonstances  aussi  identiques  que 
possible.  Ce  fiit  à  la  suite  de  cet  essai  comparatif  que 


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—  88  — 

MM.  BoUltea  et  Walt  eonstatèneot  que  la  cûUsèniiiiaftîon 
du  combustible ,  loin  d'avoir  dimioué ,  s*é(ait  accrue  d'un 
demi-kilogramme  par  heure  pour  cheval  de  vapeur.  Le 
fourneau  primitif  qui  était  muni  d'un  plateau  an  avant  de 
la  grille  du  foyer,  d'après  lé  plan  ordinaire  de  MM.  Boul- 
ton  et  Watt ,  ne  produisait  pas  de  fumée  ;  dans  le  sgralème 
de  M.  Williams,  au  contraire,  il  se  produisait  quelquefois 
une  assez  grande  quantité  de  ftimée.  D'après  la  disposi- 
tion du  fourneau,  c'est  le  refroidksement  des  gaz  com- 
bustibles qui  empêche  leur  combinaison  avec  ToxygèDe. 

John  Chanter. 

De  toutes  les  personnes  qui  ont  fait  des  recherches  dans 
le  but  de  brûler  la  fumée  ,  il  n'en  est  pas  une  seule  qui 
se  soit  livrée  à  cette  étude  avec  autant  d'opiniâtreté  que 
que  M.  John  Chanter.  Un  grand  nombre  de  patentes  lui 
ont  été  accordées  pour  difierentes  espèces  de  fourneaux  ; 
et,  en  effet,  ses  méthodes  varient  si  fréquemment,  qu'il 
est  bien  difficile  de  s'en  former  une  idée  exacte.  11  est 
même  douteux  que  M.  Chanter  puisse  se  reconnaître  dans 
la  multitude  de  ses  inventions  qui  ne  présentent  pas  de 
chances  de  succès  dans  la  pratique. 

L'emploi  de  la  vapeur. 

Une  patente  a  été  prise  en  1824  ,  par  M.  Evans,  pour 
faire  disparaître  les  inconvénients  de  la  fumée  par  le  moyen 
de  Tadmission  de  la  vapeur  d*eau  dans  l'intérieur  du  four- 
neau. Ce  procédé  a  été  l'objet  de  beaucoup  d'essais  :  il  a 
été  appliqué  dans  les  usines  à  gaz  d'Edimbourg ,  il  y  a 
quelques  années ,  par  M.  Nasmyth,  de  Patrlooff,  et  remis , 
plus  tard  ,  en  vigueur,  par  M.  Ivîson.  Mats  noua  ne  pré^ 


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—  89>  — 

Yoyoos  pas  qu#.  ra^ifisiop  de  U  vapeur  ^arimérieutf 
du  fourneau»,  ou  dans  le  e0^(liw^{>ai$8ej9i«ai&  être  avimia- 
geuse ,  quant  à  son  emptoi»  |hwi{  la  ddsUuciion  deda  ^aaiée, 
bien  qu'il  puisée  en  èire  au|pe«»efi(  dana  d'aulma  ciroons- 
taoces.  En  effet,  la  Tapeur  par  son  contact  Avee  la  Aimmef 
qui  ne  peut  exiater  qu'à  la  tempéri^tui!^  aMpérieuffe-à  celie; 
de  SOG*"  centigrades  )  diminue  son*  iolensité,  et  aftiblît: 
sa  capacité  rayonnante ,  qui  produit  à  égale  température , 
trois  fois  autant  de  chaleur  que  le  courant  d*air  chaud.  Elle 
peut  même,  parfois,  éteindre  la  flamme  et  baisser  telle- 
ment la  températiffe  du  fiiélâpge  que  les  flocons  charbon- 
neux humides  s'attachent  aux  parois  mouillées ,  soit  de  la 
cheminée ,  soit  des  carneaux,  soit  même  de  l'extrémité  de 
la  chaudière.  Il  en  résulte  une  perte  notable  de  chaleur 
pour  évaporer  cetle  enu  chaque  foia  qi^etta  se  condease. 

Généralement ,  dans  les  maobines  à  haute  pression  et 
sans  condensation  «  comme  celle  des  Jipcomc^tlves ,  où  les 
conduits  de  chaleur  sont  peu  développés,  ou  utilise  la^  va- 
peur sortant  des  cylindres  pour  augmenter  le  tirage  des 
cheminées.  Hais ,  si  on  prend  cette  vapeur  dirjectement 
dans  le  générateur  «  les  frais  de  sa  formation  dépassent 
le  bénéfice  produit  par  l'augmentation  de  tirage. 

En  général»  l'eau  qu'on  met  souvent  dans  le  cendrier», 
eu  s'évaporisant  doucement  et  sans  frais  par  les  escarbilles 
embrasées  »  ralentit  la  détédorfttion  de  la  grille ,  et  em- 
pêche une  certaine  quantité  de  la  poussière  du  cbarbon 
de  terre  de  tomber  dans  le  cendrier  ayanl  d'être  brûlé. 
4a-delà  de  cette  action  »  Q0.U6  ne  connaissons  p^  d'autres- 
avantagea  à  son  emploi ,  car ,  si  ujae  portion  de  cet^e  e^, 
se  décoa|pos^  par  la  b^u^  température  qui  existe  au- 


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—  90  — 

dessus  de  la  grille  «  il  y  a  autant  de  chaleur  absorbée  par 
sa  décomposition  ,  qu'il  y  en  a  de  dégagée  dans  sa  for- 
mation par  suite  de  la  combustion  de  rhydrogène. 


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~  91  — 

Uté,  et  tantôt  nous  avons  émis  la  nAtre.  CSen  de  b  se*- 
conde  catégorie ,  présentant  tous  un  inconvénient  du  môme 
genre,  noos  le  défvelopperons  ici  brièvement. 

Si  leurs  soupiraux  sont  en  foi^  ou  fer,  ils  sont  bientôt 
brûlés  ;  s'ils  sont  en  briques  réfractaires,  ils  sont  exposés 
à  être  brisés,  quand  on  nettoie  les  carneaux;  et  même 
dans  les  fourneaux  de  bateaux  à  vapeur,  qui  sont  très- 
rétrécis  ,  ils  sont  fréquemment  démolis  par  le  ringard  du 
chauffeur.  Il  fimt  aussi  remarquer  que  la  portion  de  la  chau- 
dière ,  qui  est  plus  directement  exposée  à  l'action  de  ces 
soupiraux ,  est  soumise  à  de  nombreuses  alternatives  de 
chaud  et  de  froid  ;  car,  lorsqu'il  y  a  une  grande  produc- 
tion de  fumée  dans  le  fourneau,  cette  fumée  s'enflamme 
vivement  au  point  où  elle  rencontre  le  courant  d'air,  et 
c'est  alors  de  la  flamme  qui  vient  porter  contre  la  portion 
correspondante  de  la  chaudière,  tandis  que  s'il  y  a  peu 
ou  point  de  fumée,  le  courant  d'air  refroidit  la  même  por- 
tion. La  tôle,  soumise  alternativement  à  ces  deux  actions 
contraires,  souffre  plus  que  dans  les  chaudières  ordinaires, 
^  il  est  arrivé  bien  des  fois  que  des  chaudières  se  sont 
crevassées  et  ont  été  mises  hors  d'usage  par  la  cause  que 
nous  venons  de  signaler.  Il  est  encore  douteux  si  l'explo- 
sion qui  a  eu  lieu,  il  y  a  peu  de  temps,  dans  Tusine  de 
Bfooke,  à  Bolton,  n'est  pas  due  à  l'altération  de  la  chau- 
dière, provenant  de  cette  action  nuisible  d'un  fourneau 
de  Williams ,  sur  lequel  la  chaudière  se  trouvait  placée. 

Ce  système  de  la  conobustion  a  tant  eu  d'admirateurs , 
que  nous  avons  jugé  opportun  de  soumettre  à  leur  atten- 
tion les  inconvénients  qu'il  peut  présenter.  Cependant, 
nous  ne  voulons  pas  le  condamner  aussi  sévèrement  qu'il 


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—  9S  — 

Taélé  patf  certobies  petaonnafi^lioBS  cnoyonsqa'on  pourrait 
dÎBiinner  etmitaifi  peut-être  éviter  ks  cau^de  la  prompte 
détérioration  des  ofaaudtères,  en  donnant  de  grandes  di- 
mensiûins  aux  fovers  et  en  dianosaiil  eoBvenaliIeaient  les 


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—  9f3  — 

ttents  qui  suivent  les  chargements  du  coïnbustrble  frais 
sur  la  grille,  est 'dû  prineipalefmentà  ce  que  i*air  ne  péiit 
alors  pénétrer  en  quantité  suffisante  à  ttravers  les  inter- 
stices existant  dans  la  masse  de  ce  combustible  qui  re- 
courre la  grille.  Peur  éviter  ou  en  nK)ins  diminuer  cette 
iutï^nstté  de  la  fuméej  il-fiiut  donner  k  la  grille  et  surtout 
au  vide  intérieur  de  la  cheminée  les  dimensions  iiéces- 
aaîres,  eu  égard  à  la  quantité  de  conubu^lible  brûlé  dans 
un  temps  donné ,  pour  que  le  passage  d'air  se  Ibsse  fiiei- 
lement ,  même  aUBsHAt  après  le  Chargement  de  la  grille. 

Règles  pour  établir  les  dimensions  des  fourneaux* 

M.  Combes,  dans  le^  conclusions  du  rapport  qu'il  a 
présenté  à  la  commission  centrale  des  machines  à-wipiBur, 
dans  la  séance  du  3  juillet  1846,  concernant  les  ei^pé- 
rieoces  dont  nous  avons  rapporté  les  extraits,  4pnne  les 
règles  suivantes  pour  la  construction  d'un  fourneau  qi|iiie 
produirait  que  très-peu  de  fumée.  La  sonmie.  des  vides 
compris  entre  les  barreaux  étant  le  quart  de  la  sur&ce  de 
la  grille,  la  surface  de  la  grille,  en  décimètres  carrés,  de- 
vrait être  égale  à  une  fois  et  demie  à  ta  quantité  de  houille 
à  brûler  par  heure,  exprimée  en  kilogrammes,  et  Tair  de 
rorifice  supérieur  de  la  cheminée  devrait  être  égal  à  la 
moitié  environ  de  la  quantité  de  houille  exprimée  eu  Lilp- 
grammes,  ou  bien  au  tiers  delà  surface  totale  de  la  grille; 
une  hauteur  de  20  mètres  et  même  probablement  upe 
hauteur  moindre  de  la  cheminée  serait  suffisante;  les^r- 
neaux  déviaient  d'aiHeurs  avoir  une,  section  à  peu  près 
égale  à  Tair  de  Torifice  supérieur  delà,  cheminée.  Ces  di- 
mensions coïncident  avec  cellçs  fue  M.  Peclet  a  données 
dans  son  traité  de  la  chaleur.  Si  Ion  voulait  avoir  le  tirage 


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—  94  — 

pins  grand ,  il  suffirait  d'augmenter  ia  aection  de  la  che- 
minée :  d'après  les  expériences  de  M.  Lefroy,  elle  pour- 
rait être  portée  jusqu'à  0«9  de  quantité  de  charbon  brûlé 
exprimée  en  kilogrammes. 

Dans  un  fourneau  qui  serait  construit  d'après  les  règles 
précédentes,  on  pourrait  brûler  «  par  heure,  une  quantité 
de  houille  à  peu  près  double  de  celle  qui  a  été  indiquée 
ci-dessus,  sans  produire  sensiblement  plus  de  fumée,  en 
ayant  recours  aux  dispositions  suivantes  :  Deux  conduits 
armés  en  fonte,  pouvant  être  facilement  changés ,  débou- 
cheraient à  0  m.  15  ou  0  m.  20  de  distance  en  arrière 
de  la  grille ,  de  &çon  à  ce  que  les  courants  d'air  jaillissent 
en  &ce  l'un  de  l'autre ,  dans  le  conduit  des  gaz  inférieurs 
à  la  chaudière,  suivant  des  directions  opposées  et  perpen- 
diculaires au  courant  gazeux  ;  le  débouché  de  ces  con- 
duits aurait  une  surface  totale  d'environ  un  sixième  de 
celle  des  vides  laissés  entre  les  barreaux  de  la  grille.  Il 
serait  convenable  que  ces  conduits  fussent  munis  de  re- 
gistres, de  manière  à  ce  que  l'entrée  de  l'air  pût  être  ré- 
glée à  volonté,  ou  même  interceptée.  Les  registres  seraient 
ouverts  à  l'aide  d'un  mécanisme  simple ,  au  moment  de  la 
charge  et  après  le  ringardage  ;  ce  mécanisme  les  fermerait 
graduellement,  en  sorte  que  le  courant  d'air  fût  totale- 
ment interrompu,  après  un  temps  déterminé  par  l'expé- 
rience, dans  chaque  cas;  et  lorsque ,  par  suite  de  la  con- 
version partielle  de  la  houille  en  coke,  le  dégagement  des 
produits  gazéiformes  résultant  de  la  distillation  de  la  houille 
aurait  été  ralenti,  en  même  temps  que  Tair  trouverait  un 
passage  suffisant  à  travers  les  barreaux  de  la  grille. 

La  distance  verticale  entre  la  sur&ce  de  chauffe  et  la 


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—  96  — 

grille  devrait  être  auflhante  pour  que  la  flamme  puisse  se 
développer  sans  être  refroidie  brusquement^  et  en  consé- 
qurnioe,  pour  qu'une  petite  portion  de  la  chaudière  ne  soit 
pas  exposée  aux  variations  subites  et  fréquenunent  réité- 
rées de  la  chaleur.  Par  la  même  raison  le  débouché  des 
soupiraux  devrait  se  trouver  le  plus  près  possible  de  la  sur- 
fiice  supérieure  du  charbon  en  combustion. 

Résumé  et  appréciation  des  procédés  fumvores. 

Dans  la  disposition  ordinaire  d'un  foyer  «destiné  à  con- 
sommer de  la  bouille  grasse,  il  est  convenable  pour  sa 
bonne  combustion  d'avoir  au  moins  recours  au  systènoie  de 
Watt,  qui  consiste  en  addition  devant  la  grille  d'une  pla- 
que en  fonte  sur  laquelle  la  houille  se  distille  avant  d'ôtre 
poussée  sur  la  grille. 

Nous  croyons  également  que  la  fumée  pourrait  être  pré- 
venue par  la  combinaison  de  deux  foyers  disposés  de  ma- 
nière à  ce  que  la  fiimée  développée  sur  l'un  deux  passU, 
soit  au-dessus ,  soit  à  travers  de  l'autre ,  au  moment  où  le 
combustible ,  dont  celui-ci  serait  chargé ,  serait  entièr^neat 
transformé  en  coke.  A  cet  effet ,  la  disposition  du  bateau 
à  vapeur  de  William  Fawcett  devrait  être  étudiée  avec  plus 
de  détails  qu'elle  ne  l'a  été. 

Lorsque  le  tirage  d'un  fourneau  est  insuffisant,  par 
suite  de  la  disposition  des  carneaux  ou  d'une  trop  fiiible 
section  de  la  cheminée ,  il  n'est  pas  possible  de  prévenir 
la  fdmnation  de  la  fumée  par  les  moyens  qui  viennent 
d*ètre  indiqué.  Plusieurs  constructeurs  ont  obvié  partiel- 
lement à  ces  inconvénients  pttr  l'emploi  de  ventilateurs 
soufflant  l'air  dans  les  ceodriers  fermés.  La  force  néces- 


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—  96  — 

sairepour  les  mouvoir  eftt  payée  et  an-cMà  par  la  idiminu- 
lion  de  comboatiblei  et  par  la  possibilité  ée  pouvoir  se 
servir  de  leur  qualité  la  plus  inftrieiire.  Mme  aïKMisniéiiie 
vu  quelques  chaudières  chauffées  avec  des  escarbilles 
provenant  d'antres  feurneaux,  à  l'aide  de  remploi  d'un 
ventilateur. 

L'énorme  diminution  de  la  température  de  l'air  chaud, 
sortant  de  la  cheminée  pendant  la  charge  du  foyer,  ob- 
servée par  U.  Lefroy,  et  une  foule  d'autres  remarques, 
nous  feurnissexit  roccasion  d'engager  l'emploi  d'un  méca- 
nisme propre  è  distribuer  le  charbon  de  terre  à  couvert 
au  fcr  et  à  mesure  qu'il  se  consume  sur  la  grille. 

•Suivant  M.  Combes,  le  dégagement  de  fumée  dans  la 
combustion  des  bouilles  grasses  peut  être  prévenu  par  Tu- 
sage  de  grilles  mobiles.  De  tous  les  appareils  de  ce 
genre  qui  ont  été  proposés,  à  notre  coanaisaanee,  la  grille 
mobile ,  patentée  de  Juekes ,  nous  paratt  donner  les  meil- 
leurs résultats»  C'est  un  appareil  iumivore  par  excelienoe. 

Il  nous  semble  que  le  foyer  à  grille  circulaire  et  tour- 
nante, toutefois  disposée  plus  simplement  que  celle  de 
MM.  Boulton,  Watt ,  et  compagnie  pourrak  préMnter  des 
girands  avantages  là  où  on  rencontrerait  des  obstacles  pour 
établir  l'appareil  de  Juekes. 

Le  système  des  autels  dits  Vénitiens  demande  à  être 
expérimenté  avec  plus  de  soins  quHl  ne  l'a  été  dans  le 
bateau  à  vapeur  le  Toge. 

Il  est  à  regretter  que  les  circonstances,  indépendantes 
du  système  de  l'appareil  que  M.  Combes  a  essayé  à  la 
pompe  à  feu  de iGi^ilk)t,f  aient  empêché  d*arriver  àux  ré- 
sultats coniparàtifs  de  sa  s^MM«rité# 


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—  97  — 

Toutes  nos  recherches ,  des  chiffres  comparatife  re- 
présentant les  effets  obtenus  par  la  combustion  de  la 
bouille  de  la  même  qualité  dans  les  fourneaux ,  ou  ap- 
pareils des  nombreux  systèmes  que  nous  avons  étudiés, 
ont  été  infructueuses ,  il  nous  est  donc  impossible  de  les 
classer  suivant  l'avantage  qu'ils  sont  susceptibles  de  pro- 
duire. L'insuffisance  des  expériences  faites  par  les  personnes 
désintéressées,  nous  empêche  de  traiter  la  question  pécu- 
niaire sur  le  même  pied  que  celle  de  salubrité  publique. 
Les  renseignements  que  nous  avons  produits  venant  de  la 
part  de  M.  du  Chalard ,  sur  les  expériences  comparatives 
de  la  grille  Tailfer ,  sont  les  seuls  que  nous  puissions  pré- 
senter comme  notoires,  et  encore  nous  croyons  qu'une 
grande  portion  de  l'économie  de  10  pour  cent,  accusée 
par  la  Commission ,  git  dans  l'emploi  de  la  trémie  qui  em- 
pêche le  refroidissement  des  foyers  occasionné  ordinaire- 
ment par  l'ouverture  des  portes  de  charge. 

La  qualité  de  la  houille  a  une  grande  influence  sur  la 
fumosité  des  fourneaux  ordinaires,  et  à  ce  titre  celle  du 
pays  de  Galles  doit  avoir  la  préférence. 

Ainsi  le  charbon  de  Cardiff  est  très-prise  par  les  indus- 
triels qui  l'ont  une  foi^  essayé ,  car  ils  savent  bien  que, 
malgré  son  prix  élevé,  il  produit  dans  les  fourneaux  bien 
installés  le  plus  faible  prix  de  revient  de  la  vaporisation 
d'eau.  A  côté  de  cet  avantage  qu'il  offre  aux  consomma- 
teurs ,  il  répand  le  moins  de  fumée  dans  l'atmosphère ,  et 
ne  donne  presque  pas  de  résidu  solide. 

En  voyant  la  minime  quantité  de  fumée  qui  s'échappe  de 
la  cheminée  monumentale  de  la  manufacture  de  M.  Thomas 
Cubitt,  à  Wauxball-Bridge ,  à  Londres,  personne  ne  se  dou- 

7 


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~  98  — 

terait  qu'il  y  a  là  une  chaudière  qui  engendre  un  grand  tra- 
vail mécanique.  Néanmoins  l'obligation  oùl'on  est  d'employer 
de  la  houille  du  pays  de  Galles,  pour  obtenir  ce  résultât,  est 
sérieuse  ;  car ,  à  Londres ,  cette  houille  est  beaucoup  plus 
chère  que  celle  de  Newcastle.  Cesurcroît  de  dépense  n'en  est 
pas  moins  une  considération  secondaire ,  lorsqu'on  a  égard 
aux  inconvénients  et  à  l'insalubrité  qui  résulte  de  la  fumée 
dans  une  grande  ville ,  et  nous  pensons  que  TAdministra- 
tion  compétente  devrait  forcer  tous  ceux  qui  n'ont  pas 
d'autres  moyens  pour  se  préserver  de  la  fumée,  d'employer, 
pour  l'entretien  de  leurs  fourneaux  ,  de  la  houille  du  pays 
de  Galles  ou  bien  toute  autre  houille  jouissant  des  mêmes 
propriétés. 

La  pénalité  serait  peut-être  le  meilleur  moyen  à  em- 
ployer pour  diminuer,  d'une  manière  notable,  la  quantité 
de  fumée  qui  se  répand  sur  les  grands  centres  industriels; 
mais  avant  d'arriver  à  cette  extrémité  ,  ne  convient-il  pas 
d'éclairer  les  populations  sur  les  causes  d'un  inconvénient 
si  fâcheux  et  si  nuisible  ;  de  donner  la  plus  grande  publi- 
cité aux  moyens  qui  peuvent  le  combattre ,  et  de  propager 
les  méthodes  les  moins  coûteuses  et  les  plus  efficaces? 
C'est  pour  arriver  à  ces  résultats  que  nous  avons  entrepris 
cette  étude  ^  puisse-t-elle  servir  de  guide  aux  hommes 
éclairés  dans  une  matière  si  digne  de  leurs  méditations. 


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—  100  — 

rives,  ou  plutôt  nous  avons  si  bien  fait,  entassé  l'un  sur 
l'autre  tant  de  systèmes  bizarres,  amoncelé  tant  de  théories 

f*C%T\v»i^\»Atta r*o         rtttfk    ly>     éirj-km%tVwtrk    t\      A^/%      4«r\«v«rvl/>        fini     a^v      ■tnv>4rk«*«k 


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—  101  ~ 

a  imprimé  à  ses  œuvres  un  cachet  grandiose,  une  physio- 
nomie saisissante  ;  mais  elle  étonne  sans  ravir,  elle  effiraie 
sans  émouvoir.  De  nos  jours,  elle  s'est  mesquinement  ré- 
fugiée dans  le  style  coquet  et  puéril  de  nos  édifices  reli- 
gieux, dans  les  toiles  gentilles,  proprettes,  faciles,  de  no» 
peintres  illustres,  dans  les  combinaisons  plus  savantes  que 
profondes  des  symphonistes  en  renom.  Née  à  Tépoque  de 
la  virilité  du  monde,  fille  de  la  Grèce,  dont  elle  éternise 
la  mémoire  et  la  splendeur,  retrempée  dans  les  eaux  vives 
de  la  foi  chrétienne,  fécondée  au  moyen-âge  par  l'enthou- 
siasme religieux,  l'école  de  l'abstrait,  de  l'idéal  en  est  ar- 
rivée de  nos  jours. ...  A  quel  point.  Messieurs,  je  vous 
le  demande?  Quels  en  sont  les  représentants?  Quelques 
odes  de  Lamartine,  quelques  soupirs  échappés  à  Hugo, 
quelques  larmes  sincères^  quelques  cris  d'amour  arrachés 
àBéranger,  voilà  pour  la  France!  Hélas!  la  même  école 
voulait  poindre  en  Italie,  elle  commençait  à  rayonner  en 
Allemagne  ;  mais  la  voilà  écrasée  à  cette  heure  sous  des 
lambeaux  sanglants,  et  sous  des  débris  qui  fument!  C'est 
donc  encore  la  France ,  et  la  France  seule ,  qui  conserve 
quelques  étincelles  précieuses  de  ce  qu'on  a  si  justement 
nommé  le  feu  sacré. 

Ne  devons-nous  par  craindre.  Messieurs,  de  le  laisser  se 
consumer  en  vain  et  disparaître  pour  ne  plus  revivre.  N'est- 
il  pas  urgent  de  sauver  l'art  de  sa  perte ,  de  sa  ruine  totale, 
en  proclamant  hautement  qu'il  existe  encore ,  et  en  sou- 
tenant sa  vie  par  l'enthousiasme  même  de  notre  espérance? 
Qui  voudrait  s'y  opposer? 

Cette  conviction  me  conduit.  Messieurs, à  une  protes- 
tation nouvelle  contre  l'école,  dont  le  système  est  la  néga- 
tion de  la  poésie.  Si  la  poésie  est  l'expression  la  plus  élevée 


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-  loa  — 

et  la  plus  complète  de  l'art,  il  n'est  pas,  selon  moi ,  d'er- 
reur plus  fatale  que  cette  négation.  Parlons  à  coeur  ou- 
vert* Quelle  est  la  lèpre  qui  nous  ronge?  Le  oiatérialisme. 
Les  écoles  de  réformateurs,  dont  Février  a  dévoilé  la  face 
et  démasqué  le  but ,  ne  se  sont  évidemment  préoccupées 
que  des  intérêts  matériels  de  l'homme.  Elles  ne  lui  promet- 
tent que  des  biens  purement  sensuels;  elles  ne  lui  propo- 
sent que  la  satisfoction  complète  de  ses  appétits.  L'une 
d'elle  va  jusqu'à  rêver  pour  lui  une  sorte  de  sens  nouveau , 
un  appendice  destiné  à  compléter  son  être  par  Te^Ltension 
du  champ  de  la  vue.  Pourquoi  s'arrêter  en  si  beau  chemin? 
Pourquoi  ne  pas  donner  à  l'honmie  un  nouvel  estomac ,  uu 
supplément  de  mains,  de  bouche,  d'oreilles?  Pourquoi, 
enfin ,  fieiisant  de  lui  un  autre  Briarée ,  ne  pas  aller  jusqu'à 
réaKser  en  sa  Cciveur  le  vœu  du  don  Juan  de  Byron?  Ainsi , 
l'idéal  d&ces  écoles  est  le  développement  absolu  des  capaci- 
tés physiques.  Elles  ont  inventé,  pour  parler  leur  langage, 
con^me  une  chimie  passionnelle,  qui  combine  les  instincts 
et  les  convertit  en  jouissances.  N'est-ce  pas  là,  je  le  de- 
mande, un  dissolvant  funeste  du  sentiment  du  devoir,  une 
insurrection  permanente  contre  l'autorité  et  contre  la  jus- 
tice, la  substitution  de  lecole  du  concret  à  celle  de  l'ab- 
strait et  de  l'idéal,  la  mort  enfin  de  tout  spiritualisme? 
Que  devient  l'art  dans  la  société  phalanstérienne?  Un  seul 
art  peut-être  est  encouragé,  prôné,  exalté,  triomphant; 
l'art  culinaire.  Triste  refuge  des  nobles  facultés  de  l'homme, 
écueil  repoussant  de  ses  aspirations  vers  l'infini I  Eh  bien! 
Messieurs ,  n'y  a-t-il  pas  un  danger  très^érieux  à  tolérer, 
même  au  point  de  vue  de  la  seule  esthétique,  ces  théories 
étroites,  à  pactiser  avec  elles,  en  recoooaissant  que  l'in-* 


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—  105  - 

dustrialisme  a  désormais  étouffé  la  poésie.  C'est  pourtant 
ce  qu'on  a  fiEiit ,  Messieurs,  dans  notre  Société.  Je  m'inscris 
en  faux  contre  cette  tendance  que  je  crois  funeste,  et 
sous  une  autre  forme,  je  proteste  de  nouveau  contre  elle. 
Ce  n'est  pas.  Messieurs,  que  nous  devions  nous  dissi- 
muler l'état  des  esprits  à  Tépoque  où  nous  sommes.  Les 
illusions,  et  ce  qui  est  pis  encore,  les  croyances  se  sont  en- 
fuies. On  reste  en  face  d'une  réalité  triste, nue,  désolante. 
Le  scepticisme  a  envahi  bien  des  âmes;  il  a  tué  bien  des 
dévouements,  brisé  bien  des  convictions  sacrées.  Ceux  qui 
disent  que  la  poésie  a  péri ,  ou  qu'elle  se  meurt  dans  des 
convulsions  galvaniques,  font  moins  de  la  critique  que  de 
l'histoire.  Ils  constatent  plutôt  qu'ils  ne  combattent.  Seu- 
lement, fut-ce  la  vérité,  toute  vérité  n'est  pas  bonne  à  dire, 
et  celle-ci  est  du  nombre  des  vérités  qu'on  doit  taire.  Mais 
il  y  a  plus,  nous  en  nions  l'évidence  manifeste ,  absolue , 
incontestable;  et,  ce  qu'il  y  a  de  plus  étrange,  ou  plutôt 
d'excellent,  ce  sont  nos  adversaires  eux-mêmes  qui  nous 
fournissent  les  armes  nécessaires  pour  lutter,  sinon  pour 
vaincre. 

En  effet ,  Messieurs ,  si  nous  avons  bien  compris  leur 
pensée  ,  vers  quel  point  se  tournent  leurs  espérances  ?  Le 
progrès.  Ils  disent  qu'il  y  a  impiété  à  méconnaître  l'ac- 
tion de  la  Providence  sur  le  monde  ,  et  blasphème  à  mau- 
dire la  loi  du  mouvement  progressif.  Ils  croient  à  l'avenir 
de  leur  patrie,  ils  aiment  la  France ,  ils  professent  le 
culte  du  beau  ;  mais  alors  comment  concilier  cette  éléva- 
'  tion  de  sentiment ,  cette  noblesse  d'intelligence,  cette  sin- 
cérité d'amour  ,  avec  la  pensée  sombre  et  navrante  qu'ils 
ont  émise ,    les  grandes  époques  littéraires  sont  fermées 


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—  104  — 

powr  nous  ?  0  hérésiarques ,  j'en  appelle  à  vous-mêmes  ! 
Vous  ne  le  croyez  pas.  Vous  dites  que  la  poésie  montre 
la  route  à  l'humanité ,  et  que  son  souffle  puissant  enfle 
les  voiles  des  générations ,  qui  voguent  sous  Tœil  de  Dieu. 
Et  vous  pouvez  soutenir  que ,  si  la  poésie  guide  le  monde, 
elle  cessera  d'être.  Comment  donc  accorderez*vous  son 
action  avec  son  néant  ?  Non,  quand  je  devrais  me  tromper, 
plus  j'étudie  vos  œuvres,  plus  il  me  semble  que  votre  pen- 
sée se  renie  elle-même  ,  pour  se  confondre  avec  la  nôtre. 
Que  dis-je  ?  Vous  servez  notre  cause  avec  plus  d'éloquence 
encore  que  nous  ,  et  vous  ne  niez  la  poésie  qu'en  lui  dres- 
sant, dans  votre  style,  de  magnifiques  autels.  Car,  je  vous 
le  demande ,  où  avez-vous  puisé  vos  formes  colorées,  vos 
images  émouvantes,  votre  vivacité  pittoresque  et  originale, 
si  ce  n'est  dans  le  sentiment  poétique,  qui  vit  en  vous, 
malgré  vous?  Soyez-en  certain.  Qu'ils  le  sachent  ou  qu'ils 
l'ignorent,  les  hommes  de  cœur,  comme  vous,  les  hommes 
dévoués  à  l'humanité^  ne  peuvent  pas  ne  pas  être  spiritua- 
listes.  Il  leur  faut  un  idéal;  car ,  sans  idéal ,  l'humanité  ne 
peut  vivre  ;  et ,  croire  à  la  vie  de  l'humanité ,  c'est  croire 
au  spiritualisme.  Ce  n'est  donc  que  par  une  fiction ,  qui 
tient  du  paradoxe ,  que  vous  glorifiez  l'industrie  aux  dépens 
de  l'idéal.  Et  cela  est  si  vrai  que ,  dominé  par  la  généro- 
sité de  vos  instincts,  vous  êtes  les  champions  de  la  doctrine 
même  que  vous  combattez.  Vos  propres  pensées,  votre  style 
sont  en  opposition  directe  avec  votre  système.  Vous  ne  pou- 
vez donc  pas  vous  retrancher  dans  une  citadelle  que  vous- 
mêmes  avez  ouverte  à  l'ennemi. 

Ainsi,  Messieurs,  loin  d'ébranler  notre  conviction  ,  To- 
pinion  contradictoire  ne  fait  que  la  confirmer  encore,  puis- 


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~  105  — 

qu'elle  se  trouve  absorbée  «  si  Ton  peut  le  dire,  dans  celle 
doDt  nous  prenons  ici  la  défense.  C'est  que  la  poésie , 
c'est  que  Tart  tout  entier  ne  dépend  ni  de  la  fantaisie  ni  des 
oscillations  politiques  d'une  époque.  Ses  bases  sont  inva- 
riables ,  inaltérables  sont  ses  lois.  Le  monde  esthétique  est 
gouverné  par  l'union  intime,  par  la  fusion  complète  des 
principes  généraux  qui  ont  fondé  et  qui  soutiennent  Tordre 
physique,  l'ordre  intellectuel,  l'ordre  moral.  L'art  ne  pro- 
cède point  par  voie  d'exclusion ,  mais  il  arrive  à  l'unité  par 
une  sorte  de  généralité  complexe.  C'est ,  en  un  mot ,  l'in- 
carnation de  la  nature  dans  l'éternité  d'un  type  divin  et 
infini.  Telle  est  aussi  la  poésie  dans  son  acception  pleine 
et  franche,  c'est-à-dire  une  puissance  créatrice,  un  rayon 
immortel  qui  &it  de  l'homme  une  image  de  Dieu. 

Je  n'abuserai  pas  davantage.  Messieurs,  de  l'attention 
que  votre  bienveillance  m'a  prêtée.  Encouragé  plusieurs 
fois  par  vos  suffrages ,  j'ai  résolu  de  ne  jamais  abandonner 
le  drapeau  que  j'ai  arboré  dans  cette  enceinte.  Je  crois  à 
la  poésie ,  je  crois  au  sentiment  vivace  de  l'art ,  je  crois  à 
l'éternité  de  Fart.  C'est  là  ma  profession  de  foi  esthétique. 
Les  évolutions  successives  de  la  société  m'ont  convaincu 
que  jamais  ce  sentiment  n'avait  péri ,  que  plusieurs  fois 
éclipsée  par  des  nuages ,  cette  brillante  splendeur  avait 
toujours  reparu  au  ciel  de  la  civilisation.  Ne  nous  effrayons 
donc  pas  de  ce  qu'à  notre  époque  elle  s'est  encore  cachée. 
Le  matérialisme  sceptique  va  tantôt  s'évanouir,  comme  ex- 
pirait tout  à  l'heure  l'agiotage  financier.  Hais  la  mort, 
a-t-on  dit ,  enfante  la  vie.  Meure  donc  le  matérialisme , 
c'est  le  spiritualisme  qui  renaît  ! 

E.  Talbot. 

Mars  1849. 


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—  107  — 

Il  y  a  quelques  mots ,  rÂcadémie  nantaise  s*est  iocrt  à 
coup  souvenue,  et  j'avoue  que  je  me  tiens  assez  fier  de  lui 
avoir  à  ce  sujet  réveillé  la  mémoire,  s*est,  dis^je,  souvenue 
d'un  des  60  articles  de  son  règlement,  qui  l'autorise  et  ren- 
gage à  décerner  des  encouragements  aux  travaux  d'art  ou 
d'industrie  de  quelque  importance  exécutés  dans  le  dépar- 
tement. 

Cet  article  était,  en  cela  semblable  à  ceux  de  beaucoup 
de  maintes  Constitutions,  demeuré  jusqu'ici  presque  à  l'état 
de  lettre  muette  ;  mais  l'Académie  a  noblement  réparé  son 
oubli.  Elle  a  décidé  qu'une  commission  choisie  dans  son 
sein  irait  visiter  les  ateliers  de  ceux  de  nos  artistes  et  de 
nos  industriels  qui  lui  en  feraient  la  demande ,  et  que  des 
médailles  seraient  décernées  aux  plus  dignes.  Plusieurs  ce- 
pendant ont  négligé  ou  méprisé  cet  avis  de  l'Académie,  à 
diverses  fois  répété  dans  les  journaux  :  s'ils  ont  à  regretter 
aujourd'hui  de  n'avoir  aucune  part  aux  récompenses  bien 
moins  matérielles  qu'honorifiques  que  nous  allons  accorder, 
ils  n'ont  à  s'en  prendre  qu'à  eux. 

Il  a  suffi ,  du  reste,  à  la  commission  des  visites  fort  nom- 
breuses qu'elle  a  faites ,  et  dont  l'intérêt  a ,  et  au-delà , 
compensé  la  fatigue,  pour  se  confirmer  dans  lidée  précon- 
çue des  progrès  considérables  accomplis  depuis  quelques 
années  par  notre  cité  dans  les  arts  et  dans  l'industrie.  D'une 
part,  Nantes  tend,  de  jour  en  jour,  à  devenir  la  métropole 
artistique  de  l'Ouest  de  la  France.  De  l'autre,  cette  viHe 
tient  incontestablement  aujourd'hui  le  premier  rang  parmi 
les  cités  industrielles  de  second  ordre,  et  si  elle  ne  saurait 
encore  rivaliser  avec  Lyon,  Rouen,  Saint-Étienne,  Lille, 
Mulhouse,  il  ne  faut  point  oublier  que  ces  villes  situées  à 


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—  108  — 

rintérieur,  n'ont  point ,  comme  Nantes ,  pour  attirer  les  ca- 
pitaux avantureux,  la  double  voie  de  Findustrie  manufactu- 
rière et  du  commerce  maritime. 

Vnlr.i  «tiiaI.q  &nnt  cpiit  Ha  nn<«  flrf.ÎRtp.s  At.  Ha  nos  înHiiAfrîpJft 


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—  109  — 

nuMrique  peut  seule,  peut-être  encore  aujourd'hui  en  pré- 
senter en  France. 

Quand  la  commission  visita  l'atelier  de  M.  Fortin,  la  plu- 
part des  jolies  compositions  que  nous  avions  peu  de  mois 
auparavant  admirées  à  l'Exposition  triennale  avaient  dis- 
paru, empressés  qu'avaient  été  leurs  acquéreurs  de  les  ré- 
clamer et  d'en  jouir  à  l'instant.  Hais  un  nouveau  tahleau 
était  sur  le  chevalet,  et  qui  suffit  seul  à  ravir  tous  nos 
suflrages  ;  il  est  exposé ,  en  ce  moment ,  au  cercle  des  Arts , 
chacun  peut  aller  le  juger.  Le  sujet  en  est  bien  simple  :  une 
chaumière  délabrée,  une  vieille  femme,  qui  file  à  la  porte, 
près  d'elle  un  gars  breton  tout  déguenillé  et  aux  cheveux 
ignorants  du  peigne;  enfin, deux  ou  trois  poules,  qui  pi- 
cotent leur  maigre  nourriture,  voilà  ce  dont  Tartistea  su 
faire  un  chef-d'œuvre.  Ce  délabrement ,  cette  misère ,  cette 
saleté ,  l'ont  vivement  ému ,  et  c'est  parce  qu'il  a  peint , 
non  avec  sa  brosse,  mais,  comme  il  le  fait  sauvent,  avec 
son  cœur,  que  Paris ,  juge  intelligent  de  ce  qui  est  vraiment 
beau ,  a  décerné  à  M.  Fortin ,  notamment  pour  ce  tableau , 
une  médaille  d'or  de  première  classe.  Si  notre  budget  aca- 
démique nous  eût  permis  de  la  doubler,  nous  l'eussions  fait 
sans  aucun  doute;  mais  nos  premières  médailles  ne  sont 
que  d'argent;  c'est  avec  un  vif  plaisir  que  l'Académie  en 
décerne  une  à  M.  Fortin. 

M.  Suc  (statuaire).  —  Médaille  d'argent. 

Est-il  besoin,  Messieurs,  de  rappeler  longuement  devant 
vous  les  œuvres  originales  et  émouvantes  de  notre  plus 
éminent  sculpteur,  du  moins  parmi  ceux  qui  n'ont  point 
été  chercher  au  soleil  ide  Paris  des  rayons  plus  brûlants 


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~  no  — 

pour  échauffer  leur  génie?  Sa  Mendiante ^  son  Aveugle  bre- 
ton et  sa  Mélancolie  ne  sont-elles  pas  de  ces  créations  qui 
vont  droit  au  plus  intime  de  notre  ftme  et  y  gardent  à  tout 
jamais  une  place  choisie  et  abritée  des  vents  de  l*oubli? 
Aucun  de  vous  ignore-t-il  que  peu  d'artistes  de  la  capitale 
égalent  M.  Suc  dans  le  buste,  ce  genre  si  simple  au  premier 
abord  et  cependant  si  difficile  7  Que  de  vie ,  que  d'expression, 
que  de  sentiment  dans  toutes  ces  tètes,  qui  formeront  un 
jour  une  si  curieuse  galerie! 

Quel  est  cet  homme  dont  l'œil  plonge  vers  Tborizon,  fixe 
et  hardi  comme  celui  de  laigle  ?  C'est  Henehel,  l'illustre  as- 
tronome. Cet  autre,  sur  le  front  duquel  reluit  un  si  émî- 
nent  caractère  d'imagination?  C'est  le  docteur  Cruépin.  Et 
celui-ci  au  regard  calme  et  bienveillant,  et  dont  la  tète  car- 
rée dut  se  plaire  dans  les  patientes  investigations  de  la 
science?  C'est  Poisson j  le  grand  géomètre.  Voici  Rachel, 
la  sublime  tragédienne;  H.^^'  Masson^  dont  les  chants  vi- 
brent encore  dans  nos  cœurs;  LUz^  le  pianiste  inimitable; 
M.  Fourré,  ce  médecin  d'un  tact  si  sûr,  d'un  esprit  si  juste 
et  si  profond ,  d'une  grâce  qui  ne  s'est  point  affaissée  sous 
le  poids  des  années;  M.  Lafont,  l'habile  chirurgien; 
Mm  de  Hercé^  notre  saint  évêque  d'illustre  mémoire , 
et  dont  les  vertus  de  son  successeur  ont  pu  seules  atté- 
nuer pour  nous  les  regrets  de  la  perte;  Mellier  enfin, 
l'honneur  de  l'antique  Mairie  de  Nantes. 

Ces  travaux  divers,  auxquels  nous  devons  ajouter  un 
buste  gracieux  de  la  propre  fille  du  sculpteur  et  une  char- 
mante tète  de  Vierge, sont  surtout,  parmi  ceux  en  trop 
grand  nombre  de  M.  Suc,  que  nous  regrettons  de  ne  pou-> 
voir  rappeler,  ceux  qui  ont  déterminé  l'Académie  à  l'una- 
nimité à  décerner  à  M.  Suc  une  médaille  d'argent. 


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—  m  — 

M.  ÀHàBÉB  MàNÀBD  (statuaire).  —  Médaille  d'argent. 

H.  Ménard  est  ud  de  nos  sculpteurs  les  plus  éminents. 
La  eorrection  et  une  heureuse  facilité  d'invention  sont  les 
caractères  distinctifs  de  son  talent.  Parmi  ses  bustes,  on  a 
surtout  reoaarqué,  à  nos  diverses  expositions,  ceux  de 
M.  de  Saint-Aignan,  du  général  de  Lamoricière,  du  géné- 
ral Cambronne^  de  M.gr  Soyer,  ancien  évêque  de  Luçon; 
de  H.  Drioliet,  architecte  de  la  ville,  etde  M."**  AnnaThillon, 
la  charmante  cantatrice  dont  Nantes  encouragea  les  débuts. 
Un  buste  de  Baco^  ce  digne  émule  de  Mellier  à  la  mairie 
de  Nantes,  et  que  M.  Ménard  exécute  en  ce  moment,  s'an- 
nonce pour  devoir  être  digne  des  précédents. 

Parmi  les  vingt  et  quelques  statues  déjà  exécutées  par  notre 
compatriote,  et  dont  plusieurs,  placées  aujourd'hui  en  Poitou, 
en  Lorraine,  à  Lyon  et  dans  d'autres  lieux  éloignés,  nous  sont 
malheureusement  inconnues,  nous  devons  vous  signaler 
sommairement  le  Forban,  ouvrage  acheté  par  la  mairie  de 
Nantes  et  qui  orne  le  Musée  ;  Sara  la  baigneuse^  ouvrage 
récompensé  par  le  Ministre  de  l'intérieur;  le  beau  groupe 
du  Condamné^  qui  obtint  à  Paris  d'unanimes  suffrages; 
Haydée^  esclave  à  vendre  dans  un  bazar  d'Orient  ;  Armide^ 
statue  non  terminée,  mais  dont  la  partie  supérieure  pres- 
que achevée  nous  a  paru  d'un  heureux  modèle;  Gilbert^ 
mourant  à  l'hôpital ,  une  des  meilleures  œuvres,  comme 
sentiment  et  comme  exécution,  de  M.  Ménard;  enfin , 
plusieurs  statues  pour  des  églises,  et  les  modèles  fort 
remarquables  de  deux  figures  colossales,  la  Force  et  la  lot, 
destinées  au  Palais- de- Justice  de  Nantes.  Tant  de  travaux 
sérieux»  et  dont  le  nombre  nous  empêche  de  pouvoir  £iire 


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-  H2  - 

ressortir  toutes  les  qualités  en  détail,  ne  pouvaient  laisser 
pour  TAcadémie  aucune  porte  à  l'hésitation ,  et  c'est  avec 

hnnhpiir  iiii'pIIa  di^ri^me  à  M.  Am<^rlpA  M^narti  nnp.  nkjÂdm'Ujt 


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—  115  — 

masse  informe,  et  ne  Ta  quitté  qu'avec  le  dernier  coup 
d'ébauchoir.  £n  pouvait-il  être  autrement,  lorsqu'il  s'agis- 
sait de  reproduire,  pour  la  postérité,  l'image  d'un  martyr 
de  la  civilisation  et  de  la  liberté?  En  l'exprimant  ainsi  avec 
une  si  rare  intelligence  et  un  si  pieux  recueillement, 
lartiste  a  &it  mieux  qu'un  beau  buste,  il  a  &it  acte 
d'un  bon  citoyen;  c'est  l'un  et  l'autre  que  l'Académie 
récompense  en  décernant  à  M.  Grootaers  fils  une  midaUle 
iargenU 

M.  BouRGEBEL  {arcMtecte  et  dessinateur). — Médaille 
d'argent. 

De  M.  Grootaers  à  M.  Bourgerel,  la  transition  se  fait 
sans  peine;  car  des  deux  bustes  du  général  de  Bréa  exé- 
cutés par  M.  Grootaers,  l'un  est  destiné  à  figurer  au  som- 
met du  remarquable  mausolée  élevé  à  la  noble  victime,  sur 
les  plans  de  H.  Bourgerel.  Fils  de  la  cité,  M.  Bourgerel, 
riche  d'études  sérieuses  feites  à  l'école  de  Paris,  et  perfec- 
tionné par  de  longs  voyages  en  Italie  et  en  Grèce,  est  re- 
venu chez  nous  il  y  a  quelques  années.  Le  rare  mérite  de 
ce  jeune  architecte,  non  moins  que  l'aménité  de  son  carac- 
tère, ne  tardèrent  pas  à  déterminer  M.  Chaigniau,  hélas!  que 
le  choléra  a  si  fatalement  enlevé,  à  le  prendre  pour  associé. 
M.  Ghaigniau  n'eût  pas  à  s'en  repentir.  Déterminer  la  part 
exacte  qui  revient  à  H.  Bourgerel,  dans  les  divers  monu- 
ments élevés  pendant  son  association  avec  M.  Chaigniau, 
serait  assez  difficile  ;  cependant  nous  savons  positivement 
que  le  beau  mausolée  du  marquis  de  Goulaine,  en  style 
ogival,  l'église  de  Ghavagnes,  en  style  byzantin,  et  enfin  le 
tombeau  du  général  de    Bréa,  lui  appartiennent  presque 

8 


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—  H4  — 

exclusivement.  Dans  ce  dernier  monument  se  révèle  surtout 
tout  ce  qu*a  d'érudit  et  d'original,  dans  son  imitation,  le 
talent  de  M.  Bourgerel.  Constamment  occupé  pendant  ses 
voyages  à  dessiner  avec  le  plus  admirable  talent  les  plus 
beaux  restes  de  rarchitecture  grecque,  il  a  su,  tout  en  y 
mariant  ce  que  la  croyance  catholique  y  réclamait  impé- 
rieusement, se  servir  de  ces  admirables  éléments  de  Tart 
hellénique  pour  élever  un  monument  marqué  au  coin  du 
goût  le  plus  pur  et  de  la  plus  exquise  élégance.  L'Académie, 
jalouse  de  récompenser  en  M.  Bourgerel  un  architecte  déjà 
fort  distingué,  et  un  de  nos  meilleurs  dessinateurs,  lui  dé- 
cerne une  médaille  d'argent. 

M.Henri  Villainb  (peintre).  —  Médaille  de  bronze. 

M.  Henri  Villaine  appartient  à  cette  génération  de  jeunes 
peintres  nantais,  parmi  lesquels  brillent  encore  MM.  Picou, 
Luminais,  Charles  Leroux,  Chérot,  Olivier  Merson  et  quel- 
ques autres  qui,  si  la  ville  et  le  département  comprenaient 
toute  leur  valeur,  donneraient  bientôt  de  si  beaux  fruits  sous 
Tinfluence  de  larges  encouragements. 

M.  Villaine  a  longtemps  étudié  à  Paris  et  en  Angleterre, 
et  n'est  revenu  à  Nantes  que  depuis  deux  ans.  Hais  déjà 
son  remarquable  tableau  de  la  Conspiration  des  poudres  et 
plusieurs  portraits  en  pied,  lui  ont  créé  parmi  nous  une 
juste  et  solide  réputation.  Son  dessin  est  généralement 
correct,  ses  poses  naturelles,  sa  toucfie  large  et  vigoureuse, 
son  coloris  agréable.  Il  compose  facilement,  et  le  don  de 
l'expression  ne  lui  est  pas  inconnu.  Est-ce  à  dire  que  M. 
Villaine  soit  déjà  un  artiste  consommé  ?  Non,  sans  doute, 
mais,  comme  à  d'heureuses  dispositions,  M.  Villaine  joint 


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—  It5  ~ 

le  goût  ardent  de  son  art  et  le  cultive  assidûment,  nous  ne 
faisons  nul  doute  qu'une  des  premières  places  ne  lui  soit 
un  jour  assignée  dans  l'histoire  de  la  peinture  en  Bre- 
tagne. 

L'Académie  décerne  à  M.  Villaine  une  nMaiUedebranze. 

M.  Chalot  (peintre).  —  Médaille  en  bronze. 

11  y  a  un  an  passé,  M.  Chalot >  récemment  sorti  de  l'a- 
telier de  M.  Ingres,  exposa  un  tableau  d'Àrmide  et  Jle- 
naïuf ,  qui,  nous  devons  le  rappeler,  loin  d'obtenir  les 
suffrages  du  public,  fut  critiqué  généralement,  peu^étre 
même  avec  trop  d'amertume.  Nous-méme,  dans  un  rap- 
port qui  nous  fut  alors  demandé  par  l'Académie ,  crûmes , 
tout  en  reconnaissant  des  qualités  réelles  dans  l'œuvre  de 
H.  Chalot,  devoir  donner  quelques  conseils  un  peu  sévères 
à  ce  jeune  artiste.  —  Chose  étrange,  et  me  croirez-vous, 
Messieurs ,  loin  de  mettre  son  amour  propre  entre  ma 
critique  et  ses  deux  amoureux  transis  pour  les  protéger 
contre  des  traits  trop  bien  lancés,  M.  Chalot  me  fit  prier 
d'aller  le  voir.  Je  vous  remercie,  Monsieur,  me  dit-il, 
vous  m'avez  rendu  un  grand  service.  Armide  et  Renaud 
n'existent   plus  ;  j'ai  déchiré   mon  tableau,  il  était  vrai- 
ment fort  mauvais. —  Quoi,  vous  en  convenez?  —  Oui, 
Monsieur  ;  oubliez-le  comme  une  erreur  de  ma  jeunesse  ; 
mais  veuillez  jeter  les  yeux  sur  cette  nouvelle  toile;  sans 
être  totalement  terminée,  elle  est,  je  crois,  de  nature  à 
me  réhabiliter  dans  votre  esprit. 

—  M.  Chalot  avait  raison.  Non-seulement  ses  éminentes 
qualités  de  paysagiste  saiUaient  encore  dans  son  nouve&u 
tableau,  ainsi  que  sa  rare  habileté  de  brosse  puisée  à  l'école 


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—  116  — 

du  mattre  en  ce  genre;  mais  en  outre  le  sujet  était  dis- 
posé avec  une  grande  habileté.  Quelques  incorrections 
prétentieuses  et  volontaires  faisaient  bien  encore  tacbe , 


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-  117  — 

nottir,  et  rêve  mos  fio^ger^  béhs!  que  ce  eouraat  Ten- 
tratne  irrévocablement  vers  le  sombre  abtme,  que  le  ciel 
va  se  charger  d'orages ,  les  arbres  perdre  leur  épaisse  feail* 
iure  et  les  roses  se  flétrir  ;  -^  là  une  autre  de  ces  char- 
mantes  créatures  tresse  avec  des  fleurs  ime  longue  guir- 
lande qui  court  le  leog  de  la  barque  et  va  se  rattacher  au 
gouvernail  de  la  iiçoû  la  plus  gracieuse.  —  Je  l'avoue,  ce 
tableau  d'un  ordre  élevé,  où  l'idéal,  quand  il  &ît  début 
dans  l'exécution  t  se  devine  tougours  dans  la  pensée  de 
l'artiste,  me  surprit,  me  plut,  et  peu  de  jours  après  je  ius 
heureux  de  voir  la  commission  partager  mon  impression. 
Aussi  l'Académie ,  sur  notre  proposition,  accorde-t-elle 
à  M.  Cbalot  une  midaille  de  bronze. 

M.  F.  Dàiwiean  (peintre).  — Médaille  de  bronze. 

M.  F.  Dandiran  est  un  très-bcile  et  agréable  dessinateur. 
U  bit  l'aquarelle  avec  un  goût  infini.  Ses  mines  de  plomb 
sont  habilement  touchées,  le  crayon  noîr  et  le  fiisin  n'ont 
pour  lui  aucun  secret ,  la  gouache  a  des  charmes  à  ses 
yeux,  le  pastel  le  tente  souvent,  et  rbuile  aussi  quelquefois. 
Paysage,  marine , architecture,  figure  au  besoin,  M.  Dsn- 
diran  s'est  essayée  tout  ,et  a  presque  toujours  réussi.. U  n'a 
Ulu  rien  moins  que  cethabile  homme  pour  consoler  tous 
nos  jeunes  amateurs  du  départ  de  M.  Jules  Noëlj  cet  ar- 
tiste bas-breton  auquel ,  sans  conteste,  revient  la  gloire 
d'avoir  créé  dans  notre  ville  le  goût  et  l'étude  si  répandus 
aujourd'hui  du  paysage.  Plus  artiste,  dans  le  sens,  pour 
ainsi  dire ,  spirilualiste  de  cette  expression  ,  que  H.  Dan- 
diran ,   et  plus  propre  à  communiquer  le  feu   sacré  de 


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—  H8  ~ 

l'art,  M.  Noël,  faute  d*étades personnelles  sofifisamment 
approfondies,  laissait  généralement  ses  élèves  tout  au 
plus  au  tiers  du  chemin.  M.  Dandiran  les  a  pris  à  ce  point, 
et,  plus  riche  à  son  tour  de  règles  et  de  principes,  il  a 
su  leur  &ire  fieiire  un  nouveau  pas  dans  la  carrière.  Puisse- 
t-il ,  acquérant  lui-même  ce  qui  peut  manquer  encore  de 
vigueur  et  d'originalité  à  son  talent,  les  pousser  vers  le  but 
final!  Appréciant  donc  non  moins  son  talent  en  lui-même 
que  les  progrès  dont  la  jeune  génération  lui  sera  redeva- 
ble ,  TÂcadémie  décerne  une  médaiUe  de  bronze  à  M.  Dan-- 
diran. 

M.  GaooTÀEBs  père  {statuaire).  —  Mention  honorable. 

Depuis  longues  années,  M.  Grootaers  père  emploie  un 
ciseau  qui  n'est  pas  sans  valeur  à  orner  nos  édifices  cirils 
et  religieux  ;  c'est  à  lui  notamment  que  sont  dues  en  grande 
partie  les  statues  de  style  gothique  qui  décorent  la  nouvelle 
église  de  Saint-Nicolas.  Son  fils,  nous  l'avons  déjà  dit,  l'a 
aidé  dans  ces  importants  travaux.  Peut-être  dans  cet  élève, 
dans  cet  émule ,  dans  ce  rival  rencontré  et  cherché  même 
à  son  propre  foyer ,  H.  Grootaers  a-t>il  aujourd'hui  trouvé 
son  mattre.  Hais  dans  cette  noble  lutte  des  arts ,  quel  père 
n'est  heureux  d'être  vaincu  par  son  fils?  et  des  lauriers  du 
jeune  triomphateur  ne  tresse-t-il  pas  la  plus  belle  couronne 
de  ses  cheveux  blancs? 

L'Académie  décerne  avec  un  vif  plaisir  à  H.  Grootaers 
père  une  mention  honorable. 

M.  GiovAinîTTT  fils  {statuaire),  r-  Mention  honorable. 

Les  ouvrages  du  jeune  et  modeste  artiste  que  nous  ve- 
nons de  nommer,  ont  fixé  aussi  les  regards  bienveillants 


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—  119  — 

de  la  commission.  Elle  a  surtout  remarqué  une  statuette 
représentant  la  mère  du  Sauveur  empreinte  d*un  senti- 
ment fort  religieux  et  dont  le  l\pe  ne  manque  pas  de  dis- 
tinction. Les  draperies  en  sont  traitées  avec  goût  ^  et  la 
même  observation  s'applique  aux  autres  productions  de 
H.  Giovanetty.  Dues  à  une  main  encore  peu  exercée,  il 
serait  inutile  de  vous  les  signaler  en  détail,  mais  leur  en- 
semble justifie  d  assez  de  qualités  et  de  belles  promesses 
pour  motiver  la  mention  honorable  que  l'Académie  ac- 
corde à  M.  Giovanetty. 

Quelques-uns  nous  trouveront  peut-être  bien  indulgents. 
—  Ah  !  ne  craignons  point  de  prodiguer  à  la  jeunesse  des 
visites  amicales,  des  motsélogieux,de  salutaires  encourage- 
ments. Sous  le  souffle  de  l'acquilon  se  dessèche  et  tombe , 
avant  de  s'être  épanoui ,  le  fragile  bouton  de  la  rose.  Il  en 
est  ainsi  des  premiers  produits  du  talent.  Ce  sont  des  fleurs 
que  l'envie,  la  jalousie,  l'oubli  surtout  et  Tindifférence 
étiolent ,  faneut,  et  qu'aucun  fruit  ne  vient  remplacer. 

ra0170TlllKUi. 

MM.  CflARPEnTiER  père  et  fils  {imprimeurS''lithographes). 
—  Médaille  d'argent. 

L'établissement  de  M.  Charpentier  est  incontestable- 
ment le  plus  beau  en  son  genre,  non-seulement  de 
Nantes,  mais  de  toute  la  Bretagne;  ni  l'Anjou  ni  le 
Poitou  n'en  ofirent  aucun  non  plus ,  croyons-nous ,  qui 
paisse  lui  être  comparé.  Lorsque  M.  Charpentier  père, 
champenois  d'origine ,  arriva  à  Nantes ,  la  gravure  en 
taille-douce  était  à  peine  pratiquée  dans  cette  ville ,  et 


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—  120  — 

c'est  à  son  initiative  que  nous  devons  Télan  imprimé  dès- 
lors  à  cette  branche  intéressante  de  l'art.  Plus  tard,  lors- 
que la  lithographie  révéla  ses  étonnants  procédés,  M. 
Charpentier  s'empressa   d'en  faire  iouir  nos  artistes.  Ce 


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parmi  les  diverses  publications  de  la  maison  Charpentier , 
le  Keep$ake  breton ,  imprimé  en  couleur,  dessiné  et  litho- 
graphie par  M.»^  loé  Coste. 

V Album  de  la  Bretagne ,  par  M.  Hippolgte  Lalame  , 
élève  de  Charlet  et  professeur  à  l'Ecole  Polytechnique. 

La  Galerie  armoricaine ,  précieux  recueil  de  cent  cos- 
tumes bretons,  par  le  même  artiste  et  auxquels  sont  venues 
se  joindre  des  vues  précieuses  de  soin,  d'exactitude  et  de 
fini,  par  M.  Félix  Benoist,  autre  artiste  de  talent  attaché 
comme  M.  Delahaye  à  la  maison  Charpentier.  Des  notices 
solides  d'un  spirituel  écrivain  qui  cache  son  nom  sous  le 
pseudonyme  de  Le  Heder,  complètent  ce  bel  album ,  au* 
quel  M.  Charpentier  se  propose  de  donner  bientôt  un  digne 
pendant,  sous  le  titre  de  la  Galerie  Normande. 

Sous  peu  paraîtra  aussi  un  ouvrage  fort  remarquable 
sur  Nantes  et  le  département ,  que  M.  Charpentier  s'oc- 
cupe à  préparer  depuis  deux  ans.  U.  Benoist  en  a  dessiné 
toutes  les  vues ,  qui ,  reproduites  sur  pierre  par  les  pre* 
miers  artistes  de  Paris ,  seront  imprimées  à  deux  et  même 
jusqu'à  trois  teintes  chez  M.  Charpentier.  Le  texte  sera 
dû  à  des  plumes  aimées  du  public  nantais,  telles  que  celles 
de  MM.  Emile  Souvestre ,  Pitre  Chevalier ,  de  la  Goume- 
rie,  dlzarn,  Eug.  Carissan  fils,  Drioliet,  Berger,  etc. 

Aucun,  parmi  tous  les  beaux  discours  entendus  depuis 
un  an  sur  la  décentralisation  artistique  et  littéraire ,  lui 
a-t-il  fait  fiiire  un  pas  semblable  à  ces  importants  travaux 
de  MM.  Charpentier?  L'Académie  la  parfaitement  com- 
pris ,  et  le  leur  prouve  en  leur  décernant  une  médaille 
d'argent. 

Baron  de  Wisns. 


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—  122  — 

M.  Alfbed  Dbzàunày  (architecte-ingénieur.)  —  Médaille 
d'argent. 


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—  123  — 

d'une  qualité  supérieure.  Avec  Tégrappoir  de  H.  Dezaunay, 
uD  seul  homme  Texécute  avec  une  promptitude  suffisante 


l__     ^l  -  -1a_^     I  . 


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—  124  — 

L'Académie  décerne  une  médaille  d'argent  à  M.  De- 
zaunay. 

A.  CàiLADD. 


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—  125  — 

compteur  indUpensfibld  pour  \a^  apiratîoûs  des  expériences 
des  machines  à  Taide  d'un  frein  de  Prony. 

3.^  Pour  la  constraction  très-ingénieuse  d'une  machine 
à  vapeur  iocomobile,  appliquée  au  battage  du  blé. 

WOLSILT. 

MM.  Guichet  atné  et  F.  Rdssbil  (fonderie  et  ktminerie).  — 
MédaiUe  d'argent. 

On  aperçoit  au  loin  dans  la  canipagoe  une  tow  monu- 
mentale qui  s'élève  au  milieu  du  quartier  de  Launay.  C'est 
dans  cette  tour  que  MM.  Guichet  et  Russeil  fobriquent  je 
plomb  de  chasse,  dont  ils  opèrent  le  triage  par  un  procédé 
aussi  simple  qu'ingénieux.  A  cette  branche  d'industrie, 
MM.  Guichet  et  Russeil  joignent  la  fabrication  du  minium 
et  le  laminage  du  zinc;  ils  ne  tarderont  pas  à  pouvoir  livrier 
en  outre  au  commerce  le  blanc  de  zinc,  s'ils  persévèrent  dans 
leurs  premiers  essais  qui  promettent  un  succès  complet.  Le 
blanc  de  zinc  peut  être  employé  dans  la  peinture  comme  la 
céruse,  mais  il  ne  présente  pas  dans  sa  fabrication  les  dan- 
gers que  cette  dernière  substance  bit  courir  aux  malheu- 
reux ouvriers  qui  la  préparent.  —  Le  laminage  du  zinc  est 
une  industrie  nouvelle  à  Nantes  ;  MM.  Guichet  et  Russeil 
ont  monté  cette  fabrication  sur  une  grande  échelle  et  y 
consacrent  une  machine  à  vapeur  de  la  force  de  vingt  che- 
vaux. —  La  Société  Académique  est  heureuse  de  décerner 
une  médaille  d'argent  à  ces  habiles  industriels. 

Cm.  w  Tojluhuu. 


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—  126  — 

CONSTRUCTIOIV  NATAEC. 

M.  GuiBERT  {constructeur).  —  Médaille  d*argent. 
Parmi    les   grands  travaux  qui  intéressent  à  un  haut 

Aarn»^  la   m*/\eni&ritA    Ha  \u   vÎIIa  Ha    Nanf ac     lu  r»AnfifmiP.tî/\n 


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—  137  — 

d'une  probité  irréprochable,  et  comme  homme  utile  au 
pays  par  suite  de  la  grande  quantité  de  travailleurs  à  Texis- 
tence  desquels  ses  importantes  commandes  de  l'État  ont 
procuré  le  bonheur  de  pourvoir  pendant  trop  peu  de 
temps. 

Depuis  vingt-cinq  ans  M.  Guibert  a  construit  à  Nantes , 
à  Cbàlons  (sur  Saône) ,  à  Lyon  et  à  Paris ,  54  bateaux  à 
vapeur  de  la  force  de  1 5  à  240  chevaux.  Dans  ce  nom- 
bre, 18  ont  été  affectés  au  service  de  la  mer,  les  autres  à 
la  navigation  fluviale. 

Dans  le  même  espace  de  temps ,  il  est  sorti  des  chan- 
tiers de  H.  Guibert  65  navires  à  voile  du  port  de  80  à 
1,400  tonneaux. 

La  partie  la  plus  importante  des  travaux  de  M.  Guibert, 
et  celle  qui  a  le  plus  particulièrement  fixé  l'attention  de 
votre  commission,  se  rapporte  à  ses  grandes  commandes 
de  Tannée  1844.  A  cette  époque,  ce  laborieux  et  intelli- 
gent ingénieur  civil,  ayant  appris  que  le  Gouvernement 
paraissait  disposé  à  essayer  de  l'industrie  privée  pour  ses 
constructions  navales ,  crut  devoir  employer  tous  ses 
moyens  pour  faire  jouir  le  port  de  Nantes  de  cette  précieuse 
&veur. 

Il  s'agissait  alors  de  la  construction  des  navires  en  fer, 
et  bien  que  les  conséquences  d'une  entreprise  de  cette  na- 
ture, résultant  d'un  premier  marché  passé  avec  le  Gou- 
vernement ,  dussent  entraîner  notre  constructeur  nantais 
dans  d'immenses  frais  d'outillage,  il  ne  recula  pas  devant 
de  si  grands  sacrifices,  et  se  mit  sur-le-champ  à  l'œuvre 
pour  créer  son  matériel. 
Pendant  trois  années,  la  construction  des  navires  en 


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—  13^  — 

fer,  réunie  à  celle  des  navires  à  voile  en  bois  pour  le 
compte  de  l'Etat ,  a  mis  en  circulation  sur  notre  place  plus 
de  deux  millions  de  valeurs.  L*un  et  Tautre,  comme  nous 
venons  de  le  dire ,  avaient  occasionné  pour  Tentrepreneur 


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—  129  — 

compenser  les  grands  travaux  utiles  dans  la  personne  de 
leurs  auteurs. 

Nantes,  15  octobre  1849. 


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—  150  — 

parvenu,  par  son  industrie  et  son  assidu  travaiU  à  fonner 
à  Nantes  une  des  plus  belles  imprimeries  de  France.  La 
fonte  des  caractères  exceptée ,  cette  nurison  offire  toutes 
les  ressources  typographiques  désirables.  A  de  belles 
presses  à  bras  elle  vient  d'ajouter  une  presse  mécanique  du 
plus  grand  modèle,  tirant  par  heure  de  mille  à  douze 
cents  feuilles  imprimées  des  deux  côtés. 

Dansitout  cela ,  il  n'y  a  rien  pourtant  que ,  dons  des  pro* 
portions  moins  grandes  toutefois,  ne  possédât  depuis  long- 
temps notre  ville;  ce  dont  il  &ut  surtout  féliciter  M.  Gaîl* 
mard,  c*est  d'avoir  doté  Nantes  de' fourneaux  et  de  moules 
à  cUcber  au  papier.  Ce  nouveau  procédé  de  stéréotypage 
offre  de  grands  avantages  pour  la  corraotion  des  épreuves , 
et  procure  le  moyen  de  livrer  à  des  prix  réduits  les  im- 
pressions qui  doivent  se  renouveler  souvent  et  se  tirer  k 
un  grand  nombre  d'exemplaires. 

La  Sodété  Académique  décerne  une  médaille  de  bronze 
à  M.  Charles  Gaifanard. 

MM.  Yàllet  (JUateurs).  —  Médaille  de  bronze. 

La  filature  de  MM.  Louis  Vallet  père  et  fib  e6t>  sans 
contredit,  dans  Fouest  de  la  France,  un  des  plus  beaux 
établissements  de  ce  genre.  Une  maebine  à  vapeur  de  la 
force  de  vingt-cinq  chevaux  y  met  en  mouvenent  no» 
moins  de  cinq  mille  brochés»  et  donne  la  Tie  à  Tappareil 
complet  des  machines  nécesisaires  à  h  convwaon  du  cotMi 
brut  en  fil  de  diverses  grosseurs.  Ce  fil  est  ensuite  livré  à 
plus  de  quatre  cents  ouvriers  tisserands ,  qui  en  fabriquent, 
pour  le  compte  même  dei'usine,  ces  excellentes  et  chaudes 
ftttaines  nantaises ,  connues  de  la  Fraiioe  entière  et  em- 


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—  151  — 

ployées  pour  doublure  par  toutes  les  clauses   de  la  so* 
ciété. 

Nous  ne  pouvions  fiiire  moins  que  d'accorder  une  mé- 
daille de  bronze  à  MM.  Vallet;  ils  ont  d'autant  plus  de 
droits  à  cet  encouragement,  que,  dans  les  jours  de  crise 
traversés  par  l'industrie,  ils  n'ont  voulu  reculer  devant 
aucun  sacrifice  pour  que  leurs  nombreux  ouvriers  n'eussent 
point  à  souffirir  des  douleurs  et  des  misères  du  eJiâmage. 

SmoEi. 

M.  DvGii*m-BBtTniGi&  (FaMqtÊe  de  fleun).  —  Médaille 
de  bronze. 

En  sortant  des  sombres  et  bruyants  ateliers  de  MM.  Voruz 
et  Guichet ,  quel  aimable  contraste  se  présente  aux  yeux  de 
la  commission  en  pénétrant  chez  M.  Duchêne-Bettinger  !  — 
Du  l'oyaume  de  Vulcain  nous  pénétrons  dans  l'empire  de 
Flore.  —  Est-ce  la  nature  ou  l'art  que  nous  devons  ici  ad- 
mirer?—  la  nature  qui  a  fourni  les  originaux,  l'art  qui  a 
su  les  imiter  au  point  de  nous  faire  hésiter  entre  les  mo- 
dèles et  les  copies.  —  J'ai  dit  l'art  ;  oui ,  ce  terme  élevé 
n'est  pas  hors  de  proportion  lorsqu'il  s'applique  au  fabri- 
cant de  fleurs.  Que  de  goûi  se  révèle  dans  l'agencement 
du  branchage ,  dans  la  courbure  d'une  feuille ,  dans  l'in- 
clinaison d'une  rose  !  quel  tact  est  nécessaire  !  quelle  con- 
naissance approfondie  des  curieuses  recherches  de  M.  Che- 
vreul  dans  la  juxta-position  de  tant  de  fleurs  différentes 
de  formes  et  de  couleurs.  Aussi  qui  ne  connaît ,  au  moins 
de  réputation,  les  Nattier ,  les  Bâton,  les  Constantin?  M. 
Duchéne-Bettinger  est  le  digne  rival  de  ces  hommes  de 


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—  132  — 

talent;  ce  génie,  aux  yeux  des  élégantes  de  Paris,  vaut 
bien,  voire  mieux  que  celui  des  Kepler  et  des  Newton.  M. 
Duchéne-Bettinger ,  qui  a  fondé  pour  l'étude  des  fleurs  ar- 


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—  153  - 

Ce  qui  appartient  personnellement  à  M.  Bobierre,  c'est  : 

1.^  L'addition  du  sulfate  de  plomb,  comme  fondant,  au 
sol&te  de  soude  destiné  à  la  fabrication  du  verre  ; 

2.*"  L'emploi  des  résidus  de  chaux  dans  l'agriculture; 

S.*"  L'utilisation  du  chlorure  de  manganèse  :  1/  pour 
désinfecter  les  fosses  d'aisance,  opération  qui  s'exécute  en 
grand  à  Nantes  ;  2.''  pour  coaguler  le  sang  destiné  à  l'en- 
grais, comme  cela  se  pratique  à  l'abattoir  de  Grenelle. 

En  raison  du  grand  développement  pris  par  l'établisse- 
ment dans  ces  dernières  années,  et  des  perfectionnements 
dont  nous  venons  de  parler ,  la  Société  a  cru  devoir  lui  dé- 
cerner une  médaille  de  bronze. 

Le  Docteur  Màlhbbbb. 

Fabrique  de  chandelles  et  de  bougie  stéarique  de  MM.  Thi- 
bault FBÈBES.  —  Médaille  de  bronze. 

Cet  important  établissement  se  recommande ,  tant  pour 
la  bonne  confection  que  pour  l'écoulement  considérable 
de  ses  produits.  MM.  Henri  et  François  Thibault ,  occupés 
spécialement  de  sa  direction,  ne  cessent  d'y  apporter  les 
soins  les  plus  assidus  et  les  plus  intelligents. 

La  commission  de  la  Société  Académique ,  qui  a  été  in- 
ritée  à  visiter  la  fabrique  de  MM.  Thibault,  a  constaté  avec 
une  grande  satisfaction  que ,  sur  les  bons  avis  publiés  par 
le  Conseil  de  Salubrité  de  Nantes ,  ces  honorables  indus- 
triels n'avaient  reculé  devant  aucun  sacrifice  dans  la  mise  à 
exécution  et  l'application  réalisable  des  moyens  indiqués 
par  la  science  pour  fondre  les  suife  en  branche,  sans  aucune 
manifestation  d'odeur  insalubre  ou  incommode. 


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1 


—  154  - 

Les  incoQtefttables  succès  dont  les  efforts  de  MBI.  Thi- 
bault ont  été  couronnés  dans  cette  circonstance ,  joints  à  la 
distribution  ingénieusement  entendue  du  travail  dans  leurs 
ateliers  et  à  la  qualité  supérieure  des  produits  de  leur  h- 
brication,  ont  déterminé  votre  commission  à  proposer  à  la 
Société  qu'il  kur  soit  décerné  une  médaille  de  bronze. 


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—  156  — 

3.®  Une  lettre  du  Ministre  de  l'instruction  publique  in- 
diquant les  formalités  à  observer  pour  Tenvoi  des  journaux 
échangés  entre  les  Sociétés  savantes,  pour  que  cet  envoi 
puisse  avoir  lieu  sous  le  couvert  du  Ministre. 

4.®  Une  lettre  de  la  Société  des  Sciences,  Lettres  et 
Arts  de  Valencieonies,  et  une  autce  de  la  Société  d'Agri- 
culture du  Puy  (^aute-Lpira^,  tputâB  deux  relatives  au 
même  objet. 

5.^  Une  lettre  du  Cercle  maritime  de  Nantes;  remercf- 
mçnts  pour  les  lettres  d'inviti|tion  à  |i|  ^j^  Pl4^vae 
adressées  par  la  Société. 

6.®  Deux  Mémoires  sur  l'Organisation  de  la  Médecine 
des  pauvres,  question  mise  au  concours  pour  1850.  — 
Renvoyés  provisoirement  h  la  Section  de  Médecine  pour 
être  remis,  plus  tard,  à  la  commission  des  prix. 

7."*  Tableau  oompacatif  du  poids  du  bétail  à  la  nourri- 
ture et  à  la  production  du  fumier  et  du  froment,  par  M. 
Neveu-Derotrie. 

8.^  Discours  prononcé  par  M.  Marchand  à  la  distribu- 
tion des  prix  df  l'École  préparatoire  de  Médecine ,  en  no- 
vembre 1849. 

9.''  Assemblée  générale  de  la  Société  philanthropique  de 
Niort,  13  janvier  185Q. 

lO."*  Mémoires  de  l'Académie  nationale  de  Metz,  lettres, 
sciences,  arts  et' agriculture.  XXX.*  année,  1848,  i&49. 

1  i  ."^  Séance  publique  annuelle  de  la  Société  d'Agricul- 
ture de  la  Marne,  sujet  de  prix  pour  1850. 

12.''  Bulletin  de  l'Athénée  du  Beauvaisis,  séance  pu- 
blique de  1849. 

13.*"  Éloge  historique  de  Lesson,  pharmacien  en  chef 
de  la  marine ,  par  M.  A,  Leièvre. 


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~  157  — 

14.*  Étude  des  intérêts  réciproques  de  l'Europe  et  de 
rAfflérique.  —  La  France  et  P Amérique  du  Sud,  par  Ben- 
jamin Poneel. 

i5.'  Congrès  central  d'agriculture,  invitation  à  la  So- 
délé  d'envoyer  des  délégués. 

16.^  Société  d'Agriculture^  des  Sciences  et  Arts  d'An- 
gers. —  Travaui  du  Comice  horticole  de  Maine-et-Loire. 
1848. 

17.®  Bulletin  de  l'Association  agricole  du  Sig,  novembre 
1849,  oifert  par  M.  Simon. 

Composition  du  bureau  de  la  Section  des  Sciences  na- 
turelles pour  1850. 

Président,  MM.  Delaiiarbb. 

fke-PriHdent ,  Moriceau. 

Secrétaire^  de  RosTimc  de  Rivas. 

Secrétaire  adftrintj  DEiAiAimE. 

Trésorier^  Pradal. 

Bibliothécaire  archiviste^     Auger  de  Lassus. 
M.  Simon  continue  ses  intéressantes   communications 
sur  la  Littérature  persane*  —  Histoire  de  Kourroglou ,  ban- 
dit turcoman. 

SéMce  au  6  man  1$50. 

PRàSlDERCE  DE  K.  6ËLY, . 

Lecture  et  adoption  du  procès-verbal  de  la  précédente 
séance. 

M.  Lambert  demande  à  échanger  son  titre  de  membre 
résidant  en  celui  de  membre  correspondant. 

M.  Dubochet,  membre  correspondant^  demande  à  de- 
venir membre  résidant;  ces  deux  demandes  sont  agréées. 


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—  138  ~ 

La  Société  a  reçu  : 

l.""  Une  lettre  de  H.  Neveu-Derotrie  accompagoant  plu- 
sieurs exemplaires  de  deux  projets  de  loi,  Tuo  sur  les 
caisses  de  retraite  pour  la  vieillesse ,  l'autre  sur  les  Caisses 
de  Secours  mutuels. 

2."*  Bulletin  de  la  Société  d'Agriculture,  des  Sciences 
et  Arts  d*ADgers;  1/S  2.%  3.«  et  4/  livraison. 

S.""  Bulletin  de  l'Association  agricole  du  Sig ,  décembre 
1849 ,  offert  par  M.  Simon. 

La  Société  s'occupe  ensuite  d'une  proposition  du  Co» 
mité  central  relative  à  un  changement  de  locah 

Après  une  discussion  à  laquelle  plusieurs  membres 
prennent  part ,  la  Société  autorise  le  Comité  central  à  trai- 
ter en  son  nom  avec  le  propriétaire  du  nouvel  apparte- 
ment, et  à  donner  congé  de  son  local  actuel* 

Sur  un  rapport  de  M.  Talbot,  au  nom  d'une  commission, 
la  Société  admet  au  nombre  de  ses  membres  résidants 
M.  Carissan  (Eugène-Pierre- Vincent) ,  né  à  Nantes ,  le  6 
juillet  1830,  professeur  d'histoire  et  de  langue  française  à 
rÉcole  primaire  communale  supérieure ,  collaborateur  lit- 
téraire du  journal  V Alliance ,  et  auteur  d'un  Essai  sur  les 
chants  populaires  des  différentes  nations  européennes, 
comparés  à  ceux  de  la  Bretagne,  publié  en  feuilletons 
dsim  VAUiance,  1849. 

Le  Château  et  les  anciennes  fortifications  de  Nantes, 
publié  dans  Nantes  et  la  Loire-Inférieure ,  2  vol.  in-f'*. 

Séance  extraordinaire  du  20  mars  1850. 

PIVÉSinE^XCE   BB   H.    GRÉGOIRE,    VICE-PRÉSIDENT. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté. 


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—  139  — 

Correspondance: 

1.*  Lettre  de  H.  A.  Guéraud  accompagnant  un  portrait 
de  M.  l'abbé  Lechat ,  offert  à  la  Société. 


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VOIE  ROMAINE 

DE  RENNES 
VERS  LE  MONT  SAINT-MICHEL, 

PAR  H.  BIZEDL. 


Cette  voie  devait  sortir  de  Rennes  par  la  porte  Saint- 
Michel  ,  puis  aller  par  la  rue  Haute ,  traverser  la  rivière 
dllle  au  Pont-Saiot-Martin,  où  débouchaient  plusieurs 
autres  voies ,  et  entre  autres  celle  de  Rennes  à  Gorseul. 
Elle  se  rend  au  bourg  de  Saint-Grégoire ,  en  passant  par 
le  village  de  la  Chaussée ,  qui  lui  doit  son  nom ,  et  en 
suivant  d'assez  près  la  rive  droite  de  Tille.  Elle  est  connue, 
dans  la  paroisse  de  Saint-Grégoire ,  sous  le  nom  de  Che^ 
min  de  la  Chèwe  ,  et  les  habitants  Fattribuent  à  la 
bonne  duchesse  Anne.  L'ancien  pavé  ou  empierrement  est 
souvent  recouvert  par  des  alluvions;  mais  elle  est  encore 
visible  en  beaucoup  d'endroits ,  au  témoignage  de  M.  Du- 
plessix  de  Grenedan,  qui  a  fourni  plusieurs  renseigne- 


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—  141  — 

ments  sur  celte  Voie  au  savant  H.  de  Gerville ,  de  Valognes, 
en  1S39.  Une  autre  personne  a  signalé,  sur  le  bord  de  la 
▼oie ,  au  nord  et  à  t  kilomëtre  du  bourg  de  Saint-Gré- 
goire ,  tell  vestiges  d'un  fort  où  camp  romain. 

M.  de  Gèrville,  qui  s'est  beaucoup  occupé  de  cette  voie  , 
parce  qu'elle  lui  paraît  être  le  prolongement  de  celle  qu'il 
conduit  de  la  côte  dé  Normandie  à  la  côte  de  Bretagne , 
aa  travers  des  gt^èves  du  llfont-Saint-Micbel  ;  M.  de  Ger- 
viHe  nous  donné ,  à  son  sujet ,  à  la  fm  de  sa  notice  sut  les 
viOes et  voies  romaines  de  la  Éùsse-Normandie ^  Valognes, 
1838,  in-8  ,  p.  91,  des  renseignements  qu'il  dit  avoir 
reçus  d'une  personne  très-édairée  de  Itennes  ,  et  qui  sont 
le  résultat  d'une  rechercbe  attentive  et  applrofondie  ,  faite 
depuis  plusieurs  années  entre  Rennes  et  Feins. 

La  foute  romaine,  d'après  cette  personne,  a  laissé  des 
tractô  trës-mariquées  et  très-abondantes  entre  Rennes  et 
Feins.  Elle  est  connue,  dans  le  pays,  sous  le  nom  de  che- 
min de  la  duthesse  Anne.  Ce  nom  donné ,  dans  toute  la 
Haute-Bretagne,  aux  voies  antiques ,  suffit  pour  démontrer 
que  celte  dont  nous' cherchons  la  trace,  est  bien  véritable- 
ment Foéuvre  des  RoYnains. 

Ihi  bourg  de  Saint-Grégoire ,  la  voie  va  passer  au  village 
du  Vivier-Louis ,  puis  à  celui  de  la  Bretesche ,  dont  le 
nom ,  dans  notre  vieux  langage  ,  signifiait  forteresse^  camp, 
tout  ouvrage  âe' fortification;  de  là  aux  villages  de  la  Pierre, 
d'Evrati  ^  As  la  Êtatietais  en  Bettou ,  dont  elle  laisse  le  clo- 
cher à  2,300'  mètres  à  YÉ.  Elle  doit,  en  quittant  la  Haue- 
lai^,  traverser  un  affluent  de  la  rivière  d'IUe,  au  moulin  à 
eau  de  la  Hardrouyère,  à  très-peu  de  distance  de  la 
maison  dit  même  nom.   Elle  remonte  ensuite    le  coteau 


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~  142  ~ 

entre  les  villages  de  la  Goufrais  ,  qu'elle  laisse  à  VO. ,  et 
celui  delà  Hazure,  à  TE.;  puis,  prenant  la  dirçctîoa  N. 
plein  ,  elle  se  rend  au  village  de  la  Michetièrc ,  laissant  à 
un  peu  plus  de  2  kilom.  les  bourgs  de  Cheveigné ,  à  TE. , 
et  de  Melesse,  à  TO.  Elle  doit  passer  à  la  queue  de  l'étang  de 
la  Grimaudais ,  dont  le  manoir ,  situé  en  Melesse,  reste 
à  2  ou  300  mètres  ,  à  TE.  de  la  voie^  qui  doit,  dans  le 
même  intervalle ,  passer  aux  villages  de  Sérvaude  et  de  la 
Spetière,  ou  au  moins  dans  leur  voisinage  trèç-rappvoché, 
La  voie  laisse  un  peu  à  TO.  la  ferme  du  Chastelier^  dont 
on  sait  que  le  nom  annonce  toujours  une  enceinte  forti- 
fiée ,  qu'il  conviendrait  d'explorer. 

L'observateur  qui  nous  a  guidés  jusqu'ici,  conduit  tout 
d'un  trait  la  voie  depuis  la  Michetière  jusqu'au  bourg  de 
Saint-Germain-sur-Ule.  Dans  ce  trajet  de  2,500  met.  ^  elle 
traversait  deux  très-petits  affluents  de  Tille ,  et  cette  ri- 
vière elle-même  ,  par  un  gué  qu'on  croit  avoir  existé  près 
du  château  du  Verger.  De  là  elle  gagnait,  en  gravissant  le 
coteau  ,  le  bourg  de  Saint-Germain ,  placé  sur  la  sommité , 
et  y  passait  près  de  l'église.  Lorsqu'on  a  creusé  le  canal 
d'IUe-et-Rance,  en  dérivation  de  l'ancien  lit  de  la  rivière  , 
sous  Saint-Germain ,  on  a  dû  reconnaître  les  vestiges  de  la 
voie,  que  Ion  coupait  dans  sa  largeur. 

Du  bourg  de  Saint-Germain ,  notre  guide  nous  conduit, 
sans  observations  intermédiaires,  jusqu'à  celui  d'Aubigné , 
et  dit  que  la  voie  arrive  à  l'ancien  château  ruiné ,  qu'indi- 
que la  carte  de  Cassini.  Nous  parcourons  ainsi  5  kilom. ,  et, 
cette  carte  sous  les  yeux ,  tirant  une  ligne  droite  de  Tun  à 
l'autre  clocher ,  nous  pensons  que  la  voie  devait  passer  très- 
près  des  villages  de  la  Fouche  et  du  Rocher ,  de  la  maison 


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—  143  — 

ou  manoir  de  Brin,  des  villages  de  la  Croix,  du  Bas-Gis* 
seul  et  du  Tertre-au-Bouvier.  Elle  laisse  ainsi  à  un  kilom. 
à  rO.  le  bourg  de  Saint-Mard ,  ou  plutôt  Saint-Médard*sur 

nie. 

Le  château  ruiné ,  dont  nous  avons  parlé ,  est  situé  tout 
près  et  au  S.-E.  du  bourg  d'Aubigné.  Il  serait  bien  à 
propos  qu  on  en  levât  le  plan.  Il  y  a  lieu  de  croire  qu'il 
fut ,  dans  l'origine ,  un  camp  romain  ,  destiné  à  défendre  la 
voie.  Quoiqu'il  en  soit,  ce  château,  au  moyen-âge,  donna 
son  nom  aux  seigneurs  d'Âubigné,  dont  le  plus  ancien, 
nommé  dans  les  preuv«  de  Thist.  de  Bret. ,  par  D.  Morice , 
t.  1,  491,  est  Raduif,  qui  attesta  et  scella  de  son  sceau 
une  donation  faite  à  labhaye  du  Mont-Saint-Michel,  par 
Guillaume  Boterat,  en  1095,  à  Tinstant  du  départ  de  ce* 
lui-ci  pour  la  croisade.  Le  titre  était  conservé  au  chartrier 
de  l'abbaye ,  et  il  portait  encore  le  sceau ,  qui  a  été  donné 
par  nos  bénédictins ,  ayant  pour  légende  :  Sigillum  Ba- 
dul/i  de  albineio^  avec  Técussou  de  gueules  à  4  fusées  d'or 
posées  en  fasce. 

Un  seigneur  d'Aubigné,  qui  vivait  dans  le  même  temps 
et  que  les  chroniques  de  Robert  du  Mont  et  de  Mathieu 
Paris  nomment  Guillaume ,  parait  être  de  la  même  fa- 
mille, puisqu'on  le  donne  comme  chevalier  du  pays  de 
Bol.  II  se  trouvait  parmi  les  Bretons  qui,  sous  les  ordres 
d'HéUe,  comte  du  Mans,  combattirent,  à  la  bataille  de 
Tinchebray,  pour  Henri  L",  usurpateur  du  trône  d'Angle- 
terre ,  contre  Robert,  duc  de  Normandie,  son  frère  aine, 
qui  devait  légitimement  succéder  à  Guillaume*le*Roux , 
leur  frère  commun.  Cette  bataille  fut  donnée,  dit-on,  le 
27  septembre  1106.  Guillaume   d'Aubigné  s'y  distingua 


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1 


-  444  - 

tellement  qu'on  assure  qu'il  eût  la  meilleure  part  à  la  yic 
toire  que  Henri  remporta. 

On  trouve  successivement  dans  nos  chartes  bretonnes  : 

Juhel  d'Aubigné ,  en  11 22  ; 

Raduif  ou  Raoul  d'Aubigné,  en  1149; 

Guillaume  d'Aubigné,  en  1151, 1162,  et  pobablement 
en  1183,  date  d'un  titre  de  l'abbaye  de  la  Vieux- Vfllé, 
portant  que,  par  suite  d'accord  sur  toutes  leurs  querelles, 
ledit  Guillaume  reçoit  d'ArscuIf  de  Soligné  cent  souldées, 
centum  solidatas,  de  rente. 

On  trouve,  sous  la  môme  année,  1183,  Raduif  d'Au- 
bigné, qui  paraît  être  le  fils  de  GuHIaume.  Il  devint  sei- 
gneur de  Landal ,  en  la  paroisse  de  I^aboussac ,  par  son  ma- 
riage avec  Maliaud  de  Mont-Sorel,  unique  héritière  de 
Guillaume  de  Mont-Sorel.  Nous  aurons  occasion  de  parler, 
dans  un  autre  chapitre ,  de  ce  chftteau  de  Landal ,  Tune  des 
places  les  plus  importantes  de  la  frontière  de  Normandie. 

Le  P.  Aug.  Dtt  Paz,  p.  453,  nous  apprend  que  Raduif 
fit  le  voyage  de  la  Terre-Saincte  et  alla  en  Hierusalem,  ap- 
paremment avec  Philippe-Auguste ,  en  1190;  mats  il  ne 
nous  dit  point  s'il  en  revint.  Sa  veuve  remariée  à  Jean  Pay- 
nel  (Paganelhis) ,  chevalier  d'une  noble  et  ancienne  mai- 
son de  Normandie ,  était  veuve  une  seconde  fois,  eti  1228. 
(V.  Du  Paz,  p.  453.) 

Le  P.  Du  Pas  donne  pour  fils  à  Raduif  un  autre  Raduif, 
2.'  du  nom.  Mais  je  crois  qu'il  se  trompe.  On  trouve,  en 
li99,  1200  et  1204, un  Guillaume  d'Aubigné,  qui  avait 
dès  lors  deux  enfents,  Raduif  et  Guillaume  (1),  et  qui  de- 

(1)  V.D.  Mor.pr.  1.776. 


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—  145  ~ 

vait  être  ffls  do  Radulf  marié  à  Mabaud  de  Mont-Sorel.  Son 
sceau  portant  un  écuseon  de  gueules  aux  quatre  fusées  d'or 
posées  en  fasce,  comme  celui  du  Raduif,  i.^^du  nom,  que 
nous  avons  mentionné  ci-dessus,  mais  brisé  de  6  bezants 
d*ar,  3  en  tête  eti  en  pointe,  était  joint  à  un  acte  de  1200 , 
tiré  des  archives  de  Marmoustier  (1).  Ces  bezants  pour- 
raient donner  à  penser  qu  il  aurait  suivi  son  père  à  la 
croisade.  (V.  D.  Mor.  pr.  1.  p.  784  et  n.«  LXV,  des 
sceaux.) 

Radulf,  que  |e  crois  fils  aîné  de  Guillaume,  se  trouve 
dans  les  mêmes  chartes,  en  1226,  1247,  1267  et  1272. 
Cependant,  je  serais  porté  à  croire  qu'il  y  a  eu  successive- 
ment deux  Radulf;  c^r,  en  1247,  Raduif  d*Âubigné, 
seigneur  de  Landal ,  qui  présenta  à  l'ôst  du  duc  deux  che- 
vaiiers  pour  cette  terre ,  n'était  pas  lui-même  encore  che- 
valier, 

....  Qut\  tune  non  erat  miles» 
Ce  qui  prouve  qu'il  était  encore  fort  jeune.  (V.  D.  Mor.  pr. 
i.  931.) 

Ce  doit  être  de  ce  dernier  Radulf,  que  sortit  Guillaume 
d'Aubigné,  en  qui  paraît  s'être  éteint  le  nom  de  sa  maison. 
Il  n'eut  quune  fille,  Mahaud  ou  Mathilde,  qui  épousa  Oli- 
vier, sire  de  Montauban ,  et  lui  porta  les  terres  de  Landal 
et  d*Âubigné. 

Ce  fut  Mahaud  qui,  en  1388,  dans  l'acte  de  partage 
donné  par  Olivier  de  Montauban  à  Jehanne  de  Montauban, 
sa  sœur,  consentit  à  ce  que  la  seigneurie  d'Aubigné  lui  fut 


(1)  y.  D.  Mor.  784. 


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—  146  — 

concédée  en  propre.  Ce  même  acte  nous  apprend  que  Je- 
hanne  de  Montauban  était  alors  veuve  de  messire  Jehan 
de  la  Tailleie  ou  Teillais.  On  ne  sait  si  elle  avait  des  en- 
fants qui  possédèrent  après  elle  cette  chaste'ainie ,  qui  re- 
levait du  sire  de  Chastillon ,  ni  comment  cette  terre  fut 
réunie  à  celle  de  la  Magnanne ,  qui  en  est  voisine.  Je  pré- 
sume qu  Aubigné  passa,  avec  la  Magnanne , dans  la  maison 
de  Mont-Bourchier,  par  le  mariage  de  René  de  Mont-Bour- 
chier,  seigneur  de  Chassé,  avec  la  dame  de  la  Magnanne. 
C'est  tout  ce  que  nous  apprend  d'elle  la  généalogie  jointe 
à  la  réformation  de  la  noblesse  de  Bretagne  de  1668. 

Cette  digression  sur  l'antique  maison  d'Aubigné  ne  pa- 
raîtra peut-être  pas  déplacée  ici  à  ceux  qui  aiment  à  remon- 
ter à  l'origine  de  nos  anciennes  seigneuries  bretonnes,  ou, 
pour  parler  plus  exactement,  à  l'époque  où  elles  sem- 
blent sortir  de  la  nuit  des  temps.  Revenons  à  la  voie  ro- 
maine. 

Les  renseignements  du  guide  qui  nous  a  si  bien  conduits 
depuis  Rennes  jusqu'à  Aubigné,  ne  vont  pas  au-delà.  Il 
ajoute  seulement  que  près  des  ruines  du  vieux  château  et 
surtout  vers  Feins,  on  rencontre  des  traces  considérables 
d'anciennes  habitations.  Mais  quelle  est  la  situation  précise 
de  ces  débris?  Quel  est  le  caractère  de  leur  maçonnerie?  Il 
serait  très-intéressant  d'étudier  cette  localité,  d'autant  plus 
que  nous  arrivons  à  Feins,  et  que  cette  petite  bourgade  a 
acquis ,  depuis  un  siècle,  une  certaine  célébrité  dans  les 
dissertations  des  savants. 

L'itinéraire  d'Antonin  donne  une  route  se  rendant 
d'Alauniumk  Condate,  et  il  l'indique  de  la  manière  sui- 
vante : 


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~  147  — 

lier  ab  AUmnio  Condale 
H.  p.  Ixivij.  Sic: 

Cosedias m.  p.  —  xx. 

Fanum  Marlis m.  p.  —  xxxij. 

Ad'Fines • .......     m.  p.  —  xxvij. 

Condate m.  p.  —  xxix. 

Od  est  à  peu  près  d'accord  à  reconnaître  Aleaume,  près 
de  Valognes,  dans  Alaunium,  et  Rennes  dans  Condate. 
Hais  on  est  loin  de  Tètre  sur  l'empkcement  de  Cosedias  et 
surtout  de  Fanum  Marlis  et  à'Ad'Fines.  Je  ne  m'occuperai 
point  ici  des  deux  premières  de  ces  stations  intermédiaires; 
je  les  crois  du  territoire  normand ,  et  je  ne  veux  point  em- 
piéter sur  les  droits  que  le  savant  M.  de  Gerville  s'est  si  lé- 
gitimement acquis  par  ses  recherches  et  ses  écrits  sur  le 
Cotentin. 

Reste  X Ad'Fines,  dont  je  ne  puis  m'empécher  de  parler, 
étant  arrivé  à  une  localité  dont  le  nom  a ,  par  sa  grande 
analogie,  attiré  Tattention  des  explorateurs  d'antiquités  ro- 
maines. 

Le  premier  qui  se  soit  occupé  de  noire  ad-fines,  est 
le  géographe  Sanson ,  qui  le  plaça  à  Pont-Orson ,  sur  la 
limite  actuelle  de  la  Bretagne  et  de  la  Normandie.  Cette 
opinion  est  rappelée  dans  la  note  iij  jointe  à  THist.  de 
Bret.  de  D.  Morice,  1,  856,  et  donnée  comme  extraite 
des  mémoires  de  l'abbé  Gallet.  Celui-ci  attaque  Sanson 
sur  les  distances  qu'il  a  fournies  entre  les  lieux  où  il 
place  les  stations  romaines,  et  ajoute  que,  d'ailleurs,  Pont- 
Orson  ne  paraît  pas  avoir  été  anciennement  une  frontière 
d'aucuns  peuples  ;  qu'ad^ fines  convient  mieux  à  la  ville 
de  Fougères,  qui  était  sur  les  confins  des  Rcnnoisetdes 


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—  148  — 

Diablintes.  C'est  par  des  raisonnements  de  cette  force  que 
le  bon  abbé  Gallet  croyait  éclaircir  la  question.  C'était 
ainsi  que,  dans  leXVII.*  siècle  et  au  commencement  du 
XVIII.^,  on  traitait  de  la  géographie  ancienne  :  la  note  de 
Gallet,  reproduite  par  D.  Horice,  en  1740,  est  un  inex- 
tricable cabos  de  conjectures,  qui  doivent  toutes  dispa- 
raître au  flambeau  qu'une  saine  critique  commence  à  faire 
luire  dans  les  recherches  d'antiquité.  Malheureusement,  ce 
système  déplorable  a  été  suivi  depuis  Gallet,  et  il  est 
eocore  de  nos  jours  celui  de  bien  des  gens. 

L'avis  de  Gallet  prévalut,  et  dans  la  carte  de  fArroori- 
que  jointe  à  son  Histoire  de  Bretagne ,  D.  Mortce  place 
Yad' fines  à  Fougères,  et  on  peut  voir  quelle  singulière 
ligne  il  donne  à  parcourir  pour  aller  de  Rennes  à  Cou- 
stances,  où  l'on  place  le  cansediœ  de  l'itinéraire.  En  partant 
des  autres  voi^  romaines  de  la  Bretagne,  nous  aurons 
bien  d'autres  observations  à  iâire  sur  cette  carte ,  pitoyable 
es^i  de  ^ens  fort  savants,  du  reste  (je  dirais  presque  trop 
savants),  mais  qui  ne  travaillaient  que  sur  des  hy|)othèses, 
sans  avoir,  et,  ce  qu'il  y  a  de  pis,  sans  s'inquiéter  de  ces 
observations  locales  et  matérielles,  qui  vous  servent  de  (il 
conducteur  et  vous  font  aller  du  connu  à  l'inconnu. 

Antérieurement  à  1750,  le  président  de  Robien  avait, 
dans  le  chap.  xvj  d'un  ouvrage  de  Recherdies  sur  la  Bre- 
tagne (mss.  à  la  Bibl.  de  Rennes),  traité,  le  premier,  de 
quelques  voies  romaines  de  la  province.  H  en  avait  signalé 
un  fragmeat  dans  les  landes  de  Romasy ,  dont  j'ai  parlé 
dans  mon  chapitre  :  De  la  voie  de  Rennies  à  Àwanehes. 
11  ajoutait  que  ce  fragment  «  se  rendait,  de  même  que 
»  pl«Muis  autres,  au  bourg  de  Faine ^  qui  parahrait 


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—  U9  — 

»  «voir  tifé  900  Dop)  de  b  jonotion  de  toas  ces  d^emins, 
»  qui  se|Qbl^Pt  y  prendre  fin.  »  On  voit  que  M.  de  Ro- 
biea  ne  soDgeafil  eiUleaient,  en  parlant  de  Fains,  à  Yad- 
fine$  de  ritînér^ire  d'Aotonin ,  et  que  ce  nom  ne  lui  a 
inspiré  autre  chose  qu'un  mauvais  calembourg  qu'on  ne 
devait  paa  atiendre,  comme  je  Tai  déjà  fait  observer,  de 
ce  savant  magjs^raA* 

M.  de  Rabien  était  en  correspondance  avec  un  bcnnme 
qpi  a  rendu  de  bien  giande  services  à  la  science  des  an- 
tiquités, le  comte  de  Caylus.  Il  lui  envoya  une  copie  de 
son  chapitre  sur  les  VQÎes  romaines ,  et  Caylus  l'inséra  par 
extraits,  et  en  y  ajoutant  quelques  notes,  dans  le  t.  vj  de 
sou  Recueil  d'antiquité,  p.  369-370.  C'est  au  commence- 
ment de  cet  extrait  que  cçt  illustre  antiquaire  a  écrit  le 
passage  suivant,  qui  devrait  être  gravé  dans  la  mémoire 
de  tous  ceux  qui  s'occupent  de  pareilles  recherches  :  a  Le 
9  plaisir  de  parler  des  premiers  sur  les  antiquités  d'un 
j»  pays  si  considérable ,  aussi  intéressant  et  aussi  inconnu 
»  que  r AroKurique ,  ne  m'éblouit  point  assez  pour  ne  pas 
A  sentir  que  les  indications  de  ces  anciens  chemins  sont 
»  très-vagues*  On  the  peut  en  porter  convenablement  fti'o- 
9  prés  avoir  parcouru  un  pays  la  toise  à  la  main,  et  levé 
9  des  cartes  sur  k  terrain.  » 

}e  n'ai  pas  besoii;i  de  dire  que  M.  de  Caylus,  en  citant 
le  bourg  de  Feins,  se  garda  bien  de  reproduire  le  malen- 
contreux rapprochement  de  notre  président  breton.  Use 
contenta  d'ajputer  :  «  On  sait  assez  que  ce  no^i  vient  de 
9  finss^t  confil^  »  L'itinéraire  d'Antonin  flit  encore  ici 
i^is  en  ou|))i ,  et  cependant  l'induction  arrivait  naturelle^ 
m^t. 


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—  150  ~ 

A  peu  près  dans  le  même  temps,  d'ÂnviUe  s'occupait 
de  sa  notice  de  la  Gaule ,  qui  parut  en  1760.  Il  y  parie 
assez  longuement  de  notre  ad-fines.  Son  système  consi- 
stait à  calculer  les  distances  de  l'itinéraire  et  de  la  Table 
théodosienne,  qu'il  a  bien  rarement  trouvées  concordautes 
avec  les  localités  que  lui  faisait  choisir,  comme  stations 
romaines,  une  analogie ,  plus  ou  moins  rapprochée,  dans 
les  noms,  qu'il  recherchait,  sur  les  cartes  modernes,  avec 
une  attention  toute  particulière.  On  peut  croire  que  cehiî 
du  bourg  de  Feins  ne  lui  aura  pas  échappé.  Cependant,  il 
n'en  foit  aucune  mention.  En  effet,  il  n'aurait  point  trouvé, 
entre  ce  bourg  et  Rennes,  la  distance  XXIX,  marquée 
par  l'itinéraire  entre  ad-fines  et  Condate.  Cette  différence  en 
moins  lempéche  même  d'adopter  la  conjecture  de Sanson , 
qui,  comme  nous  l'avons  vu,  place  ad- fines  à  Pont-^Orson, 
quoique  d'Anville  reconnaisse  que  cette  petite  ville  est  vé- 
ritablement placée  sur  la  limite  des  diocèses  de  Rétines  et 
d'Avranches,  et  que  la  règle  générale  étant  que  les  diocèses 
ont  remplacé  les  cités  gauloises,  on  se  trouverait  ici  aux 
confms  des  Redones  et  des  Abrincalui.  Pour  avoir  ces  29 
lieues  gauloises,  il  se  trouve  obligé  de  pousser  au-delà  de 
Pont-Orson ,  jusqu'à  un  petit  bourg  nommé  Huines ,  et 
qu'il  écrit  aussi  Wines ,  afm  d  avoir  la  facilité  de  changer 
le  w  en  /*,  bien  que,  dans  tout  le  pays,  le  w  ne  soit  Yiul- 
lem^nt  en  usage.  11  paraît  enchanté  de  la  découverte ,  et 
comme  le  prolongement  de  cette  ligne  le  forcerait  de  tra- 
verser la  partie  des  grèves  du  Mont-Saint-Michel  où  vien- 
nent se  décharger  ,  par  une  commune  embouchure ,  les 
rivières  de  Sée  et  de  Selune,  il  n'hésite  pas  à  en  supposer 
la  possibilité ,  soutenant  qu'en  cet  endroit  la  grève,  res« 


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—  151  — 

serrée  entre  deux  pointes  de  la  terre-ferme,  n'a  pas  plus 
de  700  toises  de  largeur ,  quand ,  d'après  toutes  les  cartes, 
elle  en  a  plus  de  2400^  Je  ne  suivrai  pas  l'auteur  dans  sa 
dissertation  sur  1'^  et  le  tD,  afin  de  trouver  /Inas  dans 
kuine$i  c'est  un  exemple  trop  déplorable  des  erreurs  où 
la  manie  ded  systèmes  entraîne  les  meilleurs  esprits. 

L'abbé  Déric,  dans^  son  introduction  à  YHist.  Ecclisiast 
de  Bretagne,  p.  7,  1777,  in-12,  a  été  le  premier  à 
battre  en  brèche  l'opinion  de  d'Ânville  sur  Yod-fines.  11 
eut  recours  aux  archives  de  la  paroisse  de  Huines,  et  il 
y  trouva  un  registre  avec  ce  titre  :  Regislrum  spansaHO" 
nm,  baplistnarum  t  mairimoniorum  et  inhumationum 
fer  me  faetum  jacobum  Fouehais  presbyterutn  vicarimn 
paroehiœ  dm  pétri  de  hymnis^  anno  1521.  Il  en  tira  la 
conséquence  que  la  paroisse  de  Huines  s'appellait  autre- 
fois Bymn  ou  Hymne.  Je  n'iTài  point  aussi  loin ,  car  je 
crois  que  le  vicaire  Fouehais  a  donné  au  mot  Huines  une 
interprétation  forcée.  Mais  au  moins  peu^-on  conclure  de 
tout  cela  que  personne ,  excepté  d'Anville ,  n'y  a  trouvé 
le  mot  fines. 

Ce  bon  abbé  Déric ,  malgré  sa  manie  d'expliquer  tous 
les  noms  de  lieu  par  le  bas-breton  dont  il  ne  savait  pas 
un  mot ,  ou  plutôt  par  une  langue  prétendue  celtique  que 
personne  ne  connaît  et  qu'il  forgeait  apparemment  au  be- 
soin ,  l'abbé  Déric  ne  manquait  ni  d'érudition  ni  même , 
en  bien  des  cas  ,  d'une  certaine  critique.  Il  présenta,  dans 
le  même  ouvrage ,  sa  conjecture  sur  Vad- fines  j  et  fut  le 
premier  à  l'établir  à  Feins  (1).  cr  II  existe ,  dit-il ,  près  de 

(1)  Dans  M8  Oéservations  sur  les  deux  votes  romaines  qui 

11 


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~  158  — 

D  Bazouges  et  de  Cooibourg,  à  sept  ou  huit  lieues  de 

"  Condaie  des  Redones  «  «ne  paroisse  dépend^oie  de  oe 

j»  diocèse ,  qui  conserve  encore  actueDemeot  le  D<Hn  de 

M  Fim.  C'est  là  ce  que  roulait  dire  rilioéraire  d'Antonin. 

»  Les  confins  des  Redones  s'y  tenntfient  ainsi  que  ceux 

»  des  DiabUnles.  La  route  qui  prenait  de  Condmtê  à  Fins, 

9  conduisait  de  là  vers  les  Moustters-d*Aloniie  (eroplace- 

»  ment  iïAlaunium^  seloa  d'An  ville).  Nous  aomioes  sur- 


conrfuisatent de  Condaie  {^Rennes  en  Bretagne\dans  ie  fond 
du  Cotentin ,  lues  en  1774 ,  k  l'Académie  des  lascriptioDS  et  insé- 
rées dans  le  t.  xlj,  p.  536  et  sm.  du  Beeneil  des  Mémoires  de  cette 
Compagnie,  l'abbé  Bellay  parle  du  bovrg  de  Fains,  mais  seulement 
pour  tirer  do  sa  sitaaiion,  à  qaatre  lieues  et  demie  de  la  limite  des 
évêchés  de  Rennes  et  d'Avrancbes ,  la  preuve  que  celte  limite  a 
été  changée.  Ce  qu'il  en  dit  est  assez  obscur,  comme  ce  qu'il  ajoute 
en  finissant  sur  l'emplacement  qu'il  donne  k  Vad-fiines  entre 
Rennes  et  Saint- lames  de  Bcuvron,  où  il  place  X^fanumMortU, 
One  mauvaise  carte ,  jointe  à  son  mémoire,  n'en  apprend  -guèies 
plus. 

Mais  une  remarque  fort  intéressante  consignée  dans  ce  mémoire 
et  que  je  n'ai  vue  reproduite  nulle  part,  c'est  que  de  quatre  ma- 
nuscrits de  l'itinéraire  d'Antonin,  que  l'abbé  Belley  a  compulsés 
h  la  bibliothèque  du  roi ,  aucun  n'est  conforme  \  Téditionde  Wes- 
Bcling  qui  donne  le  nombre  nix  entre  Ad^Fines  et  Condaie.  Le 
premier ,  du  1X.«  siècle  et  portant  le  n.*  7330  a  donne  le  nombre 
xvij.  Lesecond^da  X.«  siècle,  n.<>  4806,  donné  k  nombre  zviij. 
Le  troisième,  du  X.«  siècle,  n.»  4807,  donne  le  nombre  Kviiij  , 
ainsi  que  le  quatrième,  du  XII.«  siècle,  n.<>  4808  Malgré  cette  re- 
marque ,  la  leçon  do  Wesseling  est  la  seule  suivie  par  les  disser- 
tateûrs. 

Je  puis  ajouter  qu'une  petite  édition  que  je  possède ,  Lvgduni 
ap.  hmr.  sim.  f'rnceniù^  I621,in  S.S  porte  aussi  le  nombre  six. 


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~  153  — 

»  pris  que  l'on  n*ait  pas  bit  plutôt  cette  découverte. . . 
9  La  seule  chose  qui  pourrait  embarrasser  eu  plaçant  Fines 
o  de  k  manière  que  nous  &isons ,  c'est  que  la  distance 
9  xxix  dans  Titinéraire  entre  Candale  et  Fines ,  ne  con- 

•  vient  pas  au  local  que  nous  désignons.  Hais  cette  ob- 

•  jection  se  résoudra  facilement ,  si  Ton  considère  comme 
9  certain  qqe  les  nombres  de  l'itinéraire  sont  souvent  fau- 

•  tils  et  qu'ils  ont  besoin  de  correction,  a  (  Déric.  ibid. 
p.  9  et  (6.) 

On  voit  que  l'abbé  DéHc  retombe'  dans  le  système  de 
d'Ânville,  quant  au  calcul  des  distances ,  et  aux  mauvaises 
excuses  tirées  de  la  faute  des  copistes  de  Titinéraire,  quand 
ces  distances  ne  concordent  pas  avec  les  conjectures  sur 
tel  ou  tel  lieu.  Il  parle  vaguement  d'une  route  qui  passe 
à  Feins ,  sans  en  rechercher  les  traces.  Il  ne  paratt  pas 
même  avoir  eu  connaissance  de  l'ouvrage  manuscrit  de  M. 
de  Robien  ,  ni  du  vj.*  volume  du  Recueil  d'Antiquités  du 
comte  de  Caylus  ,  et  conséquemment  du  fragment  de  voie 
de  deux  lieues  de  long  dans  les  landes  de  Romazy ,  frag- 
ment qui ,  k  mon  sens,  en  dit  plus  que  toutes  ces  distances 
calculées  sur  des  localités  fort  ^incertaines. 

La  conjecture  d^  l'abbé  Déric  resta  longtemps  sans  être 
accueillie  par  les  antiquaires  bretons.  Ogée,  dans  le  tom.  2 
de  son  Dictionn.  de  Bretagne,  qui  parut  en  1779,  n'en 
parle  aucunement  à  l'article  Feins^  et  même  il  ne  men- 
tionne d'antiquités  d'aucun  genre  dans  cette  localité.  Feu 
H.  Rallier,  de  Fougères,  membre  de  la  Société  des  Anti- 
quaires de  .Fram^ ,  s'était  occupé  de  la  voie  que  nous  re- 
cherchons, quant  à  son  parcours  dans  le  département  d'Ille- 
et- Vilaine:  «On  ne  peut  douter,  dit-il,  d'après  l'itiné- 


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—  154  — 

»  raire  d'Antonin  ,  qu'une  route  romaine  ne  conduisit  de 
j>  Condale  (Rennes)  jusqu'au  lieu  nommé  alors  Fines^  et 
)>  aujourd'hui  Huynes^  à  deux  petites  lieues  au  N.-E.  de 


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—  155  — 

ligne  qui  est  la  représentation  de  la  voie  mentionnée  par 
l'itinéraire.  Cette  ligne  n'est  pas  précisément  la  voie  elle- 
même,  mais  M.  de  Gerville  &it  observer,  avec  quelque 
raison,  que  ce  sera  dans  un  voisinage  assez  rapproché  de 
cette  ligne  droite,  qu*on  pourra  rencontrer  les  vestiges  de 
la  voie  et  les  stations  intermédiaires.  C*est  un  moyen  fort 
ingénieux,  surtout  quand  ou  travaille,  comme  il  le  fait,  sur 
la  carte  de  Cassini.  C'est  ainsi  que  partant  d'ÂUeaume,  il 
est  arrivé  à  Coustances,  Camedire  ;  de  Constances  à  Saint- 
Pair,  à  1  1.  S.-E.  de  Granville,  où  il  croit  devoir  placer  le 
fanum  Marlis;  de  Saint-Pair,  traversant  la  baie  du  Mont- 
Saint-Micbel  qu'il  croit  avoir,  du  temps  .des  Romains, 
donné  passage  à  une  ou  deux  voies,  il  est  conduite  par  sa 
ligne  droite  au  bourg  de  Fçins,  où  il  place  Vad-fines.  On 
peut  voir  le  détail  d& cette  investigation,  dans  sa  Notice  des 
viUes  el  voies  romaines  en  basse  Normandie ,  Valognes , 
1838,  in-S."",  et  dans  le  supplément  qu  i]  y  a  ajouté. 

Reste  à  savoir,  pour  la  confirmation  de  cette  conjecture, 
si  la  voie  passe  véritablement  au  bourg  de  Feins.  On  va 
voirparce  que  je  vais  dire,  que,  jusquà  plus  ample  infor- 
mation, il  y  a  quelque  raison  d'en  douter. 

La  personne  qui  a  fourni  de  si  bons  rensergnements  à 
H.  de  Gerville  et  qui  nous  a  conduits  jusqu'au  vieux  châ- 
teau d'Aubigné,  remarque  que  l'église  actuelle  de  Feins 
resté  un  peu  a  TO.  de  la  direction  de  la  voie.  Ceci  con- 
corde merveilleusement  avec  l'observation  suivante  donnée 
par  M.  Delafosse,  de  Bazouges-la-Peyrouse,  dans  le  ^  mé- 
moire qu'il  lut  à  la  séance  de  la  Société  Française,  du  5 
juin  1840,  à  Rennes,  et  consignée  dans  le  procès-verbal, 
p.  9.  «  A  quelques  centaines  de  mètres  vers  l'E.  de  1  é- 


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n 


—  156  — 

»  glise  de  Harcillé-Raoul,  ilexigte,  dit-il,  une  motte  d'une 
»  surbee  et  d*une  élévation  considérables,  qui,  suivant  le 
»  té/noignage  des  habitants  ,du  pays,  aurait  été  couronnée 
»  de  constructions.  Cette  butte  porte  le  nom  du  CkasteL 
»  Elle  est  entourée  de  fossés,  et  était  probablement  une 
»  motte  féodale  (1).  De  son  pied  part  un$  route  assez 
»  large  que  Von  désigne  sous  le  nom  de  cHBimi  db  la  du- 
»  CHBSSB  Àims,  et  qui  se  dirige  au  sud.  Cassini  désigne  cet 
»  en^lacement  sous  le  nom  de  château  ruiné.  » 

Voici  donc  encore  ici  le  cliemin  de  la  Duchesse  Anne.  On 
se  rappelle  que  nous  sommes  venus  de  Rennes  à  Aubigné, 
en  suivant  un  chemin  du  même  nom.  Serait-ce  trop  forcer 
la  conjecture  que  de  dire,  qu'au  lieu  d'aller  au  bourg  de 
Feins,  la  voie  ou  chemin  de  la  Duchesse  se  rend  par  le  N.- 
N.-E.  au  bourg  de  Harcillé-Raoul,  ou  plus  tôt  à  ce  chastel, 
qui  en  est  voisin  et  qui  présente  une  grande  ansAogie  avec 
le  vieux  château  d' Aubigné.  Elle  laisserait  ainsi  à  700  toises 
à  rO.  le  bourg  de  Feins,  distance  trop  iaible  pour  taxer 
d'erreur  H.  de  Gerville. 

On  le  pourrait  avec  d'autant  moins  de  raison ,  qu'une 
exploration  de  ce  pays,  feite  avec  soin,  amènerait  peut-être 
d'intéressants  résultats.  On  ^e  rappelle  les  nombreuses 
constructions,  signalées  ci-dessus,  entre  le  bourg  d' Aubigné 
et  celui  de  Feins,  d'après  le  rapport  de  cette  personne  de 
Rennes,  dont  nous  regrettons  bien  sincèrement  de  ne  pas 
connaître  le  nom.  Un  autre  renseignement  nous  apprend 
que  sur  leslimites  de  Marcillé,  de  Feins  et  de  Sàint-Remy* 
du-Plain,  il  existe  des  restes  de  fortifications  en  terre. 

(1)  J'ai  déjà  dit  qao  je  no  oonnais  point  les  mottes  féodales. 


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—  157  — 

Le  dJetioimaire  d*Ogée  en  &it  mention^^  do  rappelant  la 
bataille  livrée  par  Conan  à  quelques-uns  de  ses  barons  re- 
belles, en  1136,  et  ajoute  queee  sont  les  retranchements 
oocapé6  pat  lés  deux  armées.  Mats,  coniBie  le  remarque 
M.  de  la  Fosse,  dans  ses  excellentes  observations,  qu'il  a 
bien  vottlu  me  coHUBuniqiier,  «  cette  qpinion  d'Ogée  prouve 
»  non-seulemeut  qu'il  n'avait  pas  vu  ce  retranebemeni, 
tt  mais  ménie  qu'il  n'avait  pas  la  moindre  notion  de  ses 
9  dimensions.  Ce  n'est  pas  dans  des  ouvrages  de  50  mètres 
»  de  longueur  que  peuvent  se  retrancher  deux  années.  Le 

•  petit  camp  de  la  La$ide-diê-ChQ(èaux  n'a  pu  Atre  qu'un 
»  poste,  une  vedette.  • . .  C'est  un  pûrallélogramme  de 45 
»  mètres  sur  50.  Ses  dotives  n'ont  pas  plus  de  3  à  4 

•  m^res  de  profondeur,  au<-de^ous  de  la  crête  du  petit 
»  talus,  qui  entoure  l'intérieur  du  camp,  et  sur  lequel  il  est 
»  probable  que  des  palissades  étaient  établies.  Cet  ouvrage 
9  est  par&itement  conservé  et,  malgré  ton  peu  d'élévation, 
»  il  se  dessine  très-nettement  sur  la  sur&ce  unje  de  la  lande 
»  qui  l'entoure,  et  où  rien  absolument  n'indique  l'existence 

•  d'autres  retfanchemeuts  ayant  appartenu  à  des  armées 

•  en  présence.  Ce  petit  camp  n'était  pas,  conmie  on  le 
9  voit,  un  ouvrage  bien  redoutable.  J'en  donne  ici  le  profil, 
»  qui  est  aussi  aisé  à  comprendre  qu'à  tracer  : 

»  Un  millimètre  pour  mètre.  « 
Or,  dans  les  11  kilom.  que  la  voie  a  à  parcourir  pour 
se  rendre  d^Aubigné  «^  Marcillé,  elle  doit  passer  parmi  ces 
constructions,  malheureusement  encore  inexplorées,  puis 
au  village  de  la  Bigotais,  puis  au  travers  de  la  grande  lande 
des  Châteaux,  platée  entre  le  bois  du  Roi  et  celui  deGou- 
bon,  et  daiis  laquelle  se  rencontrent  nécessairement  et  le 


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—  158  — . 

point  délimitatif  des  trois  paroisses,  et  le  petit  camp  dont 
nous  venons  de  parler. 

Ce  camp,  d'après  les  indications  de  H.  de  la  Fosse, 
paraîtrait  placé  vers  le  point  d'intersection  de  la  voie  dont 
nous  cherchons  la  trace  et  d'une  autre  voie,  courant  du 
N.-O.  au  S.-E.,  que  M.  de  la  Fosse  a  reconnue  le  premier 
et  qui  parait  se  diriger  de  Corceul  vers  le  Haine.  Nous 
nous  occuperons  dans  un  autre  chapitre  de  cette  impor- 
tante découverte,  en  traitant  des  voies  romaines  sortant  de 
Corseul. 

De  cette  lande ,  point  culminant  entre  le  bassin  de  la 
rivière  d'IUe  «t  celui  de  la  rivière  de  Coêsnon,  la  voie  doit 
passer  par  le  village  de  la  Lavelais,  puis  arriver  au  chastH 
de  Marcillé,  en  suivant  la  rive  gauche  et  assez  élevée  d'un 
grand  étang ,  par  le  village  de  la  Fontelais. 

Ce  chastel  semble,  à  M.  de  la  Fosse,  l'indice  le  plus  con- 
cluant de  la  présence  de  la  voie  que  nous  suivons.  «  Son 
origine  romaine,  dit* il,  est  démontrée  non-seulement  par 
les  débris  que  j'ai  remarqués  à  Marcillé,  qui  esta  700  mè- 
tres du  chastel,  mais  aussi  par  les  fragments*  de  tuiles  à 
rebords  et  de  briques  qui* se  trouvent  tout  autour  de  ces 
fortifications.  »  H.  de  la  Fosse  ajoute  que  pendan  longtemps 
il  a  cru  que  ces  ouvrages  de  fortifications  étaient  en  terre, 
contrairement  à  la  tradition  locale  qui  y  plaçait  d'anciennes 
constructions,  mais  qu'un  éboulement  récent  lui  a  &it 
découvrir  les  fondations  d'une  muraille,  qu'à  diverses  épo- 
ques on  a  exhumé  des  marches  d'escalier,  des  grilles  en 
fer,  des  ustensiles  de  cuisine  rongés  par  la  rouille  et  des 
pièces  de  monnaie,  dont  quelques-unes  d'une  forme  carrée, 
a  La  description  de  ce  qui  reste  de  cette  fortification, 


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-  159  - 

continue  M.  de  la  Fosse,  n  est  pas  difficile;  c'est  toujours  la 
motte  conique,  ses  douves,  le  préauetles  glacis.  Mais  je  ne 
connais  aucun  ouvrage  de  ce  genre  dont  les  proportions 
soient  aussi  vastes.  Le  montiiJule  qui  est  au  centrOy  ne  s'é- 
lève pas  à  moins  de  20  mètres  et  dépasse  la  crête  des 
glacis  de  la  moitié  de  sa  hauteur.  Le  préau  est  au  S.-S.-0. 
et  vient  s*appuyer  à  un  vaste  étang,  qui  servait  de' défense 
de  ce  côté  -ei  alimentait  les  douves  du  ciiâteau.  Dans  les 
deux  tiers  de  la  circonférence,  le  revers  du  talus  d'enceinto 
est  d'un  escarpement  considérable,  mais  vers'  le  N.-E.  se^ 
jardins  et  les  maisons  du  hameau  qui  a  emprunté  son  nom 
au  vieux  Chastel^  sont  venus  dénaturer  la  ligne  d'enceinte 
et  la  douve  seule  est  restée  intacte*  » . 

H.  de  la  Fosse  nous  apprend  encore  qu*avant  d'arriver 
au  village  de  ta  Fonteiais,  la  voie  quitte  le  chemin  vicinal 
allant  au  bourg  de  Marcillé  et  va  passer  à  la  chaussée  de 
l'étang  du  Chastel,  sous  la  forme  d'une  route  large  et  assez  , 
droite  et  sous  le  nom  de  chemin  de  la  Duchesse  Anne.  Il 
présume  qu'ensuite  elle  côtoyait  le  ruisseau  de  Tétang  du 
Chastel,  passait  sous  le  coteau  de  la  Boisnotière ,  puis  à 
droite  des  villages  de  Taille  Pied  et  de  la  Fauveiais  et 
venait  passer  le  ruisseau  de  Leurmont,  auprès  du  moulin 
de  ce  nom,  sur  un  point  où  l'on  a  trouvé  les  débris  con- 
sidéiables  d'un  pont  en  granit,  qui  ont  servi  à  en  recon- 
struire un  sur  la  route  nouvelle.  Plusieurs  larges  tronçons 
de  ce  chemin  délaissé^  en  indiquent  clairement  la  di- 
rection. 

Nous  devons  donc  à  M.  de  la  Fosse  ce  nouveau  jalon 
planté  à  Marcillé.  Mais  ce  n'est  pas  tout.  Cette  localité 
lui  a  offert,  dans  le  cimetière  du  bourg,  fouillé  récem- 


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—  160  — 

ment  pour  l'élargissement  (Tune  route,  des  fragments  de 
tuiles  à  rebords,  et  une  couche  horizontale  de  ciment  de 
6  pouces  d'épaisseur  sur  une  largeur  de  25  à  30  pieds, 
légèrement  convexe  et  donnant  Tidée  de  la»  coupe  trans- 
versale d'une  voie  romaine.  Toutefois,  H.  de  la  Fosse  D*a 
remarqué  ni  au-dessus  ni  au-dessous  de  cette  couche  de 
ciment,  rien  qui  puisse  confirmer  cette  hypothèse.  Je  crois 
en  effet  que  cette  couche  n'appartient  point  à  une  voie 
romftine  :  dans  nos  provinces,  on  n'employait  point  le 
ciment  pour  ces  constructions.  J  y  verrais  plutôt  le  rez- 
de^hoîmée  d'une  maison  ;  on  sait  quel  soin  les  Romains 
apportaient  à  la  préparation  de  cet  ouvrage ,  qui  devait 
assainir  le  bas  étage  des  habitations  ;  travail  beaucoup  trop 
négligé  de  nos  jours  dans  les  campagnes. 

Ces  débris  romains  ne  sont  pas  les  seuls  qui  aient  été 
remarqués  à  Marcillé.  M.  de  la  Fosse  nous  a  encore  appris 
qu'il  existe  des  briques  romaines  dans  les  murs  de  l'église, 
dont  une  partie  est  du  genre  romain. 

En  prolongeant  la  ligne  droite  au-delà  de  Marcillé,  nous 
allons  passer  à  un  kilom.  à  TO.  de  la  petite  ville  de  Ba- 
fOuges-Lapeyrouse.  Là  nous  retrouvons  M.  de  la  Fosse, 
qui  pense  qu'il  est  probable  qu'une  voie  romaine,  allant  de 
Rennes  vers  le  Mont-Saint-Michel ,  passait  k  peu  de  dis- 
tance de  Baftouges  (i).  Malheureusement  it  n'a  point  encore 
donné  l'indication  précise  d*un  fragment  de  la  voie  dans 
le  prochain  voisinage  de  cette  lecalhé,  et  les  noms  de  vil- 
lages qu'il  a  cités,  Vieux^Viel,  Monl-Viel,  Ville-Montûise, 


(1)  Proc.  vn^.  d0  la  Soc.  Franç^  ci-dei8«s  citét  p.  9 


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—  161  — 


k 


MÊoniayt  le  Pae-Blanc,  le  Pas-au-Comte,  ne  me  paraissent 
(MIS  avoir  un  rapport  bien  direct  avec  la  voie,  et  se  trouvent 
d'ailleurs  jetés  à  de  grandes  distances  les  uns  des  autres,'  et 
ne  soot  pas  moins  éloignés  de  la  ligne  que  nous  avons 
tracée.  Dans  de  nouvelles  recherches  auxquelles  M.  de  la 
Fosse  s*est  livré  à  Touest  de  Bazouges  ,  il  n*a  rencontré 
aucun  vestige  de  la  voie,  et  cependant  il  pense,  comme 
nous,  qu'elle  ne  devait  guère  passer  à  plus  d'un  kilomètre 
à  ro.  de  ce  bourg,  et  il  ajoute  ^ue  cette  opinion  lui  parait 
confirmée  par  les  nombreux  débris  de  briques  romaines 
qu'il  a  remarquées  dans  les  champs  de  la  métairie  dfe  La 
JGTaye,  située  à  un  kilomètre  au  S.-O.  de  Bazouges,  lors  de 
Touverture  de  la  route  de  Fougères  à  Dinan.  Ces  champs  en 
sont  remplis,  suivant  l'expression  de  M.  de  la  Fosse ,  et  il 
me  paraîtrait  intéressant  de  connaître  retendue  de  la  su- 
perficie ainsi  jonchée  de  débris ,  parce  que>  cette  étendue 
pourrait  nous  faire  apprécier  l'importance  de  rétablissement 
romain  qui  a  existé  à  La  Haye. 

Continuant  la  prolongation  de  notre  ligne  dans  la  tra- 
verse de  la  paroisse  de  Bazouges,  elle  doit  passer  vers  les 
villages  de  la  Ckarrière^  de  la  Horimère,  du  Lavoir,  puis 
entrer  dans  la  forêt  de  Ville-Cartier. 

C'est  dans  cette  forêt  que  nous  allons  trouver  un  nou- 
veau jalon.  H.  de  Vigan ,  aloi*s  garde  général  des  forêts 
royales  dans  le  département  d*Ille-et-Vilaine  ,  consulté  par 
M.  de  Gerville  sur  la  direction  de  la  voie  qui  nous  occupe , 
répondit  «  qu'un  garde  intelligerit ,  attaché  depuis  long- 
»  temps  à  la  forêt  de  Ville-Cartier,  y  connaissait  un  an- 
9  àea  chemin  empierré,. allant  dans  la  direction  de 
»  Rennes  au  MontpSaint-M icbel ,  appelé  Chemin  Montais, 


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-  162  - 

»  et  un  autre  semblable  qui  s'embranche  avec  le  premier 
»  et  se  nomme  le  Chemin  de  la  duchesse  Anne:  et  que  ces 
»  deux  chemins  sont  très-connus  des  bûcherons  de  la  fo«' 
»  rêt.  »  (M.  de  Gerville. —  Villes  et  voies  r(nn.ySupp.^ 
p.  22.) 

J'imagine  qu  il  doit  y  avoir  quelque  confusion  dans  le 
rapport  que  le  garde  de  Ville  Cartier  a  &it  à  H.  de  Vigao. 
La  ligne  du  Chemin  de  la  duchesse  Anne^  daprès  les 
traces  reconnues  sous  ce  qpm  depuis  Rennes ,  tend  direc* 
tement  de  cette  ville  au  Mont-Saint-Michel,  et  il  serait 
peu  probable  que  dans  la  forêt  de  Ville-Cartier  elle  chan- 
geât de  direction  ,  et  fut  remplacée  par  lé  Chemin  Montais. 
Au  surplus,  c'est  une  vérification  à  faire;  mais  le  rensei- 
gnement de  M.  de  Vigan  n'en  a  pas  moins  une  grande  im- 
portance ,  et  il  no  is  signale  un  repère  qui  facilitera  sin- 
gulièrement les  recherches  ultérieures  desquelles  il  est 
fort  à  désirer  que  s'occupe  M.  de  la  Fosse  ,  qui ,  demeu- 
rant sur  les  lieux,  et  ayant  la  science  et  le  goût  de  la  chose, 
réunit  toutes  les  facilités  désirables. 

Au  sortir  delà  forêt  de  Ville- Cartier,  la  ligne  passe  au 
village  de  la  Molte^  et  laisse  à  12  ou  1,500  mètres,  à  l'O., 
le  bourg  de  Frans.  A  peu  près  à  cette  hauteur,  elle  laisse  à 
l'E. ,  à  7  ou  800  mètres ,  le  manoir  du  Chastelier^  dont  le 
nom ,  comme  nous  l'avons  souvj^nt  remarqué ,  indique 
l'emplacement  d'un  camp  ou  d'une  fortification  quel- 
conque. 

Un  peu  au-delà ,  au  village  de  la  Lande  des  Vaux ,  la 
ligne  laisse ,  à  1  kilom. ,  à  l'E. ,  le  bourg  de  Vieux-Viel  ; 
puis  ^  après  une  demi'lieue,  celui  de  Pleine- Fougères,  à 
l'O.  et  à  5  ou  600  mètres.  Je  remarque ,  sur  la  carte  de 


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—  165  — 

Cassinî,  le  village  du  Chastelei  à  2  kilom. ,  à  TE. ,  placé 
sur  une  pointe  de  terre  entre  deux  affluents  duCoësnon, 
à  Tendroil  même  où  ils  viennent  se  réunir  dans  les  ma- 
rais qui  bordent  cette  rivière.  Cette  situation  et  le  nom  de 
Chfutelet^  font  croire  a  Texistence  d'un  camp  romain  dans 
cet  endroit.  Le  village  de  Four-Chemin^  situé  entre  le 
Chastelet  et  \ehetuvg  de  Pleinè-Fougères,  semblerait,  d'a- 
près son  nom,  avoir  quelque  rapport  avec  la  voie. 

A  moins  de  2  kilomètres  de  Pleine-Fougères,  nous 
arrivons  sur  la  grande  route  moderne  de  Dol  à  Pont-Or- 
son,  à  trois-quarts  de  lieue  de  cette  dernière  ville,  un  peu 
à  l'ouest  du  village  de  la  VillcrChérel.  Cette  grande  route 
délimite  au  Nord  la  commune  de  Pleine-Fougères  et  k  sé- 
pare de  celle  de  Saints.  Il  y  a  lieu  de  croire  qu'elle' a  été 
tracée  sur  la  voie  qui,  de»Corseul,  venait  à  Pont-Orson  pour 
se  porter  de  là  probablement  sur  Avranches.  Nous  en  par- 
lerons plus  amplement  en  traitant  des  voies  romaines  sor- 
tant de  Corseul.  Pont-Orson  aurait  donc  été  le  lieu  de  réu- 
nion de  deux  voies  ainsi  que  nous  le  dirons  ci-après. 

La  directionN.-N.-E.  que  nous  avons  con^laniment  suivie 
depuis  Rennes  où,  pour  plus  d'exactitude,  depuis  Saint- 
Grégoire,  nous  a  mis,  surtout  depuis  Feins,  en  désaccord 
avec  M.  de  Gerville,  et  plus  nous  nous  sommes  rapprochés 
de  la  baie  du  Mont-Saint-Hichel ,  plus  nos  lignes  se  sont 
éloignées.  La  sienne  portant  sur  Saint-Pair  va  passer  à 
rO.  du  bourg  de  Ros-sur-Coësnon ,  et  la  nôtre,  se  rendant 
directement  au  Mont  Saint-Michel ,  passe  près  et  à  TE.  du 
bourg  de  SaintGeorgesde-Grehatgne;  ce  qui  forme,  entre 
ces  deux  lignes ,  à  la  hauteur  où  eHes  entrent  dans  la  baie , 
un  écartement  d'environ  5  kilomètres. 


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—  164  — 

Nous  voici  arrivés  au  poiat  où  il  me  paratt  à  propos  de 
donner  une  idée  des  ingénieuses  conjectures  de  M.  de  Ger- 
viile. 

M.  de  Gerville  bit  traverser  la  baie  et  les  grèves  du 
Mont-Saint-Michel  par  deux  voies.  La  première,  celle d'ul- 
launium  à  Condate  ou  d'Alleaume  a  Rennes,  doit,  sui- 
vant lui,  suivre  une  ligne  parCiUement  droite^  d'Alleaume 
à  Constances,  de  Constances  à  Saint- Pair,  et  de  Saint- 
Pair,  suivailt  la  côte  jusque  vers  la  pointe  de  Carolles  où 
elle  entre  dans  la  baie ,  puis  va  aborder  la  c6te  de  Breta- 
gne ,  à  Touest  du  bourg  de  Ros-sur-Coesnon ,  sur  le  terri- 
toire d'une  ancienne  paroisse  de  Paluel  submergée  vers  le 
commencement  du  XVll/  siècle.  La  seconde,  celle  de 
Bayeux  à  Rennes,  arrivait  sur  la  côte  du  Cotentin  entre  Ge- 
nest  et  Vains,  traversait  la  baie  çn  passant  au  Mont-Saiut- 
Michel,  et  allait  aborder,  comme  la  première  efa  Bretagne, 
dans  la  paroisse  de  Ros-sur-Coêsnon ,  au  hameau  de  la 
Rue. 

Reprenons  Texamen  de  chacune  de  ces  Ugnesl  M.  de 
Gerville  affirme  que  la  première  passait  précisément  au 
point  où  Paluel  est  présenté  comipe  un  hameau  sur  la 
carte  de  Cassini ,  et  que  c'est  sur  ce  point  que  les  chartes 
de  Tabbaye  de  Mont-Morel  placent  Tancien  chemin  perré , 
Viens  Pelrosus ^eVlà  pierre  de  Repues,  Petra  de  Redoniê, 
et  la  voie  Sous-Marine,  Via  de  Sub'-MarL  11  est  fort  à  re- 
gretter que  M.  de  Gerville  n'ait  pas  donné  le  texte  même 
de  ces  chartes ,  dont  les  énonciations  citées  paraissent  fort 
intéressantes.  Car  je  ne  puis  ro'empècher  de  conserver  un 
doute  sur  cette  directi<yi  donnée  de  Saint-Pair,  ou  plutôt 
de  la  pointe  de  Carolles  à  Paluel,  dans  l'ouest  de  Ros-sur- 


] 


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—  165  — 

CoôsDOQ ,  et  laissant  le  M OQt-Saint-Michel  à  pcès  de  deux 
lieues  à  f  E. ,  c'est-à-dire  que  la  voie  ainsi  tracée  aurait  tra- 
versé un  véritable  bras  de  mer.  Bien  que  j'admette  la  sub- 
mersion du  territoire  de  Paluel  et  de  quelques  autres  loca- 
lités de  la  même  côte,  je  ne  crois  nullement  à  lexistence 
de  la  forêt  de  Scicy,  qui  s^étendait,  suivant  M.  de  Pomme- 
reail  (Uict.  d'Ogée,art.  Ool.)^  des  environs  de  Coustances, 
jusque  par  de  là  Saint-Malo^  occupant  toute  la  baie  du 
Mont-Saint-Micbei ,  ses  grèves  et  les  marais  de  Dol,  et  qui 
aurait  été  détruite.par  une  invasion  de  la  mer  au  commen- 
cement du  VIII/  sièûle.  L'établissement  d'une  chaussée 
dans  celte  traverse  me  parait^  impossible,  et  il  faudrait, 
fibur  démontrer  son  existence,  trouver  sur  le  point  d'arri- 
vée à  la  côte  de  Bretagne,  des  vestiges  incontestables  d'une 
voie  qui  se  perdit  sous  la  mer  dans  la  direction  donnée.  Or, 
je  ne  vois  pas  que  H.  de  Gerville  en  signale  .aucun  ;  car  ce 
qu'il  dit  d  une  chaussée  aperçue  il  y  a  cinquante  ans,  sous 
le  sable ,  en  face  du  hameau  de  la  Rue ,  en  la  paroisse  de 
Ros,  n'e;$t  pas  fort  concluant,  d'autant  plus  que  M.  de  Ger- 
ville ne  rapporte  pas  ce  fragment  à  la  voie  d'Âlleaume  à 
Renhes ,  mais  bien  à  la  portion  du  chemin  de  Bayeux  à 
Rennes,  passant  au  Mont-Saint-iVlichel,  et  qu'il  amène  de 
ce  Mont  à  travers  les  grèves,  se  réunir  à  Ros  à  la  première 
voie  :  détour  que  je  ne  puis  encore  admettre,  par  les  mo- 
tife  que  je  vais  déduire  en  examinant  la  seconde  voie,  de 
M.  de  Gerville. 

*M.  de  Gerville  la  nomme  chemin  de  Bayeux  à  Rennes. 
Il  la  fait  arriver,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  sur  la  côte  du  Co- 
tentin,  entre  Vains  et  Genest,  puis  la  dirige  au  Mont- 
Saint-Micbel,  et  enfin  la  réunit,  à  Ros,  à  la  première  vole 


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—  166  — 

pour  se  rendre  à  Rennes.  Je  ne  discuterai  point  sur  le  nom 
qu'il  lui  donne,  ni  sur  le  parcours  qu'il  lui  assigne  jusqu'au 
Mont-Saint-Hichel.  Une  voie  pouvait  fort  bien  avoir  été 
amenée  vers  Genest,  qu'on  dit  être  un  lieu  rempli  de  débris 
romains.  Mais  ce  que  je  ne  puis  admettre,  c'est  le  prolonge- 
ment de  cette  ligne  vers  {'ouest  jusqu'à  Ros  et  Paiuel,  à 
plus  Ide  deux  lieues  du  Mont ,  ptfr  une  partie  de  grève  fort 
dangereuse ,  et  ayant  la  rivière  de  Coësnon  à  passer.  Indé- 
pendamment de  la  très-douteuse  existence  d'une  chaussée 
allant  de  Saint-Pair  ou  de  CaroUes  à  Paliiel  ou  à  Ros,  com- 
Tnent  se  serait-on  plu  à  vaincre  de  très-grandes  difficultés  et 
aurait-on  pris  un  pareil  détour  quand  la  voie  ou  chemin  de 
la  Duchesie  Anne^  que  nous  avons  conduit  jusqu'à  la  porte 
de  Pont-Orson,  et  qui  certainement  sa  rendait  au  Mont- 
Saint-Michel,  offrait  une  route  beaucoup  plus  facile  et  plus 
directe  pour  se  rendre  à  Rennes. 

Ceci  me  ramène  au  point  où  je  me  suis  arrêté,  celui  d'in- 
tersection de  la  voie  avec  la  route  moderne  de  Pont-Orson 
à  Dol,  près  du  village  de  la  Ville-Cherel,  et,  en  même 
temps,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  de  la  voie  de  Corseul  à  Pont- 
Orson. 

En  continuant  la  direction  N.-N.-E.  que  nous  avons 
suivie  jusqu'ici ,  nous  irions  passer  pour  nous  rendre  au 
Mont-Saint-Michel,  près  et  àl'E.  du  bourg  de  Saint- 
Georges-de-Grehaigne,  traverser  le  Couesnon  à  pltis  d'une 
lieue  au-dessous  de  Pont-Orson,  et  nous  jeter ,  s^ns  une 
.nécessité  fort  apparente,  dans  une  assez  grande  étendue 
de  grèves. 

J'ai  pensé  au  contraire  (  et  c'est  une  question  qu'une 
exploration  locale  résoudra  plus  tard }  que  la  voie ,  à  par- 


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—  167  — 

lir  du  Toismagtt  de  Pleine-Fongère ,  pouvait  fort  bien  in- 
diorr  un.  peu  à  i'£..  par  une  di^  ces  belles  courbes  que 
traçaieniat  )>ien  tes  ingénieurs  romains,  et  que  j'ai  tant  de 
fois  admise»,  et  v^ir  passer  le  Coêsnon  à  Pont-Orson. 

Une  obsisrvalion  qtri  pourrait  passer  pour  règle,  c*est 
qtte4a  plus  granile  partie  des  lieux  qui  ont  conservé  dans 
leur  nom  ie. mot  Pdnf,  ont  été  très-anciennement  habités, 
et  étaient  le  ptissage  d'une  voie  romaine.  Tout  porte  à 
croire  qu'il  .en  était  ainsi -tfe  Pont-Orson.  M.   de  Gerville 
(Fjil«  et  voies  rom.^  p.  21.)  nous  assure  «  qu'on  trouve  sûr 
9  la  carte  des  Friangles ,  près  de  ce  passage ,  fréquente 
ji  dans  toos.les-  tem[is,  Tindication  d'un  pavé  et  d'une 
A  «haussée;  il  ajoute  (pag.  suiv.)  que  les  ducs  de  Norman- 
M  dJê  aivaieBt  construit  le  chftteau  de  Pont-Orson  sur  une 
»  voie  vonfiftine.  »  Tout  <ielâ  est  un  peu  conjectural,  mais 
ee  qui  vient  fartement  à  l'appui ,  c'est ,  je  le  répète ,  Tar- 
riv^  du  Chemin  de  ta  Dwchesse*^  ou  voie  romaine  dans 
un  voisinage  tcès-«rappro0lié  de  Pont-Orson; 

De  la,  il  rï*]r  a  plus  qae  deux  lieues  pour  se  rendre  au 
Moot'Saiat-jHîcbel.  o  Le  voyageur  qui  va  au  Afouf-Saint- 
a  Micbdl  par  Poot-^Orson ,  n  a  aucun  danger  à  craindre , 
a  soit  qu'il  s'y  rende  à  pied ,  à  cheval  ou  même  en  voi- 
»  ture;de€e*c6fté,  le  Mont  n'est  isolé  de  la  terre  ferme 
a  que  par  une  demi-lieue  de  grève ,  et  cette  grève ,  qui 
j»  o'est  eoupée  par'aacune  rivière,  n'offre  point  de  danger 
a  grave.»  {BùLpiU. du JUont-S.lUkk.,  p.  21) 

.On  doit.igoùter.  que  eette  demi-lieue  de  grève  n'est 
couverte  {tories  e^ui  qtfe  lors  di^s  fbftes  marées  de  chaque 
mois  et  par qeUesdes  équinotes:  {Stont-Saint- Michel ,  par 
JL.4e  ItodMiy ,  p.  136^)  ' 

12 


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—  168  — 

Cette  partie  de  chemin  présenle  donc  une  frcilité  in- 
comparablement plus  grande  que  partout  aiiieure ,  et  ce 
qui  fait  .penser  que  les  Romains  en  auront  profité ,  c'est 
que,  un  peu  avant  d'arriver  à  la  grève,  on  rescontre  une 
ferme  nommée  la  Mare  ou  le  Haut-Chemn^  et  ce  dernier 
nom  est  des  plus  significatifs  pour  indiquer  une  voie  ro- 
maine. Il  est  à  regretter  que  dans  un  terrain  aussi  sain  que 
doit  Têtré  celui  de  Pont-Orson  à  la  grève ,  dans  les  envi- 
rons des  bourgs  de  Hoidrey  *et  de  Beauvoir,  on  n'ait  pas 
recherche  les  vestiges  de  la  voie  que  nous  supposons  y 
avpir  été  tracée. 

Quant  à  tout  ce  qui  est  grève,  il  ne  faut  pas  songer  à  y 
rencontrer  ^cun  vestige  de  voie,  car  si  l'on  admet  le  pré- 
tendu engloutissement  delalbrétde  Scicy,  on  admettra  en 
même  temps,  et  à  bien  plus  forte  raison  ,  celai  des  chaus- 
sées romaines;  si'i  au  contraire,  on  se  eontente  comme 
moi  de  croire  à  un  empiétement  successif  de  la  mer,  au 
moins  depuis  les  temps  historiques,  on  avouera  encore 
que  cet  empiétement,  qui  a  submergé,  au  XVII.*  siècle,  la 
paroisse  do  Paluel ,  a  bien  suffi  pour  (aire  disparaître  tons 
les  travaux  de  communication  pratiqués  dans  les  grèves 
pendant  l'occupation  romaine. 

C'est  donc  sur  k  rivage  de  ces  grèves  'que  doit  être 
faite  l'exploration  des  anciennes  lignes  routières.  On  doit 
la  découverte  de  deux  de  ces  lignes  à'  H.  de  Gerviile  :  La 
première  est  celle  qu'il  conduit  de  Constances  à  Saint-Pair, 
bourg  situé  sur  la  côté  au  sud  de  GranviUe;  puis,  de  là , 
au  camp  du  Chaielier ,  placé  sur  la  poinle  dç  Carolles, 
et  sous  lequel  un  lrè$-ancien  chemin  va  se  perdre  dans  la 
baiedtt  Mont-Saint-Michel.  {YHl.  e^ «•  f ofn.,  p*  16.)  La  se- 


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conde  est  celle  que  M.  de  Gerville  nomme  le  Chemin^Mon'' 
tois^  et  qu'il  amène  à  la  côte  entre  Vains  et  Genest.  Tout 
porte  à  croire  que  ces  deux  voies  se  rendaient  au  Mont- 
Saint-Michel  ,  et  comme  la  ligne  de  Coustance$  à  Carolles 
parcourt  la  direction  N.-N^-E.  que  la  voie  ou  Chemin  de 
la  duchesse  Anne  a  tenue  deptûs  Rannesje  l'en  croirais 
la  continuation. 

Mars  1843. 


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CRÉATION 
D'UNE  CAISSE  AGRICOLE, 


VAA  M.  YAIVDIER. 


Chaque  époque  a  son  typé  :  les  inventions,  les  décou- 
vertes, les  beaux-arts,  les  belles-lettres ,  impriment  un  ca- 
chet particulier  à  chacune  d'elle. 

Mais  avec  son  développement ,  le  progrès  a  sa  mesure , 
et  l'esprit  humain ,  mobile  par  essence  et  impatient  du 
repos,  descend  dès  qu'il  ne  peut  plus  monter. 

Scnèque  comprenait  cette  vérité;  il  a  dit  : 

ce  Dès  que  la  place  manque  au  progrès  y  oa  touche  k  la  chute.» 

Aam  uùi  incremento  locus  uonesi^  vicinùs  occasus  est* 
Consola  ad  Marciam*  XXI II. 

Tel  est  le  principe  de  la  décadence  des  nation^.  L'his- 
toire en  fournit  des  exemples. 


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~  i7l  — 

Loisqa'uit  peopte  a  épurâé  \ùs  itése^  de  h  cfrittsalioR , 
lorsque  la  corruption  et  le  luxe  9^  sont  élevés  au  m^^mc 
niveaa ,  lorscfue  rurimiiité  des  fernnes  a-  remplacé  la  droi- 
ture dnooeur,  lorsque  régolsme  s'QSt  substitué  à  k  bien- 
faisance «  et  la  passion  des  richesses  à  la  charité ,  âitors  ce 
paople  se  ptaeefiitaleAient  sar  le  veiosant  de  là  dégénéres- 
cence ,  et  par  un  mouvement  rétrograde ,  insensible  et 
inaperçu,  il  revient  à  son  point  de  départ,  s'enyeioppant 
de  pbis en  plus  dans  ks  langes  de  FignoraYïce,  de  ia  gros* 
sièreté  et  de.  la  barbarie. 

Notre  époque,  à  nous,  a  un  double  caractère  :  elle  se 
fait  remarquer  d'abord  par  l'application  de  la  vapeur, 
remploi  de  Télectricité ,  la  fixation  de  la  lumière ,  et  en- 
suite par  des  systèmes  sociaux  qui  tendent  à  transformer 
brusquement  la  société. 

Tout  a  été  mai  fiiit,  disent  les  novateurs,  et  tout  est  à 
refiiire.  A  nous  la  micron  d'effactîr  le  vice  par  la  vertu , 
rinjustice  par  Féquité,  et  de  remplacer  les  soûlfrances 
indmdiielles  par  le  bienrôtre  général. 

Sans  doute  le  biit  est  lonable;  personne  ne  le  nie,  et 
les  âmes  honnêtes  sont  disposées  à  concourir  h  fœnvre. 
Todtefaîs,  H  finit  se  défendre  des*  tifustons;  if  faut  se  dire 
que  si  la  raison  a  ses  lueurs,  elle  a  aussi  ses  écHps'és , 
et  tia*il  ne  fimt  pas  confondre  le  créposculc  dû  matin  qui 
prépare  la  Itimlèfe  avec  le  crépuscule  du  soir  qui  conduit 
à  Tobscurité. 

Et  pourtant  la  précipitation  i^pportée  à  cette  œuvre  ac- 
cose  PoubBde  cet  axrAme,  —  que  ce  qu'H  y  a  dé  plus 
difficile  à  £Etire ,  c'est  le  bien.  —  On  semble  ignorer  que 
toiKe  forée  a  sa  résistance ,  et  qii^H  y  a  une  distinction 


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—     178    r- 

entre  aioéliarer  et  bouleverser ,  entre  déiiouer  patiemment 
et  trancher  tout  4' un  coup. 

Aussi  le.s  hommes  sages  et  véritablement  «mis  de  Thu- 
manité  oe  songent-ils. pas  à  proc^éder  avec  cette  impé- 
tuosité qui  strait  la  ruin^  de  leurs  plans  d'améliorations. 

Ils  agissent  sous  Tioppiration  de  cette  pensée  de  Quiuie- 
Curce: 

«  PliisDn  se  presse  dtnslo  tronUe ,  moins  on  avancei  » 
In  tumuitu  feêHnattù  fyoque  tarém  êjt  L.  IX.  C.  IX. 

Et  ils  adoptent  la  maxime  de  Tite-Live  : 

«  La  précipitation  est  impré^ojanto  et  aveugle.  » 
Fesiinatio  improvvia  est  et  cœca.  L.  22.  XXXIX. 

Ils  se  bornejit  à  poser  quelques  principes  avoués  par 
la  justice ,  se  réservant  de  propager  et  d  infuser  leurb  doc* 
trines  avec  modération ,  avec  réserve,  lentement,  succès* 
sivement,  en  se  donnant  le  temps  pour  auxiliaire,  per- 
suadés qu*ils  sont  que  le  rajeunissement  d'une  vieille  so* 
ciété  est  une  œuvre  de  haute  difficulté ,  et  d'autant  plus 
difficile,  que  les  maximes  subversives  récemmt^nt  émises 
seront,  pour  .leurs  n^aximes  philanthropiques,  ce  que  le 
mélange  de  Tivraie  est  au  bon  grain  ;  et  de  là  la  répulsion 
du  bien  par  la  crainte  du  mal. 

Les  plus  ardents  de  nos  réformateurs  ont  cru  suffisant 
de  jeter  quelques  mots  obscurs  et  comminatoires  dans  'e 
courant  de  la  publicité,  pour  justifier  l'excellence  de  leurs 
réformes. 

Ils  se  sont  abusés  :  au  lieu  de  convaincre,  ils  ont  ef- 
frayé. 

Quand  on  parle  aux  masses,  il  fitut  leur  parler  claire* 


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—  475  — 

ment,  et  si  l'on  veut  qu'elles  changent  de  route,  il  faut 
les  engager  dans  la  route  nouvelle  et  ne  pas  se  borner  à 
une  simple  indication  susceptible  de  les  égarer. 

En  pareil  cas,  ilne&ut  ni  incertitude,  ni  temporisa- 
tion. 

Kepler  a  pu  dire,  dans  la  préface  de  son  livre  de  17/ar- 
monique  du  Mande:  —  «  Mon  livre  sera  lu  pjir  Tâge 
»  présent  ou  la  postérité,  peu  m'importe;  il  pourra  at- 
9  tendre  son  lecteur:  Dieir n'a-t-il  pas  attendu  600  ans 
j>  un  contemplateur  de  ses  œuvres?  j)     . 

Mais  notfs,  dans  la  position  où  nous  sommes,  nous  ne 
pouvons  pas  attendre  si  longtemps. 

Nousdemandons  TexpUcation  des"principes  posés  comme 
bases  de  la  société  régénérée. 

Nous  voulons  savoir  ce  que  c'est  que  le  droit  do  vivre, , 
le   droit   au  travail,  Forganisation  du  travail,  et  autres 
maximes  incomprises. 

Nops  voulons  savoir  où  Ton  nous  mène,  et  par  quejs 
moyens  on  veut  nous  meneiv 

Vous  avez  parlé  au  peuple  en  énigmes ,  et  vous  avez  eu 
tort ,  car  le  peuple  ne  vous  comprendra  pas  ou  vous  com- 
prendra mal,  et  ce  sera  un  danger  égal  à  celui  de  lui  don- 
ner des  espérances  impossibles  à  réaliser. 

Gardez-vous  de  faire  naître,   chez  la  multitude,  des 

idées  qu'elle  na  pas,  des  idées  qu'elle  ne  doit  pas  avoir, 

•  * 

des  idées  q«i  te  tireraient  de  son  milieu  sans  utilité,  et 
qui  la  feraient  passer  du  calme  à  Témotion,  caV  Tacite 
nous  dit  :  •       ' 

•      «  La  moUitado  est  excessive  en  toyt.  »  * 

Bsivytgtis  uiroqne  immodicum.  Hist!  L.  ii. 


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-  174  — 

Nos  professeurs  d'économie  sociale ,  du  baaji.de  leurs 
chaires  qu'ils  ne  doivent  ni  au  concoure  ni  au  choix,  ont 
prouvé  de  Tesprit,  du  talent,  de  la  verve;  mais  nialheo*- 
reusement  de  leurs  bouches  éloquentes  la  parabole  s^ule  a 
coulé  à  flots  pressés. 

On  s*est  ému  de  symboles,  d*imagfi$  et  de  figures  d'une 
portée  et  d'un  but  équivoques,  et  Ton  s'est  demandé: 

Nos  maîtres  ^  trompent-Us ,  ou  veulent «^ils  nous  trom- 
per? —  Question  grave,  car  il  y  a  péril  dans  les  deux 
hypothèses^  attendu  que  le  mal  est  .le  môme,  soit  qu'il 
vienne  de  Terreur,  soit  qu'il  procède'  de  la  mauvaise  foi. 

Par  un  sentiment  de  prudence  ou  de  timi((ité,  oa  a  eu 
peur  de  ce  que  disaient  les  novateurs,  et  plus  encore  peut- 
être  de  ce  qu'ils  ne  disaient  pas.  Alors  on  leur  a  tenu  ce 
langage:  ^ 

Vous  croyez  pétrir  l'esprit  d'un  grand  peuple  cemme 
le  potier  pétrit  l'argile  :  c'est  de  la  vanité. 

Vous  croyez  votre  parole  pûîssaqte  quand  elle  n'est 
quliudaciéuse  :  c'est  de  la  pregomption. 

Vous  voulez  gouverner  nos  affaires  quand  vous  u'aves 
pas  su  gouverner  les  vôtres  :  c'est  de  l'orgaeii. 

Vous  avez  destiné  nos  épaules  à  vous  servir  d'écbeiooft 
pour  atteindre  à  la  grappe  que  vous  vouiez  cueillir  :  c'est 
de  l'ambitioç. 

Si  donc  vous  êtes  vaniteux,  présoippUie^x^  «Mtgueillmx 
et  ambitieux,  trouvez  bon  que  nous  aiournions  notre 
confiance  ^n  vous. 

Ce  n'est  pas  tout.  '       » 

Vous  oppoi^ez  les  uns  aux  autres  les  intérêts  des  qloyens< 
par  là ,  vous  préparez  le  règne  de  la  violeocet^et  vous  as- 


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—  i75  — 

sarei  le  triomphe  de  la  doetrine  de  Hobbes ,  qui  voulait 
tout  diriger  et  tout  légitimer  par  le  principe  de  la  force. 

Enfia  vous  tendez  èr  détruire,  en  un  instant,  un  ordre 
de  choses  consiicré  par  quatorze  siècles ,  et  vous  provo- 
quez la  raison  publique  à  voi^  menacer  du  formidable 
quo$  ego,... 

Ne  préjugeons  les  intentions  de  personne  en  particulier, 
n  accusons  personne  nonunément/mais  usons  d'un  droit 
acquis  à  tous,  du  droit  de  ranger  les  novateurs  de  nos 
jours  dans  les  deux  classes  suivantes. 

La  classe  de  ceux  qui  aspirent  à  leur  bien-être  indivi- 
duel aux  dépens  du  bien-ôtre  général,  et  qui*  veulent 
bire  la  nuit  si  obscure  dans  la  société  bouleversée,  qu  eux 
seuls  conserveront  le  privilège  de  vT)ir  clair  dar.s  les  té- 
nèbres. 

La  classe  de  ceujt  qui  cherche/it  le  bien-être  universel 
avec  un  cœur  droite  une  conscience  pure,  une  louable 
abnégation  et  un  ho'norable  désintéressement. 

Cette  distinction  établie,  la  conduite  de  Tbonnête  homme 
est  tracée. 

L'honnête  homme  combat  les  novateurs  turbulents  qui 
immoleraient  tout  à  leurs  passions.  ^    • 

U  s'associe  loyalement  aux  hommes  généreux  qui  veu- 
lent améliorer  et  non  détruire. 

Et  il  doit^toujours  penser  que  la  meilleure  innovation  a 
quelquefois  ses  dangers  quand  elle  est  trop  hâtée. 

En  effet ,  chnnger  les  mœurs,  les  idées,  les  lois  d'un 
people  avant  le  temps  c^iovenable,  c'est  cueillir  le  fruit 
avant  sa  maturité,  c'esT  ne  rien  &ire  pour  avoir  fait  trop 
vite;  c'est  plus  encore,  c'est  disperser  les  matériaux  du 
nouvel  édifice  qulind  le  vieil  édifice*  est  abattu. 


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—  176  ~ 

Je  me  vois,  à  mon  insu,  sur  le  terrain  politique,  ter-- 
rain  que  les  usages  académiques  nous  interdisent  d'explo- 
rer. Par  soumission  à  la  règle»  j'ahandonneraî  ce  «sujet 
élevé  pour  un  sujet  plus  humble,  aiais  peut-être  plus 
utile. 

Que  me  suis-je  proposé?  —  De  secourir  Tagriculteur  et 
de  venir  en  aide  à  l'agriculture  par  la  création  d  une  CaiSie 
agricole.  "  • 

C'est  donc  uniquement  de  ces  trois  points  dont  je  dois 
m'occuper.  . 

Quoique  la  matière  soit  vaste,  je  resserrerai  mon  cadre, 
et  je  supprimerai  les  détails.  Je  masserai  mon  exposé 
comme  une  colonne  serrée. 

De  deux  choses  Tune,  ou  mon  idée  est  bonne ,^  ou  elle 
est  mauvaise. 

Si  elle  est  boonc,  elle  se  montrera  telle  sans  être  dé- 
layée  comme  une  goutte  de  teinture  mère  amenée  par 
l'homéopathe  à  la  30.'  dilation. 

Si  elle  est  mauvaise,  j'en  aurai  toujours  trop  dit* 
On  comprend,  dès  lors,  que  je  ne  veux  ni  remontera 
Torigine  de  Tagriculture ,  ni  suivre  ses  progrès  dans  les 
différents  siècles  et  chez  les  xlifierenls  peuples. 
Je  la  prendr<y  telle  qu  elle  est  aujourd'hui. 
>  Timide  dans  son  allure ,  réservée  dans  ses  essais,  Tagri* 
culture  aime  le  sentiei  de  ia  routine.  Pour  elle,  il  n'y  a 
point  d'influence  de  mode.  Elle  ferme  roreilkaux  conseils 
qui  tendent  à  la  sortir  de  la  vieille  pratiqui^,  et  son  incré- 
dulité ne  saurait  être  vaincile  qu'à  lu  vue  d'un  succès  ré* 
pété.  - 

Lui  parle-t-on  d'une  culture  nouvelle,  d'un  nowelen- 


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—  177  ^ 

grais,  de  fourrages  nouveaux ,  dw  meilleur  assolement , 
d'une  meilleure  race  de  bestiaux ,  d'instruments  plus  com- 
modes? —  Elle  écoute,  mais  elle  reste  immobile. 

L'engage-t-on  à  défricher  des  terres  iaeiUtes,  à  amen- 
der des  terres  &ibles,  à  dessécher  des  terres  humides? — 
Alors  elle  n'^écoute  plus ,  elle  fuit.- 

Voilà  ce  qu'on  observe  dans  les  campagnes.  Aux  abords 
des  villes,  mais  dans  un  petit  rayon,  on  a  été  redeyabie 
de  quelques  progrès  ,  dus  aux  soins  éclairés  de  riches  pro- . 
priélaires.  Quelques  comices  ont  aussi  obtenu  dçs  succès  ; 
mais,  en  général ,  les  ^nélioralions  n  ont  profité  qu-à  un 
petit  espace  de  terrain ,  et  à  un  petit  nombre  de  per- 
sonnel. 

A  quoi  tient  celte  apathie ,  cl  cet  élat  slatipnnaire  de 
Fagriculture  ? 

Il  tient  à  Tétat  d^  gène,  à  l'état  de  souffrance  de  1  agri- 
culteur ?  •       • 

Et  cet  état  de  gêne  et  de  souffrance ,  à  quoi  le  rap- 
porter ? 

La  répoivse  se  pressent  :  —  Au  dé&ut  d'argent. 

Or  ,  ce  défaut,  d'argent  se  fait  souvent  sentir ,  et  qo- 
tamment  dans  lescas  suivants: 

Insuffisance  de  repolie , 

Perte  de  bestiaux  , 

Mévenf^  de  produits , 

Acquisition  d'instruments  aratoires , 

Paiement  de  fermages. 

l!e  fermier  demande  alors  des  ressources  à  l'emprunt  ; 
maïs  l'emprunt ,  dans  les  campagnes  ,  c'est  l'usure  ;  une 
usure  exorbitante,  insatiable ,  hideuse  ;  une  usure dotit  on 


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—  178  ~ 

n*a  une  idée  vraie  qu'en  soulevant  le  voile  qui  couvre  ses 
honteux  mystères. 

Si  le  fermier  emprunte,  l'intérêt  le  ruine  ;  s'il  n'em- 
prunte pas,  la  terre  est  ruinée  par  défaut  de  culture. — 
Voilà  l'alternative. 

L'usurier  des  campagn'es  est  inaccessible  k  la  compas- 
sion. Sa  joie  est  dans  le  malheur  d^autrui ,  sa  prospérité 
dans  la  '  détresse  de  ses  semblables.  Son  âme  d'airain  n'a 
d'élan  que  pour  le  gain  illicite.  Il  est  capable  de  tout ,  hors 
le  bien  ,  et  quoique  abject ,  on  peut  appliquer  à  son  ac- 
tion ,  le  vers  si^  connu  de  Virgiie  :  •' 

«  A  qael  crime  Tardcnte  soif  de  For  ne  conduit- elle  pas  ?  » 

....  Quid  non  mortétlia  pectora  cogis 
Aurt  sacra  famés,  Œnei\  L.  III.  v.  56  et  57. 

Je  ne  ueciis  pas  ce.  que  j'ai  appris  des  usuriers  de  cam- 
pagne. Je  craindrais  qu'on  ne  m'accusât  d'exagération. 

Et  voila  les  hommes  entre  les  mains  desquels  le  fer- 
mier tombe  ,  quand  les  ressources  pécuniaires  lui  font 
défaut. 

Si  au  contraire  le  fermier  pouvait  se  procurer  de  Tar- 
gent  à  ua  taux  modéré  ,  il  entretiendrait  ^  terre  en  bon 
état  de  culture  ,  il  achèterait  des  engrais  ,  des  instruments 
perfectionnés,  il  utiliserait  des  fonds  improductifs,  il  dé- 
fricherait de  petites  parties  de  terrain ,  il  hasarderait  quel- 
ques essais ,  enfin ,  il  améliorerait  le  sol ,  en  agissant  dans 
son  intérêt,  il  agirait  dans  Fintérét  de  tous. 

En  prêtant  au  fermier  à  un  intérêt  modique  ,  on  le  mot 
à  même  de  dépenser  trois  francs  pour  en  gagner  quatre  ,  et 
c'est  lai  rendre  un  sehice  signalé. 

On  a  beaucoup  parlé  d^agriculture  depuis  la  révolution 


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—  17^  ~ 

de  Février.  On  lui  a  témoigné  l^eaucoup  de  synpftdiie  « 
on  lui  a  £iit  beaucoup' de  proniefi^s,  ^n  a  même  poussé 
la  libéralité  juaqu*à  la  vqulqir  doter  de  ^i  hy/Mkicmires. 

Les  bons  hypothécaires  put  sans  doute  de  la  vakur , 
puisqu'ils  ont  la  propriété  pour  garantie ,  aoU  la  propriété 
bfttie,  soit  la  propriété  runil^.  * 

Toutefois^  ces  bons  ont  leur  cOtéfaiMa,  kw  cftté dé- 
favorable ,  ils  ont  Icuf  revers  comme  la  oaédaiUô. 

La  propriété  bâtie  peut  hinUer  pu  tomber  de  vétusté; 
la  propriété  rurale  peut  se  djéigrader  par  mauvaise  culture , 
ou  par  incurie  du  fermier*  Ejofin ,  Tune  et  Taytre  peu- 
vent manquer  d'acheteurs  quand  il  y  aurait  nécessité  de 
les  vendre. 

Mais  le  plus  gra^e  inoont énient ,  c'est  que  le  ferjiûer 
ne  peut  placer  son  bon  hypot^iécair^  pi  à  la  foire  ni  au 
marché ,  et  qu'il  ne  peut  le  faire  ac^^pter  en  paiement  p«^ 
aucun  ouvrier ,  par  aucun  marchand  ou  f<>urnÂsfi«ur<, 

Poi^  les  petites  transactions  usaeUçs  il  &ut  de  l'argdnt 
et  non  du  papier.  Nous  avons  vu  réceipment  des  fermiers 
refuser  la  livraison  de  leurs  bosufs  en  échange  de  billets 
de  banque.  Que  serait-ce  poUr  des  bons  hypothécaires  ? 

Donner  cours  forcé  à  un  papier ,  ce  n'est  pas  lui,  don- 
ner ce  que  Ton  pense ,  car  on  i;ie  peut  empêcher  cette 
convention  impoate  par  le  ven*deur  :  —  «  ÀrgeM  ou  mar- 
thé  nul.  i»  —  Le  coqrs  forcé  ^st  une  précaution  'ill^sDire 
pour  tout  marché  débattu* 

Me  dooBons  ni  pj^r ,  ni  iEls^gQa^ ,  ni  bons  hypothé- 
caires au  cultivateur  qui  a  besoin  d'avances.  Itonnons-lui 
deTargent.  •  •  . 

Mettons  entre  ses  mains  le  levier  qui  soulève  tous.  Ic^ 


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—  180  — 

lardeaux ,  la  clef  pour  laquelle  ih  n  V  a  pAs  de  serrure  à 
secre^ ,  la  planche  qui  saure  du  naufrage. 

Donndns-Iui  de  Targenl  ;  de  l'argent,  dans  lequel  tout 
est  stérile ,  comme  le  dit  Boileaa;  de  l'argent,  qui,  au  sen- 
timent d'un  esprit  judicieux^  compreiid  à  lui  seul  les  trois 
moyens  exigés  pour  faire  la  guerre. 

Mais  où  prendre  l'argent  ? 

A  qui  le  demander? 
-   A  VÉtat?  —  Mais  l'État  est  obéré  et  emprunte. 

Aux  capitaliBteê?  —  Mais  les  capitalistes  ne  domient 
rien ,  et  c'est  un  don  qu'il  nous  faut. 

Au.  commerce?  —  Mais  le  commerce  se  suffit  à  peine  à 
lui-même.  ^ 

«  A  qui  donc  nous  adresser  ?    *        *  >        ' 

A  la  terre.  -^  A  la  terre  seule ,  parce  que  seule  elle  bé- 
néficiera de  l'institution  d'une  Caisse  agricole. 

Combien  demanderons-nous  à  la  terre ,  et  comment  em- 
ploierons-nous les  fonds  qu'elle  nous  donnera  ?  —  C'est  ce 
que  je  vais  expliquer  le  plus  brièvement  et  le  plus  claire- 
ment possible,  en  tâchant  d'éviter  l'écneil  signalé  par 
Horace  : 

»     «  Je  tâche  d'être  court ,  je  deyiens  obscnr.  » 
....  Brevisesse  laàoro^ 
Obscuruê  fio.  *    Do  Aite  Pœtica.  Y.  35  et  36. 

La  France  possède  50  millions  d'hectares  de  terre  de 
toute  nature. 

Imposez  chaque  hectare  à  tinq  francs ,  payables  en  cinq 
ans ,  a  raison  d'un  franc  par  an ,-  par  hectare. 

A  la  fin  de  l{^  première* année  la  Caisse  agricole  aura  50 
milltdns;  elle  en  aura  250  après  la  révolution  des  cinq 
ans. 


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-  181   — 

Ghacno  des  2,846  cantons  de  la  France  aurait  sa  Caisse 
particulière,  coûiiéeau  percepteur  du  chef-lieu  de  canton. 
Avant  d*aller  pinç  loin,  prévenons  deux  objections. 
La  première  objection  est  celle-ci  : 
Un  irapdt  de  cinq  francs   par  i^ctare   est  un  fmpôt 
énorme. 
.    Je  répends: 

Ce  D'est  pas  un  impôt;  o*est.  un  don  limité  dans  sa 
quotité;  c'est  un  don  Mégé  par  sa  division  en  cinq  an- 
nuités. 

Et- j'ajoute: 

Vous  aver promis  de  ^courir  Tagriculture  qui ,  en  effet, 
a  besoin  d'être  secourue;  or,  vous  ne  h  secourez  ni  avec 
des  mots,  ni  avec  du  papier-monnaie;  donc,  si  vous  vou- 
lez accomplir  vos  promesses,  il  faut  un  sacrifice  effectif, 
réel ,  matériel. 

Voiâ  la  seconde  objeotion  : 

Les  fonds  ne  seront  pas  en  sûreté  entre  les  mains  du 
percepteur. 

Et  d'abord ,  voudriez^vous  les  mettre  entre  les  mains 
de  l'État,  pour  qu'ils  prissent  le  chemin  qu'ont  pris  les 
cautionnements  et  les  dépôts  aux  Caisses  d'Épargne? 
Non ,  probablement. 

Eh  bien  !  rassurez-vous  à  Tendroit  du  percepteur,  car  le 
percepteur  serait  tenu  à  fournir  caution ,  et  sa  caisse  d'ail- 
leurs ne  contiendrait  jamais  que  de  faibles  sommes. 
Maintenant,  passons. 

En  supposant  les  2,846  cantons  égaux  en  superficie, 
chacun  aurait  dans  sa  caisse,  au  bout  de  cinq  ans,  87,84!^ 
franc8« 


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—  183  ~ 

Mais  en  considérant  Ife  peu  d'étesdiae  territoriale  des 
cantons  urbains,  on  peut  «asurer  que  chaque  canton  ro- 
rai  aurait,  en  moyenne,  cent  miUe  francs  à  sa  disposi- 
tion. 

Cette  somme  sutSr&ît  aux  beaoifts,  et  f emplirait  le  but 
proposé. 

Alors,  vous  n*en  seriez  plus  aux  promes^ décevantes, 
mais  à  l'assistance  réelle^  Après  l'ékige  stérite  de  la  frater- 
nité, vous  en  seriez  à  un  acte  dePvéritabie  fraternité;  à  on 
acte  qui  prouverait  que  celui  qui  possède  sait  compatir  aux 
maux  de  celui  qui  souffre. 

Un  pareil  acte  aurait  un  effet  moral  immeilte.  Il  change- 
rait les  idées  de  ceux  qui  voient  leur  bonheur  dane  le  dé- 
sordre. Il  prouverait  au  pauvre  que  le  riche  n'est  pas  indi- 
gne de  st's  richesses ,  et  que,  plus  une  source  estabundante , 
plus  on  y  peut  puiser  abondamment. 

Enfin ,  la  culture  s'améliorerait,  et  les  cultivateurs,  main- 
tenant découragés,  cesseraient  de  craindre  ce  que  craignait 
un  chef  des  Germains,  à  qijii  Tacite  fiiit  dire: 

«  Si  la  terre  nous  manque  povr  vivre,  oUe  ne  peut  nous  man- 
»  qacr  pour  mourir.  » 

Déesse  nobis  terra ,  inquâ  vivamus;  in  quà  moriamurnon 
pofest,  Ânnalium.  Lib.  Xill. 

Supposons  nos  cent  miUe  (ïrancs  en  caisse. 

Comment  en  userons-nous? 

Rendons  la  chose  simple  et  facile.  Écartons  les  lenteiira, 
les  embarras,  et  surtout  les  frais. 

Ayons ,  dans  chaque  chef-lieu  de  canton,  un  comité  gra- 
tuit de  sept  membres;  savoir  :  le  Juge  de  Faix,  le  Maire,  le 
€uré ,  quatre  citoyens  désignés  par  le  Conseil  municipal. 


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-  185    - 

C'est  à  c^  Comité  que  le  fermier  emprunteur  adresse  sa 
demande  signée  de  lui  et  d'un/époudant. 

Le  Comité  donne,  s  il  y  a  lieu,  un  bon  au  fermier,  et 
le  percepteur  délivre  a  celui-ci  (a  somme  indiquée  au  bon. 
Si  le  prêt  dépiissait  le  prix  annuel  de  fermage,  le  fer- 
mier emprunteur  fournirait  deux  répondants  au  lieu  d'un. 

Le  taux  de  l'intérêt  serait  a  4  p.  "fo  par  an;  et  le  produit 
de  cet  intérêt  serait  ainsi  employé  : 

t  P'  %  serait  affecté  au  traitement  du  percepteur,  soit 
1,000  francs,  à  la  charge  de  fournir  les  registres  et  les  im- 
primés, tels  que  demandes  de  prêt,  bons  pour  toucher,  let- 
tres de  rappel ,  etc. 

Les  3  p.  **fo  restant ,  serviraient  : 
i.^  X  réparer  les  pertes  résultant  de  Tinsolvabilité  de 
Femprunteur  et  de  son  répondant,  circonstance  qui  se  pro- 
duirait rarement; 

2.*»  A  donner  des  primes 'd'encouragement  pour  les  dé- 
frichements, 

Les  dessèchements, 
Les  cultures  nouvelles, 

L'élètre  des  bestiaux;  *  '    • 

3.®  Enfîn,  à  récompenser,  dans  chaque  commune,  le 
zèle,  Tinteltigerice  et  la  bonne  conduite  de  deux  serviteurs  : 
un  valet  de  ferme,  une  servante  de  ferme. 

Tel  est  mon  plan  de  Caisse  Agricole.  Il  n'est  pas  ingé- 
nieux, j'en  conviens;  mais,  si  je  ne  m'abuse,  il  a  du  moins 
lemérjtedela  simplicité,  et  voici  comment: 

La  base  des  cotisations,  qui  n*est  autre  chose  que  la 
contenance,  existe  déjà  ;  elle  se  lit  sur  la  matrice  cadastrale, 
à  côté  du  nom  de  chaque  contribuable.  Quant  à  Tadminis- 

13 


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—  184  - 

tration  des  fonds ,  elle  est  dégagée  de  toute  e;ptrave ,  de  toate 
formalité  onéreuse. 

Quoiqu*il  en  soit ,  j(^  ne  nierai  pas  que  le  sacrifice  d'un 
franc  par  hectare,  pendant  cinq  ans ,  ne  soit  un  lourd  sa- 
crifice; mais,  je  le  demande,  comment  faire  beaucoup 
avec  peu?  Sufiit-il  de  donner  de  fallacieuses  espérances? 
—  Non ,  et  cent  fois  non ,  car  manquer  à  la  promesse , 
c'est  éveiller  la  défiance,  et  irriter  les  esprits. 

On  n'avait  jamais  autant  parlé  de  Tévangile  qu'on  en 
parle  depuis  plusieurs  mois  :  c'est-très-bien  ,  sans  contre- 
dit. L'évangile  est  la  loi  par  excellence;  une  loi  que  tous 
invoquent,  et  que  nul  ne  veut  abroger.  Seulement,  quel- 
ques-uns l'espliquent  à  leur  point  de  «vue. 

Toutefois  ,  je  ne  parlerai  pas  de  cette  loi  divine  que 
personne  ne  respecte  plus  que  moi ,  et  je  me  bornerai 
à  rapporter  les  par(»les  de  saint  Paul ,  parlant  aux  Galates  : 

c(  Portez  les  fardraiu^  les  uns*  des  autres,  et  vous  accomplirez 
»  ainsi  la  loi  de  J.-C.  » 

Aller  a  Lier  lus  oncra  porta  te  ,  et  sic  ^adimpUbitis  legem 
Christi,  VI.  2. 

Peut-être  alléguesa-t-on  que  cent  mille  francs  par  can- 
ton, en  moyenne  ,  formeraient  un  fonds  ^périeur  aux  be- 
soins de  l'agriculture.  Cette  allégation  serait  en  désaccord 
avec  l'opinion  de  ceux  qui  connaissent  l'étendue  de  ces 
besoins ,  et  qui  sont  désintéressés  dans  la  question  comme 
emprunteurs. 

D'un  autre  côté ,  il  faut  considérer  que  Tintérët  n'étant 
.qu'à  4  p.  "/o,  soumis  au  prélèvement  de  1  p.  7o  pour 
le  percepteur  et  les  frais  d'administration  ,.  il  ne  resterait 
que  3  p.  7o»  ou  3,000  fr.,  pour  couvrir  les  pertes  pos- 
sibles, et  accorder  des  primes  d'encouragement. 


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-  185  — 

Et  si  vous  n'accordez  pas  des  primes  d'encouragi^ment , 
ou.  si  c«*s  primes  sodI  insuOisaotes ,  vous  n'excitez  pas  i*é- 
mulatioû  ,  vous  lai&sez  le  cultivateur  dans  sa  somnolence , 
vous  atténuez  le  bienblt ,  vous  limitez  votre  action  quand 
il  &udrair  retendre ,  enfin ,  vous  n'êtes  utiles  qu'à  quelques- 
uns  ,  lorsqu'il  Ciudrait  vous  rendre  utiles  à  tous. 

Il  est  donc  évident  que  l'intérêt  à  4  p.  7»  ^^"^  ^^ 
intérêt  £iible ,  le  capital  qui  le  produit  doit  être  un  fort 
capital,  d'abord  pour  assurer Tinvariabilité  de  ce  même 
capital ,  et  ensuite  pour  distribuer  des  récompenses  et  aux 
maîtres  et  aux  serviteurs. 

Le  paiement  des  5  fr.  par  hectare  pourrait  se  diviser  en 
dix  annuités  pu  lieu  de  cinq,  cela  est  vrai  ;  mais  le  terme 
de  dix  ans  «erait  trop  long.  L'assistance  ainsi  reculée  per- 
drait de  son  prix;  et,  eu  égard  à  la  situation,  l'a'liance  de 
la  politique  et  de  l'humanité  ne  saurait  se  foire  trop  tdt. 

L'unique  moyen  d'adouchr  la  charge  des  5  fr.  serait 
dans  la  coopération  des  villes  d'une  population  de  cinq 
mille  âmes  au  moins,  par  une  légère  addition  à  leurs  im- 
pôts directs  ,  pendant  une  période  de  cinq  ans. 

Les  villes  n'ayant  de  superficie  que  l'emplacement  de 
leurs  maisons ,  coDtribaeiaient  pour  peu  à  l'établissement 
de  la  Caisse  Agricole  ;  et  cependant  les  villes ,  centres  du 
commerce  et  de  l'industrie,  profiteraient  delà  prospérité 
des  cam|>agnes ,  qui ,  devenues  plus  riches ,  consomme- 
raient davantage,  et  tireraient  des  villes  l'excédant  de  leur 
consommation: 

Du  reste,  je  n'émets  cette  idée  que  comme  idée  acces- 
soire, et  comme  n'ayant  qu'une  liaison  trèfr-foible  avec  mon 
plan.  Les  habitants  des  villes  qui  sont  propriétaires  ter- 


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—  186  — 

riens ,  et  qui  paieraient  pour  leurs  terres ,  seraient  sur- 
taxés ,  si ,  n'étant  pas  oômmërçants ,  ils  payaient  encore 
pour  la  ville. 

SiiDDOsnns  la  Caîssi»  AcrpirnlA  <&.tfih1n>  ;  trftnsfinrinnfi  nnns 


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MÉMOIRE 

SUR  LE  LIEU  DE  LA  NAISSANCE 

DE  DUGUESCLIN, 

PAR  H.  E.  DQGRBST  DE  VILLENEUVE , 

BfSMBRB  GORRESPOIfDAUT. 


1  MESSIEUBS  LES  KEMBRES  DE    LA   SOCIÉTÉ    ACADÉBUQUE 
DE    NAIfTES. 


Messieubs, 
UopinioD  généiale^  basée  sur  celle  de  quelques  histo- 
riens qui  ont  écrit  de  seconde  main  ta  biographie  de  Ber- 
trand Duguescliii,  a  |is|â,  vous  le  savez,  la  naissance  du 
héros  bre^  près  de  la  petite  ville  de  Si3>qqs,  dans  le 
département  des  Càies-du-Nord*  En  étudiant  à  sa  source 
cette  opinion  h J8jU>ri(pie ,  il  m'est  venu  quelques  doutes 
que  je  désire  soumettre  à  votre  judicieuse  appréciation. 


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1 


—  188  — 

Le  plus  ancien  des  biographes  de  Duguesclin,  et  son  con- 
temporain, le  trouvère  Cuvelier,  dont  la  chronique  rimée 
à  servi  de  base  à  tous  les  récits  postérieurs,  dit  en  parlant 
de  la  naissance  de  son  héros,  vers  49-51  : 

De  Bretaigne  fut  nez,  ce  scevent  li  auqnaot , 
A  VI  lieues  de  Besne$ ,  une  cité  vaillant , 
De  la  Motte  de  Bron ,  où  il  a  chastel  grant. 

Deux  châteaux, existaient  alors  sous  le  nom  de  la  Motte 
de  Broons,  Tun  à  six  lieues,  Tautre  à  dix  ou  douze  lieues 
de  Rennes;  le  premier  aujourd'hui  dansTUIe-et-Vilaine,  le 
second  dans  les  Côtes-du-Nord.  L'affirmation  du  chroni- 
queur contemporain  est  précise.  Ce  n'est  point  à  dix  ou 
douze  lieues  de  Rennes,  c'est  à «io;  que  nous  devoos  trou- 
ver le  lieu  qu'il  désigne.  Ce  n'est  donc  pas  à  Broons  dans 
les  Côtes-du-Nord ,  c'est  à  Broons-sur-Vilaine,  dans  l'arron- 
dissement de  Vitré >  et  le  canton  de  Chàteaubourg ,  qu'il 
faut  chercher  le  château  où  est  né  Duguesclin.  Il  y  existe 
encore  des  traces  d'un  manoiiv  fprtifié,  qui  n'a  été  détruit 
que  depuis  1767,  et  qui  ne. fut  pas  sans  importance.  Ce 
manoir  appartint,  avant  et  depuis  le  XIV.'  siècle ,  à  la  fa- 
mille Duguesclin ,  au  père  même  de  Bertrand,  et  une  tra- 
dition locale ,  qui  a  persisté  malgré  l'opinion  commune , 
veut  que  le  héros  breton  y  ait  pris  naissance. 

Comment  donc  se  fait-il  que  l'opinion  contraire  ait  pré- 
valu? 

Le  meilleur  moyen  de  s'en  assurer  est  d*en  suivre  les 
diverses  phases  dans  les  historiens  qui  ont  succédé  au  plus 
ancien,  à  celui  dont  le  témoignage  est  le  plus  authentique, 
et  à  la  véracité  duquel  tous  rendent  hommage  sans  l'i- 
miter. 


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—  189  — 

Mais  avant  d'entrer  dans  ces  détails,  je  crois  devoir  dis- 
cuter une  objection  préliminaire  sur  la  question  dea  di- 
stances. La  manière  de  les  évaluer  a  varié  sans  dcrute  selon 
les  sièeles  ;  mais  la  lieue  commune  de  Bretagne  équiva- 
lente à  2,400  toises,  environ  4,800  mètres,  a-t-el!e  jamais 
été  le  double  de  notre  lieue  métrique  actuelle  ?  Je  ne  le 
pense  pas.  Les  douze  lieues  que  Ton  compte  maintenant 
de  Rennes  à  Broons ,  dans  les  Côtes-du-Nord  ,  ni  les  dix 
lieues  un  tiers  qui  séparaient  ces  deux  villes,  suivant  Ogée, 
n'ont  donc  jamais  pu  n'ùlTe  comptées  que  pour  six.  Dira- 
t-on  que  le  chroniqueur  a  pris  le  chiffre  qui  convenait  le 
mieux  à  la  mesure  de  son  vers ,  ou  qu*on  a  lu  six  au  lieu 
de  dix  ?  Je  répondrai  que  le  biographe ,  de  peur  qu'on  ne 
s  y  trompe,  écrit  le  nombre  en  chiffres  rom^ilns,  VI  (sic), 
et  que  s  il  eut  sur  ce  point  altéré  la  vérité  connue  de  tous 
ses  contemporains,  ceux-ci  n'auraient  pas  fait  tant  de  cas 
de  sa  véracité ,  si  estimée  entre  autres  de  Jean  d'Estoute- 
ville,  lurt  des  compagnons  de'guerre  de  Duguesclin ,  qu'il 
fit  faire  une  copie  en  prose  de  la  chronique  rimée  de 
Cuvelier,  sept  ans  après  la  mort  du  grand  connétable, 
sons  les  ordres  duquel  il  avait  combattu. 

Ceci  nous  ramène  à  Texamen  des  biographes  de  seconde 
main  :  Le  premier  en  date  est  un  anonyme ,  dont  la  chro- 
nique en  prose  a  été  imprimée  au  XV. «  siècle,  à  Paris, 
pour  Johan  Bonfons ,  libraire,  demeurant  en  la  rue  Neuve- 
Notre-Dame^  à  l'enseigne  Saint-Nicolas  (1),  et  réimpri- 
mée en  1830 ,  à  Paris ,  par  un  élève  de  l'Ecole  des  Chartes, 
^  _____^^^__— ^— 

(i)  Il  existe  à  la  bibliothèque  de  Rennes  an  exemplaire  très- 
nre,  qai  t  appartenu  aux  Pères  angnstins  de  Vitré. 


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—  190  — 

M.  Francisque  Michel ,  dans  la  bibliothèque  eboisie  pu- 
bliée sous  la  direction  de  Laureutie.  Cette  chronique  qui, 
peut-être ,.  n*est  que  la  copie  en  prose  faite  par  ordre  de 
Jean  d'Estouteville ,  a  conservé  fidèleoient  les  indications 
du  trouvère  Cuvelier  sur  la  situation  du  château  ou  naquit 
Duguesclin  : 

c(  En  ce  temps  estait  en  Bretaigne  ung  chevalier  nommé 
»  Renauld  du  Guesclin,  seigneur  de. la  Motede  Brou,  ung 
)>  fort  chastel  à  six  lieues  de  Règnes.  » 

Cette  indication  est  répétée  avec  la  même  précision 
dans  le  titre  de  Tœuvre  : 

«  Les  &its  et  gestes  du  noble  et  vaillant  chevdier  Ber« 
»  trand  du  Guesclin ,  fils  de  Regnault  du  GuescHn ,  «ei* 
n  gneur  de  la»Mote  de  Bron ,  qui  est  ung  fort  chastel  à  six 
»  lieues  de  Règnes  en  Bretaigne.  » 

Le  second  biographe  ,  Claude  Menars  »  qui  a  écrit  en 
1618,  est  devenu  trop  rare  pour  que  pous  ayons  pu  le 
consulter;  mais  il  est  probable  que,  s'il  ^t  moins  affir- 
matif  que  son  prédécesseur  sur  le  point  qui  nous  occupe, 
il  ne  le  contredit  pas  du  moins  plus  que  son  successeur 
immédiat,  Paul  Hay  du  Chastelet,  qui  dit  (édition  de 
1666)  : 

«r  Bertrand  du  Guesclin  nasquit  au  chasteau  <ie  la  Ifioiie 
»  de  firoon ,  auprès  de  Rennes.  *» 

On  voit  que  le  vague  commence  à  naître.  Le  i^j^  pri- 
mitif est  déjà  altéré.  L'erreur  va  germer  dans,  cette  pre- 
mière déviation.  Nous  n'avons  pu  encore  en  observer  le 
progrès  dans  le  successeur  de  Hay  du  Chastelet.  La  chro- 
nique de  Lefèyre,  prévôt  et  théologal  d'Ârras,  n'existe  pas 
à  la  bibliothèque  publique  de  Rennes;  mais  cette  lacune 


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—  191  - 

D'est  pas«  je  crois,  plus  importante  que  celle  de  Claude 
Menars.  Nous  retrouvons»  en  effet,  dans  le  .biographe  qui 
la  suivi ,  la  même  expression  vague  que  chez  celui  qui  Ta 
précédé.  Guyard  de  Berviile  écrivait  en  1779: 

«r  Bertrand  Duguesclin  naquit  vers  Tan  1320,  dans  le 
»  château  de  la  Hotte  Broou ,  près  de  Jiennes*  d 

Ogée  est  le  premier  qui  ait  modiAé  complètement  Tin- 
dication  primitive.  Dans  son  Dictionnaire  de  Bretagne, 
publié  en  1778,  il  disait  à  l'article  Broons  (des  Côtfô-du- 
Nord) ,  en  parlant  de  Bertrand  du  Guesclin ,  le  Conné- 
table : 

a  II  fit  bâtir  à  un  quart  de  lieue  de  Broons ,  au  bord 
ji  du  grand  chemin  qui  conduit  à  S.^-Brieuc ,  un  château 
»  flanqué  de  quatre  grosses  tours ,  qui  fut  nommé  le  châ- 
9  teau  de  Bertrand  du  Guesclin.  » 

L*auteur  avait  dit  quelques  lignes  plus  haut,  dans  le 
même  article  : 

or  11  naquit  au  château  de  la  Motte  de  Broons,  Tan 
»  1326.  i> 

Ce  n*est  donc  pas,  selon  Ogée,  dans  les  Côtes-du-Nord 
que  naquit  Duguesclin.  Il  reconnaissait  implicitement  qu  il 
existait  un  autre  château  de  la  Motte-Broons,  dont  il  n'in- 
dique pas  la  situation.  Or,  les  Côtes-du-Nord  ii'en  ont 
jamais  possédé  d*aulre  de  ce  nom ,  ^que  celui  dont  Ogée 
attribue  la  construction  à  Duguesclin.  Force  est  donp  de 
revenir  à  celui  qui  existait  sous  la  même  dénomination 
dans  la  paroisse  de  Broons-sur-Vilaine.  Cependant  Ogée» 
en  parlant  de  ce  dernier  lieu ,  n'i(^di^ue  pas  Texistence  de 
ce  château ,  qu'il  ignorait  sans  doute. 

La  nouvelle  édition  du  Dictionnaire  de  Bretagne,  sans 


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—  192  — 

rectifier  Fopinion  d'Ogée  au  sujet  de  la  construction  du 
château  de  Broons  (Côtes-du-Nord) ,  par  Duguesclin  ^  y 
place  la  naissance  de  ce  dernier  coninje  une  chose  incon- 


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-  195  — 

lepoque  où  se  forma,  en  18t4,  sous  les  auspices  peu  lit- 
téraires du  maréchal  Soult,  une  société  bretonne ,  pour 
éle?er  un  monument  à  la  mémoire  du  bon  connétable.  On 
ne  se  montrait  pas  difficile  alors  en  fait  d'opinions  historié 
qoes^et  le  but  de  cette  commémoration  n'avait  rien  de  com- 
mun avec  la  vérité  archéologique. 

La  dernière  biographie  de  Duguesclin,  publiée  en  1841, 
par  H*  de  Fréminvillc,  reproduit  l'opinion  émise  par  HL 
Habasque,  sans  s'inquiéter  de  la  mettre  d'accord  avec  l'as- 
sertion précise  du  biographe  primitif  et  xïontemporain  en 
ce  qui  concerne  les  distances ,  après  avoir  dit ,  p.  4  : 

«  Bertrand  Duguesclin  naquit  en  1320,  au  cl1àt,^au  de 
»  la  Motte  Broons.  » 

Il  ajoute  en  note  : 

«  Ce  château  était  situé  entre  Lamballe  et  Montauban , 
»  tout  près  de  la  ville  actuelle  de  Broons  et  sur  le  bord 
•  de  la  grande  route  qui  conduit  de  Brest  à  Paris.  » 

N'est- il  pas  permis  de  croire  que  cette  erreur  a  eu  pour 
source  première  le  défaut  de  précision  des  biographes  de - 
pub  Cuvelier  et  son  abréviateur  anonyme ,  puis  la  tradi- 
tion née  dans  les  Côtesdu-Nord ,  par  suite  de  l'oubli  où 
se  perdait  celle  d'Ille-et-Vilaine ,  et  enfin  le  monument  lui- 
même  élevé  à  Duguesclin ,  sur  la  foi  d'une  croyance  popu- 
laire, confirmée  par  les  assertions  de  deux  historiens  es- 
timés ?  N'est-ce  pas  là  un  exemple  de  plus  de  cette  facilité 
avec  laquelle,  en  passant  par  des  modifications  successives, 
la  vérité  se  dénature  jusqu'à  l'erreur  complète? 

Noos  ne  croyons  jpas  nécessaire  de  grossir  notre  liste 
des  noms  des  autres  biographes  modernes  de  Duguesclin, 
qui,  ne  parlant  de  lui  qu'-accessoirement,  ont  tous  mon- 


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—  194  — 

tré  le  roéme  défaut  de  précision  sur  le  poioi  en  litige,  ou 
bien  ont  copié  sans  examen  l'opinion  de  MM.  Habasqoe  et 
de  Fréminville. 

Supposons  que  tous  les  biographes  de  Duguesclin  eus- 
sent reproduit  fidèlement,  jusqu'à  nos  jours,  l'assertion  de 
Cuvelier  sur  la  situation  du  château  où  naquit  le  grand 
connétable ,  aurait-on  eu  Tidée  de  chercher  à  dix  ou  douze 
lieues  de  Rennes  ce  château ,  qu'un  contemporain  place  à 
six  lieues,  en  écrivant  ce  nombre  de  manière  à  ce  que  la 
critique  la  plus  scrupuleuse  ne  puisse  s'y  méprendre? 

Il  est  donc  juste  de  restituer  à  la  commune  de  Broons- 
sur-Vilaine  un  fait  historique  qui  lui  appartient,  et  qu'on 
ne  lui  a  ravi  que  parce  qu'il  s'est  laissé  oublier.  Si  elle  eut 
protesté  à  l'époque  de  l'érection  du  monument,  celui-ci 
n'en  eût  pas  moins  été  élevé,  ajuste  titre,  spr  remplacement 
d*uii  château  qui  a  aussi  appartenu  à  la  femille  Duguesclin; 
mais  on  eût,  peut-être,  consacré  un  autre  souvenir  au  héros 
breton,  sur  le  lieu  où,  d'après  le  témoignage  des  contem- 
porains, il  est  le  plus  probable  qu'il  vint  au  oionde. 

On  eut  pu  objecter,  en  insistant,  au  nomde  la  tradition 
des  Côtes-du-Nord,  sur  ces  mots  du  chroniqueur  primitif: 
où  il  a  chastel  grant^  que  cette  désignation  semble  s'ap- 
pliquer plus  convenablement  au  château  rftppelé  par  le 
monument  moderne,  qu'à  celui  dont  le  nom  avait  été  pres- 
que oublié,  hors  du  lieu  où  il  avait  existé.  Cet  oubli,  eût- 
on  pu  dire,  semblerait  attester  son  peu  d'importance,  et  le 
titre  de  chasM  grani  ne  pouvait  lui  convenir.  A  cette  ob- 
jection secondaire,  un  simple  examendes  lieux  eût  répondu 
en  démontrant,  par.  des  traces  apparentes,  que  l'ancien 
château  de  Brpons-sur-VUaine  n'avait  pas  été  moins  impor- 


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—  195  — 

lant  que  celui  de  Broons  dans  lf*s  C6tes-du-Nord.  Ce  der- 
nier, selon  M.  de  Fréminvilte,  n'était  qu'un  simple  manoir 
€  orné,  plutôt  que  défendu,  par  quelques  tourelles  et  nids 
»  d'hiroodeiies,  a  totrs  en  flèches.  »  M.  Hahasque  dit,  au 
contraire,  «  qu  il  était  vaste  et  fortifié,  m  Admettons  ces 
deus  épithètes,  dans  la  mesure  indi(|uée  par  l'aspect  des 
lieux  et  le  souvenir  des  débris  disparus  depuis  trente  ans. 
Nous  nous  sommes-assurés,  par  nous  mémt*s,qu*elles  n'étaient 
pas  moins  applicables  au  château  de  Broons-sur-Vilaine, 
dont  l'enceinte,  l'étang  et  la  butte  seigneuriale  sont  encore 
visibles.  Un  ancien  recteur  de  la  paroisse,  H.  Hacard,  qui 
y  vînt  en  1767  et  y  mourut  en  1821,  a  vu  enlever  les 
restes  du  <:bâteau  de  la  Motte-de*Brjons,  pour  la  rerôn- 
siruction  de  celui  de  la  Bainère,  dans  la  même  paroisse.  On 
y  peut  encore  juger  de  leur  importance. 

Les  deux  contemporains  ont  donc  succombé  presque  en 
même  tentps,  et  les  débris  de  leur  vieillesse  ont  pu  té- 
moigner qu'ils  furent  égaux  en  for<:e  comme  en  durée.  * 

Qui  sait,  d'ailleurs,  si  Ton  doit  prendre  à  la  lettre  cet 
hémistiche:  où  i7  achastel  grant,  et  si  le  bon  chroniqueur 
ne  l'a  pas  m  s  pour  la  rime?  La  chose  n'était  pas  plus 
rare  au  XIV.*  siècle  que  de  nos  jours. 

Je  ne  pense  pas  que  l'on  veuille  puiser  une  nouvelle 
objection  dans  cette  particularité  de  la  tradition  des  Côtes- 
du-Nord  qui ,  selon  M.  de  Fréminville ,  avait  conservé  le 
souvenir  de  la  chambre  dans  laquelle  Duguesclin  vint  au 
monde,  et  la  désignait  enoore  aux  curieux  dans  le  «XYIL* 
siècle.  L'imagination  populaire  a  seule  &it  les  frais  de 
cette  découverte,  qui  n'(^st  appuyée  sur.  aucune  preuve,  et 
que  Ton  retrouve  partout  où  l'on  dit  qu'est  né  un  grand 


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—  196  — 

borame.  Le  château  de  la  MoUe-de-Broons-sor «Vilaine 
n*a  pourtant  jamais  élevé  une  pareille  prétention,  et  sa  tra- 
dition plus  modeste,  ignorante  des  preuves  qui  en  garan- 
tissent 1  authenticité,  se  bornaitàraconter,  à  ses  rares  visi- 


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—  197  — 

foi  de  cette  tradition,  confirmée  par  deux  seuls  historiens 
modernes. 

Y  a-t-il  encore  quelque  raison  de  douter,  en  présence 
de  cet  examen,  que  j'ai  tâché  de  rendre  aussi  complet  et 
aussi  impartial  qu'il  a  dépendu  de  moi?  Vousen  jugerez, 
Messieurs;  votre  correspondafit  na  voulu  que  s  éclairer 
près  de  vous  par  cette  nouvelle  communication,  afin  que 
vous  l'aidiez  à  réparer  un  injuste  oubli. 

Rennes,  le  20  janvier  1849. 


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Ce  frH,  poufsuit  l(.  ftiertst;  estconvfiinrquaut;on  don- 
nait l'exactitude  de  Cuvelier  :  Jean  d'Esftouleville  rattesté, 
et,  si  une  erreur  s'est  accréditée  sur  le  point  en  discussion, 
il  bttt  l'attriiMier  prinoipalQinefit  h  MM.  Hab«sque  et  de 
Fréittiifilie,  qui  oat  éerii  «ans  s'inquiéter  s'ils  étaient  ou 
itn  d'aecofd  avec  leèiographe  primitif,  avec  récrivaih 
contemjpooiîn. 

Képorse. 

Cuvelier,  dussoa  manuseril,  avaitpeut^ètre  écrit  dix, -et, 
par  uae  erreur  de  typographie,  on  aunt  imprimé  six.  Des 
Ilotes  plus  graveS'  sont  }ourDeliémenl  comnviëes  par  les  im-^ 
primèuts:  il' n'est  pas  un  auteur  qui  n'en  puisse  témoî^et; 
naisCuveiiffir  était  PrpTenc^^  il  vivait 'dans  un  temps  où 
ÏM  ne  voyageait  guère;  jamais  probablement  il  n'était 
vcmien  Binôtagne,  il  n'en  o^^naissait  que  tes  points  prtnh 
eipau:  EeoDea,  Nanties,  Saint-M$lo,  et  îl  s'occupait,  sans 
doute,  fort.peude8distaaeeBqui,  sansdoute  aussi,  lui  étafient 
très-peu  familières. 

Ia  prendre  du  peu  de  ca&  que  l'on  peut  faire  sur  ce  qui 
se  trouve  dit  sur  les  distances,  par  les  auteurs  qui  ont  écrit 
à  des.  épçques  déjà  veeulées,  s»  tire  die  oeque  M.  Ducirest, 
lui-même,  prête  à>  déux>d^eot#e  eux',  Hay  du  Chetelet  et 
fiujraad  deBervUle.  Ne  disent^Is  pas,  en  éfflsC,  Tun  et  l'au^ 
tsevqaeBerCranil  DufDeaelin'  est  né  pr^  àe  Be^mès?  Or, 
fbt-ilinéà'la*Mol|et4e*Broon9^sur  «Vilaine,  il  serait  né  au 
ia0iii6à.si£  lieuetî}eAfnne8.^'Uiief  dislance  de  quelques 
lieiies  parati  (bqc  pev  de  ebose  à  ces' auteurs.  Or,  si  des 
liûiBnies^  dont  l'un  écrivait  en  1666,  et  t'attire  en  1779^ 
entpa  taniréi  peqde^mpte  des  «dldàndes,  est-il  rationnel 

14 


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—  200  ~ 

dû  penser  qv^e  Cuv/dlier  y  ait  apporté  (ilus  de  soin,  y  aîlatla- 
ché  plus  d'impertanee? 

M.  Ducrest  nous  fournit  .eneone,  dans  son  écrit,  im 
e%eipplelrapp^t  chipeu  d'iinportanos  de  ces  légères  dif- 
férences qui  se  rencontrent  entre  «les  auteurs ,  diSteences 
qui  sont  en  quelque  sorte  inévitables,  quand  il  s -agit  et 
faits  éloignés  de  nous  de  plusieurs  siècles ,  do  bits  qui 
se  sont  accomplis!  dans  des  temps  où  Ton  sortait  à  peine 
des  ténèbres  du  moyen-âge;  c^est  ainsi  que  M.  Ducrest 
nc^is  feit  voir  Gugaodde'Berville,  fitifiafitiultre  Dagues- 
clin  vers  r^  132Q ,  et  Ogde  assignant  à  cette  naissance 
la  date  de  1326;  mais  doitron  s'en  .étomier  sérieoseiiiaDt, 
quand  on  voit  que  côImi  dont  nous  avoAs  fiiit  Duguet* 
p(in^  était  appelé, 'par  se$  <jonti»nporaiiiSf  otf  du  raoim 
d^ns  uQ  t^soips  voisin  de. sa  mort  ;  Memirt  BntrwalhL^ 
guaqgut ,  ainsit  qi^  le  constate  le  tùmbeau  trouvé  dans 
un§  salle .  placée  diHis  l'épaisseur  du  mur  de  la  tiiapeUe  du 
Rosaire,  au  couvent  des  Jacobins ,  à  Dînan^  tombeaH  sur 
lequel  on  lisait  : 

c(  Ci  gU  le  cneiir  de  Messire  Bertran  D^gmoifKi ,  en  aon 
vivant  coneslable  de  franco,  qui  Irespassa  le  Xill  jo«m' 
de  juillet,  l'an  mille  (Il  cent  IIII,  dont  son  corps  repose 
avec  ceux  des  Roys  à  Saint^Denis  en  France.  » 
,  Eh  bieii  !  quelqu'un  s'est-il  aviaé  de'  cobleater  rideotité 
de  Bertran  Dugueaqui  et  de  Dugueedin  ?  JKûH,  aisufé* 
nient  ;  on  s'est  bonne  à  dire  t  l'orthographe  des  noms  de 
Cunille  n'était  pas,  encore  f»ée  irrévocablement  an  coib* 
mencement  du  XIV*.*  siècle;  Dugueaqui,  par  une  suite  de 
transformation  qu'il  .serab  aujourd'hui  difinile  de  lepro* 
duire,  est.  devenu  Duguesclin,  et  sanipius  de  wAmt^bM, 


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—  30!  — 

« 

ToD  a  écrit  en  lettres  d'or,  sur  le  couvercle  du  tombeau 
où  repose  maintenant  ce  cœur,  le  mot  unique  :  Dugues- 
dm  (1). 

2.*  ObJBCTIOI!!. 

Ogée  dit  à  Tarticle  de  la  petite  ville  de  Broons ,  danà 
iesCMes-du-Nord,  en  partant  de  Bertand  Duguesclin  : 

c  II  fit  bfttir ,  à  un  quart  de  lieue* de  Broons,  au  kord 
du  grand  chemin  qui  conduit  à  Saint-Brieuc,  un  château 
flanqua  de  quatre  grosses  tours  qui  fut  nommé  le  château 
de  Bertrand  Duguesclin.  » 
Quelque^  lignes  plus  haut ,  il  avait  dit  : 
«  Duguesclin  naquit  au  château  de  la  Motte-Broons , 
raQl326.  » 

Ce  n'est  donc  pas,  fait  observer  M.  Ducrest,  dans  ce 
château  que  naquit  Duguesclin.  Or,  les  Côtes-du-Nord 
n'ont  jamais  possédé  d'autre  château  du  nom  de  la  Motte- 
Broons.  Donc  ce  n'est  pas  dans  les  C6tes-du-Nord ,  mais 
bien  au  château  de  la  Motte,  en  la  commune  de  Broons, 
canton  de  Châteaubourg^  arrondissement  de  Vitré,  dépar- 
tement dllIe-et-Vilaine^  qu'est  né  le  bon  connétable. 

Réponse. 

Le  fiiit  que  Duguesclin  aurait  fait  bâtip  auprès  de  la 
ville  de  Broons,  au  bord  du  grand  diemin,  un  château 
avec  quatre  grosses  tours,  ne  prouve  rien  en  fitveur  de 


{})  Notions  hist. ,  3  vol. ,  p.  304  et  305. 


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—  202  - 

ropîâion  de  M.  Ducrest»  car,  s'il  est  un  fiMt  constant ,  o'«8t 
que  le  château  bâti  par.  DoguesoUn ,  le  fut  sor  Teniplaee*- 
ment  d'un  autre  château  du  même  nom,  qui  était  entré 
dans  la  maison  Duguesclin  par  le  mariage  de  Bertrand 
IV,  son  bisaïeul,  avec  Jeanne,  fiHe  de  Robert,  seigneur 
4e  Broons.  ^ 

L'existence  de  ce  premier  c)iâteau  est  telleipent  cer- 
taii^  que  nul  n'ignore  qu'en  1158.,  un  différend ,  pour  le 
droit  d'aînesse,  ayant  éclaté  entre  deux  frères  jumeaux  de 
la  maison  de  la  Motte-Broons ,  à  l'efiet  de  savoir  lequel 
serait  regardé  comme  Tafné  et  aurait,  en  cette  qualité,  la 
seigneurie  et  le  château  de  la  Motte-Broons  «  Conan  de 
Richement , surnommé  le  Jeune,  mit  d'accord  les  deux 
frères,  en  ordonnant  que  la  seigneurie  serait  partagée 
entre  pux,  et  qu'il  serait  construit  un  nouveau  château 
portant  le  nom  de  Éroom  dit  Nmf^  château  qui  existe 
encore  à  présent  en  Sévignac ,  où  il  est  connu  soûs  le 
nom  de  Brpndineuc,  nom  qui  dérive,  par  corruption , 
du  premier. 

3."  OBiscTiom 

Le  cbât^u  dé  la  Motte~de-Broons-sur-ViIaine  a  disparu 
complétenient;  les  dernières  pierres  en  ont  été  enlevées  en- 
tre 1767  et  1821,  et  ont  servi  à  la'  reconstruction  du  châ- 
teau de  la  Baloerre ,  dans  la  même  commune. 
•  Malgré  ee  qu'en  j^uvent  penser  les  habitants  des  Côtes- 
du-Nord,  ils  savent  que  c'est  dans  leur- commune  que 
Duguesclin  est  né,  et  ils  montrent  avec  orgueil,  aux  rares 
visiteurs ,  les  ruines  de  leurs  cRâteaux  ,  les  lieux  témoins 
des  exploits  de  l'enbnce  du  héfos  Hrèton,  une*  métairie 


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—  2«5  — 

Yoistne  qui  porle  encore  son  nom  ;  ils  citent  aussi  l'é- 
gUie  ife  BkroonB  FeooQsiruile ,  afirèfi  an  incendie ,  par  les 
soins  aft  au  >compte  èe  la  ffiimilte  du  connétable. 

Réponse. 

Si  r^  dit  à  Broûos-^ur-iVilaiDe  ^oe  Dugaesçjin  y  na- 
quit, cat&e  tradition^  qui  ne  s'appuie  sur  rien  de  solide ,  n'a 
sucuiie  valeur  )  et ,  en  tous  cas ,  n*en  aurait  pas  plus  as- 
surément que  celle  qai  veut  qu'on  aiticonsenré,  à  ^oons^ 
dans  les  Côtas-du-Nqrd ,  le  souvenir  de  la  chambre  dans 
laquelle  JDug!i^8c(în  vint  au  monde  ;  entre  ces  deux  tradi*- 
tions  i\  est  au  moîps  permis  de  garder  la  neutralité. 

Quant  à  ce  poiut ,  .qua  Broons-sur«Vilaine,  on  montre 
des  lieux  témoins  des  jeux  de  son  enfance^  une  métairie 
fui  .porte  son  pom ,  .une  église  reconstruite  aux  frais  de 
safamille,  tout  cela  ^  réfute ;facilemeBt,  et  s'explique  tout 
Daturc|Uement,  ;puisquB  la  fieignauffe  de  Broon$-sur*Vi- 
laine,  étant  la  propriété  de  sa  famiUe»  Duguesdin  a  pu , 
sans  y  être  né^  j  aller  dans  son  enfanœ*  Les  rapports  du 
seigaeur  au  vassalexpliquent  aussi  suffisamment  la  recon- 
struction de  l'église  de  Broons  ou  de  rabbtffede  Fayotte, 
aux  frais  du  sejgneur  dominant. 

Ici^  Djucrest  va  au  devant  d'uoe^kbiervalÂoD  qu'on  n'eût 
pas  manqi|éfleluirfaiF/Q  : 

On  aurajt(pu,  dit-«U,  objecter  en  laveur  de  la  traditian* 
des  Côtes^du-Jiord  ,  j|ue  ces  mots  da  cbromiqueur  pri- 
mitif : 

ff  De  la.  M^Ue^de^Brpops  oà  il  y  a  chasVel.gnaQt^ s'adop- 
tent mieux  ^au^teau  désigné  par  le  mo)iiuQ|^nt  moderne 
comme  é^tlelieu  de  naissance  de  Bertrand  Du^uesclin^ 
qu'à  (^hii  fialaïU^ttord^Brooos-suriVilaioe.  » 


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—  204  — 

Qui  sait  pourtant ,  continue  M,  Ducrest,  si  Ton  doit 
prendre  à  la  lettre  cette  histoire  du  bon  chrosiqueur,  etû 
le  bon  chroniqueur  ne  Ta  point  mis  là  pour  la  rime  ?  La 
chose  n'était  pas  plus  rare  au  XIV.«  siècle  que  de  nos 
jours  ! 

Nous  en  demaïidons  pardon  i  noire  confrère  de  la  So- 
ciété Académique  de  Nantes,  mais  nous  lui  répondrons  : 

Si  le  trouvère  Cuvelier  a  pu  commettre  Terreur  dont 
vous  parlez  et  la  faire  volontairement ,  nous  vous  deman- 
derons où  est  cette  exactitude,  cette  fidélité  historique  que 
vous  vantiez  tant,  et  comment  pourriez-vous  vous  fonder 
avec  quelque  apparence  de  réussite ,  sur  la  légèrr  erreur 
de  distance  que  vous  avez  signalée,  pour  venir  combattre 
une  opinion  admise  jusqu'ici  sans  controverse ,  opinion  qui 
veut  que  Duguesclin  soit  né  au  lieu  où  le  Conseil  général 
a  fait  élever  une  colonne  commémorât ive. 

Mais,  poursuit  H.  Ducrest,  Cuvelier  s'est-il  entièrement 
trompé  en  disant  que  Duguesclin  était  né  dans  un  chastel 
grant  ?  On  pourrait  soutenir  le  contraire;  et ,  là-dessus , 
il  nous  apprend  que  l'enceinte,  l'étang  et  la  butte  seij^neu- 
riale  de  ia  Motte-sur- Vilaine,  oflrent  des  témoignages 
incontestables  de  l'importance  qu'eût  jadis  ce  château. 

Nous  ne  connaissons  pas  les  lieux  et  nous  ne  pouvons^ 
rien  affirmer,  ni  rien  nier  à  cet  égard  ;  mais  il  est  permis 
da  croire  qu'un  château,  dont  Texistence  n'a  été  connue 
ni  d'Ogée ,  ni  de  son  continuateur,  un  château  dont  aucun 
des  membres  du  Conseil  général  qui  a  fait  élever  le  monu- 
ment n  a  eu  connaissance ,  an  château  dont  nous  avons 
Aous-méme  appris  pour  la  première  fois  lexistence,  en  li- 
sant les  pages  de  M.  Ducrest,  qu'un  tel  château  n'a  jamais 
dû  avoir  une  grande  importance ,  même  relativement. 


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—  80»  — 

Qualmoyeo  d'ailleurs  de  crdire  que  le  curé,  le  maire, 
le  juge  de  pabi  et  le  notaire  de  Broons^wir^Vibifie,  anment 
gtfdé  Bn  silûDce  absoltt,  quand  le  Conseil  général  des 
Côtes-du-Nord  ordonna  réreclion  delà  colonne  momntten- 
taie,  si  leur  eommune  avait  eu  quelque  droh  de  prétendre 
àrhoaaeur  d'avoir  donné  naissonee  anptas  grand  homme 
dé  guerre  de.  la  Bretagne,  à  Tun  des  plus  grands  généraux 
delà  France ,  a'auraienfr*ils  par  élevé  la  voix  ot  crié  sur  tous 
les  tons;  mais  vous  vous  irompes ,  mais  vous  allez  commet- 
tre une  injustice  révoltante.  ' 

Les  «populations  sont ,  à  juste  titre ,  jalôuse&  et  llères  de 
eas  sottvenira  glorieux ,  et,  puisque'les  habitante  de  Broone* 
sur-Vilaine  n'ont  pas  alors  réclamé  ^  c'est  qu'ils  ont^compris 
que  leurs  réclamations  n'aumieirt  été  assises  sur  aucune 
base  solide. 

M.  Ducrest  ne  se  contente  pas  d'accroître  les  proportions 
du  château  de  la  Motte  de  Broons-surw Vilaine  ;'pour  mieux 
établir  ^que  œ  castel  avait,  matérieUen^ent  parlant,  au 
moins  autant  d'importanoe  que  le  cliAteaa  de  la  Motl^- 
de-Broons  des  GAle8*-da-Nord ,  il  che  ce  passage  de 
H.  de  FréminVilk  où -il  est  dtl,en  parhot  de  ce  dermer 
château:  .  ^ 

«  Un  diâlen  peu  étendu,  orné  plutM  qoe  défendu  pat 
quelques  tonrettas  et  nîdë  d'hirondelles  à  toits  «n  flèh- 
chc.  » 

léi ,  farpns-ndus  remarquer  à  M.  Duorest ,  il  Tant  prendre 
garde  à  la  confusiop.  Le  diÂteau  où  est  né  Dugoesclin 
disparut;  nous  croyons  l'avoir  prcové,  pour  faire  place  à 
celai  mentionné  par  Ogée,  lequef  était  flanqué  de  quatre 
grosses  tours,  et  fut  démoli  par  suite  d'ordres  donnés,  la 


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—  S06  — 

8  nm  1430.1  yar  ièhanae^idiKheisede  Arategoe,  oomtasse 
de  Mootrori  el  de  EUdieinoat,  ordres  que  i'attlear  des  Nd- 
UoQS  BîstAriqeefrsur  les  Côtes^-Biord  a  trw¥és  et  lus  éam 
les  r€igisti:es.seorets  dti  Paptèment  de  Bretagne. 

Nous  oe  oroyofls  pas  qu>aiiettB  auteur  ontemponaÎB  «H 
laissé  une  descrîfAioB  du  cbàteau  que 'fit  démolir  Oogoes- 
olin»  et  où,  selon  novs«  SI  avait  dâ  nallre.?bius  ne  *|MMons 
donc  pas  qu'on  puissle  lui  afip(ic||uer  «e  :que  ^it  Frémin- 
viUe,  qui  ne  &it  pas,  au  sarfdiiSveonoattre  ta  source  oà  il  a 
puisé. 

Nous  serions  toutefois  pmrté  i  eeohre  que  eç  qu'il  dit 
du  eiiMeau  à  ionrelibs  £ù  poivriènr ,  dont  il  vient  d>ltre  Cm! 
état,  s*appKqUerait^  noaiM»  «ucfaAtMitt  piinnitif  où  est  né 
Dugeesclin ,  non  pas  noD  plus  a  o<*lui  <|u11  ^t  codstraire 
plus  tard  sur  cet  icmplacement,  mais  bien  à  un  itroésième 
cb&teau  restauré  «  existant  au:niénie  tien  qui  vseion  M^Ou- 
orest,  aurait  été  démoli,  en  l616,'parordredes£t«ls. 

Ce  qui  nous  porté  à  adopter  cette  opinion ,  o^est  que  te 
diMeau  cottstrvit  par  Duguesiiio  avait  dû  être  détruit  en 
1420,  ainsi  qu*onirîentde  le  foir,etqBe,  pourtant.  Fau- 
teur des  Notions  Hssljoriques  a 'trouvé  sur  tés  regislrva  se- 
crets do  Parlement,  une  ordonnance  du  16  février  iB98, 
portant  qoe  les  tmrénu  et  oiiirtfs^ltThiatiMMdhieUirau 
de  BP09nê  aéraient  .rd$ieê ,  ensewMe  t$  p&Êiit*1mM  ie  iàéU» 
place,  fi  les  fouis  comblés. 

On  aurait' donc,  depois  la  destsuotion  de  44SO,  rétébli 
les  fortifications. du  ohâSean, !mais  sans  doute  dlune  ma- 
nière inoomplète.,  saiisdoute^au  cpmmencenientdes  giier*- 
res  de  la  ligue,  et  nniquepieot  poiér  le  mettre  a  même  de 
résister  à  un  coup  de  main« 


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~  207  — 

Voilà  ce  que  nous  avions  à  répondre  à  fattaque  de  M.  E. 
I>ucrest  de  Villeneuve. 

Nous  Aous  sommes  bornés ,  .dans  cet  écrit ,  à  réfuter  les 
arguments tie  H.  Ducrest,  nous  réservant  de  répliquer,  s'il 
jugeait  à  propos (i^|jf»i^er  sen-oj^kiioii  ^ur  de  nouveaux 
moyens. 

Nous  terminerons  par  cette  remarque ,  que ,  quand  il  fut 
giieslion  d'ériger  à  Do^ueselin  un  «nôiuAnent  reposant  «u 
lieu  même  où  il  était  né,  il  y  avait  au  Conseil  général  de» 
Côtes-du-Nord ,  qu  npmbte  des  jnen^bjces  .qui  yotèrant  l'é- 
rection du  monument,  un  neveu  ou  un  descendant  du  par- 
rain 'de  Duguesclin  ;  c'était  le  comte  de  Saint-Pem.  Ce 
membre  du  Conseil  général  sarvait,  sans  doute,  par  tradi- 
tion de  bmille,  en  quel  lieu  était  néCuguesclin.Eh  bien! 
il  est  mort,  sans  avoir  pbangé  d'opinion  à  oet  «égard,  et , 
jusqu'à  présent,  aucune  voix  nes'ét^ait  élevée  pour  protester 
bontre  jin  sentiment  généralement  admis.. 

Ce  n'est  donc  pas  paf  suite  d'une  tradition  .erronée  qu'on 
place  le  berceau  de  Duguesclin  à  là  Motte-^Bvoons,  près  la 
petite  ville  dé  ce  nom,  parce  que  c'est  là  qu'il  est  né  en  ef- 
fet ;  la^  qu*il  a  poussé  ses  premiers  vagissements;  là,  qu'il  a 
formé  ses  {premiers  pas,  et  Broons-sur-Vilaine  devra  se 
contenter  d'avoir  vu ,  par  fois ,  les  divertissements  de 
son  jeune  âge,  et  d'avoir  été  l'une  des  propriétés  dé  sa 
maison. 

SiiioV-Biieuc,l%  17  lévrier  1849. 

habasodï: 


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;        SUPPLÉMENT 

AU  MÉMOIRE  HISTORIQUE 

RELATIF  AU  IlÉU  DE  NAISSANCE 
DU  CONNÉTABLE  DUGUESCLIN, 

itmtUÉ    A.    LÀ    SOCfltTt    LCJMUIQVU    OB    ^A!«TB8, 

I 

.     18  22  iÂMViBR  1849  , 
FAR  M.  DUCJtEST  DE  VILLEIfEUVE. 


Messieurs , 

Un  de  nos  honorables  collègues,  dont  j'ai  cru  devoir 
consulter  les  lumières  sur  la  question  que  je  vous  ai  sou- 
mise, m'a  fait  l'honneur  de  m'adresser  une  réponse,  qu'il 
ro'autorifiûà  vous,€ommuniquer;  mais  je  vous  demande  la 
permission  de  répondre,  à  mon  tour»  à  ees  o))jections,  par 
quelques  nouveaux  arguments ,  qui  compléteront  ceux  que 


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—  209  — 

je  vous  ai  déjà  soumifi^  et  qui  exposeront  du  moins  la  ques- 
tion sous  toutes  ses  faces.  D'ailleurs,  la  contradiction  de 
bonne  foi  n*est-elle  pas  un  des  chemins  qui  conduisent  à  la 
férité? 

H.  Habasque  dit  que  a  Cuvelier,  dans,  son  manuscrit, 
»  avait  peut-être  écrit  dr^,  et  que,*  par  ut\e  erreur  de  typo- 
«  graphie,  on  aura  imprimé  «fo;.  »  J'ai  déjà  fait  remarquer, 
prévoyant  cette  objection ,  que  le  chroniqueur  avait  eu 
soin  d'écrire  dans  son  manuscrit  Vf  en  chiffres  romains. 
L'erreur  typographique  n'était  dono  guère  possible,  et  ce 
qui  la  rend  tout  à  înh  invraisemblable,  c'est  le  soin  avec 
lequel  a  été  imprimé  ce  manuscrit,  dont  la  première  et 
Tunique  édition  fuit  partie  de  rexcellente  collection  des 
documents  inédits  sur  l'histoire  de  France,  et  a 'été  dirigée 
par  *M.  E.  Charrière ,  entouré  de  l'appui  et  des  conseils  de 
M.  CbampoHion  et  des  savants  bibliothécaires  de  Paria. 
D'ailleurs,  cette  objection  de  M.  Habasque  est.  détruite 
encore  par  ce  fait  qu'il  existait,  à  siK  lieues  de  Rennes,  un 
château  du  même  nom  que  celui  qui  est  siFuéà  dix  lieues,  et 
que  cette  existent  implique  vérité  en  faveur  de  celui  des  deux 
châteaux  situé  à  la  distance  indiquée  par  le  chroniqueur. 
Pourqubi  supposer  une  erreur  de  typographie,  quand  on  a 
sous  la  main  une  interprétation  naturelle? 

Quant  au  cas  que  Ion  doit  faire  du  trouvère  picard 
Cuvelier,  son  éditeur  nous  l'apprend  dans  une  savante 
dissertation  qui  précède  la  chronique,  source  commune 
de  toutes  celles  qui  ont  été  écrites  sur  Duguesclin,  et  qui 
D6  sont,  dit  H.  Cbalrière,  que  de  faibles  copies  d'un  ex- 
Ment  originaL 

Serait  il  plus  juste  de  conclure,  avec  M.  Habasque,  que 


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—  210  ~ 

Cuvaiier  n'a  pas  dàiattaober  plus  dlimponlance  à  ee  qui 
conc/orne  la  distanoe ,  que  Bes  succeiaseiHrs  Hay  du  Chastelet 
et  Giiyàtd  de  Berville,  qui  ont  cru  être  suffisamment 
exacts,  en  disant  que  Duguesclin  était  né  pris  de  Rennes? 
Si  Cuvelier  n'avajit  pas  attaché  plus  dlmporlaace  qu'eux  à 
ce  sujets  otftnako  eux,  \l  n'eut  pas  précisé  la  distance. 
Mais,  nous  est-il  permis  de  douter  de  son  intention  et  du 
s6in  qu'il  mettait  à  l'exprimer ,  en  présence  de  ce  chiffre 
F/,  qui. aurait  pu  tout  auesi  bien  être  remplacé  par  le 
ciii&e  A*,  si  le  chroniqueur  n'avait  eu  des  raisons  pour  tenir 
au  premier?  On  connaît,  d'ailleurs,  le  .peu  de  valeur  Jiis- 
torique  de  Hay  du  Chastelet  et  de  Guyard  de  Berville  ;  mais, 
indépendamment  de  la  place  que  leur  a  Tait  la  critique,  on 
peut  -répondre  que  ces  deux  auteurs  ont  dû  s'exprimer 
conmie  ils  lont  fait.  Toute  distance  qui  n'excède  .pas  six  à 
sept  houes  n'est-elle  pas  considérée  comme  peu  de  chose 
relativement  au  voisinage  d'une  ville  importante  comme 
ttenne«?  Ils  dut  donc  .pu  dire  que  Duguesclin  était  né  près 
de  cette  capitale  tle  la  Bretagne.  Ils  eussent  dit.  plus  exac-* 
tement  près  de  Uinan,  où  Duguesclin  a  voulu  que  son 
corps  fut  inhumé,  et  qui  n'est  distant  que  de  quatre  à  cinq 
lieues  de  Brpons.  Dans  tous  ks  cas,  Teur  inexactitude  bien 
connue  n'infirme  en  rien  l'exaotitude^e'Cuvelier. 

Sans  éite  venu  en  Bretagne,  ie  chroniqueur  picard,  qui 
écrivait  à  Paris ,  a  pu  avoir  entre  les  mains  des  documents 
tirés  dupays.méme  de  son  héiK)s,  documents  auxquels  il 
s'est  d'autant  plus  strictement  conformé  qu'il  ignorait  les 
lieux*  Ajoute^  àcela  que  sa  cbrooique<a  été  copiée  à  Vamies 
au  XV*'  siècle,  pour  la  bibliothèque  .d'un  seigneur  bieton, 
et  qu'elle  a  été  aîfisi  soumise  à  4les  Jugea  eompéteiilSi  qui 


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—  211  — 
n'y  ont  rien  trouvé  à  redire,  et  la  tenaient  en  grande 

68ultie.- 

L'objection  tirée  jiar  M*.  Habasque  de  Terreur  d-Ogée, 
au  sujet  de'  ia  date  de  la  naissanoe  de  DuguescHn  et  de 
fînoertitude  de  rortbographe  de  son  nom,  malgré  celfe 
adoptée  par  soo  contettiporâin,  le  trouvère  CUvelter,  me 
semble  peu  eoaoluante,  relativement  à  la  question  dés  dis- 
iancesi.  J^  m'empresse  de  passer  à  oelle  beaucoup  plus  im- 
pcMTtante  qui  la  suit,  et  sur  laquelle  roule,  je  crois,  en  grande 
partie,  k  difflculAè. 

L'histoire  nous  appread  que  le  chàleàu  de  Broons,  dans 
les  €<>tesHlu-Nond ,  eiilra  par  un  marittge  dans  la.  famille 
Duguesoiin,  aenleount  au  Xili,"  siècle,  en  1270,  époque 
à  laquelle Taieui  de  Bertrand,  Robert,  épousa  la  fille  du 
seigneur  de  Broons*  De  cette  union  naquit  le  père  de  Bl6r- 
trand,  Robert^  qui,  comme  aîné,  dut  boiter  du  cbâiteau 
paternel.  C'est  ainsi  que  Bertrand  y  aurait,  dit-on,  pris 
naissance  à  son  tour.  Cette  opinion  n'est  pas  appuyée  de 
preuves  inconteslables.  E^  effet,  le  père  de  Bertrand,  en 
épousant  Jeanne  de  HalleBmins ,  dame  de  Sens,  prit-il 
immédiatement  possession  du  ob&teau  paternel?  En  avait^l 
bérité  précédemiiBnt?  Rien  n'atteste  à  quelle  époque  H 
devint  seigneur  de  Btoons.  On  peut  donc  conjecturer  qu'en 
atlendant  la  mort  de  son  père ,  il  a  dû  baniler  un  autre 
château  de  kifiimi)le,  celui-là  mémequi  était  situéà  Broons- 
sur- Vilaine,  et  à  six  lieues  de  la  seigneurie  de  Sens,  le 
patriqioiinè  de  sa  fiamime*  Cette  tongecture  prend-  une  oer'- 
taîne  vraisemhlabee,  si  on  la  rafiproche  des  dates  connues: 
c'est  en  1270  qos  fàîeul  de  DugueseKn  épousa  Itiéritière 
deBreonà,  prt$  Dinàn;  sonfib  àthé,*RÀbert,  épousa,  oh 


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ne  sait  à  quelle  date,  la  baronne  de  Sens,  daiis  l'IIle-et- 
Vilaine;  cène  peut  être  vraisemblablement  que  vers  1295. 
Son  père  était-il  mort  à  cette  époque,  et  lui  avait<*il  tran- 
smis la  seigneurie  de'Broons?  C'est  un  fait  qu'il  faudrait 
constater  par  un  document  écrit;  mais  25  ans  plus  tard  , 
en  1 320 ,  époque  de  la  naissance  de  Dugueselin ,  ce  même 
fait  devient  plus  probable,  sans  être  prouTé  davantage, 
puisqu'on  n'indique  pas  d'une  manière  précise  la  date  de 
la  mort  de  l'aïeul  de  Duguesdin,  et  que  cet  aïeul  pouvait 
vivre  encore ,  car  il  ne  s'était  écoulé  que  50  ans  au  plus 
depuis  son  mariage  avec  riiéritière  de  Broons. 

Jusqu'à  ce  qu'on  ait  donc  produit  ces  dates  de  la  mort  de 
l'aïeul  et  du  mariage  du  père  de  Bertrand  Duguesclin ,  le 
lieu  de  la  naissance  de  ce  dernier  reste  toujours  douteux. 
La  question  demeure  indécise,  à  moins  qu'on  ne  veuille, 
on  labsence de  preuve  contraire,  tenir  compte  de  Tindi^ 
cation  de  Cuvelier,  qui  fixe  la  naissance  du  héros  breton 
dans  le  voisinage  de  Rennes  et  non  de  Dinan. 

Après  cela,  je  n'insisterai  pas  sur  les  objections  secon- 
daires produites  par  M.  Habasque  et  q[ui  n'influeraient  en 
rien  sur  la  solution  de  la  question.  Qu'importe,  en  effet,  la 
construction  du  château  de  Broons  attribuée  par  Ogée  à 
Bertrand  Duguesclin,  le  connétable.  Ce  n*était  évidemment 
qu'une  reconstruction ,  et  je  n*ai  cité  cette  assertion  que 
comme  une  preuve  nouvelle  du  peu  de  fonds  qu'il  faut  (kire 
sur  cet  historien..  Que  d'omissions  et  d'erreurs  signalées 
dans  son  texte!  On  ne. peut  rien /conclure  de  son  silence  sur 
l'existence  du  château  de  Broons^su^-Vilaine,  non  plus  que 
du  dé&ut  de  protestations  des  notables  de  la  paroisse  où 
il  était  situé.  Ces  'bohs  villageois  auraient  clamé  dans  le  dé- 


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—  213  — 

sert;  et  qui  pourrait  dire  d*ailleurs  s'ils  savaient  ce  qui  se 
passait  dans  le  département  des  Côtes-du-Nord  ?  Eussent- 
ils  eu  parmi  eux  un  juge  de  paix  et  un  notaire,  ils  n'en 
auraient  pas  été  plus  éclairés  sur  ce  sujet.  Puis, 'après  tout, 
il  n'y  a  pas  de  prescription  en  fait  de  souvenirs  histo- 
riques. 

Il  n'en  reste  pas  moins  acquis,  et  M.  Habasque  ne  con- 
teste pas  ce  point,  que*le  château  de  Broons-sur-Vilaine  a 
été  la  propriété  de  la  famille  Duguesclin,et  que  Bertrand  a 
pu  y  séjourner  daps  son  enfance.  Hais  faut-il  affirmer,  avec 
M.  Habasque ,  que  le  berceau  du  grand  connétable  ne  peut 
être  placé  ailleurs  que  dans  les  Côtes-du-Nord?  Je  crois 
qu'il  y  a  lieu  de  douter  encore,  malgré  la  conviction  du 
Conseil  général  et  celle  de  M.  le  comte  de  Saint-Pern. 

Attendons,  pour  trancher  la  question  «  que  le  temps  et 
la  patience  des  archéologues  nous  aient  apporté  d'autres 
preuves  que  celtes  qui  résultent  d'une  tradition.  Il  ne  suffit 
pas,  pour  réfuter  l'assertion  précise  de  Cuvelier,  de  lui  at- 
tribuer une  erreur  de  distance;  car  il  y  a  une  naissance 
indiquée  dans  les  enxirons  de  Rennes  et  non  de"  Dinan , 
dont  le  nom  était  alors  aussi  connu  des  chroniqueurs  fran- 
çais que  celui  de  la  capitale  de  Bretagne. 

Je  dois  dire,  en  terminant,  que  je  regrette  que  M.  Ha- 
basque ait  donné  lé  nom  d'aUaqûe  à  l'exposé  de  mes  doutes, 
et  que,  sous  cette  impression,  il  leur  ait  attribué  une  in- 
tention affirmative  qu'ils  désavouent  ;  car  je  tiens  moins  à 
réclamer  pour  J'Ille-et-Vilaine  l'honneur  d'avoir  vu  naître 
Ouguesclin,  qu'à  préciser  le  lieu  où  il  est  né  en  Bretagne, 
et  à  troaver  les  preuves  de  la  tradition  qui  fixe  ce  lieu  dans 
les  Côtes^fai^Nord.' 

Rennes,  le  31  mai  184-9, 


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LITTÉRATURE  PERSANE. 


CHAPITRE*  VIII. 

LE    LITBB    BES    BOIS. 

MoH  d'Afrasiab  et  de  KeïKhosrou,  —  hfendiar.  —  Son 
combat  ateê  Rustem:  —  Sa  mort.  —  Mort  de  Rûs- 
tem.  —  De^itruction  de  la  famille  de  Sam  et  de  Aeri- 
mon. 

Oa  rencontre  rarement  des  poèt^  4e  i'ordke  de  Firdouâî 
et  bien  moins  encore  des  poèmes  composa  sur  d'«iufi$i.va8^ 
tes  proportions  que  le  Livre  de$  Boi$:  je  n'ai  donc  point  à 
m'exouser  de  consacrer  six  chapitres  entiers  à  l!eiB9^  de 
cette  œuvre  colossale.  Ce.^ue  j'en  ai  dit  et  cité  jmaqu'ieiauf*- 
firait  sans  doute  pour  la  faire  apprécier,  et  me  penneUraîl 
de  passer  à  un  autre  sujet;  je  crois  devoir  cependant  m'y 
arrêter  un  instant  encore.  Le  Ject«ur  qpi  aqra  suivi  av^ 
quelque  intérêt  les  divers  épisodes  que  nous  avons  mcontés 
de  Thistoire  de  Rustem,  sera  curieux  4e  trouver  m%  dans 
une  rdpide  analyse,  les  derniers  traita  de  saloi^gue^arritee 


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—  215  — 

de  labeur  et  de  gloire.  Nous  consacrerons,  en  même  temps 
et  forcément,  quelques  pages  aux  deux  héros  couronnés, 
dont  ia  destinée  s'est  liée  si  constamment  à  celle  du  fils  de 
Zal  Zer,  Afrasiab  son  in&tigable  ennemi ,  Keî  Khosrou ,  stbn 
magnanime  souverain.  Isfendiar  ,  autre  héros  célèbre  chez 
les  Persans  et  peut-être  plus  célèbre  encore  chez  les  Grecs,- 
qa'il  combattit  sous  le  nom  de  Xerxès,  viendra  enfin  com- 
pléter la  liste  de  ces  illustres  personnages,  immortels  hé- 
ros d*ut](e  immortelle  épopée.  Mais  si ,  jusqu  ici ,  nous  avons 
marché  d'un  pas  sur,  guidé  par  la  belle  traduction  française 
de  M.  Jules  Hohl ,  il  n'en  sera  plus  ainsi  désormais.  Cette 
excellente  traduction  s'arrête  malheureusement  à  cet  instant 
où  la  fm  tragique  de  Bahram  est  vengée  par  le  père  et  les 
frères  de  ce  valeureux  jeune  homme  ;  nous  n'avons  donc 
plus  maintenant,  pour  fournir  une  base  à  nos  appréciations 
sur  le  poème  de  Firdousi ,  que  l'insuffisante  et  assez  médio- 
cre analyse  qu'en  a  faite,  en  langue  anglaise» H.  James  At- 
kinson.  Ce  n'est  plus  le  flambeau  d'un  parfait  traducteur 
qui  éclairera  notre  marche,  mais  un  très-pâle  et  très-iofi- 
dële  reflet.  Et  pourtant  le  génie  poétique  de  Firdousi  a  jeté 
des  éclairs  si  vifs  et  si  puissants,  qu'on  ^n  sent  encore  l'éclat 
même  à  travers  tous  ces  nuages. 

Malgré  le  grand  désastre  éprouvé  par  les  Perses,  la  guerre 
se  soutint  opiniâtre. contre  les  Touraniens,  car  c'était  mie 
guerre  de  races.  De  nouvelles  batailles  sont  livrées;  et  l'une 
d'elle,  après  avoir  duré  sept  jours  et  sept  nuits  avec  un^ 
acharnement  sans  exemple,  ^e  termine  par  une  nouvelle 
dé&ite  de  l'armée  de  l'Iran  qui ,  réduite  à  la  dernière  extré- 
mité ,  est  heureuse  de  trouver  un  refuge  précaire  dans  une 
place  forte  des  monts  Amavends. 

15 


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—  216  - 

Aussitôt  qae  Kei  KbosrM  reçtrt  la  notitelle  de  la  situa- 
tion désespéréft  àes  siens,  il  se  hftta  d'envoyer  à  Tbous  dé 
noRibreuK  renforts comnf»ndës  (>ar  ftustem.  De  son  côté, 
Afrasiab,  pressé  de  porter  tm  dernier  coup  i  la  puissance 
iranietitie,  adresse  à  tousses  tributaires  etaHiés  une  con- 
vocation qui  sembleiés  appeler  à  un  partage  assuré  des  dé- 
pouilles d'un  vaste  empire. 

La  lufte  recommence  donc  avec  une  nouvelle  fureur,  et 
fou»nK  à  Rustem  l'occasion  d'ajouter  des  lauriers  nouveaux 
à  ses  anciens  trophées.  Tout  change  de  fece  sous  cette  main 
constamment  victorieuse.  Après  plusieurs  batailles  rangées 
et  autant  de  combats  singuliers  à  la  manière  antique,  Ten- 
nemi  est  abattu.  Afrasiab  délaissé  par  des  troupes  qu'ont 
démoralisées  ses  défaites  successives,  se  réftigie  précipitam- 
ment aiix  extrémités  les  plus  orientales  de  la  Tartarie  chi- 
noise, abandonnant  au  vainqueur  ses  drapeaux ,  ses  tentes, 
ses  arntes ,  ses  coursiers  et  d'imnienses  trésors  qui  allèrent 
grossir  ceux  du  roi  de  Perse. 

Inutile  de  dire  les  fiâtes  triomphales  dont  le  fils  de  Zal 
fut  l'objet  à  son  retour,  d'énumérer  les  riches  et  nombreux 
présents  dont  il  flit  comblé  par  le  roi.  Suivi  de  la  recon- 
naissance et  des  acclamations  de  la  Perse  entière,  il  re- 
tourna dans  le  Sefetan  jouir  d'un  repos  qu'il  avait  bien 
mérité.  11  entrait  alors,  dit  la  tradition,  dans  la  quatre- 
centième  année  de  son  âge.  Mais  le  repos  pouvait-il  être 
de  longue  durée  pour  un  homme  de  la  trempe  de  Rustem? 
Dans  la  Perse,  comme  dans  Tlndé,  se  trouvaient  trop 
constamment  quelque  rebelle  à  châtier,  quelque  monstre  à 
réduire;  quelque  mauvais  Divâ  combattre,  pour  qu'on  né 
lui  revit  pas  souvent  en  main  le  gfaiive  iet  le  hcet.  ChacUûê 


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—  âi7  — 

de  ces  expéditions,  de  ces  aventure»  fournit  à  Firdousi 
Fcttcasion  de  consacrer  de  nouveaux  chants  à  ia  gbire  de 
son  héros  de  prédilection.  Toutefois,  il  ne  perd  pas  de  vue 
fieœ  n'est  pas  à  on  seul  personnage,  quelque  grand  soiu 
il,  mais  à  rhistotre  d*un  peuple  entier  que  ses  vers  appar* 
tiennent  Le  cours  des  événements  Tentraîne.  Ceux  que 
BOUS  allons  raconter  d'après  lui  sont  cufteux  sous  plus  dTuft 
rapport  r  ils  rectifient  et  complètent  du  poial  de  vue  per- 
an  les  récit»  obscurs  et  qn^^elois  coptradictoifes  des 
èsrirains  de  ia  Grèce  ^  et  nons  donnent  tant  sur  Afrasiab 
que  Keï  Khosrou ,  c*6st^à^dire  sur  Astyage ,  roi  de  Médje 
et  Cyrus-le^rand ,  des  notions  un  peu  différentes  de  «elles 
que  nos  études  elassiques  nous  ont  inculquées. 

La  débite  subie  par  les  Touraoiens  ne  pnoduistt 
qu'on  eiei  temporaire  pouv  le  repos  de  la  Perse  :  la  haine 
indomptable ,  fia&ti^ble  activité  d' Afrasiab  eurent  bien- 
tôt trouvé  nooyen  de  reprendre  Toffensive.  De  son  c6té, 
Keï  Khosrou  confia  à  Gouderz  le  sc»in  de  réduire  de  nou- 
veaa  son  étemel  ennemi,  a  La  lâche  de  Rustem  contre 
t  Afrasiab  est  accomplie,  lui  dit*iL  La  prudence  et  la 
t  haute  valeur  de  ce  héros  lui  ont  acquis  une  gloire  sans 
»  égale:  Maintenant  c'est  toi,  Gouderz,  qui  dois  vaincre 
a  et  triomphera  ion  tour.  » 
i  Gouderz,  eo  conaéquence,  marche  droit  at\;c  frontières  du 
I  Tonrsn,  à  la  tfte  d'une  puissante  arn»ée;  tandis  qu'un 
aatre  îHuMre  Stpefabed  ,8'avançanl,  vers  TEst,  à  lii  con- 
quête de  rinde,  doit  se  rabattre,  par  le  Nord  ,  aur  les 
eonHns  de  la  Tartarie  cfaiBoise,  de  manière  à  placer  Afra- 
siab entre  don  corps  d'armées  qui  kd  rendent  tonte  éva«- 
sion  impossible. 


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—  21»  — 

En  dépit  de  ces  prudentes  combinaisons  et  de  la  va- 
leur des  guerriers  de  l'Iran ,  la  lutte  se  soutint  deux  an- 
nées entières  avec  des  chances  variées.  Enfln,  dans  une 
dernière  et  grande  bataille,  i'armée  touranienne,  taillée 
en  pièces,  perdit,  avec  une  foule  de  guerriers  en  renom, 
son  vénérable  chef,  le  sage  et  brave  Piran  Wiseh ,  oncle 
d'Afrasiab  ;  et  avec  lui  s'éteignit  la  fortune  de  ce  prinoe. 

Keï  Khosrou  n'eut  pas  plutôt  appris  la  dé&ite  et  la 
mort  de  Piran ,  qu'il  vola  à  1^  frontière ,  traversa  le  Djihoon 
et ,  passant  par  Bokhara.  et  Samarcande ,  s'avança  rapide- 
ment à  la  rencontre  de  l'ennemi.  De  son  côté,  Afrasiab 
n'était  pmnt  resté  oisif.  Tous  ses  trésors  cachés  avaient 
été  sortis  de  terre  et  employés  à  soudoyer,  une  nouvelle 
et  formidable  armée ,  dont  il  plaça  la  cavalerie  sous  les 
ordres  de  l'un  de  ses  fils  nommé  Schaïdeh  Poscbeng. 

Dans  le  même  moment,  KeS  Khosrou  mettait  à  la  tète  de 
ses  troupes  son  parent  Lohrasp  ,  son  futur  successeur  ao 
trône ,  et  allait  en  personne  au  Seifstan  prier  Rustem  de 
venir  prêter  à  ce  jeune  chef,  novice  encore  dans  l'art  de 
la  guerre ,  l'appui  de  ses  conseils  et  de  sa  vieille  expérience. 

Quanta  Afrasiab,  privé  du  prestige  de  la  jeunesse,  en 
proie  à  de  sombres  pressentiments,  ce  n'était  plus  qu'avec 
défiance  qu'il  voyait  approcher  l'heure  de  la  lutte.  Hésitant 
À  combattre ,  jl  résolut  d'envoyer  son  fils  faire  au  roi  de 
Perse  des'  propositions  d'accommodement.  —  «  Annonce 
»  à  Keï  Khosrou ,  dit-il  au  jeune  ambassadeur,  que  s'il 
n  veut  signer  un  traité  de  paix  avec  le  Touran  ,  une  par- 
j»  tie  de  mon  armée  passera  au  service  de  la  Perse,  et  que 
»  je  lui  livrerai  un  de  mes  propres  entants  comme  gage  de 
»  de  ma  sincérité Hais  encore  un  mot  à  ton  oreille , 


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—  2t9  — 

»  A  Sohaîdeh  :  si  Keî  Khosroa  repousse  ces  ouvertures , 
9  propose  lui ,  afia  d'éviter  une  inutile  fusion  de  sang , 
9  de  vider  entre  nous  deux  seuls  cette  grande  querelle. 
»  —  S'il  refiise  d'entier  en  lice  contre  moi ,  demande  alors 
»  à  prendre  ma  place  dans  le  combat,  nvee  cette  corïdi- 
»  tion  que  si  les  étoiles  se  tournent  contre  toi  ^  que  si  tu 
»  es  vaincu, je  lui  céderai  l'empire  et  fuirai  en  exil  loin 
9  de  te  monde  trompeur.  » 

Conformément  à  ces  instructions ,  Schaideb  se  rend  au 
€amp  des  Perses  où  il  est  admis  à  présenter  ses  dépêches 
avec  toute  la  solennité  que  comporte  son  rang  et  Tim* 
portance  de  sa  mission.  Keï  Khosrou  l'invite  ensuite  à  se 
retirer  dans  l'appartement  qui  lui  a  été  préparé  et  lui  pro- 
met de  lui  faire  bientôt  connaître  sa  réponse.  Dès  que  le 
prince  tcuranien  se  fut  éloigné  ,  Keï  Khosrou  ex]>osa  l'ob* 
jet  du  message  à  son  eonseil  et  dit  :  —  «  Je  ne  puis  ni  ne 
»  dois  accepter  des  offres  de  paix  qui  m'ôteraienl  tout  es- 
»  poir  de  jamais  tirer  vengeance  de  la  mort  de  Siawusch  , 
n  mon  père.  Mais  si  je  repousse  ses  offres,  Afrasiai)  do- 
9  mande  que  nos  mutuelles  prétentions  soient  abandonnées 
9  aux  chances  d'un  combat  singulier  entre  lui  ou  son  fils 
9  et  Dioi.  J'ai  vu  Schaideh  ;  son  regard  est  fiarouche ,  son 
9  œil  injecté  de  sang  ;  si  je  m*expose  avec  lui  dans  l'arène, 

•  il  s'en  faudra  de  peu  jque  son  redoutable  cimeterre  ne 
9  tranche  le  fil  de  ma  vie.  Que  l'on  courre  donc  préparer 
9  ma  plus  solide  cotte  de  mailles  et  mon  casque  de  Roum.  » 

Mais  Rustem  et  tous  les  grands  présente  au  conseil  s'é- 
crièrent : —  a  II  n'en  peut,  être  ainsi.  Àfrasiab  est  rem- 
9  pK  de  ruse  et  d'artifice.  Il  ne  recule  même  pas  devant 

•  l'emploi   maudit  de  la  magie,  et  n'a  jamais  craint  de 


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—  210  — 

»  rompre  sa  foi  jwée^  L'amkBsaie  de  Schaîdeh  ne  peut 
D  pas  ne  pas  cacher  quelques  projets  de  trahison.  Si , 
D  d'ailleurs,  le  combat  avait  Heu  et  devenait  fatal  à  ce 
»  prince,  eh!  bien,  quy  aurait-4i  alors,  qu'un  guerrier 
»  turc  de  moins  pour  affliger  ce  monde,  et  quelle  gloire 
0  le  prince  souverain  de  Tiran  obtiendrait-il  de  oette  fu-> 
»  tile victoire?-^ Si,  au  contraire,  le  roi  des  rois  suc- 
»  combait  sous  le  fer  de  la  lance  ou  deTépée  de  ce  jeune 
a  audacieut ,  dans  quel  abîme  de  ruine  et  de  malheur  ne 
a  -tomberaient  pas  ce  glorieux  royaume  et  ses  peuples 
»  affligés  !  a 

Ces  observations  étaient  parfaitement  sa^es;  Keî  Khos* 
rou  le  comprit  :  de  i'avis  même  de  Rustttn ,  il  donna  à 
Sch«iideh  son  audience  do  con^é,  et  lui  dit  quil  ferait 
porter  sa  répons^e  à  son  père.  — ^  «  Ne  suis-je  donc  pas  venu 
a  ici  pour  te  combattre  ?  »  répondit  avec  hauteur  Tor- 
gwilleux  jeune  homme. 

Irrité  de  ces  paroles  provoqijantes  comme  de  la  piqûre 
d*un  frelon ,  le  souverain  de  Tlran  réplique  aussitôi  ;  «  £h 
a  bien  donc  !  qu  il  en  soit  aiiisi  que  tu  le  désires  et  que 
a  ta  destinée  s'accomplisse  I  A  demain  le  combat,  a 

Après  avoir  vaillamment  engagé  ainsi  sa  parole,  Ket 
Khotrou  fit  dresser  pour  Afrasiab  le  message  suivant  : 

<r  Notre  querelle  se  teint  de  sombres  couleurs.  C'est  en 
»  vain  que  tu  engages  ta  foi  pour  que  la  guerre  cruelle 
a  cesse  entre  nous  deux.  La  modération  de  tes  parolea 
é  d  aûjourd'huixèle  mal  la  fAïude  de  ta  pensée.  Mais  cette 
j»  couronne  impériale  qui  orne  ton  front,  et  cette  massue 
a  qui  arme  ton  bras,  et  ces  trésors  dont  tu  es  si'fier^  et 
a  ton  royaume,  et  ta  puissante  armée ,  et  tout  ce  que  lu 


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—  251  — 

»  posées  eiUia  4ait  m^^ppartopir  !  (iOraque  das  ^astres 
9  bvorables' tournaient  $ur  tatéte^  tu  pouj^ais  bien',  au 
»  milieu  d'im  featin ,  entoui'é  des  enclaves  d^  ta  cour  «  te 
»  dire  :  Je  mis  fort.  Je  suis  pumant  ;  mais  aAJÎaurd'bui 
i>  Dieu  le  Tout  Saint  a  fait  passer  daoa  nos  oiains  cette 
9  force  et  cette  puissance ,  car  elles  viennent  de  kii^  de 
»  lui  sâul  !  ties  palmes  de  la  victoire,  le  poepitre  de  Tarn* 
»  pire,  l'autorité  suprénie,  sont  à  qui  lui  plait.  Perdu  pour 
j>  toi ,  roi  perfide ,  bientât  ton  trône  sera  le  siège  de  Keï 
j»  Khosrou.  » 

Un  second  me3sagei  destiné  à  Scbaïdeh,  s*e3(pmnait 
ainsi  : 

«  Es-tu  déjà  si  las  du  palais  de  ton  père  et  du  doux 
»  bien  de  la  vie,  téméraire  jeune  homnae,  qpe  tu  veuilles 
»  affronter  les  basards  d'un  combat  mortel  ?  Le  nuage  du 
»  malheur  s'abaisse  sur  toi  ;  ta  robe  royale  sera  ton  lin- 
n  ceul  ;  et  ton  père  sur  son  fijs  pleurera  du  sang»  comme 
B  sur  Siawuscb  en  a  pleuré  Kaous.  i^ 

Le  lendemain,  dès  Paube  du  jour ,  \a  gnuod  Khasrau 
descendit  dans  l'arène,  et  quand  il  fuir  à  portée  de  la  voix, 
Schaïdeh  lui  cria  ;  —  «  Tu  arrives  à  piedt  roi  de  l'Iran! 
»  C'est  bien  !  que  notre  combat  ait  donc  lieu  à  la  lutte!  j> 
—  Pour  toute  réponse ,  Keï  Khosrou  saisit  son  agresseur 
à  la  ceinture,  le  terrasse  en  dépit  de  ses  efforts,  et  se  pré* 
cipitani  sur  lui  tel  qu'un  lion  furieux  sur  un  onagns ,  lui 
ouvre  la  poitrine  de  son  poignard. 

L^  roi,  après  avoir  ainsi  vengé  son  honneur  outragé, 
ordonna  que  le  cadavre  du  malheureux  Schaïdeh  fut  lavé 
avec  du  musc  et  de  Teau  de  rose,  et  inhumé  avec  tous  les 
honneurs  que  lui  méritaient  et  son  sang  royal  et  san  cou- 
rage digne  d*un  meilleur  sort. 


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~  222  ^ 

La  nouvelle  de  la  mort  de  son  fils  porta  la  rage  et  le 
désespoir  dans  le  cœur»d*Afrasiab.  Renonçant  sur  le  champ 
à  toute  idée  de  paix ,  il  s*avança  contre  les  Iraniens  à  la 
tète  d'une  armée  exaspérée  par  la  perte  de  son  jeune  prince. 
La  lutte  fut  désespéi^e.  Toutefois ,  la  fortune  se  prononça 
en  &veur  de  Khosrou ,  qui  ne  négligea  rien  de  ce  qui 
pouvait  lui  assurer  tous  les  fruits  de  sa  victoire.  L*armée 
vaincue  fut  poursuivie  dans  toutes  les'  directions  et  le 
vieux  roi  du  Touran  que  ses  soldats  fugitifs  avaient  con- 
traint de  fuir  avec  eux,  repoussé  par  ses  alliés  les  plus 
anciens,  abandonné  de  ses  plus  fidèles  serviteurs,  traqué 
de  retraite  en  retraite  comme  une  bête  fauve ,  ne  trouve 
de  refuge,  après  mille  fatigues  et  mille  dangers,  que  dans 
Tobscure  profondeur  d'une  caverne  sauvage.  Pendant  quel- 
ques jours,  il  vécut  en  paix  dans  cette  sombre  demeure; 
mais  un  homme  du  nom  de  Houm ,  originaire  de  la  Perse, 
remarquable  par  sa  force  et  son  courage  et  qui  vivait 
près  de  ces  lieux  d'un  vie  solituire ,  étant  un  soir  à  la  pro- 
menade ,  entendit  Je  sourds  gémissements  sortir  du  sein 
de  la  montagne  ;  s'élant  approché,  ces  plaintes  en  langue 
turque  parvinrent  distinctement  à  son  oreille  :  —  «  Roi  du 
»  Touran  et  delà  Chine  (1),  que  sont  devenues  ta  puis- 
»  sance  et  ta  gloire?  Ton  trône ,  tes  armes;  tes  trésors,  la 
j»  fortune  cruelle  a  tout  jeté  au  vent  !  d  —  Houm  n'hésita 
pas  à  croire  que  ces  paroles  sortissent  de  la  bouche 
d'Âfrasiab,  et,  comme  il  avait  eu  personnellement  à  souf- 
frir de  sa  tyrannie,  voyant  luire  l'heure  de  la  vengeance, 


(1)  La  Tartarie  chinoise. 


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—  253  — 

il  s'avaoçB  plus  près  ettcore  de  la  caverne  poar  vérifier 
l'exactitude  de  ses  conjectures.  Les  mêmes  lamentations  ne 
tardèrent  pas  à  se  faire  entendre  de  nouveau  et  détrui- 
sirent ses  moindres  doutes  sur  la  présence  du  monarque 
fugitif.  Toutefois,  il  attendit  patiemment  jusqu'au  lende- 
main, et,  au  lever  du  jour,  se  penchant  au-dessus  de  la 
grotte,  il' s'écria  : —  «r  Afrasiab,  roi  du  monde!  sors  de 
»  cette  caverne  et  que  tes  voeux  soient  accomplis!  J*ai 
»•  quitté  pour  toi  les  sphères  invisibles.  Parle  !  ^ue  dé- 
»  sires-tu  ?»  —  L'illustre  fugitif,  trompé  par  ces  paroles 
et  croyant  répondre  à  l'appel  d'un  envoyé  des  cieux, 
s'empressa  de  sortir  de  sa  retraite.  Mais  Houm ,  qui  ie  re- 
connut à  l'instant,  le  frappa  de  sa  maçsue  et  profitant  de 
Févanouissement  causé  par  la  violence  du  coup,  lui  lia 
fortement  les  mains  derrière  le  dos. 

Lorsque  le  vieux  roi ,  reprenant  ses  sens ,  se  vit  ainsi 
garrotté ,  il  se  plaignit  amèrement  de  la  trahison  de  Houm, 
et  lui  demaada  ee  qu'il  avait  pu  foire  à  un  étranger  pour 
s'attirer  un  semblable  traitement.  —  «  Ce  que  tu  as  fait  ? 
»  répliqua  Houm.  As-tu  donc  oublié  tant  de'  princes  du 
9  sang  de  Ft*rfdoun  sacrifiés  a  ta  lâche  ambition  ,  tant  de 
9  cœurs  généreux  par  toi  brisés  i  —  Et  mai-même ,  ne 
9  m'as-tu  pas  contraint  de  fuir  ici  tes  injustes  persécu- 
»  tions,  de  me  réfugier  dans  ces  retraites  désolées,  où  de- 
9  puis  tant  d'années  je  traîne  ma  misérable  vie,  deman- 
»  dant  à  Di^u  la  chûto  de  l'odieux  tyran  qui  m'a  privé  de 
»  mes  biens ,  de  ma  famille  ,  de  ma  patrie.  Enfin,  le  ciel 
9  vengeur  t'a  mis  en  mon  pouvoir  et  je  l'en  remercie. 
0  Hais  quels  revers  t'ont  conduit  dans  ces  déserts ,  a  quels 
Il  merveilleux  événements  dois^je  l'accomplissement  de  mes 
ji  vœux?  D 


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Alors  Afrasiab  lui  raconta  la  suite  de  ses  malkeiirs  et, 
eu  terminant,  le  supplia  de  mettre  par  la  mort  une  Gn  à 
ses  maux  plutôt  que  de  le  livrer  à  soo  eonemi.  Mais  Houm 
u'était  pas  homme  à  foire  le  sacrifice  d'une  vengeance  de- 
puis si  longtemps  désirée  ;  il  se  hâta>  au  contraire ,  de  con- 
duire son  prisonnier  au  roi  de  Perse. 

Ce  fut  avec  une  joie  difiiciie  à  dépeindre ,  que  Keî  Khos* 
rou  vit  enfin  tomber»  eu  sa  puissance,'  l'irréconciliable  en- 
nemi de  l'Iran ,  le  meurtrier  de  son  père.  La  mémoire 
toujours  oppressée  du  souvenir  de  ce  crime  odieux,  il  or« 
donna  que  ses  auteurs,  Afrasiab  et  le  féroce  Guerouiiereh , 
unis  dans  un  même  supplice ,  subissent  ensemble  Tignomi  ^ 
nieiix  ti^itement  infligé  par  eux  jadis  à  l'infortuné  Sia- 
wusch. 

Après  avoir  accompli  cette  ceuvre  de  haute  justice,  trop 
violente  de  la  part  d  un  petit-fils,  même  pour  venger  un 
père  ,  Kef  Khosrou  retourna  dans  sa  capitale  et  permit  à 
Rustera  de  partir  pour  sa  résidence  ordinaire  dans  le  Seîs- 
tan. 

Telle  fut  la  déplorable  fin  (l'Afrasiab,  roi  du  Tonran,  où, 
-^si  l'on  préfère  les  dénominations  helléniques,  —  d*As- 
tyage,  roi  des  Mèdes.  Sous  Tun  ou  l'autre  de  ces  noms , 
les  historiens  persans  et  grecs  sont  assez  d'accord  pour 
reconnaître  qu'il  fut  reoveirsé  du  trône  par  Khosrou -le-Grand. 
Mais  cette  concordance  €fst  bien  loin  de  se  retrouver  en  ce 
qui  concerne  les  derniers  instants  de  celui-ci.  'Suivant  Xé- 
Dophon,  qui  s'éloigne  le  oioins  de  la  tradition  persane , 
Cyrus  mourut  à  Bahylone,  après  une  vision  qui  lui  annop* 
çait  sa  fin  prochaine.' Hérodote  dit  que  de  tous  tes  réehs  di» 
vers  qu'il  a  recueillis  sur  la  motft  de  ««.prinee ,  le  plus  vni^ 


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—  285  -- 

semblable,  seloû  lui,  «icelot  d'après  laq'iel  îl  aiirail  péri 
dans  une  expéditioD  contre  ks  Massagètieft.  Son  corps  ayâai 
été  apporté  a  leur  reine  Thcmyris^ceUs-Ci  aurait,  séparé  la 
tète  du  troac ,  et  la  plongeant  dans  un  bassin  plein  de  saQj$, 
lai  aurait  dît: —  «  Toute  victorieuse  que  je  suis»  tu  as  pour 
»  jamais  délruH  la  paix  de  mon  cœur  par  ton  strata^teie 
a  cttntre  mon  fils  (i).  Je  remplis  au)ouffdbtti  oia  prraiessa 
a  en  t*abre«vanl  de  ce  sang  dont  tu  as  été  touîours  altéré.  » 

Clésias  dit  au  contraire  «pie  Gyrus  fut  tué  par  la  jave- 
line d'un  guerrier  de  Tlode ,  comme  il  faisait  la  guerre 
aux  Brahmanes.  Et,  pour  compléter  les  variantes  qui  ré- 
gnent entre  ces  Uisloriens ,  Lucien  assure  que  Ion  trouve 
sur  quelques  colonnes  indiquant  les  limites  de  la  Médie^ 
une  inscription  qui  donne  à  entendre  que  Cyrus  moitf ttt 
de  chagrin  a  Tàge  de  cent  ans ,  en  apprenant  des  cruautés 
commises  par  un  de  ses  fils. 

Notre  prétention  n'a  jamais  été  de  faire  ici  beouco^  de 
critique  historique  y  nous  ne  ch^^erons  donc  pas  à  mettre 
d*accord  ces  récits  contradictoires  (2) ,  et  rev^ant  au 
Sdioh  Nameh  purenoeot  et  simplement. nous  allons  lais* 
ser  Firdousi  raconter  à  sa  manière  la  fin  de  Kei  KhQsrou. 
Les.  traditions  qu*il  a  suivies  ne  sont  ni  moins  curieuses  « 
ni  moins  intéressantes  que  l^8  autres,  et  ont  certainement 


(,1)  Ce  pfioce,  an  dire  de  raateur  grec,  fait  prisonoier  par  Gyrua, 
avait  été  renda  ^  la  liberté,  mais  il  s'était  tué  lui-même  eosuitc,  ne 
voulant  pas  survivre  b  la  boilte  d'une  défaite. 

(2)  Le  lecteur, curi'UxdVclaircissemcDts,  pourra  consulter,  avec 
fruit,  la  savanite  dtasertaUsa  de  sir  lelM  MalcoHm  mt  ce  sajei ,  ot 
pfanieaTB  aotros  faHa  damèoie  ftaare.  {,ëist9ry  a/*  FersivJ) 


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--  226  — 

séduit  son  imagination  de  poète  par  un  côté-  merveilleux 
qui  se  prétait  admirablement  aux  exigences  de  Tépopée. 

Le  Livre  des  Ast^^jeledis  à  regret,  est  tràs-paavre  ; 
beaucoup  trop  pauvre  de  détails  sur  les  exploits  et  tons  les 
actes  d'un  com|uérant  d'autant  derenom  que  le  Grand-Cyrus; 
il  semblerait,  à  lire  Firdousi,  que  ce  prince  illustre  considé» 
rant  sa  t&che  en  ce  monde  comme  accomplie  après  avoir 
pacifié  ses  frontières  et  vengé  la  mort  de  Siawuscii ,  ne  dut 
plus  songer,  ainsi  que  Taurait  pu  foire  un  prince  chrétien 
du  temps  des  croisades  ou  un  Charles-Quint,  par  exemple, 
qu*au  salut  de  son  àme. 

<r  A  la  fin ,  nous  dit  le  ckautre  de  Tlran ,  Kéï  Khosrou 
se  sentit  pressé  d'une  invincible  vocation  pour  la  vie  reli- 
gieuse et  contemplative.  Sous  l'influence  de  ces  sentiments, 
ou  nouveaux  ou  qui  se  réveillaient  en  iui  avec  plus  de 
force ,  il  abandonna  exclusivement  à  ses  visirs  le  soin 
d'administrer  son  vaste  empire.  Affligés  de  cet  état  de 
choses,  les  grands  et  tous  les  officiers  du  royaume  lui 
adressèrent  de  respectueuses  remontrances,  o  —  Seigneur, 
0  disaient-ils,  les  meilleurs  ministres  peuvent  s  égarer; 
0  et,  pour  lé  bonheur  de  son  peuple,  un  grand  roi  doit 
»  sans  cesse  tenir  sur-  eux  Tœil  de  la  vigilance.  Donnez 
»  donc  chaque  matin  quelques  heures  au  moins  aux  af- 
»  faires  d'État  et  vous  pourrez  ensuite  consacrer  le  reste 
))  du  jour  aux  exercices  de  piété  et  à  la  prière.  »  —  Mais 
il  répondit  toujours  :  —  «  Un  seul  cœur  est  insuffisant 
»  pour  Taccomplisseroent  d*un  Rouble  devoir.  MesaiTec- 
D  tiens  ne  sont  plus  pour  ce  monde  qui  passe  ;  tous  mes 
»  vœux  sont  pour  un  mande  impérissable.  » 

Alors  les  seigneurs  et  tous  lea  grands  forent  plongés  dans 


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—  227  ~ 

la  consternation.  Ils  n'eurent  plus  d  e^ir  que  dans  Tiu- 
tercession  du  Zal  et  de  Rustem  qu'ils  pressèrent  vivement 
de  se  rendre  à  la  cour.  Lorsque  ces  deux  vénmbles  Peble- 
wans  parurent  dans  la  capitale ,  le  peuple  se  pressait  sur 
leurs  pas  et  criait  :  —  «Un  mauvais  œil  s*est  fixé  sur  Ifi 
»  roi.  Par  sa  malice  et  ses  ruses  maudites,  Iblis  lui  a  ravi 
»  la  raisojfi.  Toute  notre  joie  est  flétrie.  Dissipez,  oh!  dis- 
»  sipez  cet  épais  nuage  de  douleur  et  d'affliction  qui  as- 
»  sombrit  nos  âmes.  Arrôtez-nous   sur  le  bord  de.  Ta- 

i>  bfmel Quelle  désolation  de  voir  ce  grand  roi,  en 

»  proie  à  la  morne  tristesse,  négliger  les  soins  et  les 
j»  pompes  de  l'empire!  Rendez-le  à  lui-même.  Faites  que, 
n  pour  son  peuple,  il  soit  encore  Kbosrou  le  victorieux, 
»  Kbosrou  le  juste ,  le  vaillant  ,1e  magnanime  I  » 

Pleins  de  tristes  pensées ,  escortés  de  ce  lugubre  cor- 
tège, Zal  et  Rustem  arrivèrent  aux  portes  du  palais.  Le 
roi  ordonna  sur  le  champ  qu'on  les.  introduisit  en  sa  pré- 
sence et  leur  demanda  pour  quelle  cause  ils  avaient  quille 
le  Seîstan.  Us  répondirent  respectueusement  que  l'uni- 
que désir  d'appeler  de  nouveau  sa  sollicitude  sur  les  af- 
faires de  l'empire,  les  avait  arrachés  à  leur  retraite.  — 
«  Je  suis  las  des  misères  de  cette  périssable  vie^  répliqua 
»  Keî  Kbosrou,  du  ton  le  plus  grave,  et  n*ai  plus  qu'un  seul 
»  souci ,  me  préparer  à  la  vie  future.  Je  ne  puis  endurer 
»  plus  longtemps  les  perfidies  d'un  monde  plein  de  frau- 
»  des  et  de  déceptions.  Mon  désir  du. ciel  est  si  grand, 
»  que  je  ne  puis  rester  un  moment  sans  lui  adresser  mes 
»  ardentes  prières.  Cette  nuit  enfin ,  cette  nuit  même. , 
»  une  voix  mystérieuse,  une  voix  d'en  bapt  a  ipurmuré  à 
»  >moQ  oreille  :  —  «  Ton  départ  est  prochain,  songe  aux 


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—  238  — 

»  préparati6  do  voyage.  Surtout  ne  méprise  pas  cet  avis 
»  de  ton  bon  ange  :  l'oecasion  perdue  ne  renaîtra  pas.  « 

Lorsque  Zal  et  Rustem  furent  bien  convaincus  de  f  îné- 
branlabie  résolution  de  KefKhosroQ,  ils  gardèrent  tin  instant 
le  silence ,  puis  enfin  Zal  Zer  reprit  :  —  «  Je  suivrai  le 
»  seigneur  dans  sa  retraite  ;  à  ses  prières  f  unirai  mes 
«  prières  ;  et  par  ses  mérites,  son  serviteur  espère  obte- 
n  nir  son  salut  du  Dieu  très-miséricordieux.  »  —  «  Hon! 
»  d]t  le  roi  à  son  tour.  Ma  place  n*est  plus  dans  cette  de- 
a  meure  impériale  :  c*est  une  humble  et  solitaire  cellule 
»  qu'il  me  faut  désormais ,  afin  de  pouvoir  y  remettre  en 
»  paix  mon  ftme  aux  mains  du  Créateur  de  runivers.  » 
—  Après  ces  mots,  Rustem  et  son  père  se  retirèrenl  en 
répandant  des  larmes  abondantes;  et  tous  les  braves 
guerriers  qui  les  accompagnaient  demeurèrent' dans  Faf- 
firction. 

Le  lendemain ,'  Keï  Khosrou  sortit  de  ses  appartements 
intérieurs,  manda  près  de  lui  les  chefs  de  ses  armées, 
les  seigneurs  de  sa  cour  et  tin»  les  sages  mobeds  de  la 
capitale;  et  quand  ils  furent  tous  réunis,  il  leur  adressa 
ainsi  une  dernière  fois  la  parole  :  —  «  Ge  que  j'ai  si  ar-- 
»  demment  désiré  m'est  enfin  accordé.  Il  ne  me  reste  plus 
n  rien  des  folles  espérances  de  ce  monde ,  rien  qui  puisse 
»  décevoir  et  troubler  mon  cœur.  Rassasié  des  grandeurs 
X»  humaines,  je  renonee  à  rectal  du  trdne,  aux  vafaes 
»  pompes  de  la  royauté.  Ainsi  le  veut  ma  destinée!  Adieu 
9  donc  braves  et  prudents  amis  qui,  toujours  fidèles, 
»  m'avez  rendu  plus  l^r  le  poids  de  la  suprême  puis« 
»  sance.  J'abdique  à  eet  instant  les  devoirs  du  'souverain 
V  et  vous  laisse  à  tous  le  tribut  d*ane  reconnaissance  mé>- 
»  ritée  et  profonde.  » 


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—  239  ~ 

Cela  dit,  il  ordonna  ^oa  allM  dresser  ses  tentes  dans 
le  d^rt.  il  oantt  ses  trésors  et ,  sept  jours  durant,  lit 
eéiébrer  des  fetes  sofenneUes;  et  pendant  ces  fôles  il  vou- 
lut que  des  viwes  et  d'abondantes  amndnes  fessent  dtstri- 
buéa  aux  pauvres,  aux  orphelins  et  à  tous  les  indigents 
du  royaume ,  de  telle  sorte  qu'ii  n'y  en  eùi  pas  un  seul 
dont  les  besoins  ne  fussent  point  satisfaits.  H  veilla  aussi 
à  ce  que  cfoaoun  de  ses  officiers  fut  généreusement  ré- 
compeneé  :  à  Rustem  il  abandonna  le  Zaboulistan ,  le  Ka< 
bonlistan  et  le  Nimrouz.  Enfm,  il  choisit  Lohrasp,  l'un 
des  gendres  de  Kel  Kaous ,  pour  lui  succéder  au  trAne , 
et  invita  les  g^nnds  et  tous  les  guerriers  présents  à  servir 
le  nouveau  prince  aussi  fidèlement  et  avec  autant  de  2èle 
qu'ils  l'avaient  servi  lui-même.  Et,  quand  ils  en  eurent 
bit  sonnent ,  il  désigna  Géuderz  pour  remplir  les  fonc- 
tions de  grand  visir  et  Guiv  |K)ur  commander  l'armée.  A 
Tfaous  il  donna  le  Khorassan,  et  dit  à  Feribourz,  son 
oncle  :  —  «  Sois  soumis  à  l'autorité  de  Lohrasp  que  j'ai 
9  élevé  et  instruit  avec  une  paternelle  sollicitude,  car  je 
»  n*en  connais  pas  de  plus  digne  de  gouverner  un  grand 
a  empiré.  » 

Les  guerriers  de  Tlran  demeurèrent  étonnés  de  ce  dé- 
cret et  murmurèrent  devoir  Lohrasp  élevé am^ au-dessus 
du  Als  atné  de  Keî  Kaous  ;  maie  Kef  Khosrou  apprenant  le 
mécontentement  de  ses  oflioiers ,  les  fit  appeler  et  leur 
dit:  —  «  Feribowz,  nul  de  vous  ne  l'ignore,  esl  inea- 
a  pable  de  supporter  le  fiirdeau  ée  la  courenne.  Loh^^ 
a  ra8p,au  contraire,  est  un  prince  éclairé,  brave  etclé*^ 
a  ment;  désQendanrt  du  grand  Hoaeeheng,  il  comprend 
9  tous  les  devoirs  de  la  royaMé  et  ealira  laaaeoomplir. 


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^  250  — 

D  Le  ciel  d'ailleurs  m'en  est  témoio,  je  le  crois  seul  ca- 
j»  pable  ti'assurer  le  bonheur  et  la  prospérité  de  l'Iran.  » 
Cédant  à  Tautorité  de  ces  paroles  ^  les  murmures  ces- 
sèrent, et  chacun  n'eut  plus  de  vœux  que  pour  la  grandeur 
et  la  félicité  du  nouveau  souverain.  Keï  Kbosrou  reprit 
encore  :  —  «  Je  dois  maiDienaiH  vous  parler  d'autre  chose. 
B  Une  fontaine  sacrée  vers  laquelle  je  dois  diriger  mes  pas 
»  m'a  été  indiquée  dans  un  songe;  aussitôt  que  j'aurai 
j»  touché  ses  bords,  mon  âme  retournera  à  son  créateur.  » 
Cela  dit,  il  prit  congé  de  sa  cour  et  se  mit  en  marche  ;  puis, 
le  soir  étant  venu,  il  fit  dresser  sa  tente.  Le  lendemain  il 
continua  son  voyage  après  setre  séparé  dç  Rustem  et  de 
Zal  Zer ,  qui  ne  le  quittèrent»  pas  sans  verser  des  pleurs 
d'attendrissement  et  de  regret.  Plus  loin ,  il  voulut  congé- 
dier aussi  etGouderz,  et  Guiv,et  Tlious,  etKustehem; 
mais  ils  ne  consentirent  point  à  se  séparer  encore  de  lui. 

Après  quelques  jours  de  marebe  le  oèrtége  impérial  at- 
teignit enlia  le  terme  du  voyage.  Keï  Kbosrou  reconnut  à 
des  signes  certains  la  fontaine  qu'une  voix  du  ciel  lui 
avait  indiquée,  il  y  prit  un  bain  sur  le  champ  et  dit  à  ceux 
qui  l'entouraient  :  —  «  C'est  bien  à  cette  heure  qu'il  faut 
»  nous  séparer,  a  — Mais  ils  continuèrent  de  rester,  et 
Kbosrou  reprit  :  —  a  Si  vous  tenez  à  la  vie  i  partes  sans 
j»  re^rd.  L'ouragan  va  s'élever,  il  souiOeraet  la  neige  et 
i>  la  mort,  et  tous  vous  périrez  dans  la  temple.  »  —  Di- 
sant ces  mots,  il  se  plongea  de  nouveau  dans  la  fontaine 
et  disparut  subitement  aux  yeux  de  tous;  et  pas  une  trace 
de  lui  ne  fut  laissée ,  et  pas  une  ride  ne  vint  plisser  la  sur- 
face de  Tonde ,  et  nul  ne  put  retrouver  la  place  qui  aer- 
vit  de  tombe  au  grand  Kbosrou» 


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—  251  — 

Après  cette  diaparitioft  extraordinaire  du  roi,  un  long 
cri  d'étoniienient  et  de  douit* ur  s'éleva  parnrti  les  siens. 
Enfin ,  lorsque  ie  sentinietit  de  stupeur  causé  par  ce  nner- 
▼eilleux  événement  se  fut  dissipé^  Peribourz  engagea  ses 
compagnons  à  prendre  un  peu  de  nourriture  et  de  repos. 
liais  9  peine  avaient-ils  eommeneé  a  coûter  les  douceurs 
du  sommeil,  que,  suivant  la  prophétie^  du  roi,  le  vent 
commença,  de  souffler  avec  tant  de  fureur  et  la  neige  de 
tomber  si  épiiisséque  tous  ceux  qui  se  IroovHiênt  la  fu* 
rent  ensevelis  sous  ses  flocons  gUtés.  Ainsi  périrent  et 
Thous  et  Feribourz,  et  Guiv  et  Bijen;  et  pas  une  âme 
vivante  n'échappa  à  ce  grand  désastre. 

Cependant  Gouderz,  qui  avait  été  contraint  de  prendre 
les  devants ,  inquiet  de  ne  recevoir  aucune  nouvelle  du 
reste  de  ki  caravane ,  envoya  un  cavalier  à  la  découverte, 
liais  celui-ci,  arrivé  au  bord  de  la  source  mystérieuse^ 
ne  put  que  oontempler  avec  bonpeur  la  foule  des  compa* 
gnons  de  Khosrou  étendus  sans  vie  soùs  leur  blanc  et 
Iroid  liaceuL  o 

On  me  pardonnera,  je  Pespère,  d'avoir  reproduit  avec 
quelque  étendue  ce  passage  remarquable.  11  est  empreint 
d  un  caractère  de  sentimeot  et  de  spiritualité  qui  contraste 
singulièrement  avec  le  ton  habituel  de  ces  vieux  classiques 
païens  qui  nous  ont  appris  le  peu  que  nous  savons  des 
peuples  et  des  souveraips  de  l'Orient ,  à  cette  époque  recu- 
lée de  rbistoire.  Vrais  ou  ^supposés  cependant ,  les  récits 
que  ces  auteurs  nous  ont  laissés  ont  reçu  la  sanction  des 
Ages  :  loogtenips  encore,  sinon  toujours,  ils  seront  des  vé« 
rites  de  convention  dont  on  se  contentera  iaute  de  mieux» 
Pour  nous,  d'ailleurs,  n0  sont-ils  pas  ce  quHis  ont  été 

16 


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âfisi. 


pour  nos  ancèttoes^t  ce  qu'ils  seronl  pcNornoB  nevein,  d'u- 
tiles, d^.hMtfislacoiM  de  manie  et  de  politique;  cela  suf- 
fit pour  les  rendre, étenaalleMient  respectables. 

Ainsi  que  T^vait  ordoaoé  Keï  Khœtottf  Lcdiraap  s*essit 
après  lui  sur  le  tftee  de  Aevse.  Son  règne  lut  hedtCQx  et 
paisible,  et  à  ce  titre  tiaol  peu  de  place  dans  rhietoire. 
Firdouisi  eu  dit  peiu  de  chose,  nissen  revincke  il  s'étend 
lotnguemeat  sur  les  AfHdures  roaanesqites  q«î  attendirmt 
dapareulGttsehtaap,rvnde8  fils  du  roi,  et,  plus  tard,  son 
sucees^i^ur. 

Loitfiisp  régna  ceci  vingt  aas*  Âfpràe  avoir  dépose  la  cou- 
ronne sur  la  tête  de  .son  fils,  saisi  du  même  sentiment  de 
pi(9t4  et  de.  renoscement  qui  avait  décidé  de  rabdieatiûn  de 
Keï  KfcosroUf  ii  alla,  ^us  rkumble  roiie  id*an  reclus,  ter- 
miner ses  jours  .dans  un  manastère  célèbre  de  la  Baictriane. 
Cette  ferveur  asoétique  dans  Kei  Kkosrou'  et  dans  son  suc- 
cesf»eiur  doit  avoir  ube  cause:  la  Bible  nous  a  appris  que 
c'est  au  premier  de  oea  prîneea  que  les  Bébreux  durent  la 
lin  de  leur  captivité  :  il  n'est  pas  impossible  que  le  long 
séjour  du  peuple  de  Dieu  dans  hfiabylonie  etles  conversa- 
tions da  roi  et  des  grands  avec  le.  prophète  Daniel  aient 
contribué  a  un  niouveinent  religieni  qui  prépam  l'avéne* 
ment  du  célèbre  Zecdoscbt^  lé  Zoroaatre  des  nations  de 
rOccideat. 

Ce  fut  sous  le  .règne  de  Guacblaqfi  que  le  nouveau  pro^ 
phètç  co(n[neiiOa.  aes  prédioaliens*  Nons  nous  occuperons 
ailleurs  de  lui  et  de  ses  doctrines;  ici  noos  nous  bornerons 
à  dire  qu'elles  fiir^ent  accueilkes  avec  anprfMsekoent  par  le 
roi,  qui  en  fiEm>risa  la  propagation  de  tout  son  pouvoir* 
Ruslem,  aussi  lui,  les/adûplade  bon^ielieure  et  devint  ua 
de  leurs  plus  fervents  prosélytes. 


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—  233  — 

Le  règne  de  GMSchtasp.dumsoifltante  années.  Sa  gloire 
fut  tout  entière  dfu^s  les  exploits  dlsit^odinr,  Tun  de  ses  fils* 
Tout  porte  a  croire,  ainsi  qvi»'  nous  l'avons  dit  déja^  que  ce 
prince  n'esst  au(;*6|  ^u^  le  fameux  Xerxèfi.  Soci  père,  mû  par 
ce  Sr*ntimenlid'it)quiète  et  sombre  jalousie^  qui  a.  causé  tant 
de  crin^es  en  Orient,  i^v cessa  de  l'éloigner  du  centre  de 
l'empire  et  de  l'engager  dans  dt^  espéditioas  et  desguerr 
res  dangereuses  où  il.devait  ef^fm  trouver  Janoiort;  mais  où 
il  s'acqpit  au;^  yeiix.  de  U  Perse  entière  ci4te  immortellq 
renommée  qui  en  a  fait, un  des  plus  f(iraads.bér(^  de  rir«n. 
Il  n'a  doçc  Jamais  porté  la  couronni^  impériale,  et  si  les 
écrivains  grecs  lui  ont  décerné  le  titre  de  roi ,  cVst  que  chez 
le^  Perses  .qe.  titre  s't^ppliquait   indjfféri'mment  à   toot 
homme ,  gpuvernf  ur  ou  général ,  berçant  le  pouvoir  d'a- 
près une  baut^  délégation  di)  monarque.  Quant  au  titre  de 
«o/rape,  pour  lequel  c'est  p^ut-ôtre  ici  le  lieu  d'une  courte 
digression ,  il  n*a  point  chez  les  Orientaux  la  signification 
spéciale  qui  lui  a  été  donnée  par  les  bisloriens  d'Europe. 
Poiir  nous,  ce  mot  éveil^le  l'idée  de  vieerroyauté ,  mais  en 
réalité  il  s  appliquait  en  P^se ,  et  probablemeat  dans  Tlnde  « 
du  moins  avant  la  conquête  d' Alexandre  ^  à  toute  personne 
revêtue  d'une  a\))OFJt^^upérieur#,  et  signifie  littéralement 
Seigneur  de  rombrelU  (i).  En  ce  sens,  il  n'est  pas  en  Afri-* 


(1)  Tschatirapa^  par  contractioa  du  sanscrit  TschaUra-patif 
TschaVra  ombrelle,  pati  seigoear.  Le  titce  de  Tjchattra-^Pati 
distitfguait  récemmeat  encore  une  des  plus  grandes  charges .  du 
gonvemement  fédéral  de  FÉtat  des  Mahraites,  absorbé  mainte- 
Dutpftrle  goa? ornement  britannique  des  Indes.  (Sir  John  MaU 
co/mJ) 


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—  254  — 

que  aujourd'hui  de  chef  arabe  de  quelque  importance  et  fai- 
sant tenir  sur  sa  tète  le  parasol  «traditionnel,  signe  de  son 
attbdrité^qo]  ne  paisse  légitimement  prétendre  à  ce  titre 
d'honneur, 

An  début  de  sa  carrière,  IsfenâNir  eut  comtee  Rustem 
ses  sept  traicaux  en  sêpijouméeê:  FirdouBi  leur  a  consacré 
autant  de  ch^itres  de  -ses  plus  beàtrx  Ters.  Le  cadre 
que  nous  nous  somnies  tracé,  ne  nous  permet  pas  de 
nous  y  étendre,  mais  il  j  a  obligation  pour  nous  de  re- 
produire la  dernière  lutte  de  ce  héros,  lutte  mortelle  où  il 
eut  Rustem  pour  adi^ersaire  et  pour  vainqueur. 

AuUuit  au  moiiis  qu'lsfendiar^  le  fils  de  Zal  Zer  était  de-* 
venu,  par  sa  puissance,  un  snjet  de  terreur  jalouse  pour 
on  prince  aussi  soûp^nneuxqueGuschtasp;  l'idée  de  dé- 
truire ces  deux  grands  hommes  Tun  par  l'autre  devait  donc 
lui  sourire ,  bien  que  ùi  l'un  ni  l'autre  ne  lui  eussent  jamais 
donné  que  des  témoignages  de  respect  et  d'obéissance  :  mais 
commande-t-on  à  la  peur? 

Le  roi,  dit  Firdoosi,  dissimulant  ses  projets  odieux, 
ordonna  les  préparatife  d'un  somptueux  festin ,  auquel  fu- 
rent conviés  tous  les  membres  de  sa  famille  et  tous  les 
grands  de  la  eour;  et  quand  le  banquet  fut  près  de  sa  fin, 
il  dit  à  Isfendiar  :  *--  «  Le  trône  et  la  touronne  sont  à 
»  toi,  car  qui  plus  que  toi  s^est  rendu  digne  de  l'empire! 
D  Une  chose  cependant  te  reste  à  &ire  :  le  jour  où  je  ira- 
»  versai  le  Seïstan  pour  conduire  nos  braves  soldats  contre 
»  Ardjasp  l'infidèle,  je  dis  à  Rustem  : — «  Mon  père  tohrasp 
»  a  été'  tué ,  ma  femme  et  mes  en&nts  prisonniers  ont  été 
»  tratnés'en  esclavage ,  viens  m'aider  à  punir  le  meurtrier 
»  et  l'oppresseur  »  —  Mais  lui  sedéfimlit  de  me  suivre, 


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—  235  — 

9  et  demeura  honteusement  dans  son  palais.  Depuis  cette 
9  époque,  de  graves  et  nombreux  dangers  ont  souvent 
1»  meiuuîé  ma  couronne,  et  il  s  est  néanmoins  toujours 
jè  gardé  de  m'offrir  le  secours  de  son  bras*.  Bien  plus  en^ 
j»  core ,  fier  de  ses  possessions  du  ZabouUst^n ,  du  Kabou- 
j»  listan ,  du  Seïstan  et  idu  Nimrouz,  qq*!!  ne  doit  qu'à  la 
*  j»  munificence  du  grand  Kliosrou,  il  refuse  ajqourd'kui  de 
o  reconnaître  notre  autorité  souveraine.  Qui  soumettra  oe 
m  su].et  révolté  ?....  C'est  à  toi  Isfendiar  que  revient  cet 
»  honneur  ?  Pars  sur  le  champ  et  ramène  avec  toi  Rustem 
9  OU  chargé  de  fers,  ou  mort.  Cette  t&che  accomplie,  jo 
B  pourrai  renoncer  au  monde,  et,  sans  crainte  ni  regrets» 
o  déposer  sur  ta  tète  la  couronne  de  l'Iran  pacifié.  >> 

Un  murmure  dapprobation  parut  accueillir  ce  discours. 
Le  roi  se  hâta  de  reprendre  :  —  «  Aussitôt  que  Rustem 
»  sera  soumis ,  j'abdiquerai  entre  tes  main^  la  suprême 
n  puissance  ;  j'en  iais  serment  sur  le  Zend  Avesta.  n 

Mais  Isfendiar  avait  trop  souvent  appris  à  ses  propres 
dépens  combien  il  devait  se  défier  de  l'hypocrite  dissimu* 
lation  du  roi  ;  loin  donc  de  se  montrer  empressé  de  dé« 
férer  à  ce  désir,  il. lui  reprocha  amèrement  ses  ancienn^a 
perfidies.  Mais  Guschtasp  ,  sans  en  nier  aucune ,  s'efforce 
d*en  atténuer  la  portée  ;  il  peint  à  Isfendiar  les  difficultés 
du  trône  et  l'impérieuse  nécessité  de  s'assurer  d'un  honame 
dont  les  provinces  appanagères  couvreat  près  de  la  moitié 
de  l'Iran.  Isfendiar,  à  son  tour,  rappelle  les  immenses  ser- 
vices rendus  par  Rustem  et  sa  famille  ;  il  prouve  qu'on  na 
pourrait  sévir  contre  lui  sans  la  plus  noire  ingratitudes- 
Mais  Guschtasp  insiste  et  dit  :  —  a  Je  ne  permets  aucun 
»  retard.  Tu  es  mon  successeur  désigné ,  défends  donc  une 


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-  236  - 

D  couronne  et  on  trône  qui  n'appartiennent  plus  qu'à 
»  toi.  * 

Ainsi  contraint  d*obéir,  —  car  la  parole  d'un  roi  d'Orient 
est  un  décret  ailssi  irrévocable  qu  absolu',  —  Isfendiar  prend 
le  comnaandement  d'une  nombreux  armée  et  se  met  cù 
marche  pour  le  Selstan. 

Or ,  il  arriva  que  Tun  des  chameaux  de  Texpédition 
s'étani  coufhé  sur  la  route,  ne  voulut  jamais  se  relever, 
quelque  violence  qu'on  lui  ftt.  Isfendiar  voyant  l'obstina- 
tion de  cette  béte,  ordonna  de  la  tuer  et  dépasser  outre. 
Cependant  l'armée  ne  put  s'empêcher  de  considérer  cet 
accident  comme  un  sinistre  présage  ;  de  toutes  parts  on 
engageait  Isfendiar  à  renoncer  à  cette  périlleuse  entre- 
prise; mais  lui ,  soumis  aux  ordres  -du  roi  ^  ne  tint  compte 
de  ces  observations  superstitieuses  et  poursuivit  sa  marche. 
Toujours  l'homme  courra  au  devant  de  sa  destinée. 

Arrivé  à  une  faible  distance  de  la  résidence  de  Rustem, 
il  le  (it  prier  de  le  venir  voir  dans  son  camp  ;  et  celui-ci, 
sans  défiance ,  toujours  dévoué  à  ses  princes,  s'empressa 
de  déférer  à  cette  invitation.  Mais ,  lorsque  Isfendiar  lui 
eut  exposé  le  but  de  son  expédition  et  lui  eut  dit  qu'il 
devait  se  remettre  entre  ses  mains  pour  être  conduit  charger 
de  chaînes  ù  GUschtasp ,  le  vieux  guerrier  frémit  d*indi* 
gnation.  D'un  autre  oôté ,  il  répugnait  à  Isfendiar  d'user  de 
violence  contre  tin  héros  tel  que  Rustem.  Entre  eux  deux 
s'établissent  alors  de  longs  pourparlers  :  mais  quelle  di- 
plomatie pouvait  vaincre  h  trop  légitime  susceptibilité  de 
Rustem,  lui  fafire  subir  rfaumiliation  des  fers?  Il  fut 'donc 
résolu  que  les  deux  champions  en  viendraient  at)x  armes, 
et  se  rencontreraiedt  dans  un  'conàbat  singulier. 


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—  237  — 

Lorsqu'ils  ^r^t  en  présence,  iU  Firdoasi,  tons  deux 
bandèreat  leur  arc  et  firent  pleuvoir  (un  rar  Tautre  une 
grêle  (le  flèches.  Hais  celles  d'isfendiar  seules  produisirent 
de  l'effet.  Raksch  fut  si  gnèyeipeût  atteint ,  que  f^ustem, 
sentant  son  coursier  fléchif ,  mit  pied  à  terre  bien  que 
blessé  lui-noôme  et  contijaua  d'assaillir  de  traits  sou  en* 
nenû. 

Cependant  Zouara ,  Fun  des  frères  de  Rustem  ,  ayant 
aperçu  le  noble  animal  errant  à  laveature ,  fût  frappé 
d'une  stupeur  mortelle  ;  le  cceur  plein  d'Ungoisses,  il  ac* 
courut  sur  le  lieu  du  combat  et  put  coolempler  son  va- 
leureux frère  luttant  toiyours ,  mais  le  corps  couvert  de 
san^^lantes  blessures,  tandis  que  la  cotte  de  mailles  d'is- 
fendiar  ne  paraissait  pas  roènie  avoir  été  efleurée.  Rustem 
aidé  de  Zouara  parvint,  malgré  sa&ibiesse,  à  monter  sur 
le  cheval  qu'il  lui  avait  amené,  non  pas  toutefois  sans  être 
exposé  aux  brocards  insultants  d'IsCendiar  :  —  o  Te  voilà 
a  donc  enfin  vaincu,  preux  RustepI  disait-iL  Hais  il  ne 
a  suffît  pas  de  reconnaître  ta  défaite ,  il  but  venir  ici  pré- 
»  senter  tes  mains  aux  fers  que  je  leur  ai  pt'éparés,  à 
a  à  moins  que  tu  n'aimes  mieux  qnie  j'ailLe  te  tes  mettre 
•  moi- même;  »  Mais  la  souffrance  et  b  pectedeson  sang 
n'avaient  pas  tellement  a&ibli  Rustem  qu'il  ne  pUt  ré- 
pondre :  —  ff  Si  j'étais  vaincu  comme  tu  le  dis,  je  devrais 
»  en  eàet  me  laisser  eochatoer  comme  un  vil  esclave  : 
9  mais  tttt'abu^ea,  Isfendiar,  et  sans  la  nuit  qui  tombe  je 
a  te  le  prouverais  sur  l'heure.  A  demain ,  à  demain  la 
a  fin  de  oe  combat  !  a  En  di;sant  Ges^nu>ts  le  vieux  guer- 
rier se  retira  sous  sa  tente.  Quant  m  prince,  se  flattant 
du  succès,  il  se   hâta  d'écrire  au  roi  son  père: —  «  Tes 


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—  23«  — 

»  ordres  seront  remplis.  La  journée  d'aujourd'hui  est 
»  mienne  :  seul  cependant  le  seigneur  du  ciel  sait  ce  qui 
»  doit  arriver  demain.  t> 

Lorsque  Rustem  fut  de  retour  au  camp ,  Zal  sonda  ses 
plaies  et  s  écria  dans  sa  douleur  :  —  «  N  ai-je  donc  tant 
»  vécu  ^  hélas!  que  pour  être  témoin  d'un  pareil  malheur, 
•  que  pour  toucher  les  blessures  de  mon  fils  !  »  —  Alors 
il  frotta  les  pieds  du  héros,  couvrit  ses  plaies  d*un  baume 
salutaire  et  les  pansa  lui-même  avec  l'adresse  du  plus  ha- 
bile mobed.  Et  Rustem  lui  dit  :  —  c(  Je  n'ai  jamais  ren- 
D  contré  d'adversaire,  soldat,  div  ou  démon  ,  fort  et  vail- 
»  lant  comme  celui-ci  !  On  dirait  d'airain  son  corps.  Mes 
D  flèches  qui  percent  une  enclume  n'ont  pu  seulement  lui 
»  effleurer  la  poitrine.  J'aurais  arraché  une  montagne  de 
»  sa  base,  et  lui ,  ferme  sur  la  selle  de  son  destrier,  s'est 
»  rit  de  mes  vains  efforts.    Bénie  soit  l'ombre  propice 
»  qui  m'a  dérobé  à  son  poignard  !  Hais  demain ,  demain, 
»  comment  pourrai-je  renouveler  ce  combat?  Le  mieux, 
i>  pour  moi,  est  de  fuir  honteux,  inaperçu  dans  quelque 
»  retraite  éloignée  et  inconnue  des  hommes  !  d  —  a  Hélas! 
»  reprit  Zal  Zer,  s'il  en  est  ainsi,  le  vainqueur  va  fondre 
»  sur  nous  et  nous  réduire  en  esclavage ,  moi,  triste  vieil- 
»  lard,  et  tous  ceux  de  ma  famille.  Cependant  tout  n*est 
»  pas  désespéré   peut*ètre  :  le  Simurgh  n'a-t-il  pas  dit 
D  que  toutes  les  fois  que  le  malheur  planerait  sur  nos  têtes, 
D  il  suffirait  de  brûler  une  des  plumes  quil  m'a  laissées  en 
»  réserve  pour  l'appeler  à  notre  secours  ?  Dans  cette  ex- 
»  trémité  invoquons  donc  sa  puissance  in&illible  l  »  —  Et 
aussitôt  le  vénérable  fils  de  Sam  monta  sur  un  coteau  voi- 
sin, plaça  sur  des  charbons  embrasés  une  plume  de  Toi- 


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-  239  - 

seau  mystérieux ,  lequel  ne  tarda  pas  à  paraître  au  plus 
haut  du  ciel.  Lorsqu'il  se  fut  abattu  près  de  son  ancien 
élève,  celui-ci  lui  exposa  leur  cruelle  position,  mais  le 
Simurgh  Tinterrompant  :  —  «  Bannis  tes  alarmes  ,  lui  dit- 
»  il.  Tu  ne  m^auras  pas  appelé  en  vain.  »  —  Alors  il  s'ap- 
procha du  fîdèle  Raksch,  arracha  une  à  une  les  flèches  qui 
tenaient  au  corps  du  noble  animal  et  les  nombreuses 
plaies  dont  il  était  couvert  se  fermèrent  au  simple  contact 
de  son  aile.  Il  alla  trouver  ensuite  le  désolé  Rustem  et  par 
de  bonnes  paroles  adoucit  Tamertume  de  ses  angoisses.  Il 
arracha  également  les  flèches  qui  perçaient  sa  chair,  suça 
le  sang  des  plaies,  les  guérit  d'une  seule  parole  de  sa  vo- 
lonté toute  puissante  et  dans  le  sein  du  valeureux  cham- 
pion de  Seîstan  fit  renaître  à  la  fois  la  vigueur  et  la  vie. 

Rustem  remis  sur  pied  par  cette  magique  influence 
sollicite  encore  l'aide  du  Simurgh  pour  la  lutte  qui  doit 
être  reprise  contre  Isfendîar.  Mais  Toiseau  merveilleux  ne 
peut  satisfaire  ce  dernier  vœu.  —  «  Jamais,  dit-il,  le 
a  monde  ne  vit  un  héros  aussi  brave,  aussi  accompli  qu'ls- 
9  fendiar.  La  faveur  du  ciel  l'environne.  En  mettant  à  fin 
»  sa  tâche  des  sept  jours  ^  il  a  su  vaincre  et  immoler  un 
»  Simurgh  môme.  Ne  demande  donc  qu'à  une  prompte 
»  fuite  le  salut  que  tu  ne  peux  espérer  obtenir  à  un  moin- 
»  dre  prix.  »  —  Mais  Zal  exprimant  de  nouveau  sa 
frayeur  de  rester,  par  cet  abandon,  exposé  lui  et  tous  les 
siens  à  un  esclavage  inévitable ,  le  sage  Simurgh  demeura 
quelques  instants  plongé  dans  une  silencieuse  méditation, 
puis,  frappé  d'une  inspiration  soudaine,  il  ordonna  à  Rus- 
tem de  se  lever  et  de  le  suivre. 

Ils  s'avancèrent  au  loin  tous  deux  dans  le  désert,  tra- 


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—  240  — 

versèrent  un  large  fleuve  et  arrivèrent  enfin  dans  un  endcoit 
couvert  de  roseaux,  parmi  lesquels  s  élevaient  plusieurs 
pieds  de  Tarbre  appelé  Kaizou.  Ils  firent  halte  en  ce  lieu, 
et  le  Siinurgh  touchant  de  son  aile  les  yeui  de  Bufitem,  lui 
indiqua  le  Kaizou  dont  il  allait  cueillir  un  rameau  qu  il 
dresserait  ensuite  et  durcirait  au  feu,  pour  en  façonner  un 
dard  à  double  pointe,  destiné  à  priver  de  la  vue  son  ennemi 
en  lui  perçant  les  deux  yeux  d  un  même  coup.  —  a  Une 
j!>  flèche  de  ce  Kaizou,  dit  Toiseau  fatidique,  n*a  jamais 
»  manqué  son  but.  Celle-ci  ôtera  la  lumière  du  jour  à 
D  Isfendiar ,  mais  quiconque  aura  fait  couler  une  goutte  du 
»  sang  de  ce  preux  aimé  du  ciel,  ne  devra  plus  attendre 
»  en  ce  monde  que  misère  et  calamités.  »  —  Cela  dit,  il 
ramena  Rustem  au  camp  et  reprit  son  vol ,  après  avoir 
reçu  du  vieux  Zal  et  de  son  fils  les  témoignages  de  la  plus 
vive  reconnaissance. 

Rustem  ,  se  conformant  aux  instructions  du  Simurgb,  se 
hâta  de  préparer  la  flèche  enchantée  et  le  lendemain,  au  lever 
du  jour,  il  s'avança  dans  la  plaine  monté  sur  son  rapide  des- 
trier. Bientôt  il  aperçut  Isfendiar  qui  dormait  encore,  et  la- 
postropha  de  la  sorte  : — «  Holà!  valeureux  prince,  som- 
»  meilleras  tu  longtemps  ainsi?  Allons,  debout!  Voici 
»  Rustem.  »  —  (-.e  prince  réveillé  en  sursaut  par  ceHe 
voix  formidable  se  leva  et  courut  prendre  ses  armes.  — 
«  J'ai  cru,  dit-il  à  un  de  ses  officiers,  que  Rustem  roour- 
»  rait  infailliblement  cette  nuit  de  ses  blessures  ;  cepen- 
»  dant  cette  voix  de  tonnerre  ne  peut  sortir  que  d'une 
j»  poitrine  saine  et  puissante.  Va  donc  et  assure-toi  si 
»  c'est  réellement  Rustem  qui  s'avance*  ^ 

Le  fait  était  trop  vrai  :  Isfendiar,  frappé  d'un  tel  prodige, 


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-  241   ~ 

aurait  volontiers  évité  le  combat;  à  cet  effet,  il  adresse  à 
Rustem  de  nouvelles  instances  pour  le  décider  à  se  sou- 
mettre spontanément  au  désir  du  roi.  Mais  Hustem  répond: 
>-  «  Tu  tirerais  dix  mille  flèches  contre  moi,  quelles 
ê  tomberaient  impuissantes  à  mes  pieds.  C  est  toi  que 
»  cette  lutte  injuste  menace.  Renonces-y  donc ,  et  viens 
•  avec  moi  dans  mon  palais  prendre  part  à  nos  fêtes.  Je 
»  jure  par  le  Seigneur  tout-puissant,  par  Zerdoscht  et  le 
»  Zend  Âvesta  son  saint  livre;  je  jure  par  le  soleil  et  par 
B  la  lune,  que  je  te  livrerai  ensuite  tous  mes  trésors,  que  je  te 
»  suivrai^  —  mais  les  mains  libres,  —  à  la  cour,  et  me  sou- 
»  mettrai  humblement  à  la  volonté  de  Guscbtasp,  quoi  qu'il 
»  lui  plaise  d'ordonner  de  moi.  »  —  «  Ce  n'est  point  assez, 
h  reprit  Isfendiar,  il  faut  que  tu  portes  des  chaînes.  J'ai  pu 
»  trop  souvent  m'écarler  des  voies  du  ciel ,  mais  je  dois 
»  obéir  à  mon  père  afin  d  obtenir  de  lui  la  couronne  et  le 
»  trône.  »  —  «  Et  c'est  dans  l'espoir  d'un  troue  et  d'une 
»  couronne^  répliqua  Rustem,  que  tu  viens  ici  t'offrir  à 
M  une  perte  assurée!  »  —  <r  Nous  verrons!  »  dit  a  son 
tour  Isfendiar,  et  il  saisit  son  arc  pour  recommencer  le 
combat. 

Rustem  alors  dut  se  mettre  en  défense;  il  plaça  sur  son 
arc  la  flèche  de  Kaizou ,  éleva  ses  yeux  au  ciel  et  dit  d'un 
cœur  plein  de  foi  :  —  «  Dieu  miséricordieux ,  tu  sais  si 
A  j'ai  proposé  une  conciliation  d'une  volonté  sincère;  tu 
»  sais  ce  que  j'ai  souffert  et  tout  ce  que  je  donnerais  pour 
»  éviter  ce  funeste  combat  ;  mais  toutes  mes  offres  ont  été 
ê  rejetées;  on  persiste  à  exiger  ma  honte.  Grand  Dieu, 
9  appui  du  juste  et  consolateur  de  Tafiligé,  guide  à  son 


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—  242   - 

A  but  cette  flèche  mystérieuse  et  ne  permets  pas  que  le 
»  sang  que  j'aurai  répandu  contre  mon  désir  retombe  ja- 
D  mais  sur  moi!  » 

A  peine  il  achevait  cette  prière,  qu'Isfendiar  impatient 
lâcha  la  corde  de  son  arc;  mais  Rustem  sut  éviter  le  trait  et 
ripostant  par  la  flèche  de  Kaizou ,  frappa  dans  les  yeux  son 
rival  selon  qu'il  lui  avait  été  prédit.  Ainsi  se  termina  cette 
lutte  fatale,  entreprise  par  l'unique  volonté  d'un  roi. 

Les  compagnons  d'isfendiar  emportèrent  ce  malheureux 
prince  dans  sa  tente  et  Rustem  s'empressa  de  retourner  à 
son  camp  où  Zal  Zer  l'attendait  en  proie  à  une  doulou- 
reuse anxiété.  En  revoyant  son  fils,  le  noble  vieillard  ne 
put  contenir  sa  joie  et  cependant  il  s'écria  :  —  «  0  mon 
0  fils  bien  aimé,  tu  as  vaincu,  mais  de  sages  mobeds  et 
»  de  savants  astrologues  m'ont  appris  que  le  meurtrier 
I)  d'isfendiar  ne  tarderait  pas  à  périr  lui-même  d'une  mort 
I)  misérable.  Que  Dieu  le  tout  saint  te  protège  donc!  »  A 
quoi  Rustem  répondit;  «  —  Je  n'ai  point  péché  :  que  le 
»  sang  d'isfendiar  retombe  sur  sa  propre  tête!  » 

Tous  deux,  dès  le  lendemain,  allèrent  visiter  le  prince 
aveugle  et  lui  offrir  Ihommage  d une  douloureuse  condo- 
léance; mais  celui  ci  dit  à  Rustem:  —  <r  Ce  n'est  pas  toi, 
D  mais  le  ciel  qui  tourne  au-dessus  de  nos  tètes  qu'il  faut 
»  accuser  de  mon  mallieur.  La  destinée  le  voulait  ainsi ,  il 
»  fallait  que  cela  fut!....  Voici  mon  fiIsBahman ,  je  le  confie 
»  à  ta  sage  tutelle.  Enseigne-lui  l'art  du  gouvernement,  les 
D  usages  des  rois ,  la  science  des  batailles  et  le  courage  du 
»  soldat,  car  tu  es  plein  de  raison  et  d'expérience ,  et  tu  ex* 
D  celles  en  tout.  »  —  Rustem  se  hâta  de  répondre  :  — 


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—  243  — 

«r  J'accepte  ces  devoirs  nouveaux ,  ils  seront  sacrés  pour 
n  moi.  J'asseoirai  ton  fils  sur  le  trône  (1).  » 

Isfendiar  se  sentit  alors  défaillir;  comprenant  que  son 
heure  approchait,  il  murmura  :  —  «  Le  pas  de.  la  mort 
»  est  rapide  :  rien  ne  peut  plus  me  retenir  en  ce  monde. 
»  Désormais  je  n'ai  plus  besoin  de  ces  armures ,  de  ces  ri- 
»  cbes  vêtements,  de  ces  robes  royales,  mais  d  un  linceul. 
»  Au  lieu  d'un  palais,  qu'on  prépare  mon  tombeau,  et 
j»  qu'on  aille  dire  à  nnon  père  que  les  désirs  de. son  cœur 
»  n'ont  point  été  formés  en  vain.  Le  malheur  auquel  il  a 
»  voué  nm  tête  en  me  chargeant  de  cette  injuste  mission  a 
»  reçu  son  sceau  :  son  fils  va  nriourir  !....  Et  toi ,  ô  ma  mère 
»  chérie!  puissent  ceux  qui  t'annonceront  la  fatale  nour 
ji  velle ,  adoucir,  par  leur  tendre  sollicitude ,  la  douleur 


(I)  On  a  vu,  pages.  14 7  et  180,  des  détails  qui  parmettooi  de 
Mipposer  qçe  c'est  en  Orient  .qu'on  doit  aller  chercher  la  véritable 
drigine  du  blason  :  on  peut  croire  encore  que  l'institution  de  la 
Chevalerie^  qui  se  divisait  en  trois  degrés,  ceux  de  page  ou  da- 
moiseau ,  ^écu'yer  et  de  chevalier^  dérive  des  anciennes  sociétés 
secrètes  de  la  Perso.  L'éducation  de  Bahman  confiée  en  ces  termes 
\  Rustem,  qui  l'accepte ,  et  avait  accepté  déjà  celle  de  l'infortniié 
Siawasch,  ne  serait-elle  point  un  fait  \  l'appui  de  cette  opinion 
adoptée  par  le  savant  auteur  de  V Histoire  pittoresque  de  la 
Franc^maçonnerie?  Le  page,  en  effet, ne  demcurait-il  pas,  jus- 
^'k  l'âge  de  quatonse  ans ,  auprès  de  quelque  seigneur  renommé 
et  surtout  de  quelque  noble  dame  chargée  de  lui  donner  ses  pre^ 
Dières leçons:  attaché  ensuite  au  service  d'un  preux  chevalier,  as^^ 
socié  k  tous  ses  travaux,  le  page, devenu  écfijer,  recevait  de  lui  lo 
complément  des  instructions  particulières  à  son  grade  et  qui  le 
préparaient  \  recevoir  bientôt  l'ordre  de  la  chevalerie. 


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—  244  — 

x>  qaa  te  causera  le  trépas  de  ton  Isfendiar!  »  Le  malheu- 
reux prince  sentit  alors  le  froid  de  la  mort  se  gii^ser  dans 
ses  veines ,  et  ces  derniers  mots  s  échappèrent  de  ses  lèvres 
avec  fffort:  —  ©  Poursuivi  par  l'inflexible  destiuée,je 
D  meurs  victime  de  la  haine  aveugle  d  un  père!  » 

Lorsqu'Isfendiar  eut  rendu  le  dernier  soupir,  son  corps 
fut  déposé  dans  un  cercueil  et  conduit  dans  la  capitale  au 
milieu  des  larmes  et  des  lamentations  du  peuple  entier. 
Quant  à  Rustem ,  conformément  au  dernier  vœu  du  prince, 
il  accepta  la  tutelle  de  Bahman  et  le  garda  avec  lui  dans  le 
Seîstan.  Cependant  Zouara,  trop  fidèle  prophète  de  Taye- 
niV,  ne  pouvait  voir  sans  regret  cette  giénéreuse.  conduite 
de  son  frère.  —  <r  Tu  as  tué  le  père  de  cet  enfant,  «.isait- 
B  il ,  ne  le  nourrit  donc  pas  dans  ton  sein  ;  car,  crois-le 
»  bien,  il  voudra  être,  un  jour,  le  vengeur  disfendiar.  * 
—  Mais  Rustem  lui  répondit  :  —  cr  Isfendiar  mourant  ne 
»  ne  m'a*t-il  pas  confié  la  tutelle  de  sot)  fi|s?  Comment 
»  pourral-je  m'y  refuser  actuellement?....  Le  ciel  d'ailleurs 
»  Ta  voulu  ainsi  et  nul  ne  peut  échapper  à  ce  qui  est 
n  écrit.  D 

On  voit  déjà,  dans  la  pensée  du  poète ^  la  main  de  la 
fatalité  s'appesantir  sur  son  héros.  M.  Atkinson,  sans 
doute  sur  quelque  autorité  respectable,  est  porté  à  croire 
que  les  principales  circonstances  de  la  mort  de.  Roatenii 
vers  laquelle  nous  marchons  rapidemeai,  ont  été  racon^ 
tées  àFirdousî  par  un  descendant  de  Sam  et  de  Neriman, 
c'e8t*à*dhre  par  un  arrière  neveu  de  Rqstem  lui-même, 
lequel  avait  fait  une  étude  particulière  des  chroniques  rela- 
tives aux  souverains  de  Tlran  et  surtout  aux  grands 
hommes  de  sa  famille.  Le  récit  qui  va  suivre  serait  donc 


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—  243  — 

ain  celui  d^une  des  traditions   les  plus  complètes  et  les 
mohfis  altérées  dû  Livre  dn  Bois. 

Cliaqtre  année ,  raconte  Firdousi,  Rustem  avait  Iliabi* 
tade  de  se  rendre  à  Kaboul .  pour  y  recueillir  les  tributs 
de  la  province.  La  dernière  fois  qu'il  fit  ce  voyage ,  il  avait, 
dil^n,  exigé  une  contribution  plus  élevée  que  de  coutume^ 
ce  q«ii  avait  causé  une  grande  affliction  parmi  le  peuple. 
Le  roi  de  Kaboul  en  éprouvait  un  vif  mécontentement, 
et  MO-  irritation   se  manifestait  dans  des  termes  peu  mé- 
nagea que  reeueillaU  Snboghad  son   gendre.  Or ,  ce  Scho- 
ghad    n'était  autre  qu^un  fils  même  de  Zal  Zer   par  une 
dea  servantes  de  Roudabeh.  A  sa  naissance,  les  astrologues 
coneulfés  sur  son  horoscope  avaient  prédit  qu'il  serait  un 
jour  la  cause  de  la  ruine  de  la  glorieuse  fomille  de  Sam. 
Cette  sinistre  prédiction,  que  nous  verrons  s'accomplir, 
n'empêcbB  cependant  pas  d'élever  l'enfant  avec  un  grand 
soin.  Ayant  été  envoyé  plus  tard  à  Kaboul ,  il  avait  fixé  sa 
demeure  dans  cette  ville  après  avoir  épousé  la  propre  fille 
du  roi.  Dans  la  circonstance  qui  nous  occupe ,  Schoghad, 
voyant  le  mécontentement  de  son  beau-père,  lui  dît:  — 
a  Bien  que  je  sois  son  frère,  Rustem  ne  m'en  a  pas  moins 
»  toujours  traité  comme  un  ennemi ,  et  depuis  longtemps 
»  je. n'attends   qu'une  occasion  Csivorable  pour  satisfaire 
•  ma  juste  vengeance.  Si  vous  le  voulez  permettre ,  sei- 
»  gneor,  je  feindrai  d'avoir  reçu  devons  une  grave  injure, 
»  dont  j'irai  porter  plainte  à  Zal  et  à  Rustem.  Il  n'est  pas 
»  douteux  qulls  ne  s'empressent  de  venir  ici  réclamer  la 
»  ré|>aration  qu'ils  croiront  m'étre  due.  Vous,  dans  l'inter- 
»  valle,   sous  prétexte  d'une  grande  partie  de   chasse, 
9  bileë  ereu^r  dé  nôkiibi^usé^  fosses,  suffisanunent  grandeis 


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—  246  — 

»  pour  ensevelir  à  la  fois  et  Rustem  et  son  cheval.  Vous  y 
»  placerez  des  épéesla  poiate  en  haut,  et  ensuite  les  fe- 
0  rez  recouvrir  de  branchages  et  de  gazon,  de  manière  à 
»  en  bien  dissimuler  Touverture.  EnGn,  toutes  choses  étant 
»  ainsi  disposées,  nousinviteronsRustem  à  chasser  avec  nous 
»  et  nous  diiigeronsces  pas  de  manière  à  le  faire  tomber 
»  dans  un  de  ces  pièges  qui  deviendra  infailliblement  son 
o  tombeau.  » 

Le  roi  goûta  fort  cet  exécrable  projet,  et  voici  comment 
ils  s  y  prirent  tous  les  deux  pour  le  mettre  à  exécution.  Un 
jour  de  grand  festin,  Schoghad  prononça,  en  présence  de 
toute  la  cour ,  quelques  paroles  désagréables  pour  1  oreille 
du  roi ,  lequel  s'empressa  de  répondre  :  —  «  D  où  te  viens 
A  donc  cette  insolence?  Te  croirais-tu  par  hasard  de  la 
I)  race  de  Sam  et  de  Neriman?....  Mais  Zal  ne  ta  ja- 
»  mais  traité  comme  un  fils,  et  Rustem  nie  que  tu  sois  son 
»  frère.  Tu  n'es  qu'un  vil  esclave ,  (ils  d'esclave.  •  —  A 
ces  mots,  Schoghad  simula  un  grand  courroux,  et  se  le* 
vaut  précipitamment ,  il  partit  pour  aller  trouver  Rustem 
et  se  plaindre  à  lui  des  paroles  offensantes  de  son  beau- 
père.  Rustem  lui  fit  un  accueil  affectueux,  écouta  sa  plaiinte, 
et,  partageant  son  indignation,  lui  promit  d'aller  sur  le 
champ  déposer  le  roi  de  Kaboul  pour  le  mettre  à  sa  place 
sur  le  trône. 

Au  bruit  de  leur  arrivée ,  celui-ci ,  pieds  nus  et  cou- 
vert de  cendres ,  courut  à  leur  rencontre  solliciter ,  dans 
les  termes  les  plus  humbles^  un  pardon  qui  lui  fut  ac- 
cordé sur  l'hypocrite  intercession  de  Schoghad.  Cepen- 
dant les  fosses  avaient  été  creusées  et  disposées  mécham- 
sfient  comme  il  avait  été  convenu  entre  les  deux  corn- 


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~  247  — 

pUces.  Rustem,  conduit  à  la  chasse  par  son  frère,  s'a- 
vançait sans  défiance,  lorsque  tout  à  coup  son  intelligent 
destrier  refuse  de  marcher  davantage  et  se  cabre  ;  mais 
Rustem  le  sollicite,  et  tous  deux  se  précipitent  dans  une 
tranchée  profonde,  hérissée  d'épieux  et  de  lames  cou- 
pantes. Cependant  Raksch,  d*un  énergique  eiFort,  s^élance 
avec  son  cavalier  hors  de  la  fosse  meurtrière,  mais  pour 
aller,  à  quelques  pas  plus  loin,  retomber  dans  un  nouveau 
piège.  Sept  fois  de  suite  ils  tombèrent  ainsi,  et  sept  fois 
le  généreux  coursier  put  sortir  de  Fabîme;  mais  enfin, 
épuisés  de  forces,  déchirés  de  blessures  mortelles,  ils 
restèrent  ensemble  inanimés  sur  T herbe  de  la  forêt  toute 
rougie  de  leur  sang. 

Lorsque  Rustem  eut  repris  ses  sens^  il  reconnut  trop 
bien  Fauteur  de  cette  inftme  trahison ,  et  appelant  Scho- 
ghad ,  il  lui  adressa  ces  paroles  de  reproche  :  —  c<  Ce 
j»  peut-il  que  tu  m'aies  traité  ainsi  ?  Et  devais-je  m'at- 
»  tendre  à  périr  par  la  perfidie  d'un  frère  !  »  —  Schoghad 
répondit:  —  «  De  quoi  te  plains-tu?...  Tu  as  versé  le 
»  sang.  Dieu  venge  le  sang  versé!  »>  —  Rustem  alors 
d'une  voix  défaillante  supplia  son  frère  de  lui  mettre  en- 
tre les  mains  son  are  et  ses  flèches ,  en  guise  d'épouvan- 
tatl,  afin  que  les  oiseaux  de  proie  et  les  loups  ne  vinssent 
pas  dévorer  son  cadavre.  Schoghad  ne  lui  refusa  pas  cette 
dernière  satisfaction ,  mais  joyeux  de  le  voir  mourir^  il 
lui  présenta  ses  armes,  insultant  en  même  temps  à  sa 
mort  par  un  infernal  sourire.  Cependant  Rustem  saisit  son 
arc  arec  un  tel  reste  de  vigueur  que  le  traître  Schoghad 
en  pâlit  d'effroi  et  courut  se  réfugier  derrière  un  cèdre  : 
c'est  en  vain,  le  trait  a  volé,  et   le  tronc  de  larbre   et 

17 


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—  248  — 

le  frère  coupable  sont  transpercés  du  même  coup.  Alors 
Fceil  de  Rustem  se  tourna  versie  ciel,  brillant  d'un  der- 
nier éclair  de  joie.  —  «  Puissant  Créateur  du  monde , 
»  s  écria  le  vieux  guerrier  mourant ,  sois  béni ,  toi  qui  as 
»  laissé  à  mon  bras  assez  de  force  pour  venger  moi-même 
»  mon  trépas!  »  —  Et  en  prononçant  ces  paroles,  le 
glorieux  vétéran  de  la  Perse  expira. 


Malgré  la  mort  de  Rustem  les  rois  de  Perse  nourrirent 
encore  une  inquiète  et  jalouse  défiance  contre  l'illustre 
famille  de  Sam  ,  devenue  trop  puissante  à  leur  gré.  Bah-* 
man  en  particulier,  passé  maître  dans  toutes  les  pratiques 
de  la  cauteleuse  hypocrisie,  lorsqu'il  fut  parvenu  au  trône, 
se  fit  le  cruel  persécuteur  de  Zal  et  de  tous  les  siens.  Sous 
prétexte  de  venger  la  mort  d'Isfendiar  son  père,  il  con- 
fisqua leurs  biens,  fit  pendre  à  un  ignominieux  gibet 
Faramours,  valeureux  fils  de  Rustem ,  et  après  avoir  com- 
plètement ruiné  toot  son  pouvoir,  laissa  par  une  sorte  de 
pitié  dérisoire,  une  liberté  peu  compromettante  au  véné- 
rable Zal  Zer,  alors  cassé  de  vieillesse  et  plus  accablé 
encore  par  le  chagrin  que  par  les  années. 

a  0  Bélisaire!  —  s'écrie  Camoens  vengeant  des  persécu- 
»  tions  qu'il  a  souffertes  un  des  plus  vaillants  capitaines  du 
»  Portugal,  —  toi  qui  seras  toujours  grand  parmi  les  filles 
»  de  mémoire;  si  l'impure  calomnie  a  flétri  tes  lauriers,  si 
»  ta  gloire  a  connu  l'outrage,  viens  te  consoler  avec  Pa- 
»  clieco.  Vous  aviez  tous  deux  servi  glorieusement  le 
j»  prince  et  la  patrie  :  d'injustes  rigueurs  vous  ont  payés 
)y  tous  deux....  Voilà  l'œuvre  des  rois!  » 

C.-G.  Smoii. 


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ANNALES 


DE  Lk  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  SÉANCES. 


Séance  du  3  avril  1850. 

PHÂSIBEIVCE  DE  H.  6ÉLT. 

Le  procès-verbai  de  la  précédente  séance  est  lu  el 
adopté. 

La  Société  a  reçu  : 

l.^"  Mémoires  de  la  Société  des  Lettres,  Sciences  et 
Arts  de  Nancy,  1848. 

2*^  Organisation  du  service  médical  pour  les  indigents 
des  campagnes ,  par  MM.  les  docteurs  Chauvin ,  membre 

18 


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_  250  — 

de  TÂssemblée  législative,  médecin  du  service  médical  à 
Châteaubriant,  et  Verger,  médecin  du  même  service  mé- 
dical. 

3.®  Lettre  de  l'Institut  des  Provinces  de  France,  relative 
à  Torganisation  d'un  centre  pour  la  publication  des  œuvres 
des  sociétés  de  province,  et  à  la  contribution  pécuniaire 
de  chaque  Société  pour  cette  fondation. 

M.  le  Président  rend  compte  à  la  Société  de  la  manière 
dont  le  Comité  central  a  rempli  le  mandat  qui  lui  avait 
été  confié  relativement  au  changement  de  local. 

Le  Secrétaire  donne  ensuite  lecture  de  la  proposition 
de  M.  Simon ,  relative  aux  concours,  telle  qu'elle  a  été 
modifiée  par  le  Comité  central. 

Âpres  une  discussion  sur  l'ensemble  et  l'adoption  de 
plusieurs  amendements  sur  les  détails,  la  Société  décide 
que  la  proposition  dont  la  teneur  suit  sera  annexée  au 
Règlement.  * 

A  la  fin  de  l'article  41  du  Règlement  ainsi  conçu  : 

Chaque  année  et  autant  que  les  finances  de  la  Soeiéti 
pourront  le  permettre^  des  questions  rédigées  par  le  Comité 
central  sur  toutes  les  éludes  dont  la  Société  s'occupe^  seront 
proposées  à  titre  de  sujets  de  prix  qui  seront  décernés  en 
séance  publique ,  seront  ajoutés  ces  mots  :  aux  auteurs 
des  mémoires  jugés  dignes  de  cette  distinction. 

DISPOSITIONS  ADBITIOKrŒLLES. 

Abticle  pbehieb.  Les  sujets  de  concours  sont  annoncés 
dans  la  séance  publique  de  fin  d'année ,  et  les  prix  décer- 
nés, soit  un  an,  soit  deux  ans  après,  selon  que  le  peut 
exiger  la  nature  du  sujet  de  concours. 


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—  3S1  — 

Abt.  2.  Dans  Tun  et  l'autre  cas,  les  manuscrits  des  con- 
currents devront  être  adressés  au  Secrétaire  de  la  Société 
avant  le  15  juillet  de  Tannée  dans  le  courant  de  laquelle 
les  récompenses  seront  décernées* 

Abt.  3.  Dans  la  séance  qui  précédera  immédiatement 
le  terme  iixé  pour  la  remise  des  mémoires ,  le  Comité 
central  désignera  les  membres  qui  composeront  la  commis- 
sion chargée  d'examiner  les  travaux  des  concurrents. 

Le  Secrétaire  adjoint  fait  de  droit  partie  de  la  commis- 
sion et  la  préside. 

Abt.  4.  An  15  septembre,  la  conmiission  aura  discuté 
le  mérite  des  travaux  soumis*  son  appréciation^  décidé 
quelle  récompense  peut  être  décernée  à  chacun  de  ceux 
qui  kii  paraîtront  dignes  de  recevoir,  soit  un  prix,  soit 
nne  mention,  et  nommé  un  ou  plusieurs  rapporteurs,  selon 
que  l'exigera  la  nature  spéciale  des  sujets  mis  au  con- 
cours. 

Abt.  5.  Le  travail  des  rapporteurs  devra  être  terminé 
au  20  octobre  et  immédiatement  soumis  au  jugement  de 
la  commission. 

Abt.  6.  Le  Comité  central  sera  ensuite  convoqué  à  bref 
délai,  en  séance  extraordinaire,  pour  entendre  la  lecture 
des  rapports  approuvés  par  la  commission,  et  en  discutera 
les  formes  et  les  conclusions. 

Les  membres  de  la  commission  seront  appelés  à  cette 
séance  ;  ils  pourront  y  prendre  la  parole ,  mais  ils  n'auront 
voix  délibérative  qu'autant  qu'ils  feront  partie  du  Comité 
central. 

Les  décisions  prises  dans  cette  séance  seront  défini- 
tives. 


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H.  Champenois,  docteur-médecin ,  né  à  Rexé,  le  4 
avril  1824,  est  admis  au  nombre  des  membres  rési- 
dants de  la  Société,  sur  un  rapport  £ût  au  nom  d'ooe 
commission,  par  M.  Rouxeau.  (Thèse  inaugurale  sur 
rhydropisie.) 

M.  Pierre-Âdolpbe  Bobierre ,  chimiste ,  né  à  Paris,  le 
7  juin  1823^  est  admis  au  nombre  des  membres  rési- 
dants de  la  Société,  sur  un  rapport  fait  au  nom  d'une 
commission ,  par  H.  Malherbe. 

M.  Bobierre  a  débuté  dans  ses  études  chimiques,  au  Ta* 
boratoire  de  chimie  organique  de  H.  Dumas,  à  la  Faculté 
de  Médecine.  Là,  il  a  été  chargé  de  diriger  les  manipula- 
tions chimiques  des  étudiants  à  l'École  pratique. 

Ilfut^plus  tard)  nommé  préparateur,  puis  profeaseui^  sup- 
pléant à  rÉcoIe  municipale  Turgot,  fondée  par  la  ville  de 
Paris.  A  cette  époque,  il  fil  paraître  son  premier  ouvrage,  ia- 
titulé:  Traité  des  JUanipulalions  Chimiques,  un  vol.  in-8.* 
de  400  pages. 

Un  an  plus  tard,  il  fit  un  travail  sur  la  conservation  des 
substances  animales,  dans  lequel  il  proposa  le  premier,  et 
bien  avant  le  docteur  Sucquet,  l'emploi  des  sulfites,  comme 
moyen  efficace  d*emp6cher  la  putréfaction  de  cea  substances. 
Sur  un  rapport  finit  à  l'occasion  de  ce  travail,  l'auteur  fut 
nommé  membre  associé  dj3  la  Société  de  Médecine 
d'Amiens. 

Peu  après,  il  fit  paraître  un  travail  sur  l'air  atmosphéri- 
que considéré  au  point  de  vue  de  la  salubrité,  ouvrage  qui 
fut  honoré  d'une  souscription  de  la  préfecture  de  la 
Seine. 

II  fut,  en  même  temps,  collaborateur  à  plusieurs  reeueib 
scientifiques  de  Paris. 


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^  253  — 

Appelé  à  diriger  les  travaux  chimiques  de  l'usine  de 
Nantes,  M.  Bobierre  fit  paraître  quelques  mots  sur  Timpôt 
du  sel  destiné  à  Tindustrie.  A  la  suite  de  cette  publica* 
tioo,  il  fut  admis  comme  membre  correspondant  de  la 
Société  industrielle  d*Angers.  Dans  le  même  temps,  il  fit 
publier  à  Paris  uu  travail  relatif  aux  avantages  du  vaccin 
constamment  régénéré  par  le  Cou)  pox,  et  à  la  nécessité, 
pour  le  Gouvernement,  d'avoir  des  étables  où  celte  maladie 
fut  entretenue.  A  Foccasion  de  ce  travail,  l'auteur  reçut 
une  médaille  de  bronze  de  la  Société  Nationale  de 
Vaccine. 

UAbeUle  Médicale  et  les  Complei-rêtidM  de  l'Académie 
de$  Sciences  renEerment  un  travail  de  M.  Bobierre,  qui  fut 
lu  par  M.  Flourens  à  Tlnstitut,  et  dans  lequel  sont  étudiés 
les  phénomènes  chimiques  qui  s'accomplissent  dans  le 
traitement  de  la  phthisie  par  le  chlore. 

M.  labbé  Hoigno, dans  la  Revue scientilique  de  Quesne- 
vUlCj  rendit  un  compte  très-favorable  de  cet  ensemble  d'ob- 
servations. 

Une  médaille  de  bronze  de  la  Société  Industrielle  d'An- 
gers et  une  mention  trës-flEivorable  de  la  Société  d'encou- 
ragement lui  ont  été  accordées  pour  un  procédé  de 
coagulation  du  sang  destiné  à  Tengrais. 

11  découvrit,  plus  tard,  un  moyen  d'améliorer  la  clarifi- 
cation du  sucre  par  un  mélange  préalable  du  noir  animal 
avec  le  sang.  M.  Payeo,  dans  son  traité  de  chimie,  ap- 
prouve ce  moyen,  qui  fut  cité  avantageusement  dans  le 
Moniteur  IndmlrieL  le  Nationale  plusieurs  journaux  bel- 
ges, et  eut  un  succès  constant  dans  le  bel  établissement  de 
HBf.  Saint-Omer  et  Baré,  à  Nantes. 


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~  254  — 

Uû  remarquable  travail  de  M.  Bobierre,  intitttié  :  Éludes 
chimiques  sur  les  cours  d'eau  du  département  de  la  Loire- 
Inférieure^  publié  en  1847,  en  collaboration  avec  H. 
Moride,  vient  de  remporter,  à  l'Institut,  le  prix  de  statis- 
tique Monthyon. 

Ce  .travail  commence  par  des  considérations  générales 
sur  le  grand  intérêt  qui  s'attache  à  la  connaissance  de  la 
composition  chimique  des  eaux  pour  l'agriculture ,  Thy*- 
gîène  et  l'industrie. 

L'eau  est,  en  effet,  le  principal  agent  de  la  végétation; 
c'est  elle  qui  fournit  à  la  plante  la  plupart  des  substances 
nécessaires  à  son  développement,  soit  par  ses  principes 
constituants,  soit  par  les  sels  minéraux  et  les  gaz  qu'elle 
tient  en  dissolution.  De  là  ressoii;  l'importance  des  irriga- 
tions, pour  lesquelles  l'agriculture  de  la  France  est  dépassée 
de  bien  loin  par  celle  de  quelques  autres  pays. 

Il  est  constant,  d'un  autre  côté,  que  toutes  les  eaux  qui 
existent  à  la  surface  du  Globe  ne  sont  pas  propres  à  servir 
de  boissons,  et  que,  parmi  celles  qui  sont  potables,  toutes 
ne  sont  pas  également  salubres. 

Certaines  affections  endémiques,  le  goitre,  par  exemple, 
sont  attribuées  à  cette  seule  cause.  Suivant  M.  Boussîngault, 
le  gottre  serait  produit  par  l'usage  d'eau  manquant  d  une 
aération  suffisante  et  par  conséquent  d'oxygène  :  c'est  pour 
la  même  raison  que  dans  les  étangs  situés  à  une  certaine 
hauteur  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  les  poissons  ne 
peuvent  plus  vivre,  l'eau  ne  retenant  pas  assez  d'air  pour 
leur  fournir  l'oxygène  nécessaire  à  la  respiration.  Enfin,  b 
connaissance  de  la  composition  des  eaux  importe  à  l'in- 


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—  255  — 

dustrie,  soit  qu'elle  doive  servira  alimenter  une  chaudière 
à  vapeur,  soit  qu'on  l'emploie  à  la  teinture  ou  au  blanchis- 
sage. Dans  tous  ces  cas,  en  effet,  les  matières  que  l'eau  tient 
en  dissolution  peuvent  modifier  profondément  le  résultat 
des  opérations. 

Après  ce  préambule,  les  auteurs  insistent  sur  la  nécessité 
d'étudier  les  gaz  contenus  dans  les  eaux  dont  on  cherche 
à  connaître  la  composition  et  exposent  dans  quelles  con«- 
ditions  ils  se  sont  placés  pour  se  procurer  celles  qu'ils  vou* 
laieot  soumettre  à  l'analyse. 

Vient  ensuite  un  exposé  détaillé  des  procédés  qu'ils  ont 
employés  dans  toutes  leurs  opérations,  et  qui  nous  ont  sem- 
blé, en  raison  de  leur  délicatesse  et  de  leur  rigoureuse 
exactitude,  pouvoir  servir  de  modèle  dans  toute  investiga* 
tion  de  même  nature. 

Avant  d'aborder  l'analyse  chimique,  les  auteurs  ont 
étudié  avec  soin,  pour  chaque  cours  d'eau,  la  constitution 
géologique  des  terrains  qu'il  parcourt,  ainsi  que  la  présence 
ou  l'absence  de  végétaux  dans  son  lit,  et  dans  le  premier 
cas,  l'état  d'intégrité  ou  de  décomposition  de  ces  végétaux, 
suivant  que  le  courant  est  rapide  ou  l'eau  stagnante.  Ils  ont 
tenu  compte,  dans  leurs  expériences,  des  circonstances  mé- 
téorologiques au  milieu  desquelles  elles  ont  été  accomplies, 
et  sont  arrivés  à  des  résultats  très-intéressants  au  point  de 
vue  hygiénique,  particulièrement  en  ce  qui  concerne  les 
eaux  de  la  Loire  et  de  TErdre. 

Ils  ont  constaté ,  pour  la  première,  la  différence  de  com- 
position qu'elle  présente,  prise  à  la  hauteur  du  Château  et 
au-dessous  de  la  ville,  vis-à-vis  Trentemoult;  et,  chose 
bien  plus  importante,  ils  ont  signalé  l'inconvénient  de 


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—  256  — 

remploi ,  dans  la  filtration  de  l'alun  ,  comme  moyen  de 
clarification,  et  du  sable  siliceux  trop  fin  comme  filtre, 
puisque  l'eau  filtrée  contient  une  plus  grande  proportion 
de  matière  minérale  dissoute  que  celle  prise  dans  la  ri- 
vière ;  de  plus,  son  aération  n'est  pas  suffisante  ;  l'air  qu'elle 
contenait  ayant  été  absorbé  par  le  charbon. 

Un  autre  ouvrage,  plus  important  encore  que  le  précé- 
dent ,  fait  également  en  coliaboratiou  avec  M.  Moride ,  a 
paru.en  1848  sous  le  nom  de  Technologie  des  Engrais.  Ce 
travail  fut  honoré  d'une  médaille  d'ai'gent  du  Comice  agri- 
cole de  la  Loire-Inférieure^  d'une  médaille  d'argent  de 
la  Société  nationale  et  centrale  d'Agriculture,  et  de  deux 
souscriptions  ministérielles.  11  commence  par  une  classifi- 
cation des  engrais  et  par  d'intéressantes  considérations  gé- 
nérales sur  les  phénomènes  de  la  vie  végétale,  et  en  par- 
ticulier sur  la  nutrition  des  plantes ,  considérations  dans 
lesquelles  sont  résumées,  avec  talent ,  toutes  les  connais- 
sances que  nous  devons  aux  progrès  récents  de  la  chimie 
organique,  et  où  sont  appréciés,  avec  clarté  et  précision, 
suivant  leur  importance  relative,  les  difierents  agents  qui 
oonconrent  au  développement  des  végétaux. 

C'était  là,  en  effet,  un  préliminaire  indispensable  à 
l'étude  des  engrais,  puisqu'il  importe  de  reconnaître, 
dans  chacun  d'eux,  la  proportion  respective  des  principes 
dont  l'utilité  est  reconnue. 

Les  auteurs  donnent  l'historique  de  l'emploi,  dans  l'a- 
griculture, du  noir  de  raffinerie,  et  démontrent  qu'il 
agit  à  la  fois  par  les  substances  azotées  et  par  lespbospha* 
tes  qu'il  contient,  et  que  la  diminution  de  l'un  ou  de  l'au- 
tre de  ces  principes  est  également  fâcheux.  Ils  signalent 


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—  257  — 

tout  ce  que  l'agriculture  de  la  Bretagne  a  trouvé  d'avan^ 
tages  dans  l'emploi  des  eugrais  phosphatiques ,  et  déplo- 
rent les  inconvénients  de  la  fraude,  qui  leur  fait  subir  de  si 
fréquentes  etsi  préjudiciables  altérations. 

Enfin,  ils  apprécient  la  valeur  des  différentes  espèces  de 
noirs  utilisés  dans  ragriculture,  et  donnent  des  procédés 
d'analyse  rigoureux  pour  en  reconnaître  la  pureté  et  les 
altérations  diverses. 

Viennent  ensuite  des  études  très-exactes  sur  les  diffé- 
rentes espèces  d'engrais  employés  dans  l'ouest  de  la  France, 
et  des  indications  très-précises  sur  leur  valeur  relative. 

Enfin,  en  1846,  M.  Bobierre  a  soutenu,  devant  le 
jury  médical  des  Boucbes-du-Rhône  ,  une  thèse  sur  Fat- 
traction  universelle.  Cette  dissertation  est  divisée  en  deux 
parties.  Dans  la  première ,  l'auteur  s'élève  aux  plus  hautes 
considérations  philosophiques  sur  cette  force  merveil- 
leuse, découverte  par  Newton,  qui  régit  tous  les  phé- 
nomènes qui  se  passent  dans  la  nature  ;  qui  règle  la  mar- 
che des  astres ,  aussi  bien  que  les  mouvements  moléculaires 
qui  s'accomplissent  sans  cesse  dans  Tintimité  des  corps.  Il 
établit  que  cette  loi  représente,  dans  l'univers,  le  prin- 
cipe de  l'unité,  qu'il  désigne  sous  le  nom  d'unitéisme,  et 
soumettant  les  phénomènes  intellectuels  à  cette  môme  loi , 
il  distingue  comme  trois  formes,  trois  tendances  de  l'attrac^ 
lion,  qu'il  appelle  attraction  moléculaire,  organique  et 
intellectuelle. 

Nous  avouons  n'avoir  pu  comprendre  complètement , 
l'explication  que  donne  l'auteur  de  l'attraction  intellec* 
tneile.  Nous  trouvons  bien  «  sans  doute  ,  dans  les  manifes- 
tations du  principe  immatériel  de  l'homme ,  des  faits  d'at- 


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—  258  — 

iraciioQ  et  de  répulsion  ;  mais  ils  sont  loin ,  selon  nous ,  de 
donner  la  solution  de  tous  les  problèmes  que  soulève  une 
sérieuse  méditation  sur  la  nature  de  rame  ;  et  ici  «  comme 
sur  bien  d'autres  points,  la  science  doit  s*arrêter  devant 
Tinconnu  et  confesser  son  ignorance. 

La  seconde  partie  de  la  thèse  présente,  comme  con- 
séquence des  principes  philosophiques  exposés  dans  la  pre- 
mière, un  résumé  de  la  théorie  des  Équivalents  chimiqties 
et  de  la  loi  des  nombres  proportionnels.  Cette  partie ,  que 
nous  nous  abstenons  d  analyser,  est  telle  qu'on  devait 
l'attendre  d'un  homme  aussi  versé  dans  les  études  chimi* 
ques  que  l'est  M.  Bobierre. 

Séance  extraordinaire  du  20  avril  1850. 

PAÉ$IDEr«iC£  DE  H.  GÉLV. 

Le  procès-verbal  do  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté. 

Correspondance  : 

l.''  Lettre  du  Président  delà  Section  de  Médecine,  pour 
réclamer,  au  nom  de  la  Section,  contre  l'oubli  fait  par 
H.  le  Secrétaire  général  de  mentionner  ,  dans  le  compte- 
rendu  annuel,  le  don  fait  par  M.  le  docteur  Palois  ; 

2.''  Observations  lues  à  la  tribune  après  avoir  entendu 
le  rapport  d'une  commission  spéciale  sur  l'Enseignement 
agricole  ; 

3.""  Histoire  de  l'Association  agricole ,  solution  pratique, 
par  H.  Bonnemère. 


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—  259  — 

.  M.  Delalande  continue  la  lecture  de  sa  notice  sur  les 
îles  de  Hooat  et  d'Hœdic. 

M.  Renool  donne  communication  à  la  Société  d'un  mé- 
moire statistique  sur  le  mouvement  comparé  de  la  popu- 
lation des  villes  et  des  campagnes  en  France^ 

Cette  lecture  donne  lieu  à  la  discussion  suivante  : 

M.  Goupilleau,  tout  en  approuvant  le  but  que  s'est  pro- 
posé Tauteur,  bit  remarquer  que  les  stutistii|ues ,  en  gé* 
néral ,  sont  pleines  d  incertitudes,  et  qu'en  particulier,  les 
recensements  faits  dans  les  campagnes  sont ,  la  plupart  du 
temps,  inexacts. 

M.  Renoul  rappelle  à  quelles  sources  il  a  puisé  ses  do- 
cumeots ,  et  s'il  n  invoque  pas  pour  eux  la  certitude  ma- 
thématique, il  pense  que  les  erreurs  qu'ils  pourraient 
contenir  sont  trop  faibles  pour  modifier  sensiblement  les 
résultats. 

H.  Ménard  dit  que ,  de  tout  temps ,  les  campagnes  ont 
servi  à  recruter  les  villes  ,  et  que  ces  dernières  dissimu- 
lent leur  population  pour  payer  moins  d'impôts;  il  ajoute 
que  la  domesticité  est  la  principale  cause  du  mouvement 
en  question. 

M.  Simon  pense  que  l'auteur  a  très-bien  fiiil  d'opérer 
sur  les  vingt  dernières  années^  parce  que,  dq)nis  vingt  ans, 
les  recensements  sont  très-bien  faits. 

M.  Moriceau  partage  cet  avis:  il  ajoute  que  les  immenses 
travaux  faits  depuis  quinze  ans  ont  attiré  les  ouvriers  des 
campagnes  dans  les  villes  ;  l'organisation  de  l'assistanoe 
publique  est  aussi  plus  avancée  dans  ces  dernières;  étendre 
ce  bîenfiût  aux  campagnes  serait  peut<4tre  un  des  n^oyens 
à  mettre  en  pratique  pour  y  retenir  le^  populations. 


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—  260  — . 

M.  Lucas-ChioapioQnîère  est  d'avis  que  ce  ne  sont  ni 
les  travaux ,  ni  les  hôpitaux ,  mais  bien  les  plaisirs  de  la 
ville  qui  attirent  les  paysans.  Beaucoup  d'Jiabitaiits  de  la 
campagne  prennent  d'autres  métiers  que  celui  de  labou- 
reur ,  parce  qu'ils  sont  moins  durs  ;  puis,  si  dans  leur 
nouvelle  profession  l'ouvrage  vient  à  manquer ,  Ils  sont 
obligés  de  retourner  au  travail  de  la  terre ,  qu'ils  ne  con- 
naissent plus,  et  qu'ils  trouvent  d'autant  plus  pénible.  Pour 
échapper  à  cette  nécessité,  ils  émigrent  vers  les  villes  où 
ils  espèrent  trouver  de  l'occupation. 

Les  titres  du  XVII/  siècle  prouvent,  qu'à  cette  époque,  le 
même  mouvement  s'opérait  dans  la  population  bourgeoise, 
qui  venait  chercher  dans  les  villes  les  avantages  de  la  d* 
vilisation  ,  qu'elle  ne  trouvait  pas  dans  les  cam^^agnes  ;  ces 
dernières,  qu'enrichissait  la  présence  des  boui*geois,  se  srat 
appauvries  par  leur  éloignement. 

Perréciot ,  qui  écrivait  à  la  fin  du  siècle  dernier ,  dit 
qu'en  Bourgogne ,  au  XVII/  siècle ,  les  populations  étaient 
plus  instruites  que  de  son  temps.  H.  Lucas-Championnière 
a  vu  la  même  chose  danssa  conomune  :  eu  XVII.«  siècle,  les 
laboureurs  savaient  presque  tous  écrire  ;  au  XV1II.<',  il  était 
rare  d'en  trouver  qui  eussent  cet  avantage  ;  depuis  vingt 
ans  seulement  on  retrouve  dans  les  actes  des  signatures 
de  paysans. 

Dans  la  mtxae  commune ,  au  XVII.*  siècle ,  existaient 
huit  attisons  boui^eoises  et  cinq  chapellenies  ;  de  tout 
cela,  une  seule  maison  bourgeoise  reste  aujourd'hui.  Le 
mouvement  actuel  n'est  donc  que  la  continuation  d'un  phé- 
nomène qui  a  commencé  depuis  longtemps,  qui  dépend 
sans  doute  d'une  cattoe  plus  génénle  qoe  celles  qu'on  a 


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—  261  — 

invoquées  ^  et  à  laquelle  il  est  peut-être  impossible  de  re- 
médier. 

H.  Simon  fait  remarquer  que  les  travaux  de  la  terre 
donnent  au  laboureur  une  tournure  grossière ,  taudis  que 
l'ouvrier  est  plus  leste  et  plus  d^urdi ,  ce  qui  excite 
Fenvie  du  premier.  L'instruction  donnée  à  tous  rétablira  l'é- 
quilibre. La  Révolution  a  détruit  des  chftteaux  et  dépeuplé 
les  campagnes  de  gens  riches ,  le  perfectionnement  des 
voies  de  communication  les  y  rappellera.  Enfin ,  lasso- 
dation  rendra  les  travaux  agricoles  moins  pénibles  en 
augmentant  les  produits  et  neutralisant  les  inconvénients 
du  morcellement  de  la  propriété  ;  mais  oe  progrès  aura 
nécessairement  une  marche  lente. 

H.  Aubinais  voit  la  cause  du  mal  dans  le  relâchanent 
des  liens  religieux  et  dans  la  corruption  des  mœurs,  et  in- 
sisle  sur  la  nécessité  de  moraliser  les  pqiulations. 

Séance  du  1."  mai  1850. 

PBÉSIDENCE  DE  H.  GfiLT. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  la  et 

adopté. 

La  Société  a  reçu  : 

l.^"  Une  lettre  de  M.  le  Ministre  de  Vinstruction  publi- 
que, relative  aux  envois  de  livres  et  à  des  réclamations 
faites  par  la  Société  pour  des  envois  qui  n'étaient  pas  ar- 
rivés à  leur  destination.  Les  recherches  faites  dans  les  bu- 
reaux du  ministère  ont  démontré  qu'il  fallait  en  accuser 
l'Administration  des  postes. 


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—  262  — 

2.''  Apiculture  simplifiée,  par  M.  A.-N.  Desvaux. 

3.®  Philosophie,  par  Victor  Jubien. 

4.^  Revue  du  progrès  de  T Algérie,  n.»'  1  et  2 ,  janvier 
et  février  1850. 

5.""  Paris  eu  Bretagne,  romance,  paroles  de  M."'  ÉUaa 
Morin,  musique  de  M.  A.  Bondu. 

6.""  Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  historique 
de  la  Charente,  année  1850 ,  1.''  semestre* 

H.  Bizeul  fils,  docteur-médecin,  né  à  Blain,  le  7  juin 
1811 ,  est  admis  au  nombre  des  membres  résidants  de  la 
Société,  sur  un  rapport  fait  par  M.  le  docteur  Baré,  au 
nom  d'une  commission. 

Ses  titres  sont  :  l.<>  Une  thèse  inaugurale,  soutenue  à 
Paris,  le  19  avril  1836,  et  intitulée  :  Qurique$  fragments 
médico-philoiophiques  sur  Viducalionphysiqtie  de  Vh&mms; 

2.®  Une  étude  manuscrite  sur  les  préjugés  et  les  soper- 
stitioDS  des  habitants  des  campagnes  au  sujet  des  maladies 
et  de  la  médecine. 

M.  Delalande  lit  la  fin  de  sa  notice  sur  les  îles  de  Houat 
et  d'Hœdic. 

M.  Galliiud  termine  également  la  série  de  ses  intéres- 
santes lectures  sur  l'histoire  de  la  division  du  ten^  par  un 
aiticle  sur  les  pendules. 


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I 


HOEDIG  ET  HOUAT, 

HISTOIRE,  MOEURS,  PRODUCTIONS  NATURELLES 

DE  G£S  DEUX  ILES  DU  UOBBIHAN, 

PAR  M.  L'ABBÉ  J.-M.  DELALANDE. 


Messieurs, 

Gr&ces  à  la  généreuse  hoepitalité  des  recteurs  de  Belle* 
Iie*en*Mer,  j'avais  pu«  pendant  un  mois  entier^  me  livrer 
à  l'exploration  de  cette  belle  localité  et  y  recueillir  des 
documents  de  tout  genre.  J'avais  pu  vivre  quelques  instants 
en  contact  avec  ce  peuple  encore  aux  mœurs  patriarcales. 
Ma  récolte  botanique  avait  été  fruotuease,  vous  le  savez. 
Cependant,  bien  des  fois,  du  sommet  des  rochers  de  £o* 
maria  ou  des  jardins  si  pittoresques  de  Palais  ^  j'avais 
jeté  mes  r^^ds  sur  deux  tlots  oubliés  au  milieu  de 
rOeéaQ«  J'y  savais  le  PancraHutn^  le  Crambe,  le  Lagu^ 


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—  264  — 

rm^  plantes  que  j'avais  vainement  demandées  aux  sables 
de  Donant  ou  à  la  base  des  rochers  de  la  patrie  de  Chastes 
de  la  Touche  et  du  capitaine  Lucas.  Là ,  de  plus ,  se  trou- 
vait un  peuple  à  part,  un  gouvernement  tout  exceptionnel, 
le  seulj  peut-être,  de  ce  genre  en  Europe.  J'avais  des  plantes 
à  y  recueillir ,  des  moours  pures  et  simples  à  y  étudier.  Le 
spectacle  de  la  vie  innocente  d'une  petite  peuplade,  heu- 
reuse sous  un  régime  à  la  fois  monarchique  ,  constitution- 
nel, républicain,  communiste  même  (dans  un  sens  que 
nous  ne  pouvons  réprouver) ,  ou ,  plus  exactement ,  sous  la 
direction  d'un  père  commun  qui  veille  à  tout ,  où  chaque 
enfant ,  tout  en  jouissant  des  joies  de  la  &mille ,  aime 
cependant  tous  les  autres  comme  ses  frères  et  travaille  avec 
eux  pour  le  bien  de  tous;  ce  spectacle,  dis-je,  devait 
consoler  mon  cœur  attristé  par  celui  du  froid  égoîsme  qui 
glace  notre  société.  J*avaib  besoin  de  retremper  mon  âme 
dans  ce  fortuné  séjour.  Je  ne  devais  point,  il  est  vrai,  y 
lire  sur  les  monuments  la  fastueuse  inscription  qu'on  ne 
voit  que  sur  les  nôtres  ;  c'est  dans  le  cœur  des  habitants 
que  j'allais  trouver  gravés  Liberté ^  Égalité^  Fraternité^ 
mots  qu'ils  ont  toujours  su  comprendre.  Avec  quelle  joie 
donc ,  après  trois  jours  d'attente ,  je  sautai  dans  la  barque 
qui  devait  me  conduire  à  Bouai  et  à  Hœdicf 

La  traversée  fut  longue,  mais  sans  ennui  pour  moi. 
Tantôt,  dans  mon  impatience,  je  demandais  à  l'avance 
des  détails  sur  le  pays  et  sur  les  habitants;  tantôt,  les  yeux 
abaissés  sur  la  vague,  je  contemplai»  les  tiges  si  rameuses 
du  Cysloseira  fibrosa  voguant  à  la  surface ,  ou  bien  encore 
j'admiraia  nager  et  se  soulever ,  par  les  contractions  de 
leur  ombrelle  Y  de  nombreuses  Méduses  aux  formes  élé* 


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—  265  — 

gantes  et  régulières.  Ce  n'était  plus  ces  masses  gélatineuses, 
informes,  que  les  flots  viennent  abandonner  sur  nos  ri- 
vages: ici,  cette  masse  demi -transparente  était  décorée 
de  tentacules  qui,  dans  leurs  mouvements  onduieux,  de- 
venaient autant  de  prismes  vivants  par  la  décomposition 
de  la  lumière,  ou  bien  encore  autant  d'arcs-en-ciel  aux 
couleurs  tendres ,  variées  et  brillantes ,  qui  semblaient  en- 
velopper l'animal. 

Bientôt ,  à  la  clarté  du  jour,  succède  le  pâle  reflet  de  la 
lune ,  et  me  voilà  témoin  d'un  autre  phénomène.  Nous 
sommes  encore  à  un  ou  deux  kilomètres  du  port  de 
Houat ,  et  mon  odorat  me  signale  avant  mes  yeux  la  terre 
voisine  :  les  douces  émanations  du  Lys  d^Houat  {Panera- 
tium  marilimum)  mélangées  aux  parfums  de  l'œillet  de  fa- 
laise (Dianthus  galliciui)  et  de  la  rose  à  feuille  de  pimpre- 
nelle,  me  sont  apportées  par  la  brise  du  soir.  Je  chantais, 
et,  dans  ma  surprise,  le  gracieux  refrain  de  la  romance  de 
Naples^  par  Masini ,  expire  sur  mes  lè\Tes.  Je  suis  muet 
d'étonnement  ;  mais  tout  à  coup  sortant  de  mon  extase , 
j'entonne  ce  passage,  si  bien  de  circonstance,  du  beau 
chœur  de  Christophe  Colomb: 

Ils  rasent  quelque  plaine , 
Ces  zéphyrs  odorants  : 
Humez  leur  douce  haleine  ^ 
C'est  le  parfum  des  champs. 

(ORl»HÉ05,n.ol91.) 

Longtemps  avant  que  le  jour  tombât,  M.  Le  Capitaine, 
curé  de  Tlle,  avait,  à  Faide  d'une  longue-vue,  reconnu 
l'équipage  et  aperçu  un  étranger.  Il  m'attendait  au  rivage, 
pour  m'offrir  une  cordiale  hospitalité.  Il  voulut,  mdme 

19 


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—  366  — 

pendant  mon  séjour  sur  son  territoire ,  être  le  compagnon 
de  toutes  mes  courses.  Je  retrouvai,  plus  tard,  à  Hœdic,  le 
même  accueil ,  les  mêmes  prévenances  de  la  part  de  son 
confrère,  M.  Stephano. 

J'ai  puisé  dans  les  annales  manuscrites  et  dans  les  chartes 
locales  d'utiles  renseignements  ;  les  conversations  soit  avec 
les  indigènes ,  soit  avec  les  BeUilois ,  m*ont  été  précieuses  ; 
la  lecture  des  notes  que  j'avais  pu  recueillir  à  l'avance ,  et 
surtout  l'examen  sur  place ^  si  je  puis  dire,  des  articles 
d'Ogée  (1)  et  des  annotations  plus  curieuses  dont  l'a  en- 
richi M.  A.  de  Francheville ,  ont  fourni  matière  à  des  dis- 
cussions et  à  des  développements  très-instructifs  soit  à  bord 
des  chaloupes,  soit  dans  les  salons  de  Palais  (2).  C'est  le 
résumé  de  tous  ces  documents  que  je  viens  en  ce  moment 
offrir  à  la  Société  Académique.  Voici,  en  deux  mots,leplaa 
que  je  vais  suivre  : 

Après  quelques  détails  géographiques  et  topograpbîques 
empruntés  en  grande  partie  au  consciencieux  annotateur 
d'Ogée,  —  je  raconterai  brièvement  les  événements  dont 


{{)  Dictionnaire  de  Bretagne  ^^zx  Ogée,  nouvelle  édition , 
Bennes,  1843, 1. 1,  pages  383  et  soir. 

(2)  Les  observations  jndicieuses,  les  rëfleiions  critiques  de 
MM.  Maurice ^TtclvoiT  de  Palais;  i7fo,  aujourdlrai  rectenr  de 
Bangor  et  naguère  d'HœdiCf  SiepAano^wm  snccesBeur  à  Hœdic; 
Ze  Capitaine fTeciQXu:  de  Ilouat,  ni'ont  été  d'un  puissant  se- 
cours. 

Je  mentionne  encore  avec  plaisir  être  connaissance  MM.  Lanco^ 
maire  de  Palais*,  de  Chappedelaine^  commandant  du  génie;  de 
Générès^'ourtiiié'^  commissaire  de  marine ,  et  le  capitaine  Saivi^ 
df  ralai9. 


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—  267  — 

eestles  forent  ou  le  théAtre  ou  les  témoins;  —  puis  vien 
dront  des  détails  sur  leur  système  de  gouvernement,  sur  les 
différentes  branches  d'industrie  auxquelles  se  livrent  les  ha- 
bitants, sur  leurs  mœurs ,  usages ,  etc.  ;  —  enfin ,  Thistoire 
naturelle  terminera  mon  récit,  et,  bien  entendu,  le  bota« 
niste  fera  une  large  part  à  la  Flore. 

§  f  •  —  Aperça  géograpliiqiae* 

Suivez  des  yeux,  sur  la  carte  de  Beautemps-Beaupré, 
cette  loogue  suite  de  rochers  noirâtres,  à  formes  et  déno- 
minations diverses,  qui,  de  la  pointe  de  Quiberon,  se 
prolonge  aa-delà  des  Petits  et  Grands-Cardinaux.  Elle  devait 
former,  dans  les  temps  les  plus  reculés,  une  presqu'île  en 
demi-cercle  de  plus  de  8  lieues  de  long  sur  une  de  large, 
comme  le  prouve  la  base  de  son  ancien  territoire  devenu  la 
proie  de  TOcéan,  et  qui  surgit  encore  au  milieu  des 
flots (1).  Derrière  cette  magnifique  chaussée  naturelle,  la 
Vilaine  et  le  golfe  du  Morbihan  venaient  majestueusement 
mélanger  leurs  eaux,  et  des  flottes  entières  y  trouvaient 
m  abri  sûr  contre  la  tempête.  Mais,  à  La  longue,  la  mer 
unwage  a  déchiré  ces  masses  granitiques  et  s^est  frayé  de 
larges  chemins  qu'indiquent  aujourd'hui  les  îlots  et  les 
rochers  qui  ont  pu  résister  à  sa  fureur.  Par  les  plus  beaux 
temps,  les  lames  du  large  viennent  y  déferler  et  blanchir, 
tandis  que,  sur  leurs  flancs  opposés,  la  baie,  large  de 


(1)  Les  anciens  Flambeaux  de  la  Mer^  qui  ne  remontent  qu'à 
deux  siècles,  disent  qu'il  n'y  a  pas  de  passage  entre  Bouat  et  Qui- 
beron. —  De  Penhouct,  lycée  Jrmoricain  ^X,  9,  page  135. 


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—  268  — 

quatre  lieues,  se  montre  calme  et  unie.  On  peut  fecilenieDi 
suivre  en  bateau  cette  redoutable  ligne  de  resciis.  Elle 
commence  à  la  pointe  de  Quiberon ,  aux  îlots  de  Beg  Con- 
guelj  En  Toul-Bihan  et  En  Toul-BraSj  et  se  compose  du 
plateau  de  la  Teignotue  (i) ,  sur  lequel  on  a  construit  an 
phare ,  de  la  chaussée  des  B$cUusiers ,  de  la  chaussée  du 
Béniguet,  de  Tîle  Glazic.de  l'île  Yalhttee^  de  l'île  Senis^ 
de  Tîle  de  Houat^  de  la  chaussée  du  Melvan  ou  Er 
Valhuen  (2),  de  l'île  d'Hœdic,  des  Petits  et  Grands  Cardi- 
natAX.  Pour  franchir  ces  dangereux  écueils,  il  n'existe  que 
trois  passages  pour  les  grands  navires  :  le  Passage  des 
Sœurs  y  entre  Houat  et  Hcedic  (peu  fréquenté  même  par  les 
chasse-marées  étrangers  au  pays) ,  le  passage  du  Béniguet 
(17  brasses  d'eau  en  basse  mer)  et  le  passage  de  la  Tei- 
gnouse^  le  plus  profond  et  le  plus  ancien.  La  rade  de  Quibe- 
ron ,  protégée  par  cette  défense  naturelle  et  garantie  en  se- 
conde ligne  des  vents  du  S.-O.  par  la  terre  élevée  de  Belle- 
Ile,  offre  encore  aujourd'hui,  par  les  plus  mauvais  temps, 
tin  des  meitteurs  mouillages  et  des  mieux  abrités  qu'il  y  ait 
au  monde  (3). 

Bouat  et  Hmdic  sont,  de  toutes  les  îles  que  nous  venons 
d'énumérer,  les  seules  habitées  et  les  seules  habitables. 

HOUAT  (4)  est  situé  au  moins  à  7  lieues  S.-S.-O.  de 


(1)  Et  non  Tagouse ,  comme  rappelle  GaMiai. 

(2)  C'est  le  Maievant  ou  ile  aux  Chevaux ,  de  Gaasini. 

(3)  Ghasle  do  La  Tonche,  Relation  du  désastre  de  Quiberon. 
Paris,  1838,  page  16. 

(4)  Houat ^  en  breton,  signifie  canard.  Ces  oiseaux  viennent , 
en  effet,  s'abattre  en  hiver  par  bandes  nombreuses  sur  les  rochers 
qui  bordent  cette  ile.  Son  nom  latin  eaiHorata. 


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~  269  — 

Vannes,  à  3  lieues  S.-E.  de  la  presqu'île  de  Quiberon ,  à  4 
1^  de  Sarzeau, à  3  N.-Ë.  de  Belle*Ile,  à  47  •  22  '  à  24  ', 

Il  fiiut  peu  de  temps  pour  prendre  connaissance  de  l'ile, 
car  elle  a  à  peine  4 ,000  mètres  dans  sa  plus  grande  longueur, 
da  N.-O.  au  S.-E.,  et  1,100  mètres  dans  sa  plus  grande  lar- 
geur de  TE.  à  1*0.  Sa  superficie  cadastrale  est  de  600  hec- 
tares. Sur  ce  nombre,  on  trouve  115  hectares  71  ares  78 
eentiares  de  felaise  ou  pâture  qui  appartiennent  à  tous  et 
sont  communs;  le  reste  est  divisé  en  plus  de  4,000  par- 
celles dont  les  habitants  sont  seuls  propriétaires ,  comme 
ils  le  sont  d'ailleurs  de  toutes  les  constructions  qui  s'y 
élèvent. 

L'Ile  est  protégée  par  d'énormes  rochers,  non- seule- 
ment au  large ,  mais  encore  près  du  rivage  ;  au  N.-O.  sur- 
tout, des  masses  granitiques  de  toutes  dimensions,  de 
tontes  formes,  s'élèvent  immobiles  au  milieu  de  l'agitation 
perpétuelle  de  l'Océan.  La  vague  vient  se  briser  avec  fureur 
contre  elles  et  ruisselle  en  larges  nappes  d'écume  sur  leurs 
flancs  polis  et  dénudés.  Le  botaniste ,  désireux  de  cueillir 
sar  leur  sommet  verdoyant  le  Lavatera  arborea ,  YAspara- 
guij  YAtriplex  littoraliSj  s'arrête  avant  de  les  gravir,  con- 
temple cette  harmonie  sévère,  ce  coup*d'œil  grandiose  et 
pittoresque.  Les  côtes  sont  plus  sauvages,  plus  déchirées  et 
beaucoup  plus  élevées  que  celles  d'Hœdic.  En  plusieurs  en- 
droits ,  la  hauteur  est  de  près  de  30  mètres.  On  y  rencontre 
de  belles  grottes  creusées  par  les  vagues  et  de  petites  baies 
remplies  de  sable  fin. 

Le  bourg  ou  village  est  l'unique  hameau  de  l'tle.  Il 
est  situé  dans  la  partie  N.-E.  et  formé  par  une  agglomé- 


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ration  irrégulièrB  d'uoe  cinquantaine  de  pauvres  maisons. 
Ogée  les  comfMire  aux  cabanes  de  saumgês  ;  j'ignore  pour- 
quoi cette  épithète  aux  maisons  de  Houat,  car  elles  sont 
semblables  à  celles  d'Hoedic,  semblables  à  celles  de  ioai  le 
Morbihan.  Vous  n'y  trouverez  pas ,  je  l'avoue ,  les  naaisons 
proprettes  des  lies  de  Ré  et  d'CMeron  ;  mais  c'est  aussi  en 
vain  que  vous  y  chercheriez  les  mêmes  mœurs. 

On  compte  à  JSouat  48  ménages,  220  habitants  (1). 
L'Ile  a  l'avantage  de  posséder  un  moulin  à  vent.  En  dehors 
du  village  se  trouve  la  maison  du  Génie ,  la  Forge ,  et 
dans  la  partie  plus  rapprochée  du  port,  sur  les  sables,  une 
autre  habitation  destinée  à  loger  les.  nombreux  ouvriers 
des  fortifications. 

L'église  actuelle,  construite  en  1766,  sous  l'invocation 
de  Saint-Gildas ,  n'a  rien  qui  mérite  de  fixer  l'attention  de 
l'archéologue ,  et  je  dirai  la  même  chose  de  celle  d'Hœdic  : 
mais  le  Dieu  qu'on  y  adore  y  reçoit  des  hommages  aussi 
purs  que  dans  les  temples  les  plus  riches.  Son  plus  bel 
ornement,  dans  l'une  et  l'autre  île,  c*est  la  foi,  c'est  hi 
piété  des  fidèles  agenouillés  devant  le  Dieu  de  leurs  pères , 
lui  demandant  leur  pain  de  chaque  jour;  c'est  leur  recueil- 
lement, c'est  le  chant  de  l'office  un  jour  de  fête  ou  de  di- 
manche, exécuté  par  tous  les  assistants,  hommes,  femmes 
et  enfants ,  avec  un  ensemble  et  une  précision  qui  sur- 
prennent toujours  un  étranger. 

Le  clocher  de  Houat  n'est  pas  sans  originalité.  Deux  belles 
poutres  de  13  mètres  d'élévation  et  de  32  centimètres 


(1)  ÀÎDsi  répartis  t  72  garçons ,  30  hommes  mariés ,  4  vend  \  — 
74fiUes,  10  veuves. 


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—  271  ~ 

d'équarrissage,  sont  adossées  extérieurement  au  pignon  de 
la  grande  porte,  de  chaque  côté,  et  dépassent  le  sommet 
du  toit  au-dessus  duquel ,  avec  deux  autres  pièces  de  bois 
implantées  sur  la  toiture ,  elles  forment  une  pyramide.  Des 
planches  peintes  en  rouge,  clouées  sur  les  parois  de  cette 
charpente  ,  les  réunissent,  les  consolident,  forment  le  clo- 
cher, et  lairain  se  balance  au  sommet  de  ces  poteaux  que 
la  vague  rejeta  sur  la  côte.  Les  pièces  d'OiCajou,  caïl-cedra 
et  autres  bois  des  îles  que  j*ai  vus  former  la  petite  tonnelle 
du  jardin  du  curé ,  n*ont  pas  d'autre  origine  :  ce  sont  des 
épaves  qui  ont  servi  d'habitation  aux  Tarets  dans  la  mer. 

Le  port  de  Tîle  se  nomme  Treh  er  Gourett,  et  quelque- 
fois Le  Collet,  à  cause  de  sa  forme.  C'est  une  anse  en  fer 
à  cheval ,  ouverte  à  TE. ,  et  faisant  face  S  Hœdic.  Les  chasse- 
marées  ,  les  chaloupes  et  les  bateaux  de  pêche  y  viennent 
mouiller  de  préférence.  La  rade  est  bonne.  La  chaussée , 
en  pierres  sèches  de  Treh  er  Goureit,,  sert  de  débarca- 
dère. Elle  a  80  mètres  de  longueur,  5  de  hauteur,  6  de 
largeur  dans  le  bas  et  4  dans  le  haut.  C'est  l'ouvrage  des 
habitants  sous  la  direction  du  curé  (M.  Roussel) ,  aban- 
donné à  ses  propres  ressources.  Cette  reconstruction,  sur 
une  plus  large  base  que  l'ancienne,  coûta  plusieurs  années 
de  travail  (1812  à  1818),  et  rend  toujours  d'importants 
services  aux  chaloupes.  C'est  à  quelques  mètres  S.  de  cette 
chaussée  que  se  trouve  la  fontaine  deSaint-Gildas,  Fetœn- 
Sanl-Guellas  ^  si  précieuse  par  la  bonté  de  son  eau  et  sa 
proximité  du  port. 

Porh  Navalo^  à  mi-route  du  bourg  au  Béniguet,  est  un 
tout  petit  port,  ouvert  au  N.,  protégé  par  des  blocs  de 
pierres  amoncelés  par  l'industrie  houataise.  C'est  là  que  nos 


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pécheurs  abritent  leurs  nioles  ou  petits  canots,  lorsqu'ils 
stationnent  avec  leurs  filets  ou  leurs  casiers  dans  les  parages 
du  Béniguet  et  des  îlots  voisins. 

H(£D1C  (1) ,  sœur  de  Uouat ,  se  trouve  à  une  lieue  Ë.-S.- 
£.  de  cette  dernière.  Elle  est  à  7  lieues  3/4  S.  de  Vannes, 
à4  l/2deSarzeau,à3  E.de  Belle-lie.  47  <'20'à21  '; 
5Ml'ài3'. 

Elle  est  d*un  tiers  plus  petite  que  Uouat.  Différentes 
pointes  qui  s'avancent  dans  la  mer  lui  donnent  une  figure 
assez  irréguliëre,  dont  la  plus  grande  longueur,  duN.  au 
S.,  est  de  3  kilomètres  (2),  et  la  plus  grande  largueur, 
d*un  kilomètre.  La  superficie  cadastrale  est  de  203  hec- 
tares. Sur  ce  nombre,  107  hectares  77  ares  8  centiares 
sont  communs;  les  deux  étangs ,  le  four  banal ,  la  cantine 
et  Taire  y  sont  compris  ;  le  reste  est pftture ,  lande  onvague. 
Les  propriétés  particulières  forment  quatre  grands  champs 
et  sont  morcelées  en  trois  ou  quatre  mille  parcelles. 

Tout  annonce  que  cette  île  a  été  considérablement  plus 
grande  qu'elle  ne  Test  aujourd'hui.  Un  rocher  remarquable^ 
à  TE.  de  Tile ,  nommé  le  Moranten  (tirant  sur  Teau  ou 
passage  de  Teau)^  se  trouve  aujourd'hui  à  plus  d'un  kilom. 
de  nie; — au  S.-E.,  à  500  mètres  déterre,  une  autre  pointe 
s'appelle  le  Beg  Melin  (pointe  du  moulin) ,  et  certes,  s'il  exis- 
tait là  un  moulin,  rimmensepla^ure  qui  le  sépare  maintenant 
de  l'île  et  qui  se  découvre  entièrement  à  basse  mer,  augmen- 
tait considérablement  la  superficie  de  notre  sol.  La  pointe 

(1)  On  devrait  écrire  etproDoncer  Houadic  (petite  bouat), 
car  ce  mot  est  formé  de  ^ovâ/  (  canard)  et  du  diminutif  breton 
ic  (petit). 

(2)  Et  non  pas  lUuei^  comme  l'a  dit  le  qûrituel  auteur  d'un 
Voyage  à  amdic^  dont  j'aurai  occasion  de  parler  plus  loin. 


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de  Beg  er  fort  (pointe  du  fort) ,  auS. ,  était,  il  n'y  a  pas  en- 
core 50  ans ,  fortement  attachée  à  i*ile  ;  le  génie  y  avaitmème 
établi  une  batterie,  et  maintenant  elle  en  est  séparée  parles 
marées  et  forme  encore  une  plaine  bien  unie.  Cosplat  a  tor 
(côté  plat  sur  la  mer) ,  au  S.-O. ,  à  2  kilomètres  de  Tlle , 
ne  découvre  plus  sa  surface ,  si  ce  n'est  à  la  basse  mer.  Sur 
toutes  les  pointes ,  les  vieillards  remarquent  de  grands  en- 
vahissements faits  sous  leurs  yeux.  Encore  quelques  années, 
et  la  mer  aura  fait  de  nouveaux  ravages  et  formé  deux 
nouveaux  flots  à  la  pointe  du  Vieux  château  {Er  houh  caS' 
tel)  f  car  déjà ,  dans  les  tempêtes,  les  flots  traversent  Ttle  , 
enlèvent  la  terre  végétale  ,  rongent,  creusent  le  granit  y 
et  plus  tard  isoleront  complètement  cette  portion  du  terri- 
toire hœdicais. 

Hœdic  est  bordé  de  rochers  peu  élevés  ,  excepté  au  N. , 
où  la  càte  présente  parfois  17  mètres  de  hauteur;  mais 
elle  est  enclavée  dans  une  chaîne  de  rescifs  dont  les  uns  se 
découvrent  à  basse  mer,  les  autres  ,  à  la  même  époque , 
ne  sont  que  légèrement  recouverts ,  et  cela  à  la  distance 
d'une  lieue  au  large.  Ces  écueils  sous-marins  rendent  rap- 
proche d'Hoedic  fort  dangereuse,  même  à  la  distance  de  4 
kilomètres ,  à  moins  qu'un  pilote  très-expérimenté  ne  di- 
rige l'embarcation ,  et  encore  très-souvent  se  trompe-t-il , 
s'il  n'est  pas  de  l'île  même  (1). 

Parh  Guen  (port  blanc) ,  est  un  petit  port  de  sable 
blanc ^  où  l'on  peut  mouiller  en  sûreté  contre  les  vents 
d'amont  ou  d'Est. 

(1)  De  mémoire  d'homme ,  pas  un  Hoaatais ,  pas  on  Hœdicais  , 
ne  s'est  encore  trompé  ,  soit  k  bord  des  chaloupes  des  îles,  soit 
\  bord  déplus  grands  navires;  ils  savent  circuler  très-près  de 
kurs  ûots. 


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Porh  Bras ,  le  port  principal  et  le  plus  sûr,  est  situé  dans 
la  partie  S.-E.  Il  assèche  à  chaque  marée,  n'admet 
que  des  barques  de  50  tonneaux  au  plus,  n'a  qu'en- 
viron 1,000  mètres  de  circonférence,  et  abrite  les  chasse- 
marées  et  les  chaloupes  des  iloîs.  Les  pilotes  de  Saint- 
Nazaire  y  restent  souvent  en  station  pour  attendre  les 
grands  navires  qui ,  arrivant  du  large,  sont  dans  1  habitude 
de  venir  reconnaître  Belle-Ile  avant  d'entrer  en  Loire  ou 
en  Vilaine.  Je  mentionnerai  plus  loin  les  grands  travaux 
qui  y  ont  été  exécutés  dernièrement. 

Une  petite  coulée  contenant  des  prairies ,  des  courlils 
et  le  jardin  du  curé ,  s'étend  du  bourg  à  un  grand  étang 
d'eau  douce  de  2,507  mètres  de  circonférence,  de  la  con- 
tenance de  deux  hectares  trente-six  ares ,  et  situé  dans  la 
direction  de  Porh  Bras.  On  la  nomme  Lèn-Yras  (étang 
grand) ,  pour  la  distinguer  d'un  étang  plus  petit  (  Lèii- 
Yihan)  situé  dans  lu  partie  Nord.  Ce  dernier,  d'un  hec- 
tare vingt-quatre  ares  quatre-vingts  centiares,  ne  dessèche 
jamais  entièrement,  et  pourrait  être  rendu  à  peu  de  firais 
à  l'agriculture.  Le  curé  comprend  tous  les  avantages  que 
ses  administrés  pourraient  en  retirer  :  c'est  assez  dire  que 
cette  question  deviendra  prochainement ,  aux  termes  de 
leur  constitution  ,  l'objet  d'une  délibération  et  d'une  dé- 
cision du  conseil  des  notables. 

Le  bourg  se  compose  de  deux  villages  séparés  l'un 
de  l'autre  par  le  chemin  et  par  quelques  prairies  :  Er 
Guei  (la  ville)  au  N  ,  et  ^r  Baluden  (le  marais)  au  S. , 
dans  la  partie  la  plus  rapprochée  du  grand  étang.  On 
compte  en  tout  4  i  ménages ,  226  habitants.  On  trouve 
encore  «  sur  différents  points  de  l'ile  ,  d'autres  demeures  : 


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la  maison  du  Génie ,  celle  du  gardien  du  pbarè  (1)  cl  une 
autre  employée  en  1839  à  la  fabrication  de  la  soude  ,  oc- 
cupée aujourd  hui  par  les  nombreux  ouvriers  du  fort.  La 
conduite  licencieuse  de  ces  travailleurs  a  fait  donner  à 
leur  habitation  le  nom  de  Mavson  perdue. 

L'église  d'Hœdic,  séparée  du  village  et  au  N.,  est  de- 
puis plus  de  cent  ans  sous  l'invocation  de  la  Sainte  Vierge. 
Saint  Goustan  n*estque  le  patron  secondaire.  Elle  fut  bâtie 
à  la  fin  du  XVIL'  siècle ,  pour  suppléer  à  celle  de  saint 
Goustan,  qui  avait  été  détruite  par  les  Anglais,  et  dont  quel- 
ques ruines  existent  encore  sous  la  nouvelle  cantitie. 

La  constitution  des  deux  îles  est  entièrement  granitique!! 
Inutile  dès  lors  d'y  chercher  le  Plantago  serpentina^  si 
abondant  sur  les  coteaux  secs  et  schistetuc  de  Belle-Ile,  et 
que  nous  retrouvons  à  Âncenis  (Loire-Inférieure)  dans  le^ 
mêmes  conditions  de  terrain.  Voilà,  certes,  un  exemple 
frappant  de  rinfluenec  minéralogique. 

N'allons  point  chercher  ici  non  plus  la  belle  végétation 
des  chénes-verts  de  Fouras  dont  je  vous  entretenais  l'année 
dernière  (2).  Â  Ilouat,deux  sureaux  et  un  figuier  s'élè- 
vent à  quelques  mètres  ;  quatre  ormeaux  s'efforcent  d'at- 


(i)Ge  phare,  en  bois  et  k  ftsux  fixes,  est  placé  sur  une  espèce  de 
mamelon,  k  550  mètres  0.  de  la  pointe  orientale  de  Vile,  par  47o 
20'  32''  de  latitude  et  h»  12'  *iO"  do  loogilude.  Il  est  élevé  de  26 
mëtrrs  au-dessus  des  plus  hantes  marées,  et  soq  feu  flxe  projette 
son  éclat  à  trois  lieues  marines.  J,  df*  Franch^vUte, 

(2)  Une  seconr/e  excursion  botanique  dans  la  Chnrenfe^ 
Inférieure^  en  s f^temôre  lb48.  Annales  de  la  Société  Acadé- 
mique devantes,  ttf4'J,  page  180. 


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teindre  la  hauteur  du  toit  dans  la  cour  de  Thumble  pres- 
bytère; dans  le  cimetière,  cinq  ou  six  autres,  à  la  tête 
échevélée ,  aux  branches  appauvries ,  semblent  fuir  vers 
le  continent  devant  la  fureur  d'un  ennemi  qui  les  outrage 
et  les  tyrannise  ,  le  souffle  violent  qui  soulève  les  flots. — 
A  Hcedic  ,  une  vingtaine  d'ormeaux  rabougris  ornent  un 
courtil  ;  deux  ou  trois  mûriers  végètent  sur  d'autres  points 
du  village ,  pendant  que  le  marais  s'environne  de  magni- 
fiques Tamarix  plantés  de  la  main  même  du  curé.  —  Ail- 
leurs ,  pas  d'arbre ,  j'allais  dire  presque  pas  une  ronce  sur 
ce  sol  sans  cesse  battu  par  les  vents  du  large.  Les  rares 
ajoncs  qui  y  croissent  (1)  sont  petits,  ramassés  en  boule 
et  chétifs.  Je  pourrais  caractériser  de  la  môme  manière  les 
seuls  arbres  fruitiers  des  îles  plantés  dans  les  jardins  des 
curés  :  rien  ne  profite  au-delà  de  l'abri.  Mais  le  botaniste  ne 
regrette  jamais  son  voyage. 

%%.--  Histoire. 

Les  Romains  donnèrent  à  Houat  le  nom  de  Siata,  et 
comme  ils  ne  font  aucune  mention  d'Hœdic,  ces  deux  tles 
étaient  alors  peut-être  réunies  et  séparées  du  continent  par 
le  seul  passage  de  la  Teignouse  (2). — Ce  serait  plus  ou  moins 


(1)  U/ex  Europœus.  Je  n*ai  vu  dans  ces  tles  ni  VU,  nanusj  ni 
r^.  Ca/h'i  dont  je  parierai  en  terminant. 

(2)  M.  Â.  de  Francheville,  Dtci.  cité,  article  IsU  de  Houaf^ 
page  386.  —  Dans  V Itinéraire^  Siaia  vient  apris  VendiHi  (BeUo- 
Ue).  Ainsi  Siatn  ne  peut  être  que  HouaU  Banville,  Notice  de 
^ancienne  Gauie* 


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en  regard  de  ces  tles  que,  selon  les  opinions  les  plus  plau- 
sibles, ce  me  semble,  de  la  science,  César  aurait  livré  aux 
Vénètes  ce  fameux  combat  qui  décida  de  leur  natio- 
nalité (1). 

Houat  et  Hœdic  étaient-elles  alors  habitées?  Question  in« 
soluble,  faute  de  documents.  Contentons-nous  de  constater, 
d'après  une  tradition  orale  de  Ttle,  qu*à  la  pointe  N.-O. 
d'Hœdic,  sur  le  bord  du  grand  chenal,  le  général  romain  fit 
construire  une  tour  pour  la  protéger  {Er  houh  casiel).  Les 
numismates,  à  diverses  époques  (2),  ont  rencontré  sur  ce 
point  et  sur  d'autres  aussi,  d'Hœdic  et  de  Houat,  des  mé- 
dailles romaines  (Fespo^ien  et  César). 

Tout  ce  que  nous  savons  de  positif  sur  ces  temps  reculés, 
c'est  que  la  civilisation  druidique  y  a  eu  son  règne,  comme 
dans  les  autres  parties  de  la  Bretagne  elle-même,  et  pour 
l'attester,  il  suffit  de  signaler  —  a  Houat,  le  menhir  ou 
peulvan  granitique,  encore  debout  dans  le  champ  qui  porte 


(1)  Mahé  {Essai  sur  les  antiquités  du  Morbihan\  Vannes, 
1825,  page  iT\\  de  Penhonet  (^yr^^  Armoricain^  n.*  47,  page 
444);  Alhénas,  Lycée  Armoricain^  t.  9,  page  239)  s  Carrct  de  la 
Tonr-d'Anvcrgne,  cité  dans  le  mémoire  do  M.  de  Grandpré  (J^îé- 
moires  de  la  Soc,  des  Antiquaires  de  France^  t.  2,  page  345)  ; 
Manct  [Hisi,  de  la  Petite-Breiagne^Btànt'^z\o^  1834, 1. 1,  page 
296)  ;  le  P.  Le  6 allen,  capucin  bellilois  (Ifist.  mainuscntedeBelle^ 
Isle^  1754,  conservée  aux  archives  de  la  mairie  de  Palais.) 

(2)  Lettre  de  M.  de  la  Sanvagère,  ingénieur  en  chef  k  Belle-Isle. 
le  9  mai  1748.  —  Hist.  de  Betle^isle^  du  P.  Le  Gallen,  page  4. 
—  Pondant  les  travaux  des  fortifications,  commencés  depuis  3  ans^ 
on  a  encore  trouvé,  k  Honat,  des  médailles  Divi  Vespasiani^  et 
1^  recteur  a  bien  voulu  me  les  offrir  k  l'appui  de  mon  travaîL 


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son  nom  (l);  — à  BœdiCj  oeux  m^fthirs  en  granit:  Tnn 
{Menhir  er  tan),  do  3  mètres  50  de  hauteur,  2  mètres  60 
de  largeur,  0  mètre  35  d'épaisseur;  Tautre,  dans  Parq  er 
menhir,  de  4  mètres  10  d'élévation^  et  de  2  mètres  30  dans 
la  plus  grande  largeur.  Une  tige  en  fer,  fixée  au  sommet  de 
ce  dernier,  me  ferait  penser  qu  il  devait  être  surmonté  d'une 
croix,  détruite,  ou  par  Toxydation  si  puissante  au  milieu  de 
la  mer,  ou  pendant  les  jours  mauvais  de  93,  époque  où 
Ton  s'efforçait  d'oublier  que  la  croix  fût  le  plus  bel  arbre  de 
la  liberté  qui  eût  jamais  élé  planté  dans  le  monde  (2).  Au 
sommet  de  ce  menhir,  la  main  de  l'homme  a  creusé  une 
petite  niche  qui  renferme  une  statuette  de  la  Sainte-Vierge. 
En  mesurant  ce  monument,  j'admirai  l'heureuse  idée  du 
pasteur  qui,  ne  pouvant  détourner  ses  ouailles  de  venir 
rendre  des  hommages  absurdes  à  la  pierre  brute>  a  cherché 
du  moins  à  les  accoutumer  à  ne  plus  regarder  ce  bloc  que 
comme  le  simple  support  d'une  image,  dont  l'objet  repré- 
senté mérite  seul  nos  respects.  Aux  Rogations,  on  se  rend  en 
procession  aux  pieds  de  cette  statue. 

Pour  en  venir  à  quelque  chose  de  positif,  et  ce  ne  sera 
encore  que  pour  Houat ,  il  nous  faut  arriver  au  séjour  que 
Saint-Gildas  y  fit.  C'était  vers  le  milieu  du  VI.«  siècle.  La 
question  de  savoir  si  cette  île,  dont  il  est  le  patron,  était 
alors  ou  n'était  pas  habitée ,  est  encore  une  question  con- 
troversée. Les  uns  (3)  sont  pour  l'affirmative  en  s'appuyant 

(1)  Il  a  2  mètres 23  de  hauteur,  0  métro  70  de  largeur,  0  mètre 
40  d'épaisseur. 

(2)  i»flr/r«i,  page 2,083. 

(3)  Dom  Lobineatt  (^wdesSS,  de  Bretagne)  i  —  TresvauXi 


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sur  ce  fait  de  la  tradition  que  Saint-Gildas y  instruisit  des 
|)ècheurs.  Les  autres  (i)  combattent  pour  lassertion  con- 
traire ,  en  se  fondant  sur  cet  autre  fait  que  le  saint  n'y  fixa 
son  séjour  que  pour  y  mener  une  vie  solitaire  et  compl^^te- 
raent  inconnue  au  monde.  Jusque-là  rien  qui  s'exclue  ab- 
solument; on  conçoit  parfaitement  qu'il  ait  pu  y  instruire 
des  pôcheurs  venus  d'ailleurs  et  s'y  arrêtant  par  occasion. 
Hais ,  dans  tous  les  cas  ,  si  nous  suivons  le  reste  du  récit 
traditionnel ,  nous  pourrons  sans  doute  conclure  qu'à 
cette  époque  du  moins  lîle  commença  à  être  habitée. 
On  raconte,  en  effet,  qu'à  la  nouvelle  du  saint  caché  sur 
ces  rochers,  un  grand  nombre  de  personnes  vinrent  le 
voir  et  lui  demander  la  permission  de  devenir  ses  dis- 
ciples. Bientôt  l'affluence  fut  telle  qu'il  fut  contraint  de 
chercher  ailleurs  un  plus  grand  espace.  Il  le  trouva  dans 
la  presqu'île  de  Rhuys  et  y  bâtit  un  monastère.  Muis  Houat 
fut  toujours  son  séjour  de  prédilection  ;  il  y  revenait  de 
temps  en  temps  pour  y  recueillir  son  esprit  et  reprendre 
de  nouvelles  forces  dans  la  prière.  Son  ermitage  fut  établi 
dans  le  petit  vallon  nommé  Lèn  er  hoêd  (I  étang  du  bois). 
11  y  avait  fait  élever  une  chapelle  et  il  y  mourut,  le  29 
janvier  de  Tan  570  ,  au  milieu  des  religieux  qu'il  avait  fait 
venir  de  Rhuys  pour  y  entendre  ses  dernières  volontés. 


id. ,  t.  I ,  page  305.  —  Le  Grom  {Bu^é  er  Sœnt)^  Vannes,  1839, 
page  66. 

(i)  Les  BollanJistcs  (^c/a  Sanctorum^  29  janaarii)  : /^i^ir^ 
aliquandiù  soliiariam  duxit  vitam.  —  Baillet  [Vies  des  SS\ 
Pa;is ,  1 724 , 1. 1 ,  page  400).  —  Amëdéo  de  Francbeville  {Nouv. 
Dict.  de  Bretagne  d^Ogée ,  1. 1 9  page  380). 


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~  280  ~ 

Quanta  Hœdic,  la  première  date  de  son  histoire  pourrait 
être,  non  608  comme  le  prétend  Albert  de  lUorlaix  (i) ^ 
mais  le  milieu  du  XL*  siècle,  véritable  époque  (2) 
où  saint  Goustan^  Gunstan  ou  Culstan,  moine  de  Rhuys, 
vint,  avec  un  seul  compagnon  nommé  Budic,  passer  plu- 
sieurs années  en  solitude  dans  cette  île  ,  laquelle,  selon  ce 
chroniqueur  trop  souvent  peu  véridique,  en  ce  temps-là 
estoit  déserte  et  non  habitée  à  cause  de  sa  stérilité  (3). 

Mais  qu^  ces  ermites  fussent  ou  non  les  premiers  habi- 
tants de  cette  île,  toujours  est-il  que  les  moines  de  Rhuys 
y  avaient  conservé  un  pied  à  terre  et  en  furent,  jusqu'à  la 
révolution  de  1789,  les  seuls  souverains  seigneurs.  Ils 
jouissaient  des  mêmes  privilèges  à  Houat  et  dimaient  au 
quart  sur  les  habitants  ;  mais  le  prêtre,  Téglise  et  les  im- 
pôts étaient  à  leurs  charges. 

On  peut  môme  conjecturer  qu'à  une  certaine  époque 
ils  y  eurent  des  communautés  de  quelque  importance.  La 
vaste  enceinte  que  décrivent  encore,  à  Houat ^  les  ruines 
d'une  ancienne  chapelle,  le  soin  particulier  avec  lequel  ces 
constructions  paraissent  avoir  été  faites  (ce  qu'on  ne  re- 
marque pas  dans  u;p  construction  sans  valeur);  —  les 
nombreux  débris  huniains  qu'on  a  trouvés  en  remuant  son 
sol,  dans  la  position  que  l'usage  a  consacré  aux  prêtres;  — 
l'étendue  considérable  d'une  maison  qui  y  attenait  et  of- 
frait une  longueur  de,  25  à  30  mètres  dans  sa  grande  di- 


(0  Fzes  {/es  SS.  de  Bretagne,  Brest,  i837 ,  page  781 . 

(!2)  Lobineau ,  Trcsvanx ,  etc. 

(3)  Albert  de  Morlaix ,  loco  ciiaio. 


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—  281  — 

mensioo;  —  les  dépendances  qui  complétaient  cette  ha- 
bitation,  et  qu'aux  restes  de  murailles  qui  les  enferment, 
OD  a  pu  juger  être  de  2  à  3  hectares  de  surface  ;  —  enfin , 
les  conduits  souterrains  que  des  fouilles  y  ont  mis  à  dé- 
couvert ,  travaux  qui ,  de  leur  nature ,  appartiennent  à  une 
dispendieuse  appropriation  ;  —  tout  porte  à  croire  que 
ceux  qui  y  séjournèrent  ne  pouvaient  être  seulement  les 
pauvres  pêcheurs  dont  les  descendants  peuplent  actuelle- 
ment nie;  tout  y  fait  reconnaître  un  monastère  où  les  re- 
ligieux durent  être  en  nombre. 

A  Hœdic,  des  fouilles  semblables  ont  amené  des  résultats 
analogues  et  nous  permettent  les  mêmes  conclusions.  Trois 
chapelles  s'y  seraient  succédé. 

Ke  demandez  pas,  Messieurs,  de  quelle  époque  pour- 
raient être  ces  constructions ,  car  nous  en  sommes  réduits 
à  ces  tristes  interrogations  de  l'ignorance  et  du  doute  qui 
ne  savent  où  renconter  une  réponse. 

Quelques-unes  de  celles  que  nous  remarquons  à  Houat 
ne  seraient-elles  pas  contemporaines  de  saint  Gildas  ?  Ne 
nous  serait-il  pas  permis  de  supposer  encore  que  les  reli- 
gieux de  Rhuys,  chassés  de  leur  monastère  par  les  Nor- 
mands, lorsqu'ils  vinrent  au  X.^  siècle  envahir  la  Bre- 
tagne et  qu'ils  renversèrent  cette  abbaye,  y  seraient  venus 
chercher   un  asile  et  une   sécurité  qu'ils  n'eussent  pas 
trouvés  ailleurs ,  pas  môme  à  Belle-Ile  ,  et  ne  pourrions- 
nous  pas  y  reconnaître  les  débris  des  édifices  qu'ils  au- 
raient élevés  à  cette  fin  ?  Faut-il  soupçonner,  à  Hœdic,  les 
restes  de  ce  que  saint  Gouslan  et  son  compagnon  durent 
y  construire  pour  leur  piété  et  pour  leur  usage  ?  —  Quoi- 
qu'il en  soit,  sans  pouvoir  rien  donner  de  plus  positif  sur 

20 


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—  282  — 

les  fondateurs  de  ces  antiques  constructions ,  les  conjec- 
tures ne  nous  manqueront  pas  pour  expliquer  les  causes 
qui  en  ont  amené  la  ruine.  Le  temps,  cet  inévitable  des- 
tructeur de  tout  ce  qui  est  abandonné  à  Tindépendance 
de  son  action  ,  les  Normands,  peut-être,  dans  leurs  dévas- 
tations limitrophes;  enfin,  d autres  ennemis  plus  récents, 
je  veux  dire  les  Anglais ,  dont  les  apparitions  désastreuses 
se  succèdent  sans  relâche  dans  le  cours  des  XVI.«  et  XVII.^ 
siècles^  en  voilà  assez  pour  nous  donner  sur  ce  point  une 
réponse  ;  libre  au  critique  de  choisir  entre  ces  hypothèses, 
lorsque  les  certitudes  nous  font  dé&ut.  Arrivons,  toutefois, 
à  cette  époque  désormais  historique ,  dernière  période  des 
souffrances  de  ces  îles  dont  nous  racontons  le  passé. 

Les  auteurs  nous  livrent  les  dates  suivantes ,  dont  quel- 
ques-unes appartiennent  à  nos  îles  sans  contestation  ,  et 
dont  quelques  autres  pourront  être  présumées  leur  appar- 
tenir. 

C'est  d'abord  1548,  où  une  flotte  anglaise  de  24  vais- 
seaux de  ligne  et  de  12  frégates  pille  les  îles  de  Houat 
et  d*Hœdic ,  en  même  temps  que  le  bourg  de  Locma- 
riaker  (1). 

Lorsque  Montgommery,  envoyé  par  la  reine  Elisabeth, 
en  1573,  au  secours  des  Calvinistes  de  La  Rochelle,  vint 
s'emparer  de  Belle-Ile  et  la  garda  pendant  trois  semaines, 
pillant  les  côtes  de  Bretagne ,  ne  sera-t-il  pas  permis  de 
douter  qu'il  ait  respecté  Hœdic  et  Houat,  si  naturellement 
à  la  portée  de  ses  hostilités  ?  Le  furent-elles  davantage  en 


(1)  Ogéc,  DicL  de  Bretagne^  article  lomariaguer^ 


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—  285  ~ 

1673  par  les  Hollandais^  quand ,  sous  la  conduite  de  Ta- 
mirai  Tromp>  ils  occupèrent  Belle-Ile?  Toujours  est-il 
que  Louis  XIV  songea  dès  lors  à  fortifier  ces  deux  îles. 
Yauban  les  visita  en  1688,  et  projeta  les  ouvrages  qui  y 
furent  exécutés  en  1693,  pour  empêcher  surtout  les  cor- 
saires de  s'y  ménager  une  retraite  d'où  ils  auraient  désolé 
le  cabotage.  —  On  construisit  à  Houat  une  batterie  circu- 
laire de  35  mètres  de  diamètre  avec  parapet  en  maçon- 
nerie et  entouré  d'un  fossé  revêtu.   Au  centre  s'élevait 
une  tour  ronde  avec  crénaux  et  mâchicoulis,  composée  de 
trois  étages  au-dessus  du  rez-de-chaussée,  et  de  dix  mè- 
tres de  diamètre.  Cette  batterie  voyait  Tanse  de  Treh  er 
Gaurett^  les  mouillages  de  la  côte  nord  jusqu'à  Parh  Navalo 
et  surtout  le  meilleur  mouillage  de  l'île ,  Le  Parc.  Une 
autre  batterie,  à  la  pointe  de  Porh  Chudely  éclairait  les 
anses  voisines.  Elle  était  en  fer  à  cheval  de  28  mètres  de 
diamètre ,  revêtue  et  fermée  à  sa  gorge  par  un  mur  flanqué 
d'un  redan  avec  fossé  revêtu.  Un  corps-de-garde  et  un 
magasin  à  poudre  étaient  adossés  au  mur  de  gorge  qui 
était  percé  de  crénaux.  —  A  Hœdic ,  une  batterie  circu- 
laire semblable  s'éleva  sur  la  pointe  N.-E.  de  l'île  {Pèn 
gard)  pour  en  défendre  la  rade. 

Quoique  insuffisants  pour  empêcher  un  débarquement , 
ces  forts  ne  devaient  pas  tarder  à  démontrer  leur  utilité. 
Le  4  juillet  1696,  l'amiral  Berckley,  venu  ravager  les 
côtes  morbihannaises ,  fit  débarquer  à  Houat  cinq  cents 
hommes.  Un  lieutenant,  un  sergent  et  quinze  soldats  dé- 
fendaient la  tour  ;  mais  leur  chef  fit  si  bien  servir  le  ca- 
non et  répondit  avec  tant  de  fermeté  à  la  sommation  que 
lui  fit  un  trompette  de  se  rendre,  que  les  assiégeants 


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—  284  — 

n'ayant  point  de  pièces  assez  fortes  pour  &ire  brèche  à 
cette  tour,  durent  se  contenter  d'enlever  le  bétail  (300 
pièces,  dit  un  historien  anglais)  (1),  après  avoir  brûlé  ht 
chapelle  et  les  chaumières  (2).  Us  passèrent  de  là  à  Hœdic 
et  lui  firent  subir  le  même  sort.  Dans  Tuneel  l'autre  île, 
à  la  vue  du  danger ,  les  habitants  avaient  trouvé  uo  asile 
au  sein  des  fortifications. 

En  1703,  les  Anglais  reparurent  encore  dans  ces  pa- 
rages, ne  firent  que  quelques  prises  à  Groix,  et  ne  jugèrent 
pas  à  propos  de  faire  une  nouvelle  descente  à  Bouat  ei  à 
Hœdic  (3).  Mais  trois  ans  plus  tard  ils  devaient  être  plus 
heureux  contre  les  forts  de  ces  lies  qu'ils  ne  lavaient  été 
en  1696. 

Jaloux  de  voir  l'importance  toujours  croissante  de  Lo- 
rient  leur  faire  ombrage,  ils  tentent  en  vain  de  détruire 
ce  port,  et  de  dépit  viennent  (1746)  porter  la  désolation 
sur  nos  côtes  :  onze  villages  deviennent  à  Quiberon  la  proie 
des  flammes;  un  grand  nombre  de  navires  qui  se  trouvaient 
dans  les  havres  sont  coulés  bas.  Houat  et  Hœdic  devaient 
encore  souffrir  de  leur  présence. 

Le  20  octobre ,  Tamiral  Lestock  fit  embosser  trois  vais- 
seaux dans  Tanse  principale  de  Houat.  II  envoya  une  fré- 
gate sommer  de  se  rendre  l'ofiicier  qui  commandait  dans 
le  fort  dont  nous  avons  parlé.  Cet  officier  refusa  d'abord; 


(1)  Thomas  Lediard ,  ffisi.  navale  de  tJngleterte.....^  tra- 
duite de  TaDglais,  Lyon,  175J ,  t.  3,  pages  214  et  215.  11  donoe 
au  vilUge  do  Uouat  lo  nom  pompenx  de  viiie, 

(2)  Lo  P.  Le  Gallen,  //fW.  de  Belie-Ish^  pages  19  et  77. 

(3)  id.^  page  85, 


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—  285  — 

mais  le  lendemain ,  après  une  heure  de  canonnade ,  il  se 
rendit  prisonnier  de  guerre  avec  les  36  hommes  de  la  mi- 
lice de  Mayenne  qui  formaient  la  garnison  de  cette  tour. 
Ce  fort,  défendu  par  quinze  braves,  avait  lutté  contre 
500  hommes,  pendant  six  jours,  en  juillet  1696  ;  il  pou- 
vait tenir  alors  un  mois  sans  tirer  un  coup  de  fusil ,  tant 
que  l'ennemi  ne  Teût  point  attaqué  par  terre.  Le  22 ,  la- 
miral  envoya  porter  cette  garnison  de  lâches  à  BelIe-Ue; 
mais  le  comte  de  Saint-Cernin  qui  y  commandait  alors,  la 
refusa ,  disant  qu'il  ne  voulait  point  recevoir  de  troupes 
françaises  qui  n'avaient  pas  une  seule  goutte  de  sang  à 
verser  pour  leur  Roi.  L'amiral,  ne  voulant  point  aussi  s*en 
charger,  jeta  ces  96  hommes  et  lofficier  à  Quiberon.  L'of- 
ficier fut  arrêté,  jugé  en  conseil  de  guerre  et  condamné 
à  21  ans  de  prison ,  après  avoir  été  dégradé  (1). 

Le  24 ,  Hcedic  se  rendit  aussi  lâchement;  le  26 ,  la  tour 
s'écroulait  sous  les  explosions  de  la  mine  ;  et ,  le  lendemain, 
celle  de  Houat  n'offrait  plus  qu'un  monceau  de  ruines.  Les 
ennemis  ne  firent  pas  d'autres  dégâts  dans  nos  îles. 

Dix  ans  plus  tard ,  Louis  XV  songea  à  y  faire  consti'uire 
des  forts  susceptibles  d'une  meilleure  défense.  Les  batte- 
ries circulaires  sur  les  mêmes  emplacements  furent  réta- 
blies :  on  supprima  les  tours  qui  en  occupaient  le  centre, 
on  ferma  chacune  de  ces  batteries  i  la  gorge  par  un  petit 
ouvrage  à  cornes,  entièrement  casemate,  avec  une  demi- 
lune  ,  fossés  et  chemin  couvert ,  et  présentant  deux  étages 


(I)  Ogéc ,  article  Tsie  de  Houat.  —  Le  P.  Le  Gallen,  Hisf.  de 
Melle^Iêie^  page  93. 


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—  286  — 

de  créneaux  et  une  plate-forme  pour  rartillerie.  Les  case- 
mates donnaient  des  abris  suffisants  pour  une  garnison  de 
50  hommes  et  les  approvisionnements  nécessaires.  Le  fort 
de  Houat ,  commencé  en  1756 ,  fut  entièrement  terminé  en 
i758;  celui  d'Hœdic,  commencé  en  i759,  fiit  élevé,  en 
1760, à  un  mètre  au-dessus  du  sol  des  casemates  de  letage, 
et  n'a  jamais  été  achevé.  La  batterie  de  VEscudel^  à  Houat, 
ne  fut  pas  rétablie. 

Pendant  ces  travaux  de  fortifications,  nos  insulaires 
furent  témoins  de  la  honteuse  déroute  du  maréchal  de 
Conflans.  On  sait  que  le  20  novembre  1759,  pendant  qu*à 
la  tète  des  escadres  réunies  de  Rochefort  et  de  Lorient,  il 
essayait,  par  une  fuite  simulée,  d'attirer  Tennemi  sur  les 
bas-fonds,  il  aperçut  bientôt  son  arrière-garde,  elle-même, 
attaquée  à  une  lieue  d'Hoedic.  La  déroute  devint  sérieuse, 
et  dans  la  confusion  avec  laquelle  elle  se  fit,  les  vaisseaux 
du  centre  vinrent  se  briser  sur  les  rochers  d'Uœdic  et  de 
Houat,  ou  entrèrent  dans  la  Vilaine.  Le  souvenir  de  ce  feit 
nous  est  resté  sous  le  nom  flétrissant  de  Bataille  de  M. 
Conflans. 

Durant  le  siège  de  Belle-Ile,  en  1761,  parles  Anglais, 
le  fort  de  Houat,  gardé  par  250  hommes  et  celui  d'Hœdic 
par  100  hommes,  firent  respecter  ces  deux  îles.  Ce  ne  fut 
qu'après  la  reddition  de  la  citadelle  de  Belle-Ile,  que  ces 
forts ,  livrés  à  eux-mêmes  et  sans  espoir  d'être  secourus, 
finirent  par  se  rendre.  À  la  paix  de  1763,  les  Anglais  remi- 
rent ces  forts  dans  le  même  état. 

Chaque  curé,  en  temps  de  paix,  occupait  dans  son  tle  le 
logement  du  commandant  du  fort,  et  recevait  comme  gar- 
dien quelques  gratifications.  Celui  d'Uoxlic eut,  en  1781, 


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—  287  ~ 

uoe  occasion  éclatante  de  montrer  son  patriotisme  et  de 
marcher  sur  les  traces  d'un  de  ses  confrères  de  Croix.  La 
population  boedicaise  animée  par  ses  conseils,  enthousias- 
mée par  sa  présence  et  sa  fermeté,  soutint  plusieurs  atta- 
ques contre  les  Ânglaiset  sauva,  par  sa  résistance,  plusieurs 
navires  chargés  pour  le  compte  du  Roi.  Le  maréchal  de 
Castries  écrivit  au  curé,  capitaine  improvisé,  une  lettre  de 
félicitations,  et  lui  envoya,  au  nom  de  Louis  XVI,  une  gra- 
tification de  150  livres.  Chaque  insulaire,  qui  avait  contri- 
bué à  repousser  l'ennemi,  reçut  12  livres  du  même  mo- 
narque. 

Le  manuscrit  qui  nous  transmet  de  Belle-Ile,  à  la  date 
du  7  juillet  1786,  le  récit  de  cette  belle  action,  ajoute  que 
depms  1761  que  les  farls  sont  pour  ainsi  dire  abandonnés 
et  à  la  di^sition  des  habitants ,  on  n'a  pas  trouvé  un  seul 
dou  de  moins ^  ni  un  morceau  de  planches  enlevé  de  ces 
forU. 

Tels  sont  les  derniers  événements  que  nous  ayons  à 
remarquer  avant  l'époque  de  nos  désastres  révolutionnaires, 
qui  ont  été  partout  une  date  plus  ou  moins  malheu- 
reuse. 

Les  passions  haineuses  qui,  excitées  par  le  philosophisme 
contre  le  clergé  et  la  noblesse,  se  traduisaient  par  la  pro- 
scription et  l'écba&ud,  étaient  inconnues  des  habitants 
de  Houat  et  d'Hœdic  ;  mais  des  patriotes  du  continent  ve- 
naient, de  temps  en  temps,  visiter  ces  rochers  pour  purifier^ 
disaient-ils,  le  sol  de  la  patrie ,  anéantir  les  symboles  et 
les  hochets  de  la  superstition  et  du  fanatisme^  et  réhabiliter 
enfin  le  seul  culte  légitime,  celui  de  la  déesse  Raison.  Là 
donc,  comme  sur  la  grande  terre^  le  prêtre,  qui  avait  refuse 


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—  288  — 

le  serment  à  la  ComtiltUiim  civUedu  clergé^  devait  toujoars 
être  sur  ses  gardes  à  rapproche  d'un  bateau  ou  d'un  canot 
étrangers.  —  Â  Houat,  jusqu'en  1795,  Ttle  nes*est  guère 
ressenti  de  Tagitation  révolutionnaire.  Le  prêtre,  M.  J.-M. 
Lorcy,  âgé  de  34  ans,  fut  saisi  avec  les  vases  sacrés,  inscrit 
sur  la  liste  des  ecclésiastiques  bretons  déportés  à  Rochefort, 
en  1794  (i);niais  il  trouva  le  moyen  de-  s'évader  et  de 
revenir  à  son  poste  pour  y  mourir  victime  de  sa  charité  (2). 
—  À  HcBdic,  M.  Jean  Harion ,  digne  successeur  du  curé 
dont  nous  citions  tout-à-l'heure  la  vaillance,  avait  pris  pos- 
session de  la  cure,  en  1786.  Il  y  resta  constamment  au 
milieu  de  son  troupeau  ;  mais  souvent  il  fut  obligé  de  se 
cacher  et  de  dérober  sa  tête  aux  recherches  des  émissaires 
républicains.  J'aurai  tout^à-l'heure  occasion  de  raconter  les 
services  qu'il  a  rendus  à  ses  concitoyens. 

Je  trouve  sur  la  longue  liste  de  ceux  qui  ne  voulurent 
pas  se  faire  absoudre  de  leurs  vertus  en  se  souillant  d'un 
crime  et  qui  préférèrent  la  mort  à  l'apostasie,  un  ancien 
recteur  d'Hœdic,  M.  Le  Manour,  traduit  au  commence- 
ment de  mars  1795  au  tribunal  criminel  du  département 
du  Morbihan  avec  un  de  ses  confrères  de  Pontivy,  M. 
Robin  :  ils  furent  exécutes  l'un  et  l'autre  à  Vannes ,  le  3 
mars  1796  (3). 

C'est  ici  le  lieu  de  rappeler  ce  qui  appartient  à  nos  in- 


(i)  Trcsvaux,  ffisL  de  la  persécution  révolutionnaire  en 
Bretagne^  t.  2,  pago  521. 

(2)  Il  n'y  eut  point  deprêtro  h  Uouat  depuis  juillet  1795  à 
décembre  1797^  —depuis  1802  k  1805,  et  depuis  1808  k  1810. 

(3)  Tresvaax,  loc.  cit.,  pages  220  et  223. 


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—  289  — 

sulaires  dans  les  suites  du  trop  fameux  événement  de  Qui- 
beron.  Le  25  juin  (7  meisidor)  1795,  au  sud  des  files 
d'Hœdic  et  de  Houat,  on  voit  paraître  une  flotte  anglaise 
sous  les  ordres  de  l'amiral  sir  John  Warren.  Elle  est  sou- 
tenue par  celle  de  l'amiral  Bridport;  elles  viennent  de 
ibrcer  ensemble,  par  d'habiles  manœuvres,  Villaret- Joyeuse 
à  combattre  malgré  lui  dans  les  eaux  de  Belle-Ile  ;  et  après 
avoir  fait  perdre  3  vaisseaux  à  l'amiral  français  (23  juin)  ^ 
les  voilà  qui  s'avancent  devant  nos  files  jusque  dans  cette 
magnifique  baie  de  Quiberon,  témoin  18  siècles  aupara- 
vant des  victoires  de  César.  Le  27  (9  messidor) ,  elles  dé- 
barquent sans  opposition  sur  la  plage  de  Carnac  plus  de 
4,000  émigrés.  —  Le  19  juillet,  une  seconde  division,  sous 
les  ordres  de  Sombreuil,  met  pied  à  terre  à  Quiberon.  — 
Je  ne  vous  raconterai  point  les  divers  épisodes  de  ce  drame 
sanglant.  En  revoyant  naguère  ces  lieux  désolés  et  cou- 
verts de  sang  français,  vivement  ému  des  scènes  qui  s'y 
étaient  passées,  j'avais  au  moins  la  consolation  de  me 
dire,  avec  A.  Gabourd,  que  «  dans  cette  longue  et  fu- 
»  nèbre  lutte,  les  fils  de  la  France,  tous,  ou  du  moins 
»  presque  tous,  s'étaient  montrés  dignes  d'elle  par  un 
B  courage  intrépide  dans  le  combat.  Soldats,  généraux, 
»  émigrés,  royalistes,  républicains,  tous  avaient  com- 
»  battu  avec  l'opiniâtreté  du  dévouement.  j>  De  part  et 
d*auire  brûlait  au  fond  des  cœursj  mais  som  une  forme 
dijftre^ite^  mime  amour  de  la  patrie  et  de  la  liberté  (!) , 


(0  De  Wismes.  La  Vendée^  albun  in-folio.  latroâuctioii» 
page  29. 


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—  290  — 

et  si  une  marque  d'infamie  et  de  sang  termina  cette  prge 
glorieusement  commencée ,  si  mes  excursions  et  mes  sou- 
venirs récents  me  rappelaient,  malgré  moi ,  Vannes ,  Au- 
ray  et  la  prairie  de  Tréauray  (l),  je  me  disais  avec  bon- 
heur que  les  soldats  de  Hoche  ne  furent  du  moins  ni  les 
provocateurs,  ni  les  complices  de  ce  dénouement  fatal: 
ils  se  bornèrent  à  combattre  et  à  mourir.  Ma  mémoire  me 
rappelait  avec  plaisir  la  lettre  du  chef  de  bataillon  Douil- 
lard  (2)  au  général  Lemoine ,  chargé  de  faire  exécuter  les 
ordres  impitoyables  de  la  Convention.  Mon  cœur  était  sou- 
lagé en  songeant  que  les  sentiments  de  Douillard  avaient 
été  partagés  par  ses  compagnons  d*armes  (3),  et  que, 
pour  remplir  le  rôle  de  meurtriers,  Lemoine  n'avait  pu 
rencontrer  que  des  Belges  et  des  Liégeois,  ignobles  et  là- 


(1)  Aujourd'hui  /e  Champ^des-Mortyrs. 

(2)  Auray ,  2  août  1795.  — -  Citoyen  général ,  j'aime  bien  la  Ré- 
publique; je  déteste  les  ex-nobles  et  les  chouans.  Je  les  combat- 
trai jusqu'à  la  mort  \  mais  sur  le  champ  de  bataille  j'ai  voulu  les 
épargner  :  j'ai  prononcé  avec  tous  mes  camarades  le  mot  de  capi- 
tulation honorable.  La  République  ne  croit  pas  devoir  reconnaître 
le  vœu  de  ses  soldats,  je  no  puis  pas  juger  ceux  que  j'ai  absous  le 
sabre  k  la  main. 

(3)  Lemoine  ne  pouvant  plus  se  faire  obéir  écrivait,  le  15  août, 
aux  représentants  et  au  général  en  chef,  qu'il  ne  trouvait  pins  dans 
la  garnison  aucun  officier  pour  remplacer  les  commissaires  qu'il 
avait  été  forcé  de  destituer.  —  Ml^l.Pradal,  Fayard,  Saint-Clair, 
le  capitaine  Laprade  et  son  frère ,  chef  de  bataillon ,  repouasërent 
cet  odieux  office.  Pour  être  vrai,  je  dois  ajouter  que  des  volon- 
taires de  Paris,  d'Arras  et  de  la  Gironde  acceptèrent  la  tftche  que 
leurs  compagnons  d'armes  répudiaient. 


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—  291  — 

ches  auxiUaires ,  horde  de  pillards,  me  répétait  naguère 
encore  un  sous-oflicier  de  la  Légion  nantaise  (U.  Meuret)  , 
que  nau^  ne  pouvions  faire  avancer  sur  le  champ  de  ba- 
taille contre  les  émigrés;  mais  qui  y  après  notre  victoire, 
se  chargèrent  volontiers  d'une  facile  vengeance  et  de  désho- 
norer  nos  sentiments  d  humanité.  N'avais-je  pas  lieu  de 
m'écrier  avec  Rouget-de-l  Isie ,  spectateur  étonné  et  té- 
moin non  suspect  de  la  lutte  de  Quiberon  :  Temps  déplo- 
rable! malheureuse  France,  qui  voyait  armés,  pour  se  dé- 
chirer et  s  égorger  entre  eux,  ses  enfants  les  plus  dignes  de 
la  servir  et  de  mourir  pour  elle! 

Mais  quittons  ces  lieux  où  tant  de  preux  succombèrent, 
et  revenons  vers  nos  îles  avec  Tescadre  anglaise  chargée 
des  débris  échappés  à  la  victoire  de  Hoche.  Elle  a  pu,  à 
Taidedeses  petites  embarcations,  recueillir,  souvent  jus- 
que sous  le  feu  des  républicains ,  un  grand  nombre  de 
blessés  et  de  fugitifs.  Les  premiers  sont  dirigés  sur  FAn- 
gleterre  (1);  les  autres,  au  nombre  de  plus  de  3,000, 
sont  divisés  en  deux  catégories  :  les  800  non  combattants, 
en&nts,  femmes  et  vieillards,  restent  à  bord  des  bâtiments 
de  transport  ;  les  officiers  et  les  soldats  insurgés  (au  nombre 
de  1,400) ,  ou  émigrés  à  la  solde  de  l'Angleterre  (au  nom- 
bre de  900) ,  descendent  à  une  lieue  plus  bas  dans  la 
baie,  et  sont  déposés  à  Houat.  Ces  malheureux  avaient 
abandonné  un  riche  butin  aux  vainqueurs;  il  ne  leur  res- 
tait pour  partage  que  le  dénûment  le  plus  complet.  Us 


(1)  Cbasle  de  la  Touche,  Relation  du  Désastre  de  Quiberon^ 
Paris,  1838,  page  142. 


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—  292  — 

n*avaient  pas  de  linge  de  rechange ,  et  celui  qui  les  cou- 
vrait avait  trempé  dans  la  mer  et  était  tout  imprégné  de 
sel.  Li^s  Anglais ,  les  Houatais  distribuèrent  à  tous  les  vê- 
tements et  ie  linge  de  première  nécessité ,  et  les  paysans 
à  bord  furent  Tobjet  des  mômes  attentions. 

Hœdic  ne  fut  occupée  que  par  les  hussards  deWarren  (1)^ 
sous  les  ordres  du  comte  de  Marconnay.  Sir  Warren  et 
Puisaye,dans  la  visite  qu'ils  y  firent,  ne  jugèrent  pas  à 
propos  d'y  envoyer  d  autres  troupes;  ils  avaient  besoin  de 
Teau  si  bonne,  si  abondante  de  cet  îlot  pour  le  service  de 
Tescadre  ou  pour  suppléer  mèmeàleau  de  Houat,si  elle 
venait  à  manquer. 

D'autres  préoccupations  agitaient  encore  sir  Warren.  La 
disette  de  vivres,  les  douloureuses  émotions  du  combat  et 
surtout  de  la  défaite  développèrt-nt  bientôt  à  Houat  une 
épidémie  meurtrière.  Il  fallut  bien  vile  songer  à  la  création 
d'hôpitaux,  et  l'absence  de  médecins  et  de  médicaments 
laissa  un  libre  cours  aux  ravages  de  cette  fièvre  putride  et 
nerveuse.  Elle  attaqua  presque  tout  le  monde.  Ceux  qui 
avaient  séjourné  longtemps  dans  l'eau  furent  les  premiers 
et  les  plus  fortement  atteints.  Dans  l'espace  d'un  mois,  elle 
enleva  plus  de  1,200  personnes.  Les  insulaires  ne  furent 
pas  plus  épargnes  que  les  autres;  13  Houatais  succombè- 
rent. Dans  cette  calamité,  le  recteur  de  l'île,  M.  Lorcy, 
prodigua  aux  grands  comme  aux  petits,  aux  Houatais 
comme  aux  étrangers  (il  ne  voyait  en  eux  que  des  frères 


(I)  Mémoires  da  comte  Joseph  de  Pnisaye.  Londres,  1807  et 
1808,  t.  6,  page  613. 


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—  293  -- 

malheureux) ,  ses  soins  les  plus  assidus.  Le  fléau  ne  res- 
pecta pas  son  zèle ,  et  il  alla ,  le  4  brumaire ,  rejoindre  au 
ciel  ceux  qu'il  avait  consolés  sur  leur  lit  de  douleur  et  dont 
il  avait  béni  le  cercueil.  Personne  ne  se  chargea  alors  d'en- 
registrer ceux  que  la  mort  moissonnait,  et  c'est  M.  Chaste 
de  la  Touche ,  ancien  maire  de  Belle-Ile-en-Mer  (1),  qui 
ra*en  fait  connaître  le  chiffre.  Cette  épidémie ,  après  le  dé- 
part des  vaincus ,  se  fixa  dans  l'île  jusqu'en  1800,  et^  dans 
cet  intervalle,  Houat  eut  encore  à  déplorer  la  mort  de  plu- 
sieurs de  ses  habitants. 

M.  Puisaye  fut  condamné  à  vivre  sur  cet  îlot  parmi  les 
tristes  débris  de  son  armée  que  dévoraient  la  misère  et  la 
maladie,  a  S'il  s'était  (ait  des  illusions,  nous  dit  M.  Cbasle 
»  de  la  Touche,  sur  le  résultat  qu'aurait  pour  lui  sa  fuite, 
j»  elles  durent  être  promptement  dissipées  :  les  officiers  qui 
»  arrivèrent  après  lui  à  Tescadre  accusèrent  hautement  de 
j»  leurs  malheurs  son  impéritie  et  sa  lâcheté  ;  il  fut  honni 
»  et  bafoué.  Sir  John  Warren  l'avait,  dès  le  premier 
»  abord ,  fort  mal  accueilli  ;  il  finit  par  lui  déclarer  que  ses 
»  vaisseaux ,  ni  même  l'Angleterre ,  ne  pouvaient  plus  lui 
j»  offrir  un  asile ,  et  qu'il  ne  lui  restait  d'autre  avenir  que  de 
»  regagner  la  confiance  des  insurgés  en  rendant  à  la 
»  cause  royale  assez  de  services  pour  faire  oublier  ses 
»  torts.  Dès  le  lendemain,  il  fut  déporté  à  Tile  de  Houat. 
»  II  dut  y  vivre  dans  le  chagrin  et  les  remords,  tout  en 


(1)  Reialion  du  Désastre  de  Quiàeron  ^  page  142.— Le  comte 
de  Yaaban,  zélé  défenseur  de  Puisaye,  intérofisé  dès  lors  k 
diminuer  le  nombre  des  viotimes,  le  fait  monter  k  environ  709  « 
page  176. 


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—  294  — 

»  luttant  contre  les  besoins  et  les  dangers.  Poursuivi  par 
»  les  malédictions  et  le  désespoir  de  ses  compagnons 
»  d'exil ,  et  souvent  par  des  menaces  inquiétantes  pour  sa 
»  vie ,  il  se  hasarda ,  pour  s'y  soustraire ,  i  débarquer  furti- 
»  vement  (le  8  septembre)  sur  la  côte  du  Morbihan,  à  tra- 
»  vers  la  rigoureuse  surveillance  qu  on  y  exerçait.  Partout 
»  il  rencontra  le  mépris,  l'insulte  et  la  haine.  Les  émigrés 
0  moururent  en  le  maudissant,  eu  appelant  la  vengeance 
»  sur  sa  tète  ;  les  insurgés  y  répondirent  par  les  mêmes 
»  sentiments  ;  ils  le  condamnèrent  à  mort  et  l'auraient  fu- 
»  sillé  si  son  éloquence  n'eut  attendri  Mercier-la- Vendée, 
»  qui  le  laissa  échapper  et  qui  s'en  repentit  ensuite.  » 

Les  paysans ,  les  femmes  et  les  enfants  qui  gémissaient 
à  bord  des  vaisseaux  de  transport  soupiraient  vivement 
après  le  moment  où  ils  seraient  rendus  à  la  liberté.  Les 
démarches  de  l'amiral  auprès  des  autorités  républicaines 
furent  couronnées  de  succès,  et  cette  immense  popula- 
tion put,  sans  crainte,  retourner  dans  ses  foyers  (f).  — 
Les  autres  exilés  à  Uouat,  plus  ou  moins  compromis, 
continuèrent  à  crier  et  à  se  plaindre.  La  lettre  écrite  d'Au- 
ray  (22  juillet)  par  le  comte  Ch.  de  Sombreuil  au  général 
Hoche  pour  la  faire  tenir  à  sir  Warren^  vint  augmenter  leur 
désespoir.  Quelle  impression  ne  devait  pas  faire  sur  une 
multitude  malheureuse ,  déjà  trop  convaincue  que  la  cause 


(I)  Vauban....,pag6  193.  —Les  Anglais  viennent  (le  3!  juillet) 
de  nous  envoyer  douze  cha8fte>marée8  portant  1,500  vieillards 
chouans  «  femmes  et  enfants.  Ces  derniers  ont  été  mis  en  liberté 
par  le  représentant  du  peuple  Blad,  {Lettres  de  Biad  et  de 
Hoche  au  Comité  de  Salut  public) 


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—  295  — 

de  ses  maux  devait  être  attribuée  aux  prétentions  jalouses 
des  généraux,  à  leur  mésintelligence,  au  défaut  d'en- 
semble de  leurs  opérations,  Topinion  d'un  jeune  chef 
dont  elle  connaissait  la  bravoure  et  qui  venait  rejeter  sur 
Puisaye  les  désastres  dont  elle  était  la  victime  et  le  fla- 
gellait des  épithètes  de  lâche  et  de  traître.  Les  défenseurs 
de  Puisaye  n'épargnèrent  point,  à  leur  tour,  d'Uervilly  et 
Sombreuil ,  ei  ces  récriminations  ne  cessèrent  que  vers  la 
mi-août,  époque  où  le  départ  des  uns  et  des  autres,  soit 
pour  l'Angleterre ,  soit  pour  le  continent  où  ils  se  faisaient 
débarquer  en  secret,  rendit  enfin  à  Houat  le  calme  et 
la  tranquillité. 

Pendant  ce  temps,  le  commodore  anglais  avait  fait 
prévenir  Charette  de  l'ordre  qu'il  avait  de  lui  fournir  les 
armes,  munitions  et  effets  d'équipement  dont  étaient  en- 
core chargés  les  bâtiments  de  transport  qui  avaient  amené 
le  comte  de  Sombreuil  ;  et  le  débarquement  s'opéra  à  Saint- 
Jean-de-Hont,  le  10  août  1795. 

Le  10  septembre,  la  mer  parut  encore  couverte  de  vais- 
seaux :  c'était  la  3.^  division  des  émigrés  qui  venait  avec 
le  comte  d'Artois  (plus  tard  Charles  X)  opérer  sa  jonction 
dans  la  baie.  Quelques  jours  passés  en  i^econnaissance,  dé- 
libérations et  correspondances ,  retinrent  dans  ces  parages 
toutes  les  forces  anglaises  et  les  cent  cinquante  voiles  du 
comte  d'Artois.  Ce  prince  se  fit  débarquer  à  Tile  de  Houat, 
y  reçut  des  députations  de  plusieurs  villages  situés  sur  la 
côte  du  Morbihan ,  et  fit  aussitôt  célébrer  un  service  fu- 
nèbre pour  honorer  la  mémoire  de  Sombreuil  et  de  ses 
I;  raves  et  infortunés  frères  d'armes.  Il  mit  aussi  pied  à 
terre  à  Hœdic,  et  une  cérémonie  semblable  y  eut  lieu  en 


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—  296  — 

sa  présence.  Une  nouvelle  tentative  sur  les  côtes  du  Mor- 
bihan n'était  pas  possible ,  un  plus  long  séjour  ne  l'était 
pas  non  plus.  Le  comte  d'Artois  appareilla  donc  avec  toutes 
les  forces  dont  il  put  disposer,  monta  sur  le /a^on^  et  ar- 
riva le  2  octobre  à  Tlle  Dieu,  avec  son  état-major;  Ta- 
miral  Warren,  avec  une  partie  de  sa  flotte^  l'avait  précédé 
le  29  et  le  30  septembre,  et  avait  débarqué  7  à  800 
émigrés  et  4,000  hommes  de  troupes  britanniques.  On 
connaît  le  résultat  des  lenteurs  inouïes,  des  mesures  mal 
concertées,  de  la  perfidie  peut-être  des  Anglais,  ]ieui- 
étre  encore  de  l'indécision  du  prince;  du  moins  ces  deux 
soupçons  furent  émis  et  soutenus.  Toujours  est-il  que  le 
comte  d'Artois  remonta,  le  18  novembre,  à  bord  du 
Jasofin  reparut  devant  Hoadic  et  Houat,  le  30  du  même 
mois,  pour  suivre  bientôt ,  en  Angleterre ,  le  duc  de  Bour- 
bon, resté  seulement  quelques  jours  dans  la  baie. 

Pendant  ces  diverses  expéditions,  les  Anglais  station- 
naient néanmoins  devant  nos  îles.  Beaucoup  de  vaisseaux 
de  transport,  quelques  vaisseaux  et  frégates  et  trois  cha- 
loupes canonnières  y  restèrent  en  observation;  et,  à  son 
retour  de  l'île  Dieu ,  l'escadre  anglaise,  composée  de  16 
vaisseaux  de  ligne ^  6  frégates,  sans  compter  les  corvettes, 
cotres  et  autres  bâtiments  légers,  passa  l'hiver  dans  la 
baie  et  dans  les  Courreaux.  Pour  se  mettre  plus  à  Taise, 
une  grande  partie  des  troupes  descendit  à  Houat.  Sur  tous 
les  points  de  l'île  s'élèvent  des  tentes  sur  lesquelles  flot- 
tent les  couleurs  de  TAngleterre  et  de  l'ancienne  monar- 
chie. Jamais  ces  arides  rochers  n'avaient  vu  une  population 
si  nombreuse  (i).  L'amiral  méditait  un  coup  de  main  sur 

(l)  Les  bestiaux  des  deux  ttei  devinrent  leur  nourriture*  On  m 


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—  297  — 

BeUe-IIe;  mais  il  n'osa  s'exposer  à  un  échec  probable  tant 
étaient  fermes  les  réponses  du  commandant  Boucret  aux 
propositions  du  Commodore  Ellison,  du  26  juin  et  du  16 
juillet;  et,  après  avoir  pris  la  précaution  de  foire  sauter,  à 
Uouat  et  à  Hœdic,  les  forts  dont  nous  avons  parlé,  il  ap- 
pareilla pour  TAngleterre,  le  27  décembre,  emmenant  les 
derniers  débris  de  l'armée  de  Monsieur;  et  l'ile^  naguère 
si  bruyante,  rentra  de  nouveau  dans  le  silence  et  la  paix. 
Ce  ne  devait  pas  être,  il  est  vrai,  pour  longtemps;  car, 
dès  le  commencement  de  mars  suivant  (1796),  une  divi- 
sion anglaise  vint  se  fixer  pendant  six  semaines  dans  ces 
parages,  et  débarqua  sur  le  continent  des  munitions  et  de 
l'argent  pour  les  insurgés  (1). 

Nous  retrouvons  encore,  en  juin  1800,  sir  Edward 
Pellew  avec  sept  vaisseaux,  cinq  frégates  et  cinq  transports, 
portant  cinq  mille  hommes  de  troupes  opérant  un  débar- 
quement dans  la  baie  de  Quiberon.  Il  reprit  la  mer  après 
avoir  commis  quelques  dégâts» 

Enfin  ,  dans  les  Cent- Jours,  nous  dit  M.  Chasle  de  la 
Touche,  les  Anglais  reparurent  en  maîtres  dans  la  baie 
de  Quiberon  ,  s'adressant  aux  puissantes  sympathies  bour- 
bonniennes  des  populations  du  Morbihan,  comme  ik 
avaient  &it  en  179^5  ;  mais  cette  fois  avec  plus  de  succès, 
parce  que  les  éloquents  souvenirs  de  Quiberon  comman- 


laissa  vivre  que  ceax  qui  étaient  abBoloment  Béceiaairefl  à  la  csl- 
tore  da  sol. 
(1)  Annales  manuscntes  dt Hœdic  y  année  1795. 

21 


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—  298  — 

daient  aux  royalistes  de  pénétrer  de  vive  force  jusqu*à  la 
mer  pour  recevoir  le  secours  des  Anglais ,  et  de  rentrer 
immédiatement  dans  Tintérieur  des  terres. 

Pendant  les  guerres  de  la  République  et  de  l'Empire , 
nos  deux  îles,  sans  moyens  de  défense^  et  privées  d'une 
garnison  française ,  furent ,  dit  H.  de  Francheville ,  par 
une  espèce  de  convention  tacite ,  regardées  en  quelque 
sorte  comme  un  pays  neutre.  Les  croiseurs  Anglais  avaient 
pour  habitude  de  venir  mouiller  dans  la  rade  d*Hœdic.  Ils 
déposaient  dans  cette  tie  leurs  blessés,  leurs  malades;  ils 
y  enterraient  leurs  morts.  Une  portion  de  la  côte  conserve 
encore  aujourd'hui  le  nom  de  Cimetiire  des  Anglais  (Béred 
en  ÀnglcBs).  Je  ne  puis  ajouter,  nvec  le  même  auteur,  que 
les  insulaires  houatais  et  hœdicais^  ayant  plusieurs  fols 
porté  secours  à  des  équipages  anglais  en  péril  pouvaient , 
avec  une  simple  passe  signée  de  leurs  recteurs  ^  pêcher  et 
naviguer  sans  crainte  d'être  retenus  prisonniers  de  guerre  » 
car  jamais  les  recteurs  ne  donnaient  de  passe.  Les  Hœdi- 
cais ,  les  Houatais  étaient  pris  comme  les  autres  Français 
par  les  péniches  de  l'ennemi  ;  mais  les  recteurs  fidèles  à 
une  belle  mission  patriotique ,  ne  réclamaient  pas  en  vain 
leurs  paroissiens  auprès  des  autorités  supérieures.  Néan- 
moins ,  souvent  les  chaloupes  des  tlois  ,  quand  cela  con- 
venait pour  faire  des  prises ,  étaient  arrêtées  par  les  chefs 
subalternes  ;  plus  souvent  encore,  leur  pêche ,  quand  Ten- 
nemi  venait  à  passer  près  des  filets ,  était  enlevée.  Cepen- 
dant, les  cbe&  supérieurs,  nous  devons  le  dire,  fiiisaîent 
exactement  respecter  la  neutralité  ;  lorsqu'ils  venaient  à 
terre ,  ils  mettaient  l'ordre  partout ,  faisaient  bonne  et 


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—  299  — 

prompte  Jtistice  des  maraudeurs  et  des  pillards,  et  savaient 
écouter  les  plaintes  des  habitants  (i). 

Et  vous  aussi ,  pauvres  marins  du  continent,  qui  n'avez 
d'autres  moyens  d'existence  que  vos  pénibles  voyages 
sur  les  flots  du  Morbihan  et  des  fleuves  ou  rivières  qui 
l'environnent ,  voguez  sans  crainte  :  il  est  dans  l'Ile  d^Hoe- 
dic  une  Providence  qui  veille  sur  vous.  Un  prêtre  a  su , 
par  l'ascendant  de  la  vertu ,  conquérir  l'estime  des  officiers 
anglais,  même  de  ceux  qui  ne  partagent  pas  ses  croyances. 
Son  ingénieuse  charité  saura  bien  profiter  de  cette  in- 
fluence qu'on  lui  accorde  pour  sauver  de  la  captivité,  de  l'exil 
ou  de  la  mort  ses  malheureux  compatriotes  quelle  que  soit 
d'ailleurs  la  couleur  de  leur  drapeau.  A  la  vue  d'une  em- 
barcation républicaine,  le  prêtre  se  dérobe,  il  est  vrai , 
aux  recherches  de  ses  persécuteurs  et  prie  pour  eux  ;  mais 
à  peine  l'Anglais  reparatt-ii ,  que  ce  même  prêtre  sort  de 
sa  retraite ,  se  met  à  la  piste  des  captures  Eûtes  par  l'en- 
nemi ,  et  sait  trouver  dans  les  ressources  de  son  dévoue- 
ment et  de  son  adresse  le  moyen  de  les  délivrer.  Capi- 
taines ,  pilotes  et  matelots  qui ,  à  ces  tristes  époques,  avez 
parcouru  les  rivages  de  la  Bretagne ,  je  vous  entends  nom- 
mer M.  Marion ,  car  vous  n'avez  jamais  prononcé  ce  nom 
qu'entouré  de  bénédictions,  qu'accompagné  du  souvenir 
de  tant  de  larmes  qu'il  a  séchées,  de  tant  de  capti6  qu'il 
a  rendus  à  la  patrie  (2). 

(1)  Les  Anglais  s'emparaient  de  tout  ce  qni  leur  convenait,  mais 
payaient  bien,  exceptons  toujours  les  pillards.  Ils  achetaient  du 
poisson ,  du  lait  (  1  fr.  et  1  fr.  25  le  litre  ) ,  des  œufo  (  1  Ir.  50  la 
douzaine),  du  beurre  (t  fr.  50  les  500  grammes). 

(3)  M*  Marion  (Jean),  naquit  \  Arradon^  près  Vannes ,  le  8  août 


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—  300  — 

Je  oe  puis  m'empèdhier  de  raooater  à  la  Société  Acadé- 
mique au  moins  deux  &iU ,  dont  j'ai  souvent  recueilli  le 
récit  de  la  bouche  des  capitaines  de  Belle-lie. 

Ua  jour,  le  recteur  eut  la  visite  d'im  officier  supérieor 


1759,  de  parents  <jiii  exploitaient  une  méiaine  appartenant  \  !."• 
deStapl0ton,née  deRobien.  Cette  généreiise  dame  frappée  de 
l'esprit  naturel  de  son  jeune  fennier,  Ini  fonniit  les  moyena  de  dé> 
velopper  ses  talents.  Il  fut  envoyé  recteur  d'Hœdic,  en  1 786,  pour 
y  conserver  la  foi  et  les  mœurs  patriarcales  qne  venait  de  célébrer 
Ogée.  Pendant  trente-trois  ans ,  il  resta  à  la  tête  de  son  troupeaa, 
partagea  ses  misères  et  ses  joies,  et  sut  encore  se  rendre  utile  aa 
loin  perses  nombreux  ouvrages.  Durant  la  penéculion  révolotioB- 
uaire,  il  fut  souvent  obligé  de  se  cacher.  C'est  dans  ces  momenli 
de  solitude  forcée  qu'il  s'occupa  à  traduire  en  breton  (dialecte  de 
Vannes):  l.®  les  psaumes,  cantiques ,  hymnes  et  prières  réunis 
édius  YOfficeu  parisien.  M.  Galles,  de  Vannes,  qu'il  avait  choisi 
pour  son  imprimeur,  me  disait  naguère  que  les  Bretons  devaient 
encore  k  ce  digne  prêtre^  2.*  Instntctioneu  sanM  f  %.^  Et 
règle  kag  en  ordrénaneeu  a  Drivèd-Urh  en  Jutnm-yarim 
ag  er  ifont^Carmel  ;  4.<>  En  or  ag  er  Vuhé  dévot ^  dré  Sont 
Francœs  a  Saies,-  5.®  la  Sainte  Bible:  6.«  C  on  sidéra  tioneu 
sanlel  eit  derhel  chonge  ha  pourfiiein  ag  er  retrœd^  guet 
un  instruction  eit  disguein  gober  orœson  /  7.*  Magasin  spù- 
rituel  er  beurerion ,  en  artisantèd ,  er  serviterion  hag  en 
dud  diar  er  mœzeu  /  8.<»  Fogage  mystérius  de  inis  er  VertUf 
9.0  Vocabulaire  français-breton. 

Le  massacre  de  trois  chouans,  venus  d'Ho^c,  sur  l'île  de  Houaty 
en  1812,  fournit  un  prétexte  k  l'ingratitude  pour  déverser  sur  cet 
ami  de  l'humanité  la  plus  noire  calomnie.  Des  personnes  influentes 
du  continent,  jalouses  de  son  mérite,  insinuèrent  adroitement 
qu'il  avait  dénoncé  les  trois  victimes.  Sa  justification  était  facile  : 
mille  voix  s'élevaient  en  sa  faveur  \  il  préféra  souffrir  en  silence 
et  remettre  k  Dieu  le  soin  de  ramener  les  cœurs.  Néanmoins ,  la 


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—  301  — 

ie  b  flotte  anglaise.  Après  les  premiers  propos,  Milord, 
dit  ie  recteur ,  je  suis  trop  heureux  de  la  circonstance  dans 
laquelle  il  m'est  doûoé  de  vous  recevoir  :  c'est  celle  oà , 
ebex  les  Français ,  les  amis  se  plaisent  à  édianger  entre 
eux  les  présents  et  les  vœux  de  bonhetor.  He  serait-il 
permis,  tout  en  vous  livrant  l'expressioD  de  mes  souhaits, 
de  vous  offrir  un  don  qui,  chez  nous,  a  sa  valeur.  Il  s'a- 
gissait d*un  de  ces  quadrupèdes,  indispensable  habitant  de 
h  basse-cour  ou  de  la  chaumière  bretonne ,  et  celui  qu'ils 
avaient  devant  les  yeux  était  d'un  remarquable  embon- 
point. Cette  prévenance  fat  accueillie  de  l'officier  avec  re- 
counaissance,  et  des  assurances  de  dévouement  vinrent 
aussitôt  y  répondre.  Le  prêtre  se  hâte  d'user  du  droit  que 
lui  donne  cette  ouverture ,  et  réclame  de  la  générosité 
de  l'Anglais  la  liberté  de  quelques  Français  du  continent. 
Le  lendemain ,  ces  pauvres  gens  bénissaient  dans  les  bras 
de  leurs  familles  le  nom  de  leur  libérateur. 
Une  autre  fois ,  deux  filets ,  que  nous  nommons  Trois- 


vue  eoBtiauelle  da  théâtre  de  ses  bieafaits,  loi  rappelait  malgré  loi 
la  méchaoceté  des  hommes  :  d'an  aatre  côté,  les  infirmités  qu'il 
avait  contractées  dans  les  cavernes  et  dans  les  souterrains  pendant 
les  mauvais  jours ,  rendaient  très-pénibles  pour  lui  les  voyages  sur 
mer  qu^exigeaient  cependant  ses  fonctions  diverses  et  multipliées  \ 
Il  se  décida  \  se  séparer  de  ses  bons  tlois,  donna  sa  démissicm  dans 
les  termes  les  plus  humbles ,  quitta  son  tle  en  secret  vers  le  mois 
de  février  ISIO ,  pour  épargner  des  larmes  abondantes  k  ceux  qui 
rappelaient  toujours  avec  tant  de  raison  leur  père  et  leur  sauveur, 
et  se  retira  chez  sa  bienfaitrice ,  k  son  cbàteau  de  Querran ,  en 
Arradon,  oh  il  finit  ses  jours ,  le  17  août  1824 ,  emportant  dans 
la  tombe  des  regrets  unanimes  :  il  n'avait  phn  tf  ennemis. 


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—  502  — 

MaUks^  font  enyie  à  Tamind.  Le  recteur  s'en  aperçoit  et 
les  lui  offre  de  la  meilleure  grâce,  refusant  d'eu  recevoir 
un  prix  quelconque.  L'Anglais,  piqué  de  générosité ,  promet 
de  ne  pas  rejeter  sa  première  demande ,  et  bientôt  le  rec- 
teur trouve  l'occasion  de  rappeler  à  l'amiral  l'engagement 
qu'il  a  pris.  Un  bâtiment ,  prise  anglaise ,  était  mouillé 
sous  la  citadelle  de  Belle-Ile  et  avait  même  ses  amarres  sur 
le  quai.  En  sûreté  sous  la  protection  des  canons  français, 
13  Belltlois,  dont  plusieurs  maîtres  au  cabotage ,  au  milieu 
de  la  nuit,  se  livraient  à  bord  aux  joyeux  propos  et  pré- 
ludaient déjà  aux  souhaits  de  bonne  année^  car  c'était  le 
31  décembre  1809^  me  disait  l'aimable  et  qpirituel  capi« 
taine  Satin ,  de  Palais.  La  sécurité  était  si  grande  qu'il  n'y 
avait  pas  même  d'oflScier  de  quart.  —  Mais  dans  la  rade 
d'Hœdic  déjeunes  officiers  anglais,  par  bravade ,  méditent 
depuis  plusieurs  jours  l'enlèvement  de  ce  navire,  et  plus  le 
danger  est  grand,  plus  ils  désirent  l'amener  triomphants 
à  Hœdic.  Le  commodore  a  autorisé  cette  expédition  aven- 
tureuse. Pour  fêter  le  nouvel  an  au  lever  de  l'aurore , 
deux  péniches  armées  se  dirigent  sans  bruit  vers  leur 
proie.  Fermer  les  panneaux ,  couper  les  amarres  et  revenir 
à  Hœdic  avec  la  prison  flottanle  et  ses  prisonniers^  fut  chose 
bientôt  fiiite.  Avant  la  fin  de  la  nuit,  les  Bellîloises  ont  appris 
leur  malheur  et  le  sort  de  leurs  époux.  Leurs  pensées  se  por- 
tent sur  l'ange  tutélaire  du  pays  ;  vite  une  chaloupe  force 
de  rame,  l'espoir  donne  des  forces,  et  elle  met  à  terre, 
dans  l'endroit  le  plus  caché  (Casspiérà  Kiz)^  des  mes- 
sagers qui  viennent  implorer  la  protection  de  H.  Harion. 
Celui-ci  court  chez  l'amiral  et  réclame  l'accomplissement 
de  sa  promesse,  liais  déjà  le  navire  capturé  cingle  vers 


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-  303  — 

r Angleterre,  un  vent  favorable  s'est  élevé.  Sir  John  War- 
ren ,  fidèle  à  sa  parole,  lance  après  les  prisonniers  une  pé- 
niche avec  pavillon  d'amiral.  Celle-ci  les  ramène  bientôt, 
et  le  recteur  peut  les  rendre  à  leurs  &milles  éplorées.  — 
Il  faut  entendre  les  marins  bellilois  raconter  ce  trait  avec 
leurs  nombreuses  variantes  dont  pas  une  ne  fait  dé&utà 
la  louange  du  charitable  M.  Marion,  à  l'influence  bien- 
£Bkisante  duquel,  disent-ils,  plus  d'un  MILLIER  de  per- 
sonnes doivent  leur  salut.  J'ai  parcouru,  les  larmes  aux 
yeux,  ces  belles  pages  des  Annales  hoedicaises,  jusqu'en 
1813 ,  et  parmi  ceux  qui  le  reconnaissent  pour  leur  sauveur, 
j'ai  vu  non-seulement  les  noms  des  marins  d'Hoedic ,  Houat, 
Belle-Ile,  Quiberon  et  autres  ports  du  Morbihan,  mais 
le  Pouliguen,  Méans,  Saint-Nazaire ,  figurent  aussi  sur 
cette  longue  liste  de  prisonniers  relâchés. 

Ce  n'était  pas  seulement  contre  les  Anglais  qu'il  fallait 
lutter  ou  se  tenir  en  garde.  Chose  étrange!  Il  fellait  re- 
douter davantage  ses  propres  compatriotes;  et  nosîlois 
étaient  réduits  à  désirer ,  dans  leurs  lies ,  le  séjour  d'enne- 
mis qui ,  tant  de  fois,  étaient  venus  ravager ,  incendier  leurs 
demeures  et  leur  étaient  étrangers  même  par  le  langage  et 
par  les  croyances.  A  peine  l'Anglais  s'éloignait-il  qu'une 
ou  plusieurs  embarcations  de  la  République  ou  de  l'Em- 
pire arrivaient  etse  comportaient  absolument  comme  en  pays 
conquis.  Elles  enlevaient  les  chaloupes ,  prenaient  les  bes- 
tiaux et  ne  leur  laissaient  qu'une  vache  pour  chaque  mé- 
nage,  4  paires  de  bœufs  pour  toute  l'île  (1)*  Les  prêtres. 


(1)  Ainsi ,  les  Annales  d'Hœdic  citent  le  désarmement  des  doux 


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—  504  — 

les  marins,  les  éeus  surtout  devaient  se  cacber;  les  mena- 
ces, les  coups,  les  vols  étaient  chose  vulgaire.  Pour  sau- 
ver leur  argent,  nos  tlois  devaient  avoir  recours  k  toutes 
les  ruses  que  les  circonstances  et  la  présence  d'esprit  pou- 
vaient suggérer.  Un  jour,  une  femme  voyant  un  soldat 
républicain  entrer  dans  sa  maison  et  craignant  pour  son 
trésor  qu*elle  avait  dans  sa  poche,  le  sauva  en  le  jetant  dans 
sa  soupe. 

Quand  nos  insulaires  voulaient  aborder  dans  les  ports 
du  continent,  on  tirait  le  canon  sur  eux^  on  les  forçait 
au  service  sans  leur  accorder  les  privilèges  des  autres 
Français.  Ils  gémissaient  en  silence;  mais  si  Ton  ve- 
nait à  froisser  leurs  sentiments  religieux ,  il  n*en  était  pas 
toujours  de  même.  Un  jour,  entr  autres,  en  Tabsence  des 
Anglais ,  une  compagnie  de  républicains  débarqua  à  Hoedic 
et  fouilla  partout  pour  y  trouver  des  objets  d*église  et  le 
curé  Marion.  Celui-ci  s'était  caché  dans  une  chaloupe. 
Un  oflBcier  bellîlois  (M.  Sylvestre^  de  Palais)  l'aperçut  dans 
son  gtte ,  garda  le  silence ,  et  son  humanité  sut  diriger  les 
recherches  sur  les  autres  points  de  Tile  avec  d'autant  plus 
d'ardeur  qu'il  savait  alors  qu'elles  seraient  infructueuses. 
Les  ornements  sacerdotaux  furent  rencontrés  dans  une  ci- 
terne et  les  soldats  les  emportaient  triomphalement ,  lors- 
que les  femmes,  qui  n'étaient  point  accoutumées  à  ces  sa* 


fies,  en  avril  1796,  parle  génértl  do  brigade  de  Belle-Ile, 
prétexte  qu'elles  étaient  du  parti  des  chouans  \  et,  le  21  avril, 
l'enlèvement  de  leura  chevaux  et  de  leurs  bateaux.  L'administra- 
tion départementale  rendit  justice  avx  plaintes  des  habitants  et  fit 
restituer  tout  ce  qui  existait  encore* 


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—  505  — 

tumtles,  66  précipiienl  put  les  pillards ,  leur  enlèvent  leur 
bulin  et  k»  font  sortir  précipitamment  de  Ttle. 

Nos  Hœdicais  et  nos  Hoaatais  qui ,  plus  heureux  que  les 
enfants  d'Adam ,  n*ont  pas  encore  compté  de  Ciân  parmi 
eax,  cherchèrent  toujours,  eu  milieu  de  nos  discordes  ci^ 
viles ,  à  empêcher ,  sur  leur  territoire ,  l*effusion  du  sang 
français.  Nous  les  verrons,  en  1803^  cacher  avec  empres- 
sement, à  Hooat,  un  gendarme  de  la  marine  qui  venait 
d'y  aborder  pour  son  service,  parce  que  des  royalistes,  sur 
le  point  de  passer  en  Angleterre,  dans  la  crainte  d'être 
découverts,  lui  auraient  fait  un  mauvais  parti.  Mais  cette 
humanité  généreuse  qui ,  chez  eux ,  ne  connaissait  ni  Blancs 
m  Blem^  quand  il  s  agissait  d*arracher  des  hommes  à  la 
mort ,  n'eut  pas  toujours  son  succès ,  et  dut  quelquefois , 
malgré  tout,  laisser  périr  ceux  qu'entouraient  leurs  sympa- 
thies. En  1796,  malgré  lt»ur  énergique  résistance,  ils  ne 
purent  sauver  Téquipage  d'une  chaloupe  qui ,  sortie  du  cêté 
de  Piriac,  était  venue  relâcher  à  leur  port.  Des  compromis 
du  continent  les  massacrèrent   de  peur   d'être  dénoncés 
par  eux.  Le  7  novembre  1812  ,  les  habitants  de  Houat 
eurent  à  regretter  encore  une  scène  de  cruauté  du  même 
genre  dont  ils  furent  forcément  les  témoins  inopuissants. 
Trois  émigrés,  nommés,  à  ce  que  Ton  croit,  de  Bar^ 
Bonaventare  Le  6uem,  dit  Sans-^Souei  et  de  Rose^  fu- 
rent mis  à  terre  à  Heedic,  et  de  là  transportés  à  Houat.  On 
apprit  sur  le  continent  la  qualité  de  leurs  personnes  et  le 
lieu  de  leur  retraite.  Le  commandant  d*un  bâtiment  armé 
en  qualité  de  convoyeur ,  nommé  Alaniotàse^  de  t'tle  aus 
Moines,  vint  avec  forte  escorte  les  attaquer  pendant  la  nuit 
dans  la  maison  qui  leur  servait  de  refuge.  On  menaçait 


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—  506  — 

d'y  mettre  le  feu.  Us  sortent,  et  malgré  robscuritéde  It 
nuit ,  ils  tombent  entre  les  mains  de  leurs  ennemis.  Tous 
trois  furent  tués  cruellement  sans  qu'on  put  leur  porter 
secours,  car  Alaniouse  avait  eu  soin  de  défendre  aux  ha- 
bitants de  sortir  de  chez  eux,  sous  peine  d*ôtre  fusillés.  Le 
lendemain  ,  on  trouva,  sur  divers  points  de  File,  les  trois 
cadavres  mutilés  à  coups  de  sabre,  percés  de  coups  de 
baïonnette,  la  tête  écrasée  avec  des  pierres  et  presque  dans 
un  état  complet  de  nudité;  preuve  évidente  que  le  pillage 
et  Tespoir  du  butin  n'étaient  pas  étrangers  à  cette  assassi* 
nat.  Plus  tard ,  on  a  vu  Alaniouse  se  pavaner  avec  la  belle 
montre  de  M.  de  Bar.  Pendant  l'exécution,  un  vieiOard  eut 
la  prudence  de  brûler  leurs  papiers.  Le  propriétaire  s'était 
caché;  sa  femme,  amenée  à  Paris,  gémit  en  prison  jus- 
qu'en 1814,  époque  où  elle  revint  à  Houat.  —  Hœdic  vit 
encore,  sans  y  rien  pouvoir,  le  3  août  1813,  ce  même 
Alaniouse,  si  tristement  célèbre  dans  les  Annales  de  Houat , 
y  saisir  quatre  infortunés  du  continent  que  poursuivait  sa 
fureur. 

Dans  un  chapitre  où  je  donne  Thistoire  d'Hœdic  et  de 
Houat,  je  ne  puis  passer  sous  silence  le  combat  Towmewr. 

Le  5  mai  1804,  une  corvette  commandée  par  le  capi- 
taine Wright  et  un  cotre  anglais,  rencontrèrent  une  section 
de  canonnières  sortant  du  Morbihan  et  coounandée  par  le 
lieutenant  de  vaisseau  Towmeur^  et  n'hésitèrent  pas  à  l'at^ 
taquer.  Le  combat  fut  opiniâtre;  mais  bientôt  accablés  de 
boulets  et  de  mitraille  par  les  canons  de  24  des  canon- 
nières, la  frégate  et  le  cotre  gagnèrent  le  large  et  firent 
force  de  voiles.  Le  brave  Tourneur,  non  content  de  les 
avoir  contraints  à  la  retraite,  voulut  encore  les  poursuivre;  il 


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—  307  ~ 

leur  donna  la  chasse,  les  atteignit  près  de  Houat  et  les  força 
d'amener  leur  pavillon  (I). 

Disons,  du  reste,  qu*à  dater  de  1795,  les  années  qui 
s*écoulent  furent  des  plus  dures  pour  nos  insulaires.  Les 
batailles  maritimes  qui  se  livraient  autour  d'eux,  les  rédui* 
sirent  à  une  telle  extrémité,  qu  ils  auraient  péri  de£dm,  sans 
Tassistance  de  Fescadre  anglaise  qui,  jusqu'à  la  paix,  s'était 
établie  dans  le  meilleur  mouillage  (fe  Parc),  pour  fermer 
les  embouchures  du  Morbihan,  de  la  Vilaine  et  de  la  Loire, 
surveiller  le  port  de  Lorient,  intercepter  à  peu  près  toutes 
les  communications  entre  le  golfe  de  Gascogne  et  la  Manche. 
Elle  donna  à  chaque  tte  400  hoisseaux  de  farine.  L'année 
1815  ouvrit  pour  les  habitants  de  ces  îles  une  ère  toute 
nouvelle.  Ils  commencèrent  à  goûter  dès  lors  les  bien&its 
de  la  paix,  et  leur  vie  plus  calme,  plus  heureuse,  eùlbve  à 
nos  observations  les  faits  variés  d'une  existence  agitée ,  et 
ne  fournit  guère  désormais  à  leurs  Annales  que  le  récit 
monotone  de  sauvetages  opérés  par  leui*  entreprenante 
charité.  On  sent  que,  quelque  intérêt  que  puissent  troiver 
ces  actes  aux  yeux  de  la  morale  et  de  l'humanité,  ils  ne 
peuvent  cependant  offrir  une  assez  grande  importance,  pour 
qu'on  leur  reconnaisse  la  valeur  de  faits  historiques.  Je  ne 
déroulerai  donc  pas  ici  ces  longues  listes  où  chaque  année 
vient  inscrire  les  preuves  nombreuses  de  leur  magnifique  dé* 
vouement. 


(t)  Lebas,  Dtct  encyciop.  France.^  t.  9,  page  49S.  —D'après 
les  souvenin  des  Hoaatais,  le  cotre  serait  venu  se  réfègier  entre 
Hoaat  et  Hœdic,  et  la  corvette,  seule  aax prises  avec  Tour- 
neur, aurait  été  capturée  k  Fabordage,  après  2  ou  3  heures  de 
combat. 


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-^  508  — 

Les  di?ers  événements  historiques  que  ooiis  avons  nt- 
contés  ont  fait  comprendre  de  nouveau  toute  rimportance 
maritime  que  pouvaient  avoir  nos  tles.  Louis*Philippe,  dès 
1840,  songea  à  les  fortifier  et,  depuis  1847,  de  grands  tra- 
vaux sont  en  cours  d'exécution ,  sous  la  direction  de  M.  de 
Cbappedelaine,  chef  de  bataillon  du  génie  à  Belle-Ile,  et  sous 
h  surveillance  d'un  de  nos  compatriotes,  IL  Jollan  de 
Clairville,  capitaine  du  génie  à  Houat.  —  A  Houat,  c'est 
une  citadelle  carrée,  formée  de  quatre  côtés  et  de  quatre 
bastions,  surmontée  d*un  cavalier  en  terre  de  cinq  mètres 
d'épaisseur  et  destiué  à  dominer  toute  Ttleet  les  parties  de  la 
mer  qui  sont  sous  ses  feux.  Un  murde  10  mètres  de  hauteur 
et  un  fossé  au  pied  de  ce  mur,  entoureront  ce  fort,  qui  sera 
enfin  limité  pardesglacis,  sur  lesquels  on  a  déjà  commencée 
porter  des  remblais.  Une  batterie  de  six  pièces,  au  Béni- 
guet,  défendra  le  passage;  une  autre  à  la  pointe  d'£^  Tàl 
(le  Front),  battra  la  grande  rade. —  A  Hœdic,  les  dimen- 
sions de  la  caserne  seront  sur  une  plus  petite  échelle* 

§  i.  ^  Mœurs  et  c»iitiiBies« 

Le  chapitre  que  nous  commençons  va  nous  transporter 
dans  des  régions  assez  semblables  à  celles  que  la  plume  de 
Fénélon  a  dépeintes  avec  des  grâces  si  touchantes  et  des 
couleurs  si  poétiques,  et  qui  nous  rappeleront,  malgré  nous^ 
les  champs  heureux  de  la  Bétique,  habités  à  la  fois  par 
rinnocenceet  par  le  bonheur. 

1.®  LAnajuGB.  —  Commençons  par  dire  du  peuple  que 
nous  allons  étudier,  qu'il  est  une  race  à  part  par  l'esprit, 
par  les  usages,  et,  si  nous  le  considérons  relativement  à  h 


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—  509  — 

France,  par  le  langage,  comme  les  autres  Bretons,  du  reste, 
qui  oui  conservé  leur  langue  traditionnelle  et  primitive.  Les 
bonmies,  il  est  vrai,  obligés  par  la  nature  de  leur  com- 
merce à  entretenir  des  rapports  avec  tous  les  points  mari- 
times de  notre  continent,  comprennent  et  parlent  le  fran- 
çais. Les  anciens  possèdent  même  de  plus  la  langue  de  la 
Grande-Bretagne  :  c'est  une  connaissance  qu'ils  ont  acquise 
pendant  le  long  séjour  des  Anglais  dans  leurs  îles.  Mais  leur 
langue  naturelle^  la  seule  qu'on  pratique  au  pays,  est  la 
langue  bretonne^  dont  Tidiome,  qui  leur  est  commun  avec 
tout  le  pays  de  Vannes,  rentre  dans  la  nuance  usitée  à  Saint- 
Gildas-de-Rhuys.  Les  femmes,  que  leur  vie  sédentaire 
éloigne  du  contact  étranger,  ne  sont  initiées  qu'à  celle-ci  ; 
c*est  à  peine  si  quelques-unes  savent  s'exprimer  dans  la  nôtre. 
Précieuse  singularité^  qui  contribue  bien  quelque  peu  à 
sauvegarder  leurs  principes  et  leurs  mœurs,  ainsi  que  les 
inappréciables  avantages  que  nous  aurons  à  relever.  Le  pre- 
mier que  nous  ayons  à  signaler,  c'est  incontestablement  leur 
système  de  gouvernement. 

2.®  BBfiucB  fiovvBARBMBNTii..  —  Après  la  République  et 
les  guerres  de  l'Empire,  les  recteurs  avaient  trouvé,  sous 
le  rapport  temporel,  bien  des  choses  à  faire  ou  à  réparer  dans 
leurs  îles.  Les  habitants  s'étaient,  il  est  vrai^  maintenu  dans 
la  religion  et  dans  les  vertus  patriarcales  de  leurs  pères  ; 
mais  ils  étaient  depuis  vingt  ans  si  habitués  à  la  misère 
qu'ils  paraissaient  désormais  sans  goût  pour  les  améliorations 
matérielles.  Le  souvenir  vivant  de  la  destruction  du  fruit 
de  leurs  efforts  et  de  leurs  sueurs  les  décourageait,  et  ils 
redoutaient  encore  de  nouveaux  et  semblables  malheurs. 
Le  zèle  des  recteurs  s'enflamma  davantage  à  la  vue  de  cet 


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~  310  — 

abattement.  La  patience,  la  fermeté,  la  persuasion,  l'affec- 
tion et  le  dévouement  des  administrateurs,  gagnèrent  la 
confiance  des  administrés.  On  releva  leur  courage  et  on  sut 
leur  inspirer  le  désir  des  améliorations  matérielles  et  d'une 
aisance  moins  voisine  de  la  misère. 

La  nécessité  d*un  règlement,  d'une  organisation  gou- 
vernementale, d*une  Constitution,  se  fit  alors  sentir.  On 
rechercha  les  anciens  usages  de  l'île  et  ses  bonnes  coutumes; 
le  recteur  les  codifia,  et  cette  charte  locale  discutée,  votée, 
adoptée  librement  par  tous  les  intéressés,  eut  force  de  loi 
parmi  eux  (1).  Un  conseil  fut  nommé  pour  veiller  à  son  en* 
tière  et  stricte  exécution. 


(1)  Je  lis  ces  mots  dans  le  préambule  on  Fexposé  dea  motib  t 
Fondé  sur  les  vrais  iotérèts  de  ceux  pour  qui  il  est  fait  f  il  (le 
règlement)  maintient  la  paix  parmi  tous  les  membres  ^  il  fixe  à 
chacun  ses  droits  et  ses  devoirs  et  ne  permet  pas  que  Fun  entre- 
prenne sur  les  droits  des  autres;  il  protège  les  faibles  contre  les 
forts  et  rend  h  tous  ane  égale  justice  \  il  prévient  les  dissensions 
qui  ne  mettent  que  trop  souvent  le  trouble  et  le  désordre  parmi 
les  hommes  qui  ne  connaissent  point  de  règles;  il  encmirage 
les  bons  et  intimide  les  méchants ,  donne  aux  efforts  de  chacua 
une  direction  plus  stable,  plus  uniforme,  plus  constante,  fait 
tout  concourir  au  bien  général,  qui  est  le  premier  qu'il  faut 
s'efforcer  d'atteindre,  parce  que  de  l\  dépend  la  prospérité  par- 
ticulière de  chacun,  et  qu'il  n'y  a  rien  de  plus  opposé  an  boa 
ordre  et  k  l'intérêt  commun,  de  plus  funeste  et  de  plus  odieux 
que  la  recherche  exclusive  de  son  intérêt  privé.  Aussi,  cette  cupi- 
dité est-elle  condamnée  dans  l'Ecriture  comme  un  crime  qui  ex- 
clue du  royaume  do  Dieu ,  et  ce  n'est  pas  sans  raison  que  Saint- 
Paul  l'appelle  ta  source  de  tous  nos  maux,  ra<iix  omnium 
tnaiorum^ 


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~  511  — 

De  tous  les  Pouvoirs  qui  régissent  les  hommes,  les  ha- 
bitants dHœdic  et  de  Houat ,  comme  les  anciennes  réduc- 
tions du  Paraguay,  ne  connaissent  que  la  douce  influence 
de  la  religion.  Un  prêtre,  en  effet,  tel  est  le  seul  magis- 
trat, la  seule  autorité  à  laquelle  ils  soient  soumis,  comme 
autrefois  encore,  ces  nombreuses  femilles  de  patriarches, 
sous  les  tentes,  dans  les  plaines  de  la  Mésopotamie,  dont  le 
chef  était  à  la  fois  le  législateur,  le  prêtre,  le  roi  et  le 
père. 

Le  curé ,  qu'on  désigne  dans  nos  tles ,  comme  dans  tout 
le  Morbihan ,  sous  le  nom  de  Recteur  (1),  exerce  légale- 
ment, depuis  le  17  frimaire  an  X,  les  fonctions  d'officier 
de  l'état-civil,  bien  que,  pour  le  culte  et  l'état-civil,  Hœdic 
et  Houat  soient  annexés  à  la  paroisse  et  commune  de  Palais 
en  Belle-Ile.  Il  est,  à  la  fois,  en  titre,  maire,  curé,  syn- 
dic des  gens  de  mer,  agent  des  douanes  et  de  l'octroi,  et 
directeur  delà  poste  aux  lettres;  et  ses  actes  ont  un  caractère 
légal.  Il  remplit  encore  les  fonctions  de  notaire,  de  juge  de 
paix  et  de  percepteur,  d'agent  de  l'enregistrement  et  des 
domaines;  mais  sans  caractère  officiel.  Jusqu'à  ce  jour,  les 
habitants  soumis  au  légitime  empire  que  lui  assurent  la  su- 
périorité de  ses  lumières,  l'autorité  de  la  religion,  ses 
vertus  et  l'obéissance  spontanée  qu'ils  lui  accordent  se  plai- 
sent à  admettre  ses  décisions  quoiqu'ils  soient  libres  de 
s'adresser  ailleurs,  et  acceptent  volontiers  son  arbitrage, 


(f  )  Dans  le  Morbihan ,  le  mot  curé  signifie  vicaire^  et  notre  mot 
de  curé  se  rend  par  celai  de  recteur.  Je  retrouve  la  môme  locu- 
tion usitée  chez  nos  voisins  d'oatre-M  anche  :  rector  et  cura  te* 
yAnglais  et  le  Breton  sont  ici  d'accord. 


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—  5!3  — 

parce  qu'ils  sentent  qu'il  ne  peut  leur  vouloir  de  mat  et 
qu'il  s'intéresse  à  tout  ce  qui  les  touche.  Comose  au  temps 
d'Ogée,  «r  une  mort  ou  un  mariage  eiigent  quelquefois  des 
»  arrangements  nouveaux.  Daoft  ce  cas ,  le  curé  les  écrit 
»  sur  une  feuille  de  papier  commun  et  les  signe.  Cet  écrit 
»  devient  un  titre  de  propriété  pour  celui  qui  en  est  le  por- 
D  teur  et  pour  sa  postérité.  Il  n'est  jamais  contrevenu  que 
n  dans  le  cas  d'un  autre  arrangement  à  l'amiable.  »  Les 
dispositions  testamentaires  reçues  par  le  curé  devant  té- 
moins ont  aussi  toujours  été  respectées  II  a  bien  soin ,  du 
reste,  de  les  prévenir  qu'il  est,  dans  ce  cas,  sans  pouvoirs 
aux  yeux  de  la  loi.  Quant  au  titre  de  percepteur,  il  ne  Cuit 
qu'éviter  au  titulaire  la  peine  de  venir  dans  son  ile  bire 
rentrer  les  fonds. 

Le  curé,  disais-je  tout-à-l'heure,  est  la  seule  autorité  de 
nie;  c'est  une  monarchie,  mais  une  monarchie  constitu* 
tionnelle,  car  il  gouverne  son  petit  royaume  aidé  de  douze 
vieillards  les  plus  considérés,  qui  forment  un  Conseil  des  An- 
ciens et  représentent  toute  la  conmiunauté.  Pour  en  faire 
partie,  il  faut  avoir  atteint  l'Age  de  trente  ans  au  moins  et 
jouir  de  l'estime  générale  des  habitants.  {Règlement^  cft.  3, 
§2,  n.""  i.)  Le  Conseil  des  notables  est  chargé  :  l.*"  De 
veillera  ce  que  le  règlement  soit  exécuté;  2.®  de  décider 
toutes  les  questions  d'utilité  publique;  3.®  de  réformer  les 
abus  et  de  rechercher  les  moyens  d'y  remédier  conjointe- 
ment avec  le  recteur.  {RègL ,  cft.  3,  §  2,  n.®  3.)  Il  y  a, 
par  an,  trois  assemblées  ordinaires  :  le  dimanche  de  la 
Quasimodo ,  celui  de  la  Dédicace  et  le  8  décembre  ;  et  plus 
souvent ,  si  besoin  est.  Dans  les  affaires  graves ,  le  suffrage 
universel  Y  si  péniblement  acquis  en  France  ^  est  un  des 


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-  315  — 

points  fondamentaux  de  la  législation  de  nos  îles.  Tous  les 
hommes  majeurs  réunis  sont  appelés  à  donner  leur  avis 
sur  la  question  soumise.  Alors  on  vote  par  assis  et  levé^  et 
toujours  la  majorité  décide.  Dans  le  cas  où  les  intérêts  dun 
particulier  pourraient  être  lésés,  dans  celui  où  la  crainte 
empâcherait  dédire  son  avis,  le  scrutin  secret,  avec  des 
petits  pois  blancs  et  noirs,  vient  donner  au  vote  sa  liberté 
entière. 

Deux  ou  quatre  hommes,  à  tour  de  rôle,  son  chargés  de 
conduire  le  canot  du  curé ,  toutes  les  fois  que  les  affaires  de 
rtle  rappellent  au  continent  ou  à  Belle-Ile.  Pendant  tout 
le  temps  qu'ils  sont  au  service  de  la  communauté ,  ils  re- 
çoivent chacun  un  franc  par  jour,  à  moins  que  le  curé  ne 
nourrisse  lui-même  son  équipage.  Dans  le  premier  cas,  cet 
argent  est  pris  sur  la  masse  commune. 

L'île  possède  une  bouliqtAe  ou  magasin  de  marchandises 
usuelles  bien  assortie.  Les  profits  sont  versés  à  la  masse 
commune,  et  c'est  encore  une  petite  ressource  pour  ali- 
menter la  Caisse  d'épargne. 

Une  seule  cantim^  est  permise.  Elle  est  placée  sous  la 
surveillance  du  Curé  et  des  Anciens.  Le  cantinier,  ordinaire- 
ment choisi  parmi  ceux-ci,  ne  doit  pas  donner,  aux  termes 
du  règlement  (Ch.  2 ,  §  6 ,  n.°  2) ,  plus  d'une  chopine  de  vin 
par  repas  au  même  individu ,  s'il  est  habitant  de  l'île,  et  pas 
plus  d'une  bouteille,  s'il  est  étranger.  Il  reçoit,  pour  tout 
salaire,  cinq  francs  par  chaque  barrique  de  vin  débitée»  — 
L'toergie  du  curé  d'Hœdic  (M.  Aio)  et  de  son  Conseil  a 
maintenu  intact,  dans  son  île,  pour  ses  îlois,  cet  article  du 
règlement ,  lorsque  les  ouvriers  sont  venus  travailler  à  la 
construction  du  fort,  en  1847.  Une  cantine  spéciale  pour 

22 


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—  514  — 

ces  étrangers  a  été  établie  en  dehors  du  village  et  autori- 
sée sous  la  responsabilité  de  l'entrepreneur,  mais  non  sou- 
mise aux  prescriptions  de  Tfle.  Aussi  là,  chaque  ouvrier 
peut-il  s*enivrer  à  loisir  et  dépenser,  dans  un  jour,  le  gain 
de  plusieurs  semaines,  sauf  à  vivre  nécessairement  de  pri- 
vations pendant  longtemps.  —  A  Houat,  quelques  habitants 
substituant  Tégoîsme  des  intérêts  individuels  au  bien  géné- 
ral et  à  Tesprit  de  fraternité,  ont  cru  voir,  dans  la  présence 
des  ouvriers  sur  Ftle ,  une  excellente  spéculation  privée.  Ils 
se  sont  donc  insurgés  contre  cet  article  du  règlement  (ce 
n'est  pas  en  1848  qu'on  pouvait  les  en  blftmer)  et  se  sont 
mis  à  tenir  cabaret.  Si  l'un,  par  convenance,  refuse  à  un 
ouvrier  déjà  ivre,  un  autre,  moins  délicat  ou  plus  avide, 
accorde  volontiers,  et  la  masse  commune  a  été  ainsi,  à 
Houat,  privée  d'une  partie  de  ses  profits  (1). 

Il  n'y  a  point  de  douanes  dans  nos  îles.  Les  marchan- 
dises ne  sont  soumises  à  aucun  droit  d'entrée ,  mais  on  le 
h\i  payer  au  continent  :  ainsi  Houat  et  Hœdic  paient  un 
droit  de  consommation  sur  les  boissons,  droit  de  débit 
en  détail,  sont  même  soumis  au  droit  d'octroi  de  Palais, 
et  en  obtiennent  quelques  secours  pour  leurs  besoins  lo- 
caux (la  moitié  des  recettes  de  l'octroi  des  tles). 


(!)  Dans  mes  derniers  voyages,  en  1849,  j'ai  appris  que  plusiean 
Houataîs,  qui  s'étaient  mis  en  opposition  avec  le  règlement  sur  on 
article  admis  dans  ui  but  si  sage .  n'avaient  trouvé  qa'amëres  dé- 
ceptions an  lieu  d'one  plus  grande  somme  de  bonhenr,  avaient  fini 
par  comprendre  que ,  non-seulement  Pintérèt  général  était  com- 
promis en  même  temps  que  la  morale,  mais  qu'ils  se  ruinaient  eux-- 
mêmes 9  et  avaient  repris  leurs  filets. 


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—  315  — 

J*ai  parlé  d'une  masse  œmmune  placée  entre  les  mains 
du  Conseil  des  Anciens  et  du  curé.  Ce  sont  les  seules  res- 
sources de  rtle  (1)  ;  avec  elle  on  secourt  les  plus  néces- 
siteux, les  vieillards  et  les  familles  dont  les  chefs  ont  péri 
.à  la  mer;  avec  elle  encore  on  construit  des  chaloupes  et 
des  canots  qui  deviennent  la  propriété  de  Tîle  et  lui  paient 
un  petit  revenu  (2).  Grâces  à  cette  précaution  toute  phi- 
lanthropique ,  le  Houatais  ou  THoedicais  n'est  plus  obligé 
d*aller  sur  le  continent  emprunter  de  l'argent  à  un  taux 
qui  souvent  d  !venait  ruineux.  C'est  encore  sur  cette  masse 
commune  que  chaque  patron  de  chaloupe  vient,  au  com- 
mencement de  la  pèche  de  la  sardine,  emprunter  400  francs, 
sans  intérêts,  à  la  seule  condition  de  les  rendre  à  la  fin 
de  la  pêche;  c'est  ce  qu'on  appelle  une  grosse.  Si  Tune 
des  chaloupes  ne  rend  pas  toute  sa  grosse  dans  la  môme 
année,  on  ne  lui  prête  l'année  suivante  que  ce  qu'elle  a 
rendu  {RègL  d'Hœdic^  art  13.).  Depuis  plusieurs  années, 
les  Hœdicais  ont  abandonné  la  pèche  de  la  sardine  pour 
se  livrer  exclusivement  à  celle  des  crustacés  (homards , 
langoustes  et  cancres) ,  et  ne  se  trouvent  point  dans  la 
nécessité  de  recourir  à  la  ressource  de  la  grosse. 

La  demeure  du  premier  magistrat  n'a  rien  qui  le  dis- 
tingue des  autres,  si  ce  n'est  sa  toiture, en  ardoises,  et 


(I)  Le  revenu  de  Houat  est  de  6  k  7,000  fr.  —  Celai  d'Hœdic 
de  1,200  k  1,500  fr. 

.  (2)  n  y  a  aetaelleraent  k  Bonat,  8  chaloupes,  1  péniche,  5 
grands  canots  et  6  petits  oa  nioies.  —  Â  Hœdic ,  8  chaloupes , 
2  péniches  et  20  canots.  -  Expillj  donnait,  en  1762  et  1764 ^  7 
chaloupes  k  Houat  et  4  k  Hœdic. 


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—  316  — 

encore  vous  courez  risque,  d'après  cette  indication^  de 
tomber  à  Houat  chez  un  cantinier.  La  pièce  principale 
sert  d'Hôtel-de-VilIe,de  salle  d'audience,  d'étude,  de  bu- 
reau  de  port  ; 

EUe  est  encor  salle  ou  salon, 
L^usage  qu'on  en  fait  détermine  son  nom. 

ff  La  simplicité  la  plus  grande  règne  dans  son  ameu- 
a  blement  :  on  dirait  la  table ,  Tescabeau  et  le  pauvre  lit 
»  préparés  par  la  femme  de  Sarepta  au  prophète  Elysée... 
»  Vous  me  trouvez  pauvrement  logé,  disait  le  curé  d*Hoe- 
»  die  à  un  voyageur  (1)  ;  mais  depuis  dix  ans  que  je  suis 
»  à  Hœdic,  je  n'ai  plus  de  désirs,  et  j'ai  appris  qu'il  iaut 
»  peu  de  choses  pour  fournir  au  nécessaire.  Ne  suis-je  pas 
»  encore  le  mieux  logé  de  l'Ile  7  J'en  ai  honte  :  mes  chers 
»  en&nts  m'y  contraignent,  mais  ils  savent  que  tout  ce 
»  que  je  possède  est  à  eux.  Si  je  veux  quelque  magnifi- 
ù  cence ,  c'est  dans  la  maison  de  Dieu  ;  elle  seule  domine 
»  un  peu  nos  pauvres  cabanes...  Nous  ne  sommes  pas  ri- 
a  ches,  mais  le  peu  que  nous  avons  vient  de  lui,  nous  lui 
a  donnons  tout  ce  que  nous  pouvons,  a 

Les  appointements  du  curé  se  bornent  au  modeste  trai« 
tement  de  desservant  ;  il  reçoit ,  de  plus,  pour  les  frais  de 
mairie,  une  somme  de  l&O  francs  ;  enfin,  500  francs  sont 
alloués  au  syndic  titulaire ,  charge  qui  revient  officielle- 
ment à  Tun  des  deux  curés.  Le  titulaire,  aujourd'hui  celui 
de  Houat,  partage  avec  son  confrère  d'Hoedic,  qui  doit 


(t)  Voyage  à  Hœdic  ^  dans  le  jonmal  V Union,  Kante%  1833, 
page  426. 


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-  317  — 

ptetidre  pour  cette  rétribution  sa  part  locale  dans  la  rédac- 
tion des  notes  relatives  au  service  de  inscription  mari- 
time. 

J'oubliais  de  dire  que  le  curé  est  encore  surveillant  de 
Técole,  directeur  des  études,  écrivain  public,  et,  au  be- 
soin, médecin  et  pharmacien,  sans  qu'il  puisse  se  déchar- 
ger sur  quelqu'un  de  ce  monopole  général.  C*est  bien  dans 
UD  ermitage,  comme  Houat  ou  Hœdic ,  que  les  connais- 
sances médicales  sont  permises,  utiles,  indispensables  au 
curé  pour  le  soulagement  de  ses  rares  malades.  Son  jar- 
din ,  c'est  presque  toute  la  pharmacie  du  village. 

Malgré  ces  six  ou  sept  places,  son  poste  n*est  convoité 
par  personne.  Depuis  cinquante  ans ,  on  a  vu  bien  des 
fois  des  intrigants,  des  ambitieux  surcharger  des  voitures 
le  lendemain  d'une  révolution  et  courir  après  la  curée  des 
places  :  pas  un  seul  jusqu'ici  n'a  pris  le  chemin  d'Hœdic  ou 
de  Houat.  Et  cela  se  comprend ,  car  il  faut  ici  un  motif 
au-dessus  des  motife  humains  pour  déterminer  un  homme 
à  s'exiler  sur  un  rocher  sauvage  pour  le  bonheur  de  ses 
semblables.  C'est  le  même,  du  reste,  qui  pousse  nos  mis- 
sionnaires jusque  dans  la  hutte  du  sauvage,  pour  y  porter 
la  civilisation  et  la  foi. 

Pour  compléter  ce  tableau,  j'ajouterai  ici  un  passage 
d'une  plume  mieux  exercée  et  dont  le  bonheur  d'expres- 
sion me  paratt  sans  égal  ;  c'est  celle  du  voyageur  que  je 
citais  tout-à-l'heure  :  «  Vous  avez  lu  quelquefois ,  dans 
9  Emile ^  le  portrait  d'un  pasteur  de  village,  tout  dévoué 

8  à  ses  modestes  fonctions,  tout  occupé  du  bonheur  de 
n  son  troupeau.  Ici,  c'est  la  réalité,  mais  revêtue  d'un 

9  eharme  particuKer,  et  marquée  du  sceau  d'un  plus  gé- 


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—  518  - 

A)  néreux  dévouement.  D'ordinaire,  il  existe  pour  le 
0  teur  quelque  distraction  ;  en  se  donnant  à  son  troupeau, 
»  il  ne  renonce  pas  à  tout  au  monde.  Mais  Hœdic  (ou 
»  Houat)  devient  pour  le  pi  être  comme  une  patrie  adop- 
u  tive  :  cette  île  aride,  sablonneuse,  triste  et  monotone, 
»  ces  quelques  lieues  d'un  terrain  presque  sauvage ,  ce  pe- 
»  tit  village  avec  ses  habitants  simples,  sans  culture,  pau- 
0  vres  et  malheureux,  voilà  Tendroit  où  il  doit  couler 
»  tous  ses  jours,  voilà  son  nouveau  pays,  voilà  son  uni* 
»  vers  à  lui  qui,  peut-être,  connut  longtemps  les  délices 
»  de  la  vie,  qui  vécut  ^u  sein  d'une  famille  où  l'aisance 
))  était  un  besoin  parce  qu'elle  était  une  habitude. 

»  II  est  vrai:  mais  dans  cette  île,  au  milieu  de  cette 
»  population  pauvre,  le  curé  apporte  un  coBur  de  prêtre, 
»  un  cœur  que  la  charité  dévore,  un  cœur  afiamé  de  dé- 
j>  vouement  ;  il  vient  et  il  ne  rencontre  pas  d'étrangers; 
»  tous  ceux  qu'il  voit,  quoi  qu'ils  lui  fussent  jusqu'alors 
»  inconnus ,  ce  sont  des  frères;  il  sent  dans  sa  poitrine  un 
»  feu  sacré  qui  le  consume,  un  sentiment  intérieur  ^ 
»  céleste^qui  l'en  avertit.  Ces  hommes,  se  dit-il.  Dieu  me 
»  les  donne,  c'est  une  famille  qui  m'est  confiée;  leurs 
»  maux,  leurs  besoins ,  leurs  sacrifices  comme  leurs  joies, 
»  je  les  partagerai  ;  j'adoucirai  les  uns,  je  m'efforcerai  de 
»  multiplier  les  autres.  C'est  un  peuple  dont  je  dois  faire 
B  le  bonheur,  trop  heureux  si  je  puis  ici  sécher  quelques 
»  larmes,  ramener  à  la  vertu  ou  y  affermir  quelques 
»  cœurs ,  entretenir  parmi  eux  la  paix ,  la  douce  paix  de 
a  la  charité,  et  rélégué  avec  ce  petit  tioupeau  sur  ce 
»  coin  de  terre  ignoré ,  sous  les  yeux  de  Dieu  seul ,  se- 
»  paré  du  monde  par  TOcéan  moins  agité,  moins  ora- 


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—  3I9  — 

»  geux  que  lui,  passer  avec  des  enfants  dociles >  dans  la 
j»  pratique  de  nos  communs  devoirs,  les  rapides  instants 
ji  de  celte  existence  éphémère  {i)>  » 

Sous  uue  telle  impression  et  au  milieu  des  occupations 
si  multipliées  des  ministères  religieux,  civil,  maritime  et 
postal,  les  jours  passent  avec  rapidité  et  s'écoulent  ina- 
perçus. Rarement  il  a  des  distractions  étrangères,  de 
nouveaux  visages  sur  son  petit  territoire.  Ces  visiteurs  sont 
—  ou  des  marins  forcés  de  relâcher  et  de  chercher  un 
abri  contre  la  tempête  ou  môme  de  malheureux  naufra- 
gés, —  ou  quelques  touristes  curieux  de  voir  en  plein 
XIX.'  siècle  un  tout  petit  coin  de  terre  encore  soumis  au 
régime  patriarcal,  —  ou  bien  encore  ce  sont  quelques 
amis  de  la  nature  qui  viennent  y  lire  une  page  de  ce  grand 
livre.  C'est  un  bonheur  pour  Termite  d'Hcedic  ou  pour 
celui  de  Uouat  de  pouvoir  exercer  1  hospitalité,  de  serrer 
la  main  d*un  étranger,  d'un  Français,  d*un  Breton.  11  ne 
redoute  qu'une  phose ,  c'est  l'arrivée  de  quelqu'un  de  ces 
libres  penseurs  ou  de  ces  hommes  affranchis  de  toute  rè- 
gle ,  qui  ne  connaissent  plus  le  joug  des  principes  ni  celui 
de  la  morale,  donnent  toute  licence  à  leur  langue  et  se 
font  un  plaisir  de  semer,  parmi  le  peuple ,  leur  désolant 
scepticisme  et  leurs  dégoûtantes  lubricités,  ou  bien  en- 
core de  quelque  voyageur  peu  délicat,  dont  la  curiosité  abu- 
sive exploite  sans  mesure  et  rétribue  très-feiblement  la 
bonne  volonté  des  insulaires  qui  se  dévouent  et  leur  sacri- 
fient ,  par  là ,  un  gain  plus  abondant. 


(t)  Voyage  k  Hœdic.  l/nion  déjk  citée ,  pages  425  et  suiv. 


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—  520  — 

Ses  récréations,  quand  il  a  le  loisir  d*en  prendre,  c*est 
la  pèche ,  c'est  la  culture  de  son  jardin,  ou  bien  encore 
Tétude  des  productions  de  son  tie  (i). 

Telles  sont  les  occupations  du  pasteur  chez  les  Houatais 
et  chez  les  Hœdicais.  Sa  porte  est,  à  toute  heure,  ouverte  à 
toutes  les  misères ,  à  toutes  les  souffrances  ;  le  premier  à 
donner  Texemple  de  la  fidélité  au  règlement  ;  il  n'a  pas 
même  le  chien ,  ce  meuble  vivant  du  fuyer,  comme  l'ap- 
pelle Lamartine ,  cet  ami  de  ceux  qui  sont  oubliés  du 
monde.  Sa  vie  coule  sans  éclat ,  mais  aussi  sans  remords 
et  sans  regrets,  au  milieu  du  troupeau  qu'il  chérit  et  dont 
laffection  est  pour  lui  la  plus  douce  des  jouissances.  Il  ne 
connaît  ni  saison ,  ni  temps  lorsqu'il  s'agit  de  porter  se- 
cours au  navire  en  péril,  ou  le  pardon  au  coupable,  ou  son 
Dieu  au  mourant.  Nulle  pierre  ne  marquera  sa  tombe  au 
cimetière  ;  mais  son  nom  retentira  encore  dans  le  cœur  de 
ceux  auxquels  il  laissa  une  croyance ,  une  loi ,  un  Dieu , 
et  ils  diront  longtemps  de  lui,  comme  de  son  divin  maître: 
/{ a  passé  en  faisant  le  bien. 

3.*^  VIE  DES  INSULAIRES.  —  Après  le  chapitre  du  Prési- 
dent de  cette  République  d'un  nouveau  genre,  vient  celui 
des  administrés.  —  Nous  disions  tout-à-rheure  que  le 
séjour  qu'ils  habitent  était  un  séjour  de  bonheur  ;  hâtons- 
nous  de  remarquer  que  ce  n'est  pas  pourtant  sans  que  la 
vertu  et  la  médiocrité  des  désirs  y  soient  pour  beaucoup. 


(I)  M.  l'abbé  Bio  avait  même  eu  la  bonne  pensée  de  réunir, 
dans  une  petite  armoire  od  hoc^  nn  certain  nombre  d'échantillons 
de  conchyliologie  hœdicaise. 


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—  321  — 

car  Ips  conditions  ordinaires  qui  semblent  être  réclamées 
pour  le  bonheur,  ne  se  retrouvent  guère  chez  eux,  et,  à 
coup  sûr,  il  ne  faut  pas  y  rechercher  toutes  les  délicatesses 
de  notre  sensualité  et  de  notre  luxe.  Tout  y  est  simple  et 
frugal;  et  si  nous  voulons  nous  occuper  d'abord  des  choses 
qui  tiennent  le  plus  intimement  au  bien-être  matériel  de 
l'existence,  donnons  quelques  détails  sur  la  nourriture,  le 
logement,  le  costume. 

La  nature  du  climat  et  des  travaux  auxquels  s'adonnent 
nos  insulaires  exige  chez  eux  une  abondante  nourriture. 
Leurs  mets  usités  sont  les  bouillies^  les  soupeij  le  poisson, 
les  viandes,  parmi  lesquelles  le  lard  vient  figurer  avec  Faveur. 
L'hiver,  la  tiViHe  salée,  accompagnée  de  pommes  de  terre,  fait 
les  frais  du  repas  du  soir.  Du  reste,  sur  les  bords  de  la  mer,  la 
viedevient  facile  sous  ce  rapport  :  les  poissons,  les  coquillages 
y  sont  toujours  des  ressources.  A  défaut  de  mieux,  on 
mange  les  pieds  ou  manches  de  couteau  {solen)^  aliment 
coriace  qui  a,  de  plus,  le  désavantage  de  contenir  presque 
toujours  du  sable  dans  les  plis  de  son  manteau.  La  châ- 
taigne de  mer  (oursin) ,  et  surtout  certains  bigourneaux 
qu'on  nomme  dans  nos  îles  bigourneaux  de  chien  {Taleguet^ 
en  Breton),  ne  passent  pas  pour  fria  ids  (t). 

Il  y  a,  il  faut  en  convenir,  quelquefois  de  la  misère; 
mais  elle  n'est  point  le  fruit  de  Tinconduite,  du  libcrtiiiage 
ou  de  rivrognerie,  aussi  n*altère-t-elle  en  rien  la  paix  du  mé- 
nage :  la  famille  souffre  en  silence  et  se  console  avec  l'espoir 


(1)  Cest  le  Purpura  ifipitius  qa'oii  désigne  soas  ce  nom  k 
Hœdic  et  \  Hoaa  t  ^  «a  Groinc,  au  contraire,  c^est  le  turbo  Uiioreus^ 
si  recherché  k  Nantes. 


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J 


—  322  — 

d*un  plus  beau  jour;  elle  a  fui  en  celui  qui  fournil  la  pft- 
ture  même  aux  oiseaux  naissanls.  Le  curé ,  du  reste.  Pro- 
vidence visible  du  pauvre,  est  habile  à  découvrir  les  misères 
de  ses  paroissiens,  et  n*est  pas  nooins  actif  à  venir  a  leur 
secours.  Cependant,  quelquefois  on  n*ose  pas  avouer  sa  po- 
sition; c'est  un  aveu  pénible  qu*il  faut  savoir  arracher:  Juf- 
qulci,  dit-on,  nous  n'avons  pas  encore  manqué.  Combien 
de  fois  les  deux  sœurs  de  M.  Le  Capilaine,  compagnes  dé- 
vouées de  son  exil  et  auxiliaires  intelligentes  de  sa  charité, 
n*ont-elles  pas  obtenu  de  réponses  analogues,  et  cependant 
il  était  notoire  que  ces  personnes  en  étaient  aux  derniers 
besoins.  —  Un  jour,  j'entrai  à  dessein,  me  racontait  le  rec- 
teur de  Houat,  dans  une  maison  à  l'heure  du  repas  de  midi. 
On  était  à  faire  la  récolte.  J'y  trouve  le  frère  et  la  sœur, 
jeunes  gens  de  1 8  à  20  ans,  assis  un  de  chaque  côté  de 
la  table.  Eh  bien!  mes  enfants,  a-t-on  dîné?  Je  reçus  deux 
réponses  simultanées,  mais  contradictoires.  Il  était  facile  de 
voir  qu'en  venant  à  la  maison  à  l'heure  ordinaire  des  repas, 
on  tenait  à  s'épargner  la  honte  d'une  révélation  qu  il  coûtait 
à  l'amour-propre  de  faire.  —  Jusqu'à  ce  jour,  les  Hœdicais 
ont  été  à  l'abri  de  pareilles  nécessités,  et  j'en  vois  la  cause 
dans  l'observation  plus  exacte  du  Règlement. 

L'extérieur  des  maisons,  presque  toujours  orientées  au 
Midi ,  ne  se  fait  remarquer  que  par  sa  rustique  simplicité. 
Là,  vous  n'apercevez  point  la  tuile  aux  riantes  couleurs, 
dont  la  teinte  rougeâtre  réveille  nos  paysages.  Rarement 
vous  y  verrez  l'ardoise  aux  reflets  bleus  et  luisants  :  c'est  à 
peine  si  ce  dernier  mode  de  couverture  vient  de  s'intro- 
duire dans  l'usage  ;  six  maisons  à  Houat,  trois  seulement  à 
Hœdic,  s'élèvent  prétentieuses,  an  milieu  des  autres,  avec 


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—  323  — 

cette  toiture  novatrice.  L'usage  tradititmnel  n'admet  donc, 
pour  ce  genre  de  construction,  que  le  roseau  {Arundo 
phragmites) ,  mais  surtout  le  jonc  des  chaisiers  {Scirpas 
lacuslris).  Les  Hœdicais  recut'iilent  ces  deux  plantes  dans 
leur  marais  et  peuvent  même  subvenir  aux  besoins  de  leurs 
voisins;  et  si  la  récolte  de  ces  deux  végétaux  vient  à  man- 
quer, la  paille  de  seigle  qu'ils  achètent  au  continent  y 
supplée. 

Sur  leurs  murailles  de  granit,  que  Fart  n  a  point  été  appelé 
à  embellir,  vous  verrez,  pour  tout  ornement,  à  la  saLsou, 
pendre  par  leurs  pétioles  fixées  à  1  avant-toit  quelques  feuil* 
les  du  détestable  tabac  sauvage  {ISicoliana  rustica)  que  nos 
pauvres  pêcheurs  fument,  en  le  mêlant  quelquefois  avec 
celui  de  la  régie;  car,  chez  eux,  la  pipe  est  un  meuble  in* 
dispensable  :  elle  les  distrait ,  les  désennuie  à  terre  et  à 
bord ,  les  repose  et  peut  même  tromper  la  faim.  C'est  pour 
eux  une  source  de  jouissances  et  un  gage  de  bienveillance 
pour  les  autres.  lisse  croiraient  perdus  s  ils  ne  fumaient,  et 
ils  se  disent  ou  se  croient  malades  aussitôt  qu'ils  ont  perdu 
le  goût  de  la  pipe;  comme  dans  leurs  maladies,  ils  se 
croient  guéris  ou  hors  de  danger  lorsque  ce  goût  leur 
revient.  —  Cette  culture  de  quelques  pieds  d*un  mauvais 
tabac  est  une  bien  petite  économie;  mais  nos  habitants  se 
reprocheraient  sans  doute  la  culture  d'une  espèce  meil- 
leure (iV.  Tabacum). 

Pénétrons  maintenant  dans  la  modeste  demeure  de  nos 
bons  îlois.  Â  Texemple  de  leur  curé ,  ils  savent  modérer 
leurs  désirs;  pas  un  meuble  inutile  et  qui  ne  soit  d'un 
usage  journalier.  Plus  propres  que  dans  maintes  communes 
du  continent  où  bêtes  et  gens  logent  ensemble,  nous  avons 


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—  324  — 

isolé  récurie  au  moins  par  un  mur  plein,  et  aucune  éma- 
nation désagréable  ne  s'échappe  pour  venir  frapper  notre 
odorat.  En  poussant  la  porte  extérieure ,  un  petit  corridor 
s'ouvre  devant  nous  et  nous  présente  deux  entrées:  Tune, 
en  face ,  nous  conduit  dans  un  petit  cabinet  ou  sont  dépo- 
sés le  lin,  les  filets,  les  instruments  de  labourage;  Tautre, 
sur  le  milieu  de  ce  corridor ,  donne  accès  à  la  pièce  prin- 
cipale où  vit  la  famille.  Entrons  et  faisons  Tinventaire.  Le 
sol  que  nous  foulons  aux  pieds  est  de  la  terre  battue;  au- 
dessus  de  notre  tête  est  un  plancher.  De  chaque  côté  de 
Tunique  fenêtre,  un  lit  s'élève  assez  au-dessus  du  sol  pour 
permettre  d*y  abriter  la  récolte  de  pommes  de  terre  ;  on  s*y 
introduit  en  grimpant  sur  un  coffre  qui  y  est  adossé,  et  Ton 
y  repose  derrière  des  rideaux  ou  derrière  des  portes  ornées 
à  jour,  qui  se  ferment  à  coulisse.  En  face  de  la  fenêtre  vitrée 
est  une  large  table ,  dont  le  couvercle  glissant  dans  une  rai- 
nure, permet  de  loger  au-dessous  le  pain,  la  viande,  le 
poisson,  le  beurre.  Vis-à-vis,  des  armoires  appuyées  à  la 
muraille  préservent  le  linge  et  les  vêtements  de  la  pous- 
sière et  de  rbumidité.  Ordinairement,  un  petit  dressoir  ou 
vamellier  sépare  ces  armoires;  les  bols,  assiettes,  tasses  à 
café, etc.,  y  sont  rangés  avec  symétrie.  Plus  souvent  en- 
core, au  milieu  du  vaissellier,  la  piété  a  ménagé  un  petit 
espace  orné,  pour  y  exposer  un  crucifix  ou  limage  de  la 
madone.  Le  froment  est  renft^rmé  dans  des  barriques  où  il 
trouve  un  abri  contre  les  dévastations  des  rats  et  des  sou- 
ris. La  marmite  et  les  bassins  sont  seuls  en  fonte,  les  autres 
ustensiles  sont  d'argile. 

II  y  a  peu  de  ménages  qui  n'ait  d'armes  à  feu  :  ce  n'est 
pas  qu'ils  craignent  les  voleurs,  mais  elles  sont  pour  eux 


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—  326  — 

un  délassement;  c'est  un  instrument  de  réjouissances  un 
jour  de  noces ,  de  chasse ,  à  l'arrivée  d*un  ami  qu'on  veut 
régaler,  de  solennité  à  la  procession,  au  jour  de  la  fête  pa- 
tronale. A  Hœdic,  les  jeunes  gens,  sur  deux  rangs,  sous  la 
conduite  du  plus  capable ,  exécutent  de  temps  en  temps  des 
décharges  de  mousqueterie.  Ces  armes  sont  suspendues  dans 
la  cheminée,  pour  être  préservées  de  la  rouille  et  de  l'hu- 
midité. 

De  chaque  côté  de  la  cheminée  sont  pratiqués  des  bancs. 
C'est  autour  de  cet  âtre  où  le  varech  pétille ,  que  la  famille 
se  réunit  pour  foire  la  veillée.  C'est  dans  ces  longues  soirées 
d*hiverque  nos  pécheurs  confectionnent  leurs  engins,  rac- 
commodent leurs  casiers.  Les  femmes  filent ,  cousent ,  tri- 
cotent ou  font  des  filets.  La  conversation  roule  sur  leurs 
gains,  leurs  pertes,  leur  adresse,  leurs  dangers  ou  d'au- 
tres aventures  de  pèche  ou  de  voyages ,  leurs  campagnes 
maritimes  sous  les  drapeaux  de  l'État,  lis  conservent  ainsi, 
de  bouche  en  bouche,  les  faits  historiques  les  plus  saillants 
de  la  localité.  Les  femmes  s'étudient  à  entretenir  la  plus 
grande  gaîté  et  la  joie  la  plus  innocente;  elles  se  plaisent , 
par  le  piquant  de  leurs  récits,  à  dérider  le  front  des  view^ 
loups  de  mer.  Des  chants  viennent  rompre  de  temps  en 
temps  cette  monotonie  :  c'est  la  douce  mélodie  d'un  canti- 
que breton.  Quelque  lecture  attrayante  vient  offrir  de  la  va- 
riété; et  souvent  le  grand-père,  entouré  de  ses  petits-fils , 
leur  apprend  les  premiers  éléments  de  la  religion ,  leur 
catéchisme.  Là ,  on  ne  parle  point  de  revenant ,  de  lulin^ 
de  loup-garou ,  etc.  ;  et  si  parfois  quelqu'un  rapporte  un 
récit  du  continent ,  c'est  pour  en  rire  à  gorge  déployée ,: 
personne  n'y  croit,  du  moins  à  Hoedic,  Les  instructions 


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—  526  — 

que ,  chaque  soir,  le  curé  d'Hocdic  a  coutume  de  Ciire  à  la 
maison  d*ÉcoIe  après  la  prière  (a  laquelle  assistent  tous 
ceux  qui  sout  dans  1  île),  n*ont  pas  peu  contribué  à  éclairer 
cfî  pays. 

Leur  bibliothèque  (car  tous  savent  lire  le  breton  et  le 
latin,  et  quelques-uns  le  français)  est  peu  volumineuse, 
mais  bien  choisie  :  ce  sont  d^s  livres  d'inslructions  dont  plu 
sieurs  furent  le  fruit  du  zèle  de  M.  Harion ,  des  histoires 
édifiantcb,  des  cantiques,  des  offices  de  chant.  Ils  ont 
aussi  leur  journal,  ils  se  sont  même  fait  inscrire  comme 
actionnaires.  On  ne  trouve  point  dans  ce  recueil  les  maxi- 
mes suivantes:  DieUj  c'est  le  mal;  la  propriété,  cest  le 
wl;  le  prêtre  est  t  ennemi  du  bonheur  de  F  homme  et  de  la 
société.  Voici  son  titre  :  Annales  de  la  propagation  de  la  foi. 

Pour  tapisserie,  dans  les  intervalles  laissés  libres  par  les 
meubles ,  des  images  rappelleront  à  la  famille  quelque  vertu 
d'un  patron. 

Vous  avez  aperçu,  sans  doute,  dans  le  petit  couloir,  une 
échelle  dressée  perpendiculairement  contre  le  mur,  elle 
vous  conduit  au  grenier.  C*est  là  que  sont  entassés  le  foin 
et  la  paille,  nourriture  du  bétail,  les  varechs  et  les  autrtô 
matériaux  desséchés,  bois  de  chauffage  pour  le  four  et 
pour  la  cuisine. 

N'oublions  pas  les  costumes.  Celui  des  hommes ,  sem- 
blable à  celui  des  marins ,  n*a  rien  qui  lui  soit  particulier. 
Une  casquette ,  les  jours  de  travail ,  ombrage  leur  tête  ; 
mais,  le  dimanche, un  chapeau  à  haute  forme  vient  encore 
ajouter  à  leur  belle  taille.  —  Les  femmes  ,  modelées  sur 
celles  de  Saint-6ildas-de-Rhuys,  ne  jettent  sur  leurs  épaules 
aucun  mouchoir  ou  fichu  les  jours  ouvrables  ;  mais  ,  le  di- 


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—  527  — 

manche ,  elles  portent  toujours  cet  ornement  de  la  modes- 
tie. Il  resplendit  môme  de  couleurs  vives  et  éclatantes ,  et 
cependant  elles  ne  visent  pas  au  lu&e,  elles  se  contentent 
de  rester  simples  et  propres.  Leur  coiffe  en  toile  fine  vient 
tomber  en  deux  basques  sur  leurs  épaules ,  à  la  hauteur 
de  la  taille  et  quelquefois  sur  la  poitrine.  Un  parapluie, 
un  mantelet  ou  un  tablier  noir ,  jetés  sur  leur  tête  et  sur 
leur  dos,  les  abritent  contre  la  pluie.  — Malgré  tous  ces  tra- 
vaux rudes  et  quotidiens,  elles  sont  remarquables  parla 
fraîcheur ,  la  modestie  et  la  douceur  de  leur  physionomie  : 
le  vice  n'y  a  pas  imprimé  ses  stigmates. 

4.®  MOTEifS  D*EXiSTBrscE.  —  Trois  industries  viennent 
leur  fournir  les  ressources  qu'exigent  les  besoins  de  cette 
modeste  existence. 

Celle  qui  vient  la  première  dans  leurs  affections  et  dans 
leurs  habitudes,  c'est  la  M^èehe. 

A  Hoedic,  à  Houiit,  les  hommes  ne  connaissent  presque 
que  leurs  bateaux  et  leurs  filets.  Ils  se  sont  essayés  de 
bonne  heure  à  ce  genre  d'exercice.  Dès  l'âge  de  10  à  12 
ans ,  les  enfants  y  sont  admis ,  et  déjà  capables  d'affronter 
les  diflScultés  de  cette  rude  vocation ,  on  les  voit  s'exposer 
avec  courage  à  tous  les  dangers.  Dans  l'intérêt  niême  de 
leurs  plaisirs,  ils  ne  craignent  pas  d aborder  les  rochers 
les  plus  menaçants  pour  y  chercher  les  œufs  de  goélands , 
mouettes,  etc.  (1).  Rien  de  tel  que  cette  longue  habi- 


(i)  Chaque  matin ,  \  la  saison ,  ils  peuvent  trouver,  sur  un  dot , 
150  k  200  œofe  de  diverses  grosseurs ,  déposés  sans  antres  pré- 
paratifs sur  le  sable  ou  dans  quelque  cavité  ou  sur  l'herbe,  La 
cuisinière  en  fait  des  omelettes  recherchées. 


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—  ^528  — 

tude  pour  aguerrir  contre  les  peines  de  cette  hasardeuse 
existence  ;  mais  c*est  surtout  en  hiver  que  ce  métier  de- 
vient dur,  lorsqu'il  leur  faut  aller  à  la  pèche  au  chalu, 
travail  qui  se  prolonge  d'ordinaire  pendant  trois  ou  quatre 
jours  sans  être  interrompu  par  la  nuit.  Malgré  ces  fatigues, 
jamais  ils  ne  s'affranchissent  de  la  loi  du  jeûne  et  de  Tab* 
stinence.  Cette  vie  d'épreuves  a  pourtant  ses  plaisirs,  et 
nous  pouvons  citer  en  particulier  le  grand  régal  qui  cou- 
ronne ces  expéditions  et  qu'on  appelle  la  cotériade  et 
cotriade^  où  le  poisson  en  bouUleture  tait  tous  les  hon- 
neurs. C'est  même  là  ce  qui  mesure  le  succès ,  et  pour 
savoir  d'un  Hœdicais  ou  d'un  Houatais  si  la  pêche  a  été 
bonne,  demandez-lui  s'il  y  a  cotriade  :  c'est  la  formule 
consacrée,  il  ne  répondrait  pas  à  une  autre. 

On  prend  tout  autour  de  Houat,  année  commune,  pour 
7  à  800  francs  de  homards ,  et  à  peu  près  pour  2,000 
francs  à  Hœdic.  (Les  Hœdicais  passent  pour  les  plus  expé- 
rimentés en  ce  genre  de  pêche.)  Mais  c'est  surtout  aux 
environs  des  fies  Glénans  que  la  pêche  des  crustacés  se 
fait  en  grand.  Chaque  Hœdicais  a  pu,  pendant  les  der- 
nières années,  f  n  vendre  pour  5  à  600  francs  (1).  On  j 
voyait  près  de  200  barques  réunies  de  différents  ports , 
chacune  montée  par  cinq  ou  six  marins.  Trois  ou  quatre 
caboteurs  anglais  y  viennent  acheter  tous  les  homards  ou 
tailleurs  {Astacus  marinuSy  Fab.) ,  mais  ils  dédaignent  les 


(l)A  Hoaat,  Si  Hœdic ,  chaque  homme  dHin  équipage  peut, 
selon  sa  conduite  plus  ou  moins  sage ,  posséder  en  caisse ,  fia 
d'année ,  5  k  600  francg ,  frais  d'entretien  et  de  noamtore  payés. 


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langoustes  ou  gris  (Palinurus  quadricamis,  Fab.) ,  qui 
prennent  une  autre  direction  (1).  Le  jeudi,  on  se  rend 
dans  un  port  du  continent  pour  la  vente  :  Houatais  à  Vannes 
et  à  Auray>  Hœdicais  à  Nantes,  après  avoir,  au  besoin, 
complété  leur  chargement  à  Belle-Ile.  Leur  vieille  salée 
est  aussi  un  objet  de  commerce,  mais  qui  ne  va  pas  au-delà 
de  Belle^lle,  où  elle  s'échange  contre  des  pommes  de  terre. 
Ils  négligent  complètement  les  chevrettes  {Cancer  SquiUa^ 
L.)  et  les  boucauds  {Crangon  tulgaris) ,  qui  sont  rares. 

Les  instruments  dont  ou  se  sert  pour  la  péclie  sont  ;  le 
ChalUihDragtw^  les  Grands- Filets ,  h  Seine j  le  Trois- 
MaiUes  et  les  Casiers.  Sous  ce  dernier  nom  sont  compris 
deux  engins  différents  :  le  premier  consiste  dans  une 
planche  sur  les  bords  de  laquelle  des  demi-cercles  en  bois 
viennent  former  berceau  ;  un  filet  recouvre  ces  demi-cer- 
cles^ se  termine  aux  deux  extrémités  par  une  ouverture 
dont  révasement  dinûaue  a  mesure  qu'elle  s'enfonce  à  l'in- 
térieur, offrant,  comme  nos  souricières  en  fil  de  fer,  une 
facile  entrée  et  une  sortie  impossible.  Cet  instrument  a , 
pour  nos  pécheurs ,  une  origine  anglaise.  Après  le  départ 
de  ces  hétes  de  circonstance ,  un  Hœdicais  rencontra  la 
carcasse  d'un  de  ces  instruments,  le  reconstruisit  en  entier, 
et  fit  part  aux  voisins  de  sa  découverte.  Le  second  repré- 
sente une  cage  en  osier  ouverte  à  son  extrémité  supérieure 
et  assez  semblable  à  celles  que  nous  donnent  les  planches 


(I)  Le  Imgage  usuel  de  nos  îles  est  l'inverse  du  langage  scien- 
tifique. Une  eemblaUe  anomalie  existe  sur  la  place  de  Nantes , 
oïl  les  Bruants  sont  Verdiert ,  et  les  Verdiers  s'appellent 
Bruants^. 

23 


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—  350  — 

des  pêches  de  TEncyciopédie  méthodique  (pi.  45,  fig.  5). 
—  A  Texception  de  ce  dernier ,  qu'on  achète  à  Nantes ,  tous 
les  autres  instruments  sont  Touvrage  de  nos  pêcheurs.  Ils 
tournent  même  le  fil  qui  doit  servir  à  leur  fabrication  : 
il  n'est  pas  jusqu'aux  cordages  qu'ils  ne  préparent  de  leurs 
mains. 

Quant  à  Tappftt  dont  on  se  sert ,  c'est  toujours  du  pois- 
son ou  des  annéiides  ;  mais  chaque  espèce  a  son  morceau 
de  prédilection.  Pour  les  homards,  langoustes  et  cancres, 
tout  poisson  mis  dans  les  casiers  les  attire  ;  lorsqu'on  em- 
ploie l'hameçon ,  c'est  pour  les  cancres  un  morceau  de 
vieille  {Labrus,  L.);  pour  les  vieilles,  au  contraire,  ce 
sont  les  fragments  de  cancre,  les  pestithes  {Nereis,  Cuv.), 
ou  les  bugues  de  mer  {Bihuegued  de  nos  flois,  Arénicole  des 
pêcheurs^  Lam.,  Lumbricus  marinus^  L.). 

Les  espèces  de  poissons  pêchées  le  pltts  habituellement 
par  les  Houatais  et  les  Hœdicais  sont  les  suivantes  :  (I) 

NOMS  YULGÀIRBS.         ROMS  BRBTOIfS  IfOMS  SCIBRTinQCSS. 

DANS  CES  1LB8. 

Alaises.  ...........  Alezet — 

.  Aiguillettes Angaeillet Esoas  âeloney  L. 

Bars • Dreinneguet. . .  Perça  labrax ,  L. 


(1)  Pour  rendre  complète  la  liste  des  poissons  qui  TÎvent  près 
de  nos  tics  ou  qu'on  y  rencontre  accidentellement ,  il  faudrait  on 
très-long  séjour  an  milieu  des  péchears.  raorais  même  été  très- 
embarrassé  pour  traduire  en  langue  scientifique  les  noms  vul*» 
gaircs  que  me  donnaient  nos  insulaires ,  si  les  Annales  de  la 
Société  AcadémiquB  (1843)  n'avaient  été  enrichi  d'un  travail  sé- 
rieux sur  les  poissons  de  notre  Loire-Inférieure ,  par  un  savant 
(M.  Desvaux)  dont  Féloignoment  sera  toujours  sensible  pour  nous* 


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—  531  — 

Cavales Gavalet —  ? 

.  Charoux Charohet —  ? 

Ghinchars Checharct ....  Scomber  irachurus^  L. 

Congres CoDgrct Muraena  conger^  L. 

Corlazos •  Courlazet Labtus  cornuôius ,  L. 

Demoiselles Damezelet ....  —  ? 

Dorades Toradet Spams  avrata ,  L. 

DrevelB Hartet —  ? 

Grondins Grondeignct. . .  Trigla  eu  eu  lus  ^  Bloch ,  et 

—  Gumadus ,  L. 

Liens Leanncguct. . . .  Oadus  pollœchius ,  L. 

Moines PesqnetMeneh.  Squalus  squaiina ,  L. 

Maquereaux Berrelly Scomber  scombrus  ^  L. 

Merlans Merlanet Gadus  ruber ,  Lacép. ,  et 

G,  merlangus  ^  L. 

Merlus Merlcuct Gadus  meriuecius ,  L. 

Pelons  et  Pirlons....  Pelonct Trigla  hirun  do  ^  L, 

Plies Plincot Pleuroneetusplatessa^  L. 

Posteaux  et  Poche- 

teaux Travantet Rata  bâtis ^  L. 

Poules  de  mer Yer-dear Zeus  faber^  L. 

Prêtreaux Beloyon Aiherina  hepsetus, 

Quiquets  ou  Chats  de 

mer Quiquchct.  . . .  Squalus aeanthtas^  Gmcl. 

Baie Er  Bée Raia, 

Bougets Bongellct Mullus  barba  tus ,  L. 

Soles SecUlet Pleuronectus  solea ,  L. 

Sourds  d'eau  ou  Trom- 

bleurs Trcincriou.         Torpédo. 

Sturpes Sturpel —  ? 

Tacos  ou  Bogues. . . .  Tacohct Gadus  minuius ,  L. 

Tarzes Tarzet —  ? 

Turbots Treboutet JRhombus  maximus^  Cuv. 

Vieilles Grouahet Genre  Labrus. 

L*algologue  rencontre  à  chaque  instant,  dans  les  PauUê 


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—  332  — 

ou  petites  flaques  d*eau,  à  marée  basse ,  le  Crapaud  de 
mer  {CoUus  Scorpius^  L.) ,  dans  le  sable  le  Lançon  (Am- 
niodytes  TobiamiSy  Lacép.),  et  dans  le  marais  d'Hoedic 
l'anguille  {Muraena  AnguiUa^  L.). 

La  seconde  industrie  à  laquelle  ils  consacrent  leurs  soios, 
c'est  \  MgrieuiitÊrm. 

Il  n'y  a  que  quatre  grands  champs,  dans  chaque  tie  ;  deux 
sont  cultivés  en  froment,  et  les  deux  autres  en  petite  récolte, 
ou  laissés  en  friche  pour  pâture. 

Les  espèces  cultivées  sont  :  le  froment,  qui  forme  la 
grande  récolte  (1),  Torge,  les  petits  pois,  la  jarosse,  quel- 
ques légumes,  le  lin  et  la  pomme  de  terre. 

Pour  l'opération  du  rouissage,  le  lin  est,  à  Hoedic,  déposé 
dans  les  douves  du  grand  étang  dont  nous  avons  parlé;  à 
Houat,  les  habitants  privés  de  cette  utile  ressource,  creusent 
dans  le  sable  des  ravines  des  trous  où  Teau  s'accumule  ea 
quantité  suffisante  pour  cette  préparation. 

La  maladie  de  la  pomme  de  terre  qui,  depuis  1845  sur- 
tout, attaque  si  violemment  et  si  universellement  ce  pré- 
cieux tubercule,  n'a  pas  encore  fait  invasion  dans  nos  îles, 
tandis  que,  à  Belle-Ile,  si  voisine  pourtant,  l'insistance  du 
fléau  obligera  bientôt  d'abandonner  cette  culture  ;  déjà  ils 
essaient  de  la  remplacer  parle  maïs,  importation  excellente, 
due  au  zèle  de  M.  Trochu,  agronome  éminentde  l'île  (2). 


(i)  A  Houat,  400  hectolitres,  année  commune;^  k  Hœdic, 
moitié  moins. 

(2)  Les  habitants  de  Belle-De,  me  disait  M.  Leclech,  vicaire  de 
Palais,  reconnaissent,  dans  cette  nouvelle  récolte,  plusieurs  avan- 
tages :  les  grains  servent  en  farine  k  faire  de  la  bouillie,  et  cette 


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~  555  — 

Tai  du  chercher  quelle  pouvait  être  la  cause  de  cette  ano« 
malie  ;  et  j'ai  cru  la  trouver,  non  dans  la  nature  quoique 
différente  des  sols, encore  moins  dans  l'espèce  cultivée, 
puisque  nos  insulaires  adiètent  leur  semence  à  Belle-Ile, 
mais  bien  dans  Tépoque  de  la  récolte.  En  effet,  le  8  octo- 
bre dernier,  on  procédait  encore  à  l'extraction  des  pommes 
de  terre  dans  les  champs  de  Belle-Ile,  et  elles  étaient  pbbs- 
QUBTOUTBS  perdue»;  quinze  jours  plus  tard,  je  trouvais  les 
habitants  de  Missillac  (Loire-Inférieure),  travaillant  en  pure 
perte  à  une  opération  semblable  :  toutes  itaienê  gâtées;  — 
mais  à  Houat,  mais  à  Hcedic,  elles  étaient  recueillies  de- 
puis les  premiers  jours  de  septembre,  ou  même  dès  la  mi- 
aoùt,  et  pas  une  ne  s'est  gfttée  jusqu'à  ce  moment.  Cette 
observation  vient  confirmer  la  justesse  des  instructions  de 
H.  Neveu-Derotrie ,  inspecteur  d'agriculture  de  la  Loire- 
Inférieure  ,  dans  son  rapport  au  Préfet ,  en  date  du  2  août 
1846  (1). 


farine  est  très-nourrissante  \  les  feuilles  vertes  servent  de  nourri- 
tare  aux  bestiaux  pendant  la  moisson  ^  l'enveloppe  de  Fépi  est  ex- 
cellente pour  paillasse,  et  se  vend  1  fr.  50  k  2  fr.  le  sac^  les  tiges 
sèches,  broyées  et  données  en  cet  état,  sont  recherchées  de  tous 
les  bestiaux;  chaque  grain  rapporte  900  à  1000  pour  1  ;  k  peine  le 
cultivateur,  snr  3  années,  en  compte-t-il  une  mauvaise,  due  an  dé- 
font de  chaleur. 

(1)  Des  expériences  faites  pendant  deux  années,  par  un  fermier 
de  H.  Pleury,  maire  de  la  Ghapello-sur-Erdre  (Loire-Inférieure), 
donnent  un  nouveau  poids  k  cette  opinion  :  11  a  planté  dans  un 
champ  des  pommes  de  terre  provenant  de  même  semence.  Dans 
la  moitié  du  champ ,  il  a  arraché  ces  tubercales  lorsque  les  tiges 
étaient  encore  vertes,  et  le  reste  dans  l'autre  moitié  lorsque  lesti- 


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—  534  ~ 

La  mer,  dans  son  inépuisable  richesse ,  fournit  au  sol  in- 
sulaire la  presque  totalité  des  engrais  que  le  cultivateur  da 
continent  obtient  de  ses  bestiaux.  La  Zastére  (Curse) ,  les 
algues  du  genre  Larninaria  (Cornait)  et  les  plus  petits  va- 
rechs  couverts,  les  uns  et  les  autres,  à  leur  base,  de  mol- 
lusques, corallines,  sertulaires  et  autres  zoophytes,  sont 
jetés  à  la  côte  dans  les  gros  temps.  L'usage  de  les  stratifier 
avec  de  la  terre  pour  en  obtenir,  à  la  longue,  un  compost 
noir  tout  à  fait  semblable  au  fumier  des  fermes,  est  in- 
connu dans  les  deux  îles.  Ils  sont  employés  sous  les  bes- 
tiaux comme  litière  après  avoir  été  parfaitement  séchés; 
c*est  ici  la  base  de  l'agriculture,  et,  sans  le  goémon ,  bi  cul- 
ture serait  presque  nulle.  Cet  engrais  a  un  mérite  tout  par- 
ticulier :  c'est  qu'il  ne  porte  point  avec  lui  les  germes  de 
cette  foule  d'herbes  nuisibles,  dont  le  fumier  des  étables 
infecte  souvent  la  terre  et  que  le  cultivateur  a  tant  de  peine 
à  détruire. 

La  cendre  de  goémons  sert  aussi  à  amender  les  terres. 

Les  Fucus  serratus  {Chubelen,  balai),  Vesiculosus 
(TarheCj  qui  craque  dans  le  feu)  et  Nodosus  (Huitel, 
sifflet) ,  ont  une  autre  destination.  Les  femmes  vont  les 
couper  sur  les  rochers  découverts  à  marée  basse ,  les  éten- 
dent ensuite  sur  la  côte  pour  les  faire  sécher.  Débarrassés 
par  les  eaux  pluviales  des  sels  qui  apparaissent  à  leur  sur- 
face, ils  seront  entassés  dans  les  greniers  et  devront  servir 


ges  étaient  eatièrement  desséchéea.  Pas  un  de  ceux  qui  ont  été  ir* 
rachég  avec  les  tiges  eneore  vertes  n'a  été  attaqué  et  ne  s'est  cor- 
rompu. 


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-  355  — 

de  bois  de  chauffage  ou ,  plus  rarement ,  de  litière  aux  bes- 
tiaux. Cette  provision,  qui  offre  de  si  grandes  difficultés  à 
Houat,  où  les  femmes  ordinairement  obligées  de  la  faire 
doivent  souvent  gravir,  la  tète  chargée  de  varechs,  une 
côte  abrupte  de  10  à  20  mètres  d'élévation,  devient  facile 
à  Hœdic  :  la  mer  ly  entasse  près  de  la  chaussée  de 
Porh  Bras ,  et  principalement  à  Porh  Lmiid  et  à  Porh 
Pamac. 

Un  autre  genre  de  combustible  bien  connu  sur  presque 
toutes  nos  côtes  et  peut-être,  en  général ,  dans  les  pays  dé- 
pourvus de  bois,  et  dont  nous  pourrions  retrouver  Tusago 
jusque  dans  TÉgypte,  est  également  employé  dans  nos 
îles  :  je  veux  parler  des  excréments  de  bœufs  et  de  vaches. 
Les  bouses  y  ramassées  sur  le  terrain,  sont  séchées  sans  au- 
tre manipulation  et  brûlées  telles.  Mais,  en  été,  on  en  re- 
tire aussi  des  écuries,  on  les  mélange  avec  la  balle  de  fro- 
ment, on  les  pétrit,  on  les  façonne  en  gâteaux  ronds  et  plats 
que  Ton  fait  sécher  contre  les  murs.  Le  feu  en  est  meilleur; 
mais  on  en  fabrique  à  peine  pour  brûler  pendant  un  mois 
ou  deux  ;  tout  le  reste  est  employé  à  faire  du  fumier. 

Le  règlement  (CA.  3,  §  4)  contient  une  excellente  me- 
sure de  salubrité:  c'est  la  défense  d'établir  les  fumiers  au 
sein  du  village;  mais  cet  article  est  abrogé,  sinon  de  droit, 
au  moins  de  fait,  car  les  fumiers  se  trouvent  dans  le  ha- 
meau. 

Ce  n'est  point  à  l'aide  de  longues  perches,  ni  de  fléaux, 
ni  de  rouleaux  que  les  Hcedicais  et  les  Houatais  font  sortir 
de  son  épi  le  grain  de  froment.  Ils  préfèrent  l'usage  antique 
du  dépiquage j  bien  connu  encore  dans  nos  contrées  méri- 
dionales, c'est-à-dire  l'égrenage  fait  au  moyen  du  piétinc- 


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—  356  — 

meut  des  animaux.  En  Judée,  le  bœuf  avait  ce  privilège; 
ici ,  le  cheval  seul  est  chargé  de  ce  service,  et  nos  pécheurs, 
aussi  humains  que  le  législateur  des  Hébreux,  lui  laissent 
volontiers  prendre  quelques  bouchées  des  produits  de  cette 
terre  qu'il  a  fécondée  par  ses  fatigues  et  ses  sueurs  :  sa  ra- 
tion est  même  doublée  en  raison  de  ses  travaux.  On  trouve 
dans  ce  mode  d*opérer  les  avantages,  sur  le  fléau,  d*une 
plus  grande  vitesse  et  de  l'amélioration  de  la  paille  pour  la 
nourriture  des  bestiaux.  —  La  nécessité  de  présider  dans 
Taire  et  de  faire  manœuvrer  les  chevaux ,  opération  peu 
poétique,  a  cependant  inspiré  la  muse  d'une  jeune  fille 
d'Hœdic, 

Car  que  faire  en  une  aire  k  moins  que  Ton  ne  chante  5 
elle  a  donc  chanté,  improvisant  paroles  et  musique;  et  une 
a)nmr%ai\on  avec  son  cheval  sur  les  travaux  de  l'île  (1)  lui 
a  fou/ni  52  couplets  ou  208  vers,  conservés  manuscrits. 
Je  me  déclare  incapable  d'apprécier  son  mérite  littéraire , 
car  je  suis  réduit  à  dire  ce  qui  me  fut  souvent  répondu  lors- 
que je  faisais  entendre  à  ces  oreilles  bretonnes  une  inter- 
rogation en  langue  française  :  n'antand  quet ,  n'antand 
quel. 

Mj'éat§eaHow%  ae9  be9iiat§œ  est  aussi  une  de  leurs 
principales  industries  (2).  Â  Houat,annéecommune,oneu 


(1)  Devis  être  Pelagi  ha  marh  Antoine^  e  tomein  guet 
loéson. 

(2)  A  Houat,  29  taureaux,  44  bomfe,  64  vachea,  57  génisses; 
35  k  40  porcs  en  été ,  en  hiver  tous  au  charnier;  38  chevaux  eur 
tiers.  —  A  Ilœdic,  12  taureaux ,  40  boeufs,  60  vaches  ^  80  gé- 
nisses ;  40  k  45  porcs  en  été  \  40  chevaux  entiers. 


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—  337  — 

vend  pour  1,500  k  2,000  fr.  ;  mais ,  chaque  année  aussi ,  on 
en  perd  à  la  côte  ou  par  maladie  au  moins  pour  600  fr.  ;  la 
perte  s'est  éle?ée  quelquefois  à  1,200  fr.  A  Hœdîc ,  on  en 
vend  autant  qu'à  Houat,  mais  on  en  perd  moins ,  grftces 
à  la  moindre  élévation  des  côtes.  ' 

Les  bestiaux  se  nourrissent  comme  ils  peuvent  dans  les 
cbamps  ou  dans  les  falaises,  cherchant  quelques  brins 
d'herbes  épars  parmi  les  ajoncs  ou  les  Epkedra  (Paumian) 
qu'ils  foulent  aux  pieds.  Quand  les  récoltes  sont  faites , 
rtleenttère  leur  est  abandonnée  et  se  transforme,  pour  eux , 
en  une  vaste  pâture  où  ils  errent  en  liberté.  Dans  tout 
autre  temps,  les  Hœdicais  ont  adopté,  sur  leurs  parcelles, 
la  noéthode  de  la  pâture  au  piquet ,  système  rarement  suivi 
à  Houat.  Les  Hœdicais  y  trouvent  les  avantages  suivants  : 
Nourriture  d'un  plus  grand  nombre  d'animaux  sur  une 
même  étendue  de  terrain  ;  possibilité  de  les  faire  paître 
dans  de  petites  parcelles  herbeuses  sans  exiger  la  présence 
constante  d*un  gardien  ;  facilité  de  récolte  des  matériaux 
qui,  après  dessication,  deviendront  bois  de  chauffage. 

Les  bœufs  et  les  chevaux  ont  seuls  ,  les  jours  de  travail, 
un  supplément.  Cependant  on  recueille  un  peu  de  foin  sur 
les  tlots  Er  Valhum  (1)  >  Er  Valhuec  et  Er  Senis.  La  paille 
de  froment  leur  est  aussi  conservée ,  de  même  que  les 
mauvaises  herbes  qu'on  enretire.  La  paille  de  jarosse,  celle 
des  petits  pois,  les  algues,  et,  pour  être  complet,   les 


(1)  Les  HoBdicais  et  les  Houatais  en  jouisseiit  altenatiTement 
pendaDt  une  année  entière.  Sents  est  aujourd'hui  un  lieu  de  dé- 
portation pour  les  chevaux  de  Houat  méchants  ou  voleurs* 


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—  338  - 

ajoncs  piles ,  voilà  la  nourriture  du  bétail.  Aussi  maigrit- 
il  pendant  tout  Thiver;  mais  le  pâturage  vient  à  bonne 
heure  dans  nos  îles ,  et ,  au  printemps ,  il  y  a  abondance* 
Alors  aussi  les  apophyses  des  vertèbres,  naguère  saillantes 
et  décharnées ,  disparaissent  bientôt  sous  un  voile  soyeux 
et  étoffé.  Aux  mois  de  mai  et  juin,  le  bétail  a  jeté  sa  robe 
d'hiver  et  repris  tout  son  éclat.  C'est  aussi  la  saison  des 
foires ,  et  nos  insulaires  en  ont  une  qui  porte  le  nom  de 
foire  de  HowU.  Elle  se  tient  sur  la  côte  de  Rhuys,  le  24 
mai.  «  Les  deux  flotilles  des  chaloupes  de  Houat  et 
»  d'Iiœdic,  nous  dit  H.  A.  de  Francheville,  chargées  de 
»  bestiaux,  appareillent  à  la  même  heure  et  s'efforcent  de 
»  voguer  de  conserve  afin  d'arriver  en  même  temps  à  la 
»  petite  crique  de  Porh  Maria  (et  si  le  vent  est  favorable  a 
»  Porh  Sont  Jàq)  en  Saiut-Gildas.  Pour  faire  ledébar- 
0  quement,  les  bestiaux  sont  jetés  à  la  mer  et  recueillis 
»  ensuite  sur  le  rivage.  Avant  d'être  mis  en  foire ,  ils  sont 
D  conduits  dans  deux  prairies  séparées,  qui  sont  la  propriété 
a  de  chacune  des  deux  îles  et  qui  ne  leur  servent  que  ce 
j»  jour.  Ceux  qui  n'ont  pas  été  vendus ,  ce  qui  arrive  rare- 
»  ment,  sont  menés,  le  28  mai,  à  la  foiredeSaint-Co- 
^i  lombier,  enSaraeau,  »  et  plus  fréquemment  ramenés 
dans  Tiie. 

Quand  Thiver  est  rude  ,  ce  qui  n'arrive  pas  souvent^  les 
bestiaux  sont  à  plaindre.  Les  bœufs  et  les  vaches  (1)  sont 
logés  sous  des  toits  ;  mais  les  chevaux  ne  connaissent  au- 
cune espèce  d'asile,  excepté  quand  les  neiges  ou  les  glaces 


(t)  Chacune  peut  donner  trois  litres  de  lait  par  jour. 


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—  539  — 

couvrent  le  sol ,  car  alors  ils  sont  plus  exposés  à  tomber  à 
la  côte.  II  n'y  a  ,  dans  chaque  île ,  que  des  chevaux  en- 
tiers. L'habitude  de  ne  les  amener  presque  jamais  à  Té- 
curie  ,  mais  de  les  laisser  passer  hiver  comme  été ,  la 
nuit  comme  le  jour^  en  plein  air,  le  peu  détendue  de 
riie,  la  pente  abrupte  des  côtes  qui  ont,  en  quelques  en- 
droits ,  près  de  trente  mètres  d'élévation ,  rendent  cette 
mesure  nécessaire.  On  achète  au  continent  de  jeunes  pou- 
lains pour  remplacer  ceux  qui  ont  péri ,  car  malgré  la 
sage  précaution  dont  je  parle,  chaque  année  les  habitants 
ont  à  déplorer  la  perte  de  quelques  compagnons  de  labou- 
rage. 

Le  naturaliste  peut  vérifier  à  son  aise,  sur  ces  ilôts, 
les  curieuses  observations  que  Sanchez ,  médecin  des  ar- 
mées russes ,  communiquait  à  Buffon ,  sur  les  mœurs  des 
chevaux  vivant  en  liberté.  Ces  animaux  se  sont  partagés 
entre  eux  en  différentes  compagnies  qui  paissent  par  bri- 
gades, sans  se  séparer  ni  se  mêler.  Chacune  de  ces  troupes 
a  un  cheval  chef  qui  la  commande  et  la  guide.  On  le  voit 
très-vigilant ,  toujours  alerte ,  et  il  fait  de  temps  en  temps 
le  tour  de  sa  petite  troupe.  Toutes  les  fois  qu'un  nouveau 
poulain,  amené  du  continent,  débarque  dans  l'île,  vite 
chaque  chef  vient  à  la  tête  de  sa  compagnie  disputer  à 
ses  concurrents  la  possession  de  la  nouvelle  recrue.  Ils 
galopent  vers  lui,  passent  et  repassent  à  ses  côtés,  le  ca- 
ressent et  l'appellent  par  des  hennissements  prolongés.  Si 
ces  procédés  affectueux  n'ont  pas  de  succès,  les  chefe  ja- 
loux en  viennent  à  un  combat  singulier,  où  les  dents  et 
les  pieds,  armes  redoutables ,  ftont  maniées  avec  prestesse 
et  force.  La  victoire  est-elle  indécise?  Les  chefs  appellent 


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~  340  — 

à  une  mêlée  générale  tonte  la  troupe  sous  leurs  ordres. 
Un  mouvement  de  queue,  un  son-  qu'on  ne  peut  convena- 
blement  traduire ,  voilà  le  signal.  Le  chef  s'élance  avec  sa 
compagnie  pour  rompre  les  rangs  des  heureux  qui  déjà 
ont  entouré  le  poulain ,  cherche  à  le  jeter  d'un  coup  d'é- 
paule hors  de  la  troupe  rivale  pour  s'en  emparer  à  son 
tour,  et  fait  tousses  efforts  pour  maintenir  la  victoire  et 
assurer  sa  conquête.  Le  jeune  arrivant  est  ainsi  disputé, 
enlevé,  repris;  et  ces  manœuvres  durent  plusieurs  jours, 
c'est-à-dire,  jusqu'à  ce  que  le  nouveau  débarqué  ait  déci- 
dément fixé  son  choix  et  adopté  une  compagnie.  Pendant 
cette  longue  lutte,  le  pauvre  poulain,  harcelé  de  tous 
côtés ,  n'a  pas  le  loisir  de  contenter  la  feim  qui  le  tour- 
mente. —  La  jalousie  parmi  ces  chevaux  est  poussée  au 
point  que  si  l'on  vient  à  caresser  un  cheval  d'une  maison 
sans  avoir  les  mêmes  prévenances  pour  son  commensal ,  le 
cheval  méprisé  mordra  son  maître  ou  battra  son  camarade. 
—  Jamais  on  ne  voit  les  chevaux  descendre  à  la  mer  pour 
y  boire  ou  pour  s'y  baigner.  Quant  aux  vaches,  on  les  ren- 
contre souvent  sur  le  bord  du  rivage  occupées  à  manger 
le  goémon  frais  qu'elles  ne  dédaignent  pas. 

Dans  ces  occupations  que  nous  venons  de  décrire ,  cha- 
cun a  sa  part.  Aux  hommes  seuls  appartiennent  les  aven- 
tureuses expéditions  de  la  pêche ,  ainsi  que  celle  de  la  vente 
de  ses  produits.  C'est  aux  femmes  de  veiller  sur  le  bétail 
et  de  labourer  la  terre;  mais,  quoîqu'en  dise  Ogée,  les 
hommes  les  aident  beaucoup.  Dès  qu'ils  peuvent  rester 
quelques  instants  sur  l'fle ,  ils  s'empressent  de  partager  les 
fatigues  de  leurs  compagnes,  surtout  à  l'époque  des  se- 
mailles, ou  de  la  récolte,  ou  des  différents  labours  pré- 


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—  541  — 

paratoires  qui  ont  lieu  trois  ou  quatre  fois  par  an  pour 
la  partie  en  friche.  Quand  les  travaux  des  champs  sont 
finis,  les  femmes  filent^  tricotent  ou  cousent  pour  ]a  mai- 
son ,  et  n'ont  pas  le  temps  de  s'occuper  à  &ire  des  filets 
pour  aller  les  vendre  au  continent.  Les  jeunes  filles  et  les 
enfiints  se  rendent  à  marée  basse  sur  les  rochers  pour  y 
recueillir  les  Bemics  {Patelles),  qui ,  crus  ou  cuits  «  servent 
à  Talimentation  des  cochons,  animaux  qui  ne  sont  pas 
pour  eux  une  branche  de  commerce,  mais  un  simple 
objet  de  consommation.  Lorsque  les  sangsues  abondaient 
dans  le  grand  marais  d'Hœdic,  les  habitants  trouvaient 
encore  une  ressource  dans  la  vente  de  cette  annélide ,  mais 
elle  y  est  devenue  rare  et  d'un  bien  petit  bénéfice. 

5.®  ÉTAT  sAHiTAiBS. —  «  L'abuégatiou  de  tous  les  vices, 
j>  une  vie  laborieuse ,  la  frugalité ,  la  salubrité  de  Fair  et 
»  la  bonté  des  eaux,  les  font  jouir  d'une  santé  constante, 
»  d'un  corps  robuste  et  de  la  longévité  qui  en  est  la  suite.  » 
J'applique  ce  passage  d'Ogée  (art.  Houai)  aux  deux  îles, 
car  je  ne  puis  ajouter  avec  le  même  auteur  (art.  H<Êdk) , 
que  les  Hwdkais  sofU  faibles  et  tnalsaiiis.  Les  assertions 
dont  il  cherche  à  fortifier  son  opinion  méritent,  du  reste, 
qu'on  s'y  arrête  un  instant.  «rj£'air>  dit-il,  y  est  très-mal'^ 
»  «otn,  et  cette  insalubrité  est  occasionnée  par  un  marais 
j»  d'eau  douce  qui  assèche  dans  les  moindres  chaleurs. 
»  L'eau  de  la  mer  s'y  mêle  dans  les  grandes  marées,  mais 
»  en  très-petite  quantité,  et  ne  sert  qu'à  augmenter  la 
ji  corruption,  qui  devient  quelquefois  si  considérable,  qu'on 
»  a  vu  dans  la  dernière  guerre  (1761  sans  doute)  les  dé- 
M  tachemenls  de  trente  hommes  que  la  garnison  d'Auray  y 
»  fournissait  et  que  l'on  relevait  tous  les  quinze  jours,  en  re^ 


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—  542  — 

»  venir  attaqués  presque  totalement  de  fièvres  violentes, 
))  dont  plusieurs  soldats  périssaient.  Les  reptiles,  soitoat 
»  les  crapauds,  s*y  multipliaient  au  point  que  les  soldais 
»  et  les  habitants  s'en  trouvaient  couverts  à  leur  réveil. 
»  Toutes  les  poches  en  étaient  pleines ,  et  ces  animaux  pé- 
»  nétraient  jusque  dans  les  marmites;  aussi  les  Hœdicais 
»  sont  faibles  et  malsains.  » 

Lorsque,  dans  mes  causeries  avec  les  Hœdicais  aux  for- 
mes musculeuses  et  athlétiques ,  je  leur  lisais  ce  passage, 
les  uns  laissaient  errer  sur  leurs  lèvres  un  sourire  malin 
et  ironique,  et  reléguaient  ce  récit  parmi  les  contes;  d'au- 
tres, prenant  la  calomnie  au  sérieux,  défendaient  chau- 
dement le  lieu  qui  les  vit  naître.  L*air,  me  disaient-ils, 
ne  peut  être  malsain  ici  ;  voyez  le  peu  d'étendue  de  notre 
île ,  elle  a  à  peine  un  kilomètre  de  large  dans  la  partie 
où  se  trouve  le  marais;  celui-ci  n'a  que  2,500  mètres  de 
circonférence;  il  est  exposé  au  souffle  de  tous  les  vents; 
Fair  de  l'Océan  est  toujours  agité  ;  voilà  au  moins  un  ob- 
stacle au  séjour  des  miasmes,  ils  auraient  pu  me  citer 
leurs  Annales ,  qui  ont  eu  soin  de  constater  les  années  où 
pas  un  Hœdicais  n'avait  payé  le  dernier  tribut  à  la  nature; 
et  cette  note  était  souvent  répétée  et  même  quelquefois 
trois  années  de  suite.  Ils  regardaient  la  maladie  de  leur 
garnison  comme  une  fable  inventée  par  les  soldats,  ap- 
puyée par  le  chef  subalterne  qui  les  commandait ,  pour 
discréditer  un  rocher  sur  lequel  aucune  de  leurs  passions 
ne  trouvait  d'aliment.  Les  chirurgiens-majors  de  nos  ar- 
mées pourront  dire  si  cette  supposition  est  trop  hasardée, 
et  si  bien  des  fols  de  pareilles  ruses,  pour  arriver  à  une 
fin  analogue ,  n'ont  pas  été  employées.  —  Pour  ce  qui  est 


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des  crapauds  {Bufocàlafnila,  L.),  nos  villageois  avouaieût 
qu'ils  sont  communs,  mais  ils  soutenaient  aussi ,  avec  rai- 
son ,  qu'ils  le  sont  tout  autant  sur  toutes  les  dunes  du  lit- 
toral de  la  Bretagne  et  de  La  Rochelle ,  et  se  plaisaient 
à  proclamer  quils  ne  sont  pas  venimeux. 

Quant  à  l'habitude  de  se  loger  dans  les  poches  et  de 
grimper  dans  les  marmites  ,  il  paraît  que  ces  pauvres  ba- 
traciens y  auraient  renoncé,  du  moins  depuis  Ogée; 
exemple  frappant  de  politesse  et  de  civilisation  erapau- 
dienne  que  devront  citer  les  quelques  philosophes  qui  font 
au  genre  humain  le  curieux  honneur  de  descendre  d'une 
grenouille.  J'ajoute  :  bien  loin  que  le  fait  avancé  par  Ogée 
puisse  être  prouvé  et  qu'on  doive  admettre  comme  légi- 
time la  conclusion  qu'il  prétend  faire  ressortir,  des  re- 
marques par&itement  contradictoires  ont  été  faites  pres- 
~  qae  en  même  temps  que  lui  par  un  autre  observateur.  Les 
Hœdkais^  dit  Expilly  (i),  conservent  la  force  et  la  vigueur 
des  hommes  des  premiers  siècles  ;  ils  sont  bien  constitués 
et  presque  tous  de  tris-grande  taille.  M.  A.  de  Franche- 
ville  confirme  cette  dernière  opinion  en  disant  que  la  po- 
pulation  y  est  mime  plus  belle  que  dans  VUe  voisine.  Bien 
plus ,  les  chiffres  d'Ogée  môme  viendraient  péremptoire- 
ment défendre  l'innocuité  du  marais  et  des  crapauds.  En 


{i)Dicf,  géog*^  hisl.  et  politique  des  Gaules  et  de  la  France  ^ 
Paris,  i  762,  article  Beile-Isie^tX  Amsterdam,  1 764,  article  Hœdic. 
Gel  auteur  ne  donne  qae  50  hommes  (  lisez  ménages  ,  pour  èkro 
d'accord  avec  Ogée)  k  Hoaat,  et  30  k  Hœdic.  —  Bouillet ,  Dici, 
univ.  d'Hist.  et  de  Géog.j  3.»  édit- ,  1845  ,  mcnlionne  k  Iloaat 
VOO  babilants.  Évidemment,  c'est  par  trop  fort. 


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effet ,  cet  auteur  donne  à  Houat  160  habitants ,  et  aujour- 
d  hui  an  en  compte  226  ;  le  nombre  250  pour  Houat  se 
trouve  en  ce  moment  réduit  à  220. 

Les  Annales  des  deux  îles  nous  expliqueront  ces  diffé- 
rences :  de  temps  en  temps  de  désastreuses  épidémies , 
surtout  chez  les  en&nts ,  y  sont  indiquées  ;  je  signale  en- 
tre autres  pour  Houat,  1795  (fièvre  putride  :  13  décès  ) , 
1825  (fièvre  typhoïde  :  7  décès) ,  1845  (grippe  et  scarla- 
tine :  15  décès) ,  1848  (fièvre  typhoïde  :  8  décès.  Les  ou- 
vriers du  fort  eurent  autant  de  victimes  parmi  eux  )  ;  — 
pour  Hoedic,  1777  (variole)^  1842  (scarlatine).  Le  choléra 
n'a  fait  jusqu'ici  aucune  apparition  dans  ces  deux  Oes. 

Si  1  habitude  de  la  navigation  et  Tair  vif  que  recréât 
nos  ilois  contribuent  à  développer  chez  eux  la  force  et  b 
vigueur ,  avouons  aussi  que  ces  mêmes  travaux  et  Tusage 
des  salaisons  occasionnent  quelquefois  des  affections  her- 
pétiques ou  scorbutiques.  Les  moyens  hygiéniques  qu'ils 
emploient ,  et  peut-être  par  dessus  tout ,  l'usage  si  fré- 
quent de  la  pomme  de  terre ,  aliment  sain  et  nutritif  et 
de  plus  préservatif  excellent ,  si  l'on  en  croit  les  obser- 
vations de  M.  Rio ,  curé  d'Hœdic ,  et  les  expériences  de 
M.  Roussel  de  Vauxème ,  rendent  le  scorbut  rare  parmi 
eux  et  sans  terminaison  fâcheuse. 

6.*»  PBiNCiPES  ET  CABACTÈBE.  —  N'cu  déplaise  au  phi- 
losophisme ,  ces  bonnes  gens  sont  encore  convaincus  que 
le  prêtre  en  qui  ils  personnifient  la  religion ,  peut  suppléer 
à  la  maréchaussée  et  conserver  la  paix  et  le  bonheur  au 
sein  de  la  société  et  de  la  fitmille  ;  et  partout  ils  préco- 
nisent la  religion  comme  la  meilleure  serrure  de  sûreté. 
Leur  gros  bon  sens  les  empêche  de  comprendre  une  so- 


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-  345  — 

ciéié  qui  nie  le  ciel  et  l'enfer,  et  qui  ne  laisse  à  rbomme 
ici-bas  d*autre  félicité  suprême  que  celle  de  For  et  des  jouis- 
sances. Sous  l'empire  de  ces  principes  fondamentaux,  le  vol 
est  inconnu  chez  eux.  Les  objets  perdus  sont  suspendusà  la 
porte  de  l'église  ou  à  la  barrière  du  cimetière  où  le 
propriétaire  vient  les  retrouver.  Les  verroux,  les  ser- 
rures sont  encore  inutiles  pour  eux  ;  et  si  les  portes  des 
maisons  sont  quelquefois  fermées ,  c'est  contre  le  vent  et 
jamais  comme  garantie  contre  des  malfaiteurs  indigènes. 
Avouons,  cependant,  que  les  idées  de  progrès,  comme 
on  les  appelle  dans  un  certain  monde,  commencent  à 
pénétrer  dans  le  pays,  surtout  à  Houat.  Naguère,  on  en* 
tendait  les  Houatais  se  menacer  à  la  manière  des  enfants  : 
Oh  I  je  le  dirai  au  recteur,  tu  verras ,  toi  :  Afe  larau  d'er 
Person^  te  huilou^  îaû.  Maintenant  on  commence  à  rire 
de  ces  menaces,  mais  on  commence  aussi  à  sentir  le 
besoin  des  serrures  ;  encore  un  peu  de  ce  progrès,  et  nous 
verrons  que  la  présence  d'une  brigade  de  gendarmerie 
sera  indispensable  pour  rendre  les  gens  vertueux.  La  cm- 
lisation  tris-avancée  et  toute  proudhanienne  de  plusieurs 
ouvriers  des  fortifications  n'est  pas  venue,  depuis  trois  ans, 
démentir  l'importance  de  la  religion.  Nos  insulaires  se  sont 
applaudis  plus  d'une  fois  d'avoir,  par  prudence^  muni  leurs 
portes  de  serrures  contre  des  gens  qui  n'ont  d'autre  Dieu 
que  leur  ventre. 

A  Sparte ,  on  exposait  un  esclave  dans  un  état  d'ivresse 
complet ,  aux  yeux  des  enfants ,  pour  leur  inculquer  de 
bonne  heure  l'horreur  d'un  vice  qui  ravale  l'homme  au- 
dessous  de  la  brute.  A  Houat ,  à  Hœdic ,  depuis  les  tra- 
vaux des  forts,  nos  ilois  grands  et  petits  ptuvent,  et  le 

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jour  de  la  paie  et  les  jours  suivants ,  jouir  d'un  semblable 
spectacle  et  profiter  des  mêmes  leçons.  Quelle  besogne , 
grand  Dieu  !  pour  le  curé-maire,  s*il  devait  faire  observer  les 
lois  de  TAngleterre,  où  tout  individu  trouvé  sur  la  voie  pu- 
blique, en  état  d'ivresse,  est  mis  en  prison  et  paie  la- 
mende  !  Cette  conduite  n*a  pas  donné  à  nos  pêcheurs  une 
grande  idée  des  nouveaux  venus ,  et  le  bon  sens  popu- 
laire a  bien  vite  baptisé,  à  Hœdic,  la  maison  isolée  où  se 
retirent  ces  travailleurs ,  du  nom  de  Maison  perdue.  Di- 
sons, toutefois ,  avec  bonheur,  qu'il  est  dans  ce  ramassis 
d'honorables  et  nombreuses  exceptions,  et  on  les  retrouve 
surtout  (ce  qui  confirme  ma  thèse)  dans  les  Bretons  breton- 
nants,  qui  croient  encore  en  Dieu  et  observent  les  pratiques 
de  la  religion  de  leurs  pères. 

A  Houat ,  à  Hœdic ,  une  naissance  illégitime  est  chose 
inouïe  ;  jamais  un  scandale  n'est  venu  affliger  ce  pays.  Le 
Houatais ,  THœdicais  ne  connaît  que  les  chastes  joies  du 
foyer  domestique  ;  il  u*a  d'autres  maximes  que  celles  de 
son  décalogue  et  les  prescriptions  de  son  recteur  ;  il  sort 
sans  inquiétude  de  son  tle  ;  la  religion  de  son  épouse  lui 
répond  de  sa  fidélité.  Si ,  sur  d'autres  points  de  la  France 
où  l'absence  de  toute  croyance  religieuse  se  &it  remar- 
quer, la  jalousie  a  le  droit  de  réclamer  des  autels,  ici  ce 
culte  est  inconnu,  et  le  parfum  des  mœurs  patriarcales  em- 
baume encore  nos  tlots  avec  le  Lys  d" Houat. 

II  est  inouï  qu'un  homme  ait  frappé  sa  femme  ;  celle-<i 
tient  la  bourse ,  mais  elle  en  délie  facilement  les  cordons 
pour  les  menus  besoins  du  mari  ^  et  une  entente  cordiale  th- 
gne  toujours  au  sein  du  ménage.  La  proposition  Crémieux, 
pour  le  rétablissement  du  divorce,   accueillie  avec  tant 


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~  547  ^ 

d^enthoQsiasme  par  les  Viiuvimnes  de  Paris,  appuyée  par 
quelques  incomprises  et  quelques  époux  mal  assortis,  ne 
troorerait,  dans  nos  ties,  aucun  écho,  aucune  sympathie. 

Les  hommes  et  surtout  les  femmes  se  disputent  quel- 
quefois ,  mais  jamais  leur  bouche  ne  se  souille  de  paroles 
obscènes  ou  injurieuses,  bien  moins  encore  a-t«-on  recours 
à  des  procédés  plus  violents.  Aussi ,  de  mémoire  d'homme , 
il  n'y  a  pas  eu  une  aflkire  de  justice  à  Hœdic  ou  à  Houat, 
pas  même  devant  le  juge  de  paix. 

Est-il  question  de  mariage?  Le  jeune  homme  qui  a  fixé 
son  choix,  longtemps  avant  de  &ire  les  premières  avances 
pour  obtenir  la  main  qu'il  convoite ,  s'efForce  de  se  recom- 
mander par  sa  piété,  sa  bonne  conduite,  son  assiduité  au 
travail,  son  habileté  dans  les  choses  de  sa  profession  et 
dans  les  affaires  ,  par  ses  services  c«>mplaisants  et  ses  res- 
pectueuses prévenances  auprès  de  ceux  dont  il  ambitionne 
d'être  le  gendre ,  enfin  par  les  cadeaux  qu'il  leur  feit,  mais 
tout  cela  sans  jamais  leur  dévoiler  le  secret  de  son  cœur. 
Si  tout  est  reçu  de  bonne  grâce,  il  envoie,  en  temps  con- 
venable, sa  mère,  ou,  à  son  défisiut,  celle  qui  lui  en  tient 
lieu,  formuler  sa  demande,  et  il  réussit  toujours.  Un  repas 
vient  à  la  suite,  où  les  deux  futurs  et  leurs  parents  les  plus 
proches  sont  les  convives  obligés.  C*estlà  que,  vers  la  fin 
du  régal ,  le  jeune  homme  reçoit  des  anciens,  la  permis- 
sion de  déposer  un  baiser  sur  le  front  de  sa  future  :  c'est 
le  signal  du  consentement  public  des  parents  et  des  en- 
fiints.  —  L'unique  jour  de  la  semaine  où  se  célèbre  le  ma- 
riage ,  c'est  le  mardi.  Comme  ici  la  religion  s'associe  à  tout, 
le  dimanche  qui  précède  réunit  d'abord  au  banquet  mys- 
tique qu'elle  dresse  pour  ses  fidèles  ceux  dont  elle  va, 
plus  tard ,  consacrer  les  indissolubles  liens* 


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—  548  — 

Le  même  pasteur  qui  doit  les  bénir  en  son  nom ,  cette 
fois  fonctionnaire  civil ,  dans  la  représentation  de  ta 
charge  ,  recevra,  au  nom  delà  loi  «  leurs  mutuels  sermeDt& 
—  A  Hoedic,  le  lendemain,  vers  le  soir,  une  vingtaine  de 
jeunes  filles,  dans  tout  Téclat  de  leur  costume ,  se  rendent 
sur  deux  lignes  au  presbytère,  où,  introduites  dans  la 
salle,  elles  se  rangent  en  cercle,  et  la  plus  digne,  élue  par 
ses  compagnes,  porte  la  parole  au  nom  des  futurs  conjoints. 
En  voici  la  formule  invariable  :  M.  le  curi^  nous  vanoni, 
de  la  part  de....  et  de....,  vous  prier  d^ avoir  la  bonté  de 
célébrer  demain  la  sainte  messe  pour  eux ,  et  de  leur  domur 
la  bénédiction  nuptiale  ;  ils  vous  conjurent  aussi  d'éirei 
bon  pour  les  honorer  de  votre  présence  au  déjeuner  < 
sitôt  après  l'office.  La  réponse  du  curé  est  suivie  d'une 
courtoise  révérence ,  et  la  troupe  se  retire  aussitôt  et  n 
porter  Tinvitation  ailleurs,  en  commençant  par  les  plos 
notables.  —  Enfin  le  jour  de  la  solennité  a  lui.  Dès  sept 
heures  du  matin ,  le  garçon  est  conduit  à  Téglise  par  b 
main  de  sa  mère  ou  de  sa  sœur ,  tandis  que ,  d'autre  part , 
le  père  ou  le  frère  de  la  jeune  mariée  lui  rendent  le  même 
service. 

Ce  n'est  qu*au  signal  de  la  cloche  que  le  peuple  s*y 
rend  à  son  tour.  L*affluence  est  nombreuse  et  ohacoo  s'y 
produit  dans  ses  habits  de  fête  ;  la  religion  elle-roèrae  y 
déploie  les  siens  et  y  étale  en  même  temps  toutes  les 
pompes  de  ses  plus  grands  jours.  —  La  joie,  du  reste, 
ne  se  manifeste  jamais  avec  plus  d'éclat  et  d'une  manière 
plus  bruyante  :  aussi ,  lorsque  la  cérémonie  achevée ,  le 
prêtre  aura  franchi  le  seuil  du  temple,  il  sera  accueilli  par 
une  salve  demousqueterie.  Quelques  minutes  après  son  pas- 


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—  349  — 

sage,  le  même  honneur  attend  également  et  accompagne 
les  deux  époux,  qui  se  rendent  au  presbytère  en  se  donnant 
le  bras.  Là ,  après  leurs  devoirs  rendus  au  curé ,  leur 
marche  triomphale  recommence,  et  le  pasteur  vénéré  « 
entouré  de  son  peuple ,  leur  forme  cortège  et  se  rend  avec 
eux  à  la  demeure  de  l'épouse  pour  prendre  part  au 
déjeuner,  où  les  deux  maisons  alliées  sont  seules  ad- 
mises d'ailleurs.  —  Mais ,  à  midi ,  la  table  s'agrandit ,  et 
c'est  alors  que  viennent  s'y  asseoir  les  nombreux  invités 
de  la  noce  ,  servis  par  une  jeunesse  d'élite.  Après  ce  repas, 
qu^assaisonne  nécessairement  la  tempérance  et  l'honnêteté, 
pendant  que  les  hommes  oublient  les  dernières  heures  du 
jour  dans  l'exercice  du  jeu  de  boules ,  les  mariés  et  les 
jeunes  filles ,  marchant  deux  à  deux  à  leur  suite,  parcou* 
rent  les  sites  les  plus  agréables  de  l'île ,  en  chantant  les 
cantiques  de  leur  naïve  piété ,  ou  en  se  donnant  d'inno- 
centes récréations.  L'ivresse  ,  les  hideux  blasphèmes  ,  les 
cyniques  propos  qu'elle  inspire,  les  colères  dégoûtantes 
qu'elle  provoque ,  les  danses  folâtres ,  les  chants  lubriques, 
les  indécentes  libertés,  qui  sont  partout  ailleurs  d'une 
pratique  ordinaire ,  sont  autant  de  choses  inconnues  ici. 
Jour  qui  compte  pour  la  vertu  et  où  sa  dignité  ne  subit 
aucun  échec ,  il  sera  couronné  comme  tous  les  autres  par 
la  prièrt  cxmimuiM  à  la  maison  d'école ,  car  rien  n'y  est 
dérangé  de  l'ordre  accoutumé.  —  A  Houat ,  le  recteur 
n*assiste  pas  au  déjeuner  des  époux  ;  mais  ceux-ci,  après 
leur  dîner ,  s'empressent  de  venir  lui  rendre  hommage  et 
prendre  le  café  qu'il  est  dans  l'usage  d'offrir  en  cette  cir- 
constance. 

Qu'un  navire  en  détresse  réclame  du  secours ,  nos  iu- 


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—  3B0  — 

suiaires  feront  briller  d'autres  vertus.  Prêts  à  toute  heure 
à  faire  preuve  du  dévouement  le  plus  aveugle ,  ib  s'é- 
lancent au  milieu  de  ces  affreux  rescib  qui  défendent  et 
protègent  leurs  lies  et  qui  sont  trop  souvent  de  funestes 
écueîls  pour  les  étrangers.  Le  curé  dirige  les  opérations 
de  sauvetage  ;  les  femmes  tremblantes  sur  la  grève  sui- 
vent tous  les  mouvements  des  chaloupes  et  des  hommes, 
et  accompagnent  de  leurs  prières  et  de  leurs  vœux  les 
généreux  efforts  qu1ls  font.  Souvent  ils  sont  couronnés  de 
succès.  C'est  ainsi,  entre  autres,  que  seize  Hoedicais,  sous 
les  yeux  de  leurs  femilles  alarmées ,  en  se  précipitant  dans 
les  flots,  au  plus  fort  de  la  tempête,  eurent  le  bonheur, 
en  moins  de  vingt  minutes ,  d'arracher  à  la  mort  vingt- 
sept  marins,  dont  les  forces  épuisées  luttaient  en  vain 
contre  h  vague  en  fureur  (1).  Vous  les  verrez  rendre,  avec 
une  piété  touchante,  les  derniers  devoirs  aux  cadavres 
des  infortunés  qui  ont  péri  dans  le  naufirage,  mettre  re- 
ligieusement en  réserve,  pour  les  rendre  à  qui  de  droit, 
les  effets  qu'ils  ont  sauvés^  et  accueillir  avec  bonheur 
ceux  qu'ils  ont  arrachés  vivants  à  la  fureur  des  flots,  et  leur 
prodiguer  les  soins  de  l'hospitalité  la  plus  empressée.  Us 
ne  connaissaient  pas  les  froids  calculs  de  Tégoîsme  quand 
il  s'agissait  d'exposer  leur  vie  ;  ils  ne  s'épargneront  pas 
lorsqu'il  faudra  s'imposer  des  privations ,  au  risque  d'af- 
fiuner  l'ile.  Mais  l'administration  de  la  marine  ne  pour- 


ri) Le  ministre  de  la  marine ,  pour  récompenser  cet  acte  de  dé- 
vonement,  flt  remettre  au  cnré  50  fr.  qu'il  devait  garder  k  titre  de 
gratification ,  et  320  fr.  qu'il  devait  distribuer  aux  seize  Hœdicais, 
qui  avaient  bien  mérité  de  l'humanité. 


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—  361  — 

rait-elle  pas  seconder  efiScacement  le  zèle  de  ces  insu- 
laires ,  empêcher  la  disette  de  vivres  qui  survient  trop 
souvent  après  le  séjour  prolongé  que  les  naufragés  sont 
quelquefois  contraints  d'y  &ire ,  en  établissant  dans  cha- 
cune des  deux  tles  un  petit  dépôt  de  biscuit  et  de  sa- 
laisons? J'abandonne  aux  appréciations  de  sa  philanthropie 
ce  vœu  qu  ont  souvent  exprimé  devant  moi  des  capitaines 
de  Belle-Ile.  Une  distinction  bien  flatteuse  pour  les  habi- 
tants, ce  fut,  en  1842 ,  la  création  d'un  syndicat  confié  au 
patriotisme  de  leur  pasteur. 

Dans  leurs  marchés,  dans  leurs  rapports,  toujours  fran- 
chise et  loyauté  ;  entre  eux  union  parfaite,  qui  se  traduit 
par  l'empressement  à  se  rendre  service  et  par  la  familiarité 
des  procédés:  ils  se  tutoient  tous.  C'est  une  famille  de  frères 
qui  tous  respectent  un  même  père  et  lui  vouent  attache- 
ment filial,  politesse  et  prévenance.  Outre  la  part  qu'ils  lui 
font  dans  tout  produit  public  de  l'île,  ils  lui  cèdent  de  bon 
cœur  sa  part  de  jonc  et  de  fougère.  Ils  ne  lui  permettent 
pas  de  chauffer  le  four  à  son  tour,  et,  si  besoin  est,  toutes 
les  charrettes  et  les  bras  sont  à  son  service.  Chaque  famille 
lui  envoie  un  peu  de  paille  et  de  grain.  Dans  le  temps  de 
la  pèche,  il  ne  manque  jamais  de  poisson.  Â  Hœdic,  sa  pe- 
tite provision  de  lard  se  fait  en  deux  vendredis  consécutifs, 
jours  consacrés  à  l'immolation  de  ce  pachyderme;  qua- 
rante-quatre porcs  sont  ainsi  égorgés,  car  chaque  famille 
a  le  sien.  Le  samedi  soir,  un  membre  de  la  iiamille  apporte 
au  presbytère  un  morceau  de  lard  cru  accompagné  du  sel 
nécessaire  pour  le  saler;  le  dimanche  matin,  c  est  le  boudin, 
et  le  soir  du  même  jour,  c'est  le  lard  rôti. —  Ils  sont  géné- 
reux à  l'égard  de  leur  pasteur,  surtout  à  Hœdic;  mais 
celui-ci,  dispensateur  sage  de  son  superflu  de  circonstance. 


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—  582  — 

ne  doit  pas  être,  à  la  (In  de  Tannée,  plus  riche  qae  le  der- 
nier de  Tîle. 

Le  pasteur  est  aimé,  car  il  est  leur  consolateur.  Qu'une 
tempête  s'élève,  que  Tabsence  de  quelques  marins  se  pro- 
longe, ou  que  d'autres  accidents  surviennent,  tout  est  calme 
dans  nie,  si  le  curé  est  présent;  s'il  n'est  pas  là,  l'agitation, 
la  mélancolie,  le  désespoir  s'emparent  des  cœurs  et 
tourmentent  les  esprits.  Vient-il  à  s'absenter,  c'est  à  qui 
sera  admis  à  porter  ses  effets  ou  ses  petites  provisions  de 
bord,  et  dès  qu'on  hisse  les  voiles,  on  lui  crie  du  haut  de 
la  dune  :  Bon  voyage,  beau  temps,  prompt  retour  :  Boyage 
vadj  amzer  vad,  bean  in  dro.  A  son  retour,  il  est  assiégé 
de  questions  sur  son  voyage,  pendant  qu'on  s'empresse  de 
lui  rendre  les  mêmes  bons  offices  qu*à  son  départ. 

11  est  aimé,  car  défenseur-né  de  leurs  intérêts  tempareb 
et  spirituels,  il  a  toujours  cherché  à  améliorer  leur  sort, 
malgré  les  oppositions  que  quelques  étrangers  ont  essayé  de 
faire  naître,  et  il  a  pris  à  tftche,  en  toutes  circonstances,  de 
donner  à  ses  enfants  des  preuves  de  son  dévouement. 

Laissez-moi,  Messieurs,  pour  abréger  cette  lecture,  pas- 
ser sous  silence  les  travaux  entrepris  à  Houat,  même  ceux 
du  port,  qui  demandèrent  plusieurs  années  de  travail;  je 
vais  me  borner  à  vous  esquisser  ceux  d'Hœdic  seulement. 

Les  cendres  des  ancêtres  reposent  à  l'ombre  de  la  croix 
et  de  l'église  ;  mais  ce  champ  du  repos  avait  un  mur  d'en- 
ceinte, que  le  temps  et  les  bestiaux  avaient  endommagé  en 
plusieurs  endroits:  ces  animaux  venaient  y  paître  et  jouer 
parmi  les  tombes,  sur  lesquelles  nos  pieux  villageois  vont,  à 
la  sortie  des  offices,  prier  et  s'inspirer  des  vertus  de  leurs 
pères.  Il  suffit  au  curé  de  rappeler  le  respect  qu'on  doit 


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—  353  — 

aux  morts ,  hommes,  femmes,  enfiints,  vieillai-ds  se  rendent 
à  la  côte,  réunissent  des  matériaux,  et  en  sept  jours  de  tra- 
vail un  mur  d*enceinte  en  qranii  protège  les  ossements  de 
leurs  aïeux. 

Dans  un  autre  ordre  d'idées,  nous  trouvons  la  tiiéme 
ardeur.  —  Le  grand  étang,  ressource  si  utile  pour  les  ha- 
bitants auxquels  il  fournit  les  matériaux  de  toiture  (joncs  et 
roseaux)^  était  aussi  sans  clôture.  Les  bestiaux  allaient  y. man- 
ger les  jeunes  roseaux,  briser  leurs  tiges  et  occasionner  des 
pertes  considérables.  Le  recteur  fait  encore  appel  à  leurs 
intérêts  et  à  leur  bonne  volonté;  il  donne  lui-même  Fexem- 
ple  du  travailleur,  accorde  des  prix  à  ceux  qui  se  mettent 
les  premiers  à  Tœuvre,  et  en  deux  campagnes  (1840  et  1 843), 
le  marais  est  à  couvert  des  incursions  et  des  ravages  des 
bestiaux(l).  —  Une  opération  du  même  genre,  pour  faci- 
liter la  surveillance  des  mc^mcs  animaux  à  la  pâture,  ren- 
ferme douze  hectares  de  falaise.  C*est  Taflaire  de  trois 
semaines.  —  Autre  fait  :  La  source  qui  fournit  à  toute  la 
population  une  eau  si   bonne  et  si  abondante  (2),  était 

(1)  Le  temps  disponible  pour  les  travaux  publics  est  depuis  le 
■UNS  de  novembre  jusqa'k  la  fia  dejaavier  {JUègL  a*llœdic^  art. 
!•).  —  Depuis  le  commeDcemeut  de  décembre  josqu'an  mois  d'a« 
vril  ou  de  mai,  on  s'occupera  des  travaux  qui  seront  jugés  les  plus 
avantageux  au  bien  général,  autant  que  les  occupalions  particu- 
lières laisseront  de  temps  libre  pour  y  vaquer  [RègL  de  Houaf^ 
cb.3,§l.)- 

(3)  Pendant  les  travaux  de  maçonnerie,  douze  personnes  ne  pou- 
vaient épuiser  la  source^  rintamiptioD  nécessitée  par  le  dîner,  exi- 
geait ensuite  le  travail  de  quarante  personnes.  Pendant  la  sécheresse, 
habitants  et  ouvriers  du  fort  y  ont  eu  recours,  et  Teau  avait  toujours 
plus  de  trois  mètres  de  profondeur. 


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—  554  - 

continuellement  souillée  par  les  pieds  ou  les  excréaients 
des  animaux.  Le  pasteur  craint  pour  la  santé  des  habitants. 
Nouvel  appel;  et  au  bout  de  cinq  semaines  de  travail,  un 
escalier  très-commode  conduit  à  la  source,  un  beau  mur  en 
granit  l'environne  et  la  protège  et  contre  les  animaux  et 
contre  le  sable  ou  les  Panicauts  que  le  vent  y  précipitait. 
Ce  fut  un  beau  jour  de  fête,  le  8  septembre  18  Vi,  lorsque  ce 
puits  du  lUûrier  {Punce  er  Yauyaren)  fut  achevé  et  dédié  à 
la  Sainte-Vierge.  Il  devait  son  nom  primitif  au  voisinage 
d'un  vieil  enclos  planté  de  mûriers. 

Mais  voici  un  travail  bien  plus  gigantesque.  Les  ruines 
de  la  vieille  chaussée  n*abritaient  plus  les  chaloupes  dans 
les  tempêtes,  et  comme,  à  mer  basse ,  elles  sont  échouées 
sur  le  sable,  elles  éprouvaient,  dans  les  coups  de  mer, 
de  fortes  avaries.  Une  reconstruction  complète  et  plus 
solide  était  urgente.  Mais  des  objections  se  présentent  de 
tous  côtés.  Comment ,  avec  ses  seules  ressources ,  con- 
struire une  chaussée  de  300  mètres  de  long?  Comment  ex- 
traire des  blocs  assez  volumineux  pour  résister  à  la  mer 
en  courroux?  D*un  autre  côté,  des  voix  étrangères  et  ja- 
louses du  bienfait  que  le  curé  veut  procurer  à  son  tle,  le 
dénoncent  tantôt  comme  trop  entreprenant ,  tantôt  conune 
incapable.  Il  se  roidit  contre  tous  ces  obstacles;  ilentOKi 
sa  conscience  qui  Fencourage.  La  vue  des  monuments 
druidiques  qui  Tentourent  le  rassure  et  soutient  sa  réso- 
lution. Pourquoi ,  se  dit-il,  ne  pourrions-nous  pas,  nous 
aussi,  comme  nos  pères,  remuer  et  entasser  des  rochers 
entiers  ?  Il  déjoue  en  même  temps  les  indignes  manœu- 
vres dont  on  se  sert  pour  le  forcer  à  renoncer  à  son  projet 
Il  trouve  appui  et  protection  dans  M.  Lorois ,  alors  pré- 


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-  355  — 

fet  du  Morbihan  ;  les  chefs  supérieurs  de  Tadministration 
des  ponts  et  chaussées  louent  le  zèle  de  M.  Rio,  favori- 
sent ses  desseins  et  lui  accordent  les  engins  nécessaires  à 
l'extraction  et  au  transport  des  blocs.  Le  curé  se  hâte  alors 
d'annoncer  l'ouverture  des  travaux  (c'était  au  printemps 
de  1844);  il  organise  ses  travailleurs,  au  nombre  d'en- 
viron cent,  en  différentes  compagnies  :  mineurs,  maçons^ 
élingueurs^  hisseurs^  gabarieurs  et  cwiir^i  (4  de  garçons, 
la  première  nommée  premiers  grenadiers;  4  de  filles,  la 
première  nommée  deuxième  grenadiers).  Chaque  civière 
avait  huit  personnes  et  dix  au  besoin ,  et  cela  pour  porter 
un  seul  bloc.  Les  personnes  étaient  associées  par  rang  de 
taille.  —  Une  demi-heure  avant  que  la  marée  permît  de 
travailler^  la  cloche  de  la  maison  d'école,  beffroi  civil  de 
la  commune,  sonnait  dans  le  village,  et  aussitôt  tous  se 
rendaient  à  la  côte  à  la  suite  du  curé.  Au  premier  cri  de 
hourra ,  chacun  était  à  son  poste.  La  législation  locale , 
pour  stimuler  l'ardeur,  avait  statué  une  amende  d'un  franc 
pour  celui  qui  ne  s'y  trouverait  pas  au  bout  de  dix  mi- 
nutes ,  sans  une  raison  légitime.  Alors  on  n'entendait  que 
les  cris  de  Kèlêf  Hourra!  Engine  !  (mots  retenus  au  con- 
tact des  Anglais) ,  ou  le  bruit  des  barres  à  mine  et  celui 
des  explosions.  Toute  la  jeunesse  en  file,  chaque  civière 
chargée  d'une  grosse  pierre,  marchait  au  pas  et  faisait 
retentir  en  cadence  les  airs  des  plus  beaux  cantiques  bre- 
tons. Celui  qu'elle  chantait  avec  le  plus  d'enthousiasme , 
peut-être  parce  qu'il  est  un  fruit  du  pays,  est  composé  en 
l'honneur  de  la  Sainte-Vierge,  patronne  de  l'île,  commence 
par  ces  mots  :  JHU  bennoh  d'em  Salvér,  et  a  pour  re- 
frain: 


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—  3S6  — 

Eid  omb ,  pobl  a  Ilœdîc , 
Jésus  en  dès  choéget 
Eid  lotron  pur  Slari 
Rouannes  er  Qtiérhiésèd  (1). 

Le  plan  de  la  chaussée  est  de  trois  cents  mètres  de 
long ,  6  de  haut  et  3  de  large ,  et  forme  un  deroi-fer-à- 
cbeval.  On  y  apportait  des  blocs  de  la  pesanteur  de  4  et 
6  tonneaux.  Quand  les  civières  ne  suffisaient  pas  pour 
leur  grandeur,  avec  des  élingiies  en  fer  on  les  amarrait  à 
de  grands  tonneaux,  et,  par  le  moyen  d*une  lottée^  on  les 
conduisait  à  la  chaussée  ;  ou  bien ,  flanquant  d'énormes 
palans  contre  la  chaussée  même,  on  y  faisait  venir  les 
plus  grands  rochers  en  multipliant  les  poulies.  Aucune 
difficulté  ne  rebutait  Tardeur  des  travailleurs.  Quand  arri- 
vait un  de  ces  énormes  blocs  que  la  compagnie  des  hisseurs 
ne  pouvait  pas  même  soulever  de  terre,  le  curé  contre- 
maître et  ingénieur  à  la  fois,  criait  :  Civières  à  la  drisse  f 
et  le  rocher  soulevé  par  les  efforts  do  tous ,  montait  ma- 
jestueusement par  plusieurs  pentes  et  venait  se  placer  à  3 
mètrectde  hauteur  dans  l'espace  de  six  minutes,  aux  cris 
continus  de  hourra! 

Lorsque  la  cloche  de  Técole  annonçait  midi  par  YAn- 
gelus^  tous  se  mettaient  à  genoux  pour  la  prière  et  la  ré- 
citaient alternativement  avec  le  recteur.  En  même  temps 
les  femmes  Agées ,  seules  gardiennes  et  seules  cuisinières 
du  ménage  en  cette  circonstance ,  sortaient  du  village  char- 
gées du  frugal  repas  du  mari  et  des  enfants.  Les  petits  en- 


(f)  Pour  nous,  peuple  d*Hœdic,  Jésus  a  choisi  pour  patronne 
la  pure  Marie ,  reine  des  Vierges. 


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—  357  - 

fanis,  suspendus  au  taUier  ou  à  la  jupe  des  grand*mëres« 
venaient  égayer  rassemblée  de  leurs  naïves  réflexions.  Là , 
chaque  famille  se  groupe  autour  de  la  marmite  à  Tabri  des 
travaux  mêmes  et  enviroune  le  curé  qui ,  un  morceau  de 
pain  à  la  maia,  sur  lequel  il  retient  avec  le  pouce  l'accès- 
soire  qu'il  réclame,  fait  honneur  à  sa  table  improvisée.  La 
plus  innocente^  gaité  assaisonne  tous  les  mets.  Entre  le 
BenedicHe  et  les  Grâces,  c'est  une  affaire  de  dix  minutes, 
autant  pour  fumer  sa  pipe,  dessert  indispensable,  obligé 
pour  les  hommes,  et  aussitôt  le  signal  est  donné  pour  re- 
tourner à  la  besogne. 

C'est  avec  cette  ardeur  que  nos  Hœdicais  infatigables 
quand  le  curé  les  anime  par  sa  présence,  du  geste,  de  la 
voix  et  de  Texemple ,  sont  parvenus  en  trois  mois  a  établir 
leur  chaussée  sur  une  longueur  de  200  mètres  (1).  Les 
travaux  du  fori  ont  interrompu  les  leurs  ;  mais  les  ha- 
bitants sentent  d'autant  plus  le  besoin  d'achever  cette  œu- 
vre puissante  qu'ils  s'aperçoivent  tous  les  jours  des  avan- 
tages immenses  que  leur  procure  la  partie  terminée.  Pour 
consolider  celle-ci ,  ils  devront  même  l'appuyer,  à  l'exté- 
rieur, par  d'autres  blocs,  car  ils  peuvent  voir  que  déjà, 
dans  une  tempête  affireuse,  quelques  mètres  de  long,  mai- 
gré  l'énormité  et  l'eacbevétrement  des  pierres,  ont  cédé  à 
la  vague. 

Ce  n'était  pas  assez  de  rendre  le  mouillage  meilleur,  il 
fallait  faciliter  son  abord  et  le  rendre  moins  dangereux.  La 
croix,  symbole  de  salut,  placée  sur  le  haut  de  la  dune, 

(1)  En  1444  et  en  tS4S,  ils  ont  travaillé,  pendant  quatre  se*- 
saiOMf  aufciatumpt  et  anttut  après  Jm  leinaiUiei, 


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~  558  — 

retrouve  ici  sa  signification  bien&isante;  elle  signale  l'en- 
trée du  port;  et  deux  balises  en  fer  plantées  dans  le 
chenal,  en  1846,  par  les  soins  du  curé,  mais  envoyées 
par  l'administration  des  ponts  et  chaussées,  indiquent  la 
direction  à  suivre  entre  Moranlen  et  Big  Melin.  Aussi  ce 
Porh  Bras  porte-t-il  encore  le  nom  de  Port  de  la  Crmx 
(For h  er  Groéz). 

Voilà  bien ,  ce  me  semble,  Messieurs,  des  résultats  im- 
menses dus  à  une  bonne  direction  de  l'esprit  d'associa- 
tion. Cet  esprit  d'association ,  nos  gens  Font  bien  compris, 
est  une  des  bases  de  leur  constitution.  Ils  ne  perdent  pas 
de  vue  que  X union  fait  la  force,  et  savent  à  merveille 
mettre  en  pratique  cette  belle  maxime  de  rÉcriture  :  Fra- 
ter  qui  adjuvatur  à  fratre  quasi  dvitas  firma  {Prot,  18, 
19);  aussi  lont-ils  appliquée  jusque  dans  leurs  travaux 
privés.  En  effet ,  pour  la  pèche ,  cinq  ou  six  ménages 
s'associent  sur  une  chaloupe  ;  et  à  Hœdic ,  ils  vont  encore 
plus  loin  :  trois  ou  quatre  bateaux  se  réunissent,  dépo- 
sent à  bord  de  Tun  d*eux  le  résultat  de  la  pèche  com- 
mune pour  compléter  un  chargement,  et  quelques-uns  des 
associés  le  conduisent  à  Nantes  pour  faire  la  vente,  tan- 
dis que  les  autres  continuent  la  pèche.  —  A  Houat ,  il  n'y 
a  pas  d'association  pour  cette  opération  commerciale. 
Chaque  chaloupe  se  rend  à  Vannes  ou  à  Auray  pour  vendre 
sa  propre  pèche,  et  interrompt  ainsi  ses  travaux. 

En  agriculture,  le  travail  est  encore  commun.  —  A 
Houat,  plusieurs  maisons  se  réunissent  pour  se  prêter 
main-forte  et  opérer  plus  vite  et  mieux.  —  A  Hoedic ,  cha- 
que particulier  laboure,  il  est  vrai ,  sa  parcelle  isolément; 
mais  celui  qui  a  le  premier  terminé  son  ouvrage  vient  au 


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—  359  - 

secours  du  moins  avancé  «  et  ces  bons  offices  ne  cessent 
que  lorsque  tous  les  labours  de  Ttle  sont  achevés.  Pour  la 
récolte ,  toutes  les  forces  sont  concentrées  :  le  travail  du 
premier  jour  (battre ,  vanner  et  loger)  est  consacré  à  l'un 
d'eux  ;  celui  du  lendemain  appartient  à  un  autre  ;  le  jour 
suivant,  c'est  pour  un  troisième  ;  et  cette  chaîne  n'est  in- 
terrompue que  lorsque  la  dernière  gerbe  a  disparu  de 
l'aire. 

Chaque  tle  possède  un  four  banal.  Les  habitants  sont 
divisés  par  sections,  dont  chacune  le  chauffe  à  son  tour 
et  à  frais  communs.  Le  premier  combustible  employé  c'est 
le  goémon  ;  les  ajoncs  achèvent  de  lui  donner  le  dernier 
degré  de  chaleur  voulue. 

S'agit-il  d'expédier  une  chaloupe  au  continent  pour  le 
service  des  habitants,  à  une  foire,  par  exemple?  Chaque 
animal  est  tarifé;  mais,  à  Hoedic ,  le  produit  n'appartien- 
dra pas  à  la  chaloupe  qui ,  à  son  tour  de  rôle ,  fait  la 
corvée  publique  ;  le  patron  n'aura  droit  qu'à  la  modeste 
somme  de  six  francs  ;  le  reste  du  profit  sera  conservé  en 
note,  chez  le  recteur,  dans  une  bourse  commune,  mais 
bien  distincte  du  Trésor  public^  et  sera  partagé  entre 
tous  les  patrons,  à  la  fin  de  chaque  année,  ou  à  une  autre 
époque,  selon  le  désir  de  la  majorité.  {Régi.  d'Boidic, 
art.  12.)  Cet  acte  additionnel,  inscrit  dans  la  charte 
d'Hœdic,  en  décembre  1844,  reçut  dès  le  12  janvier  sui- 
vant, au  sein  d'une  réunion  des  Notables  et  de  tous  les 
patrons  des  chaloupes ,  une  bien  plus  grande  extension  ; 
nos  constituants  l'appliquèrent  à  tout  gain  public j  et  défi- 
nirent ces  deux  mots:  Voyage^  secours ^  pilotage  et  sau- 
vetage. (Il  est  à  noter  que  le  gain  résultant  de  la  vente 


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—  560  — 

légalement  faite  par  qui  de  droit  d'un  sauvetage  est  par- 
tagé entre  tous.)  Une  seule  exception  fut  admise  en  &veor 
de  Tindividualisme  ,  c*est  le  cas  où  ces  secours,  etc.,  se- 
raient demandés  à  une  chaloupe  en  mer,  avant  qu'on  eût 
connaissance  dans  Tîle  de  la  détresse  ou  du  désir  du  bâti- 
ment {BègL  (THœdic^SLTU  31.). 

L'égalité  des  charges  et  des  devoirs  entraîne  nécessaire- 
ment régalité  des  bénéfices  et  des  droits.  Hoedic  possède 
un  étang  dont  nous  avons  parlé,  et  où  croissent  les  roseaux 
et  le  jonc  des  chaisiers.  Chaque  famille  y  a  son  droit  égal, 
mais  à  la  charge  de  travailler  avec  les  autres  à  récolter  ces 
plantes.  Celui  qui  refuse  son  concours  à  la  communauté , 
s'exclue  par  là  même  du  partage  {Régi  d'Hœdic,  art.  8.). 
Après  la  provision  faite ,  on  vend  le  reste  aux  Houatais. 

Ils  partagent  également  encore,  maisj^or  UleAes  1,500 
kilogrammes  de  sel  que  les  curés  sont  parvenus  à  obtenir  en 
1841 ,  pour  chaque  île,  en  franchise  de  droit.  —  Ils  peu- 
vent, du  reste,  comme  tout  pêcheur,  saler  autant  de  pois- 
son qu'ils  veulent,  avec  un  acquit-à-caution. 

Je  viens  de  vous  montrer  les  excellents  résultats  de  Tas- 
sociation  fraternelle.  U École,  à  ce  point  de  vue ,  est  encore 
digne  de  nous  arrêter  un  instant.  Le  curé,  convaincu  de 
rimportance  de  l'instruction  et  de  Téducation ,  non  moins 
pénétré  de  Tobligation  qui  pèse  sur  un  Gouvernement  de 
procurer  ces  biens  inestimables,  n'a  pas,  du  reste,  perdu  de 
vue  que  l'instruction,  sans  la  religion,  est  plus  nuisible 
qu'utile.  C'est  une  vérité  dont  il  peut,  chaque  jour,  se  con- 
vaincre; il  n'a  pas  besoin  de  venir  visiter  nos  petites  villes 
ou  d'étudier  les  statistiques  morales  et  criminelles,  il  lui 
suffit  de  jeter  les  yew  vers  les  travailleurs  du  fort  :  ceux  qui 


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—  561  — 

se  vanteDt  le  plus  de  connaître  leurs  droilSj  ne  compren- 
nent pas  un  mot  de  leurs  dewirSj  et  savent  encore  moins  le 
montrer  dans  la  pratique.  Le  curé  a  donc  envoyé,  aux  frais 
de  nie f  une  de  ses  paroissiennes,  pour  achever  son  éduca- 
tion sur  le  continent  et  revenir  dans  ses  foyers  capable  de 
remplir  son  utile  mission.  Les  appointements  de  la  maî- 
tresse d'école  ne  sont  que  de  deux  cents  francs.  L'école 
commence  le  matin,  à  huit  heures;  le  soir,  à  une  heure: 
chaque  classe  doit  durer  deux  heures,  et  tous  les  enfiEinls 
des  deux  sexes,  depuis  Tâge  de  sept  ans  jusqu'à  leur 
troisième  conmiunion,  sont  obligés  dy  assister  {RigL 
d^BcediCj  art.  30.);  mais,  dès  Tâge  de  trois  à  quatre  ans, 
les  enfants  ne  manquent  pas  de  s'y  rendre  et  savent  lire  à 
sept. 

A  Houat,  les  filles  vont  à  l'école  le  matin;  et  le  soir, 
c'est  le  tour  des  garçons.    —  Le  curé  d'Hœdic,  pour 
consacrer  les  deux  parties  de  la  journée  aux  deux  sexes 
en  même  temps ,  a  disposé  la  salle  de  manière  à  ce  que 
les  garçons  et  les  filles  soient  séparés  par  une  cloison  assez 
élevée  pour  les  empêcher  de  se  voir  et  de  se  distraire ,  et 
a  placé  la  chaire  de  la  maîtresse  de  façon  à  dominer  à 
la  fois  les  deux  classes ,  à  voir  partout  et  à  être  entendue 
de  tous.  —  On  apprend  à  tous  à  lire  le  breton  et  le  latin, 
de  plus  le  français  à  ceux  qui  le  désirent  ;  à  tous  encore 
on  enseigne  le  catéchisme  breton  et  les  quatre  règles  de 
l'arithmétique.  L'école  est  absolument  gratuite.  A  Houat , 
on  fournit  même  aux  enfants,  plumes^  encre,  papier,  et 
souvent,  de  plus,  les  livres  aux  frais  de  la  communauté  ;  à 
Hœdic ,  l'écriture  et  ses  accessoires  sont  à  la  charge  des 
particuliers* 

25 


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—  362  — 

Les  couleurs  avec  lesquelles  je  viens  de  vous  peindre  les 
misères  et  les  joies  de  ces  petites  peuplades  sont  bien  pâles 
sans  doute:  j'ai  voulu  rester  simple  comme  les  mœurs  de 
mes  bons  ilois.  Faut-il  s'étonner ,  néanmoins  «  si  I  habitant 
d'Hoedic  ou  de  Houat  s'attache  aux  lieux  où  il  retrouve  les 
souvenirs  de  sa  première  enfonce  et  de  ceux  qui  lui  furent 
chers,  où  il  goûta  le  bonheur?  «  Sans  envie ,  nous  <lit 
»  l'auteur  du  Voyage  à  Bœdic  ^doni  je  me  suis  plu  à  vous 
n  citer  quelques  pages  ,  il  aperçoit  des  bords  de  son  fie  les 
»  côtes  de  la  Bretagne  :  avec  regret  il  y  va  quelquefois,  et 
»  revient  avec  joie  vers  ses  dunis,  ses  rochers  et  sa  cbati- 
»  mière.  C'est  que  le  bonheur  n'est  pas  dans  les  richesses  et 
»  la  multiplicité  des  jouissances.  Ainsi  que  l'enseignent  la 
»  philosophie  et  la  religion ,  le  bonheur  n'est  pas  au  de- 
9  hors  ;  les  choses  extérieures  n'en  peuvent  être  que  les 
»  moyens  :  c'est  par  l'âme  qu'on  est  heureux ,  et  l'ftme  peut 
0  être  heureuse  à  Hoedic  (ou  à  Houat)  comme  ailleurs. 
»  Pourquoi ,  en  effet,  ne  ly  serait^elle  pas?  Moins  exposé 
»  aux  désirs  brûlants  des  passions ,  moins  irrité  par  la  vue 
9  d'une  civilisation  corrompue  et  cruelle,  étranger  aux  vio- 
i)  lentes  commotions  qui  agitent  le  monde  ,  aux  injustices 
»  qui  l'accablent^  aux  lois ,  aux  manœuvres,  au  gouverne- 
»  ment  politique  dont  nous  sommes  souvent  victimes,  Tba- 
»  bitant  d'Hœdic  (ou  de  Houat) ,  calme  et  heureux,  vit  en 
»  paix  sous  l'empire  de  lois  plus  douces  et  plus  simples. 
9  Chez  lui  règne  la  vraie  liberté,  il  jouit  de  tous  ses  droits.  • 
Âussi>  ne  cite-t-on  qu'un  seul  Houatais  qui  se  soit  fixé  sur 
la  Grand* terre,  et  encore  se  repent-il  de  cette  démarche 
et  se  rappelle-t-il  avec  regret  sa  chère  Houat  :  c'est  là  qu'il 
a  vécu*  Il  est  également  très-rare  de  voir  des  femmes  du 
continent  venir  s'établir  à  Houat  ou  à  Hœdic  :  elles  y  soDt 


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—  363  — 

toujours  un  peu  traitées  comme  étrangères,  et  cette  remar- 
que s'applique  même  aux  personnes  d'une  de  nos  îles  qui 
vont  habiter  Tautre.  Houatou  Hœdic  aime  cependant  à 
conserver  des  rapports    fréquents  avec  Saint-Gildas-de- 
Rliuys,  dont  il  a  le  costume,  le  dialecte  et  même  i'accen- 
toation.  Quand  du  continent  il  se  présente  quelque  passa- 
ger pour  Hœdic  ou  pour  Houat ,  un  feu  s'allume  trois* 
quarts  d  heure  après  le  cou(Jier  du  soleil  sur  une  butte  de 
la  côte  de  Saint-Gildas ,  désignée  pour  chaque  Ile;  il  ne 
doit  être  éteint  que  lorsqu'un  semblable  signal  vient  lui 
répondre  du    rivage  insulaire ,  mais  il  doit  s'éteindre  à 
rinstant.  Le  lendemain  ,  un  bateau  parti  deltle  est  a  la 
disposition  du  voyageur.  Que  ce  soit  un  prêtn?  ou  un  ma* 
rin  hcBdicais  arrivant  du  service,  alors  la  barque  s'en  re- 
tourne pavillon  déployé ,  et  quand  elle  viendra  aborder  au 
port,  une  fouie  de  curieux  sera  là  pour  laccueillir,  joyeuse 
de  rendre  honneur  au  nouvel  arrivé  et  de  le  conduire  tout 
d'abord  auprès  de  son  pasteur. 

Je  termine  ici,  Messieurs,  cet  intéressant  chapitre.  Je 
viens  de  vous  soumettre  l'analyse  des  observations  qu'il  m'a 
été  permis  de  faire  pendant  mon  séjour  prolongé  dans  ces 
deux  fies,  à  trois  époques  différentes.  J'en  ai  dit  assez ^  ce 
me  semble,  pour  vous  prouverque  j'avais  raison  d'affirmer 
en  commençant  cette  lecture  qu'à  Souai  et  à  Hœdic  an  ne 
vU  painl  comme  ailleurs  ;  que  le$  mœurs  de  la  petite  popu- 
lalian  de  ces  deux  lies  ont  un  cachet  de  simplicité  et  de  dou- 
ceur qui  ne  se  retrouve  peut^tre  sur  aucun  autre  point  de 
notre  Europe  civilisée  (1). 

(1)  Cayot-DélandrOf  le  Morbihan^  son  histoire^  ses  monu" 
menis ,  Vaaoes  y  1847 ,  page  539. 


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—  564  — 


§  4.  —  Histoire  Batorelie. 

1  .<>  ZOOLOGIE. — TEBTÉBBÉs. — La  Faune  nous  ofire  pea 
d'espèce  en  MÊaw^mUfèw^emi  Les  Chouoe-Souris  y  pour- 
suivent les  insectes;  la  Tavpe^  inconnue  à  Hooat,  est  rare 
à  Hœdic  ;  le  Rat  surmulot  désole  le  pays ,  se  cache  dans 
les  anfractuosités  même  des  rochers ,  porte  ses  ravages  jus- 
que dans  les  chaloupes  amarrées  dans  le  port  et  n'épar- 
gne pas  même  les  cordages  et  les  voiles  ;  la  Souris  habile 
toujours  les  maisons  ;  le  Lapin  fournit  en  tout  temps  aai 
insulaires  un  utile  délassement  dans  l'intervalle  dés  offices 
religieux  du  dimanche;  enfin,  le  Manouin  est  toujouis 
pour  nos  pécheurs  un  animal  dont  ils  redoutent  la  pré- 
sence et  les  évolutions  au  milieu  des  filets  moins  pour  les 
poissons  qu'il  peut  leur  enlever  qu'à  cause  des  déglts 
qu'il  fait  à  leurs  engins. 

Ne  cherchez  pas,  dans  nos  tles  sans  arbres,  cette  roulti* 
tude  d'Oleeaatd^  qui  animent  les  bois  et  les  jardins  du 
continent.  Le  Rossignol,  h  Fauvette  A^  Loriot,  le  Merle, 
la  Grive,  le  Chardonneret,  le  Pinson,  le  Bouvreuil,  la  We^ 
n'y  paraissent  qu'accidentellement.  La  Tourterelle  et  le 
Coucou  s'y  font  entendre  à  la  saison  ;  mais  les  AUmetisi 
me  paraissent  les  premiers  musiciens  de  nos  îles  et  savent 
en  égayer  les  champs  par  leur  joli  ramage.  Le  TroglodutSi 
la  Berger  onnetu,  Y  Hirondelle  de  rivage,  le  Traquet  et  le 
Moineau,  chacun  à  sa  manière,  fait  sa  partie  dans  ce 
concert.  La  Cresserelle,  Y  Effraie,  les  Buses,  ont  un  autre 
mérite  et  rendent  de  vrais  services  en  foisant  la  guerre  aux 
rats  et  aux  souris. 


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—  365  — 

Les  Perdrix  rouge»,  qu'on  rencontre  seulement  à  Houat, 
proviennent  de  deux  couples,  qui  y  furent  apportés  en 
1828.  Poursuivies  par  le  chasseur,  elles  ne  passent  pas 
à  Belle-Ile,  comme  an  l'a  dit,  mais  elles  prennent  leur  es- 
sor dans  différentes  directions,  se  rapprochent  du  rivage 
et  viennent  se  remiser  dans  quelque  anfractuosité  de  la 
même  cAte;  cependant ,  quand  elles  sont  pressées  trop  vi- 
goureusement, elles  passent  dans  les  tlots  voisins ,  surtout  à 
la  pointe  du  Béniguet  ;  mais  ne  tardent  pas  à  revenir  dans 

nie. 

On  reman|ue  quelques  rares  Corbeaux,  et  l'on  dit  même 
à  Houat  qu'il  n'y  a  jamais  qu*un  seul  couple  sur  l'Ile,  et 
qu'à  l'exemple  des  Aigles,  ces  conirostres  forcent  leurs 
petits  à  quitter  le  pays  pour  s'établir  ailleurs.  —  L'appari- 
tion du  Coracias  sur  nos  Iles  est  un  bit  plus  certain  et  plus 
curieux.  Ce  tenuirostre,  qui  n'habite  que  les  Hautes- Alpes 
de  la  Suisse,  de  V Italie ,  du  Tyrol,  de  la  Bavière  ei  de  la 
Carinthie,  accidentellement  dans  les  hivers  rigoureux  sur 
des  montagnes  moins  élevées,  telles  que  le  Jura  et  les  Vosges, 
toujours  dans  le  voisinage  des  régions  couvertes  de  fi  imats, 
ou  en  Angleterre,  sur  des  pitons  rocailleux  des  côtes  mari- 
times (i) ,  vit  à  Belle-Ile  et  à  Houat  dans  les  mêmes  condi- 
tions que  chez  nos  voisins  d'outre-Manche.  C'est  dans  les 
endroits  les  plus  sauvages  de  Lomaria  et  de  Bangor  qu'il  se 


{i)  TemmlncV^  9fanuei  (fOrnifho/ogie^  1820,  !.'•  psrtie, 
page  1)3 1 1835 ,  3.*  partie,  psfe  70.  —  Un  petit  trsvaîl  sur  Belle- 
Ile  me  permettra,  plus  tard,  de  décrire  les  mœurs  de  cette  es- 
pèce que  les  insurgés  de  Jûn ,  détenas  à  Palais ,  se  plaisaient  à 
élever. 


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—  566  — 

retire  ;  c'est  dans  les  anfractoosités  les  plus  inaocessiblea  de 
la  côte  qu'il  établit  son  nid;  et,  pour  se  procurer  les  cou- 
vées ou  les  œufs,  le  dénicheur  bellilois  doit  s'y  iaire  des- 
cendre à  Taide  de  cordes.  Adulte ,  le  Coracîas  est  totale- 
ment noir,  à  reflets  violets,  verts  et  pourprés,  seloa  rinci- 
dence  de  la  lumière; son  bec  est  plus  long  que  la  tête, 
efRIé,  pointu,  arqué,  sans  échancrure,  et,  comme  les 
pieds ,  de  couleur  rouge  ;  les  ongles  sont  noirs.  C'est  le 
Crave  d^ Europe  Cuv.;  Corvuê  graadus  L.;  Coracia  ery- 
ihroramphos  Vieillot  {Galerie  des  Oiseaux^  pi.  103),  la 
Chouette  de  nos  insulaires. 

Sur  le  rivage,  des  oiseaux  marins  de  toutes  sortes,  pal- 
mipèdes et  échassiers,  ne  cessent  d*unir  leurs  éternelles 
criailleries  au  tumulte  mélancolique  des  flots,  mais  se  lais- 
sent difiicilement  étudier. 

On  ne  connaît  ici  comme  représentant  la  classe  des 
Wieptttem  que  le  Lézard  vert,  le  Lézard  gris, ï  Orvet,  la 
Rainette  xierte  y  le  Crapaud  calamiïe^  enfin  le  TriUm  pal- 
mipide  et  le  Triton  ûtniominal*  —  Les  Coûteuses  et  les 
Vipères  y  sont  tout  à  fiiit  inconnues. 

Les  J*olaa«tta  forment  un  ordre  de  vertébrés  avan- 
tageusement représenté  dans  la  Faune.  J'ai  donné,  en  par- 
lant de  la  pêche,  la  liste  de  ceux  qui  BOùile  plus  généra" 
lement  arrêtés  dans  les  filets  de  nos  dois. 

Articulés.  —  i.»  Anféiiete»*  —  Serpula  vermicuiaris  / 
Saôeila  aiveolata  f  Dentalium  enta  Us  i  Lumbncus  marinus  ^ 
Nereis**** 

2.<»  CrstafiteM  que  j'ti  pu  me  procurer  t  l'étrille  cons- 
mone  {Portumus  puéer);  le  orabe  cominaii  do  nos  côies,  {jreuget 
et  cancre  vert  au  Grcnsic,  {Porianus  mœnas)  ;  le  Pwrtttums 
Rondeletti  Bisso^  le  tourteau  {Jaureau  an  Croisic,  Cancer  Pm- 


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—  367  — 

§mrus  L.)  \  VÀÎeUe^elus  Oràignyi  Leaeh  \  le  flapie  madré 
(chérîgo  an  Groîsic  «  Crapsus  varias  Latr.)  s  Faraignée  de  mer 
(Maia  squinado  Leach)  \  Vlnachus  dorsettensis  Leach)  ; 
llienDile  Bernard  {Payurus  sirpàionyx  Leach)  ;  la  langouste 
commane  {Pnlinums  quadricornis  Fab.)  \  Fécrevisse  homard 
\failieur  dans  nos  îles,  Àstacus  marin  us  Vzh»)  \  le  crangon 
comman  {fiovco  2i  Hantes  et  an  GroisiCy  àéco  k  Bourgneuf  et  k 
Hachcconl ,  Crangon  vutgnris  Fab.)  \  la  salicoqne  \chpvrette 
de  mer  k  Nantes ,  Paieman  sqwUn  Leach)  ;  les  thalitres  on 
puces  de  mer  \  le  Pandarus  bicolor  Leach ,  vivant  sur  le  squale 
roussette* 

3.0  AT^^eHniAemm  —  Pas  d'observations. 

4.»  MmmeeËem*  —  Une  journée  consacrée  à  ce  genre  de 
chasse  m'a  donné  les  suivants ,  désignés  d*après  le  CoXa-- 
logue  de  M.  Dejean. 

Carabvs  auraius  et  hortensisf  Calafhus  mtianocfphalus  / 
(l'estomac  d<s  bufo  calamiia^  que  j'ai  soumis  au  scapel,  conte- 
nait une  grande  quantité  d'élytrcs  ^Agnnum ,  Harpalus  et  Ca^ 
iathus).  Anchomenus  anguslicoUif  et  prastnus  ;  Ludius  ta^ 
tusi  Eclinus  a1firrimus$  Cantharis  bicolore  Sytpha  rvgosa^ 
sinuata  et  iœvigala  ;  Mis  fer  lunatus  /  Sphœridium  scara* 
beoides  et  bittvstuiatum  f  Cercyon  obsoielumf  Gymnapieu^ 
rus  flageliatus  très-commun  ^  Copris  iunaris  f  Ontophagus 
vacca ,  nuchicomis ,  copra  et  Schreberi  $  Oniitcellus  flavU 
pesf  Aphodius  hiriellus ,  erraticus^  subterroneus  et  scrofa; 
Geotrupes  fyphœus  /  Bhisotrogus  meridionaiis  /  (le  hanneton 
cotonneux  ,  frappé  d'inertie  pendant  la  chaleur,  s'anime  le  soir, 
bourdonne  de  tous  côtés ,  vole  avec  rapidité ,  sans  attention ,  et 
devient  très-incommode  pendant  les  promenades  les  plus  agréa- 
bles de  la  journée.)  Phylax  meridionaiis  très-commun  \  Opa- 
irvm  sabuiosum  ;  Sfeioe  gallicus  et  cyaneusi  Asc/era  cœ- 
ruiescensf  Brachycerus!  europœusP;  Cneorinus  geminatus; 
Phyionomus  meiesf  Otiorynchus  fuscipes;  Lema  osparagi; 
Chrysomela  hottentotta^  coriacea  et  Banksiif  Coccmelia...,f 
Gryltus  campesirisf  Pentatoma  acuminata  ^  flavicornis  Pf 


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—  368  — 

Pniffommatus  Alexis  et  agesits;  Botys  hyàridaiùf  Noeiueiia 
conspersa  et  dipsacea^ 

MoLLu^QtES.  —  Recueillis  par  moi-même  ou  trouvés 
dans  les  collections  faites  par  les  curés  MM.  Rio  et  Lt 
Capitaine  : 

En  coquilles  terrestres  s  Buiimus  acutus\Htiix  ericetorum^ 
rhodostoma^  et  rotundnta.  —  En  coquilles  d*eau  douce  i 
Lymnea  auHcularia ,  étang  d'Hœdic ,  ovala  et  minuta  dans 
les  petites  sources  sur  les  bords  du  rivage  k  Houat.—  En  coquilles 

marines:  bttlta  iignaria^ /  Trovhus  cinerarius^  magtts 

et  iineatus}  Tumtella  commuais^  Scaiaria  commuais^  Litto- 
rina  Hitorea^  et  neritoidea ;  Monodonta  viridis;  Cyprœa  coc- 
cinelia  /  Buccinum  reticuiatum ,  lapillus ,  et  erinaceus  /  Ce^ 
rithium  lima  /  Fusus  comevs  /  Rostellaria  pes  pelecani  / 
Patelin  testud inaria  /  Ptcten  varius/  Pmna  mdis  ,-  Mytilus 
edvlis  f  Cardium  tuberculatvm  ^  edule  ,  el  serra tumf  Vonox 

anatinvm  /  Tellina  tenvis^  elfragiltsf  lucina  ! /  /^jtcr/ 

decvssata ,  et  avrea  /  Cytherea  Kione  et  exoleta  /  Mactra 
stvltommf  Lvtraria  solenoides\Solen  sitiqua  et  ensis\  Psam^ 
moùia  vesperlinat  Anatifa  lœvis  $  Pollicipes  comucopiaf 
Maianus  lœvis, 

HkYùnnts*^  Àsterias  rttbens  /  Opkiura  texturaia  P  et  c»x- 
pidifera?  i  Echinus  esculentus. 

2.<»  BOTANIQUE.  —  Les  plantes  de  nos  deux  fies  seront 
classées  d*après  l'excellent  ouvrage  de  M.  Lloyd  (  Flore 
de  la  Loire^Inférieure).  L'auteur,  pour  rendre  mon  tra- 
vail plus  complet ,  a  même  eu  la  complaisance  de  me  re- 
mettre toutes  les  notes ,  qu'à  diverses  époques ,  il  a  re- 
cueillies sur  les  plantes  d'Hœdic  et  de  Houat  : 

Myosurvs  minimus  }  Banunculus  hederaceus^  aqvatitis  ^ 
Flammnla  ^  chœrvphyllos  ^  repens^  àulhosus^  ci  porvf/lorus  ; 
Ficaria  ranunculoides,  —  Papaver  Argemone  rare,  hy* 
èridum  AG  %  moissons ,  rhœas  et  dubium  communs  \  Glau- 
cium  luteum  /  Chelidonium  majus  rare.  —  Fumuria  muralis 


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-  369  — 

et  officinalis.  —  Haphanvs  Ffophamstrum  /  Le  i?.  maritfmttt 
SiDÎlh,  n'est  autre  chose  qu*un  77.  Baphanisirum  très-robaste.  Je 
Fai  TQ,  en  18U,  sur  le  Mehan  ayec  de  jeunes  repousses  de  60 
contimfttres  \  I  mètre  et  plus  d'élévatiou  \  le  lobe  terminal  des  plus 
grandes  reuillcs  mesurait  20  centimi'^tres  de  large ,  et  la  feuille  at- 
teignait 6u  centimètres  de  long  ;  mais  ces  pieds  croissaient  au  mi- 
lieu des  déjections  des  oiseaux  marins  \  et  en  1849  ,  dans  les  flots 
Yalhnec  et  Glazic,  ses  dimensions  étaient  bien  réduites  et  se  ratta- 
chaient par  de  nombreux  intermédiaires  an  V7.  Raphanislrvm  / 
Brassica  Cheiranthus  $  Sifiapis  arvens^sf  Dipiotaxis  tenni^ 
foiia  f  Sisymbrium  officinafe  f  Matihiola  sinunta  s  Arnbis 
Th^fiann  9  Crambe  maritima  croît  parmi  les  galets  entassés 
sur  le  bord  du  rivage  dans  une  localité  unique  (4  li  5  pieds  \  Houat, 
une  vingtaine  k  Hœdic)  ;  Cakile  matitima  ;  Cametinn  fœîida 
Pries  (Grén.  et  Godr.  FI.  de  /'r.),  dans  les  champs  de  lin,  rare  $ 
— Cochlearia  danicof  le  célèbre  Cranson  de  Bretngne  (r.  Ar^ 
moracia  L ,  Roripa  rusticana  Grén.  et  Go  J.)  signalée  le  long 
des  ruisseaux  de  Ifretagne  dans  les  ouvrages  de  matière  médicale 
(Toir  MM.  Merat,  Hilne  Edwards  et  Vavasscur ,  etc.),  n'est  une 
plante  bretonne  que  par  le  noro(N.  Légal,  Fi.  du  Morbihan^  page 
94);  elle  se  propage  dans  un  jardin  du  curé  de  Houat^  mais  évidem- 
ment elle  ne  se  trouve  Ik  que  comme  plante  anti- scorbutique.  L*pi- 
dium  Smithiif  Coronopu»  RueiHi^  Teesdolia  iberis  /  Caps  et  la 
Borsa  Pastorts.  —  Hetianihemum  ^ullatum  et  sa  var.  mn^ 
rii/mum.  —  Fio/a  Biviniann ,  et  V.  tricnlor  G  nana  Lloyd  t 
tiges  de  S  k  10  centimètres;  corolle  très-petite,  blanche  ou  bleue 
très  pâle;  sable  maritime;  forme  maritime  !  de  la  variété  B  ar^ 
pentit,  (Lloyd).  —  Beseda  iuteoh.  —  Potygala  vulgnris  B 
oxyptera.  —  Frankenia  tmvis,  —  Dianihvs  prolifer^  et  gai- 
Urus  i  Silène  inflala  dans  les  moissons,  maritima  sur  les  ro- 
chers et  les  coteaux ,  conica  et  gallicn  /  tychnis  vespertina 
et  gilhago  /  Sogina  procumbens  et  maritima  Don  ;  ^pergiila 
arvensis  et  suhulatn}  Arenaria  marina  Rolh  ,  peplnides^ 
i^^nuifolia^  visciduh ,  serpillifolia  et  sa  variété  mncrocarpa 
Uoyd ,  forme  maritime  rabougrie  de  l'espèce  ;  Sttllaria  médiat 


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—  370  — 

Mœnchia  erecla  /  Cerasfivm  glomerûlum  9  triviale  et  ietran* 
drum  Gort.  Ce  dernier  off  e  deux  forme»,  l'une  trapue,  IrH-vis- 
queuse,  couchée,  appartcnaol  aux  sables  nus^  Faulre  grêle,  moins 
visqueuse,  croiséant  dans  les  liôui  plus  ou  moins  herbeux.  Dans 
les  individus  robustes,  les  fleurs  k  cinq  parties  dom'ment;  dans 
les  plus  petits,  elles  sont  presque  toutes  k  quatre  parties 
(Lloyil).  —  linum  angusUfolium$  Badiota  iinoifies.  —  Malva 
moschala^  syivcstris  (varie  quelquefois  k  fleurs  lilacées),  et 
nicœpiisis  /  Lava  fera  aràorea  rare  dans  les  deux  fies  mêmes, 
mais  très- commun  dans  les  ilôts  qui  les  avoisinent.  Je  puis  citer 
Beg  er  Vachif\  deux  ou  trois  mètres  de  Houat  9  Er  Gurec ,  Er 
Cents ^  Er  Valhuec  et  ^r  6^/ffz/c:  .•  quelques  pieds  seulement  k 
Boss  Tosf  (île  près)  et  Bass  Creis  (ile  milieu) ,  mais  k  File 
Glazic ,  ils  étaient  tellement  rapprochés  qu'ils  formaient  un  char- 
mant petit  bois  de  hante  futaie.  L'absence  de  toute  autre  végéta- 
tion, le  sol  piétiné,  et  de  nombreux  débris  de  poissons,  annon- 
çaient que  les  mouettes  ou  autres  animaux  étaient  venus  se  re- 
poser sous  cet  ombrage.  —  Hypericum  UneQrifoiiumi  —  Géra» 
nium  molle  ^  columbinum  ^  dissectum^  rotundifoiium  vipur' 
pttrpum  Vil.;  Eroffium  cf'cufariumf  Evonymus  europœui  au 
moulin  et  près  de  Bass  Tost*  —  i/iex  éuropœus.  Je  n'y  ai  point 
vu  1'^.  nnnas^  viVU.  C^//t/ Planch.  Mais  cependant  comme  ce 
dernier  est  une  des  raretés  qu'il  m'a  été  pemùs  de  cueillir  sur 
les  côtes  du  llorbihan,  sousla  con«!uite  deM.Toussaints,  d'An- 
ray,  et  que  celte  espèce  est  publiée  dans  un  ouvrage  trop  peu  ré- 
pandu, je  dois  k  notre  Section  des  sciences  naturelles  de  m'arrêter 
un  instant  dans  mon  énumération  et  de  citer  la  Fhre  desserres  et 
jarffins  de  thurope^  publié  kGaod  «sousla  direction  de  M.  Van 
Houtte,  t.  V,  page  441  g,  1849  ,  où  il  est  figuré.  «  C'est  k  M.  Le 
»  G  ail,  auteur  d'une  Fiore  (inédite,  mais  déjk  imprimée)  du 
H  Morbihnn ,  que  revient  le  mérite  d'avoir ,  le  premier ,  bien  dif- 
i>  tingué  et  bien  décrit  la  plante  nouvelle  en  question  ;  k  M.  le 
»  chef  de  bataillon  Toussaint  appartient  l'hoaneur  d'avoir  parfai- 
»  tement  confirmé  ces  vues  par  des  diaguoscs  comparatives  des 
1»  Uleaa  nanusy  europwus  et  de  la  nouvelle  espèce  bretonne.  Pov 


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—  371  — 

»  notre  part,  dit  M.  PlaBclK>n ,  ez-coosenrateur  de  l'herbier  de 
n  W.  Qooker,  noos  aurons  ca  k  relever  l'errenr  presque  iné- 
»  Tilable  ou  ces  deax  auteurs  ont  été  conduits ,  k  proposer  pour 
u  la  aoavcUe  espèce  le  nom  d'^«  6*a//rï  en  l'honneur  de  H.  Le 
»  Gall,  k  en  constater  l'existence  dans  la  partie  S.'-O.  de  l'Âng1e« 
i>  terre  aussi  bien  que  dans  notre  Bretagne  française..... •  » 


ULBX  BCROPOEUS. 

«  4rbrisseau  de  2  k  6 
pieds  de  hantear,  k  ra- 
meaux redressés ,  k  épi 
ses  (feuilles  adultes  et 
ramules)  fortes,  inégales, 
diyariqaées. 

Bmctéoles  calyci* 
naies  ovales ,  grandes , 
beaucoup  plus  la  ges  que 
le  diamètre  du  pédicelle. 

Fieur  grande,  d'un 
jaune  citron. 

Caiice  conrert  d'an 
duvet  lâche  et  jaune- 
roussfttre. 


Âiiês  de  la  coroUe 
dépassant  de  beaucoup 
la  carène  qu'elles  eoi- 
brassent,  en  se  ccQrbant 
chacune  en  aro-boutant 
et  croisant  leurs  som 
mets. 

FUuraisfm  dès   las 


VIiEX  GALLII. 

a  /4rbrisseau  de  l  1/2 
k  3  pieds ,  k  rameaux  et 
épines  presque  comme 
^U.  europœusy  mais 
moins  robustes* 


Hr.  caL  ovales-oblon- 
gués,  petites,  un  peu 
plus  larges  que  le  dia- 
mètre du  pédicelle. 

FL  moyenne ,  d'un 
jaune  orangé  (Obs.  de 
M.  Toussaint). 

CaL  couvert  d'un  lé- 
ger duvet  jaune,  rous 
sitre     seulement    vers 
l'extrémité. 

MIps  en  réalité  un 
peu  plus  longues  que  la 
carène  9  mais  se  laissant 
ilépasser  par  elle,  dans 
la  leur  fraîche  k  cause 
de  lenr  légère  courbure 
en  arc«bontant. 

Fièuraùon  de  sept. 


VLBX  NÂIfUS. 

iiSous^arSrissea»  de 
1  k  1  1/2  pied  \  k  tiges 
nombreuses  ,  couchées 
ou  redressées,  k  épines 
courtes,  très -serrées, 
moins  robustes  que  chez 
les  espèces  précédentes. 

£r,  ctiL  oblongues, 
très-petites ,  k  peine 
aussi  larges  que  le  dia- 
mètre du  pédicelle. 

FL  petite,  d'un  Jaune 
vif. 

CaL  k  surface  lisse  et 
luisante,  sur  laquelle  la 
loupe  fait  voir  de  petits 
poils  clairsemés  et  cou- 
chés. 

Aiies  manifestement 
plus  courtes  que  la  ca- 
rène, sur  les  côt<^s  de  la- 
quelle elles  s'appliquent 
presque  k  plat. 


Fieurûison  de  juillet 


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—  372  - 


premiers  mois  de  Tan** 
née,  active  aurioat  en 
avril  et  en  mai. 

Fruits  mûrs  en  juin  « 
Faonée  même  de  la  floo- 
raison  et  s* ouvrant  alors 
avec  élasticité  (Obs.  de 
Uiller,  de  Filassier  et 
do  M.  J.  Gaj) ,  et  avec 


un  crépitement  particu- 
lier (Obs.de  M.  J.  Gaj).» 


en  décembre  (Observ.  de  en  octobre. 
M.  Le  Gall). 

Fruits » 

Jo  complète  cette  note 
en  disant  que,  le  30  mai 
1849,  il  ne  restait  plus 
que  quelques  fruits  sur 
les    tiges;    les    autres 


Fruits  mûrs  pendant 
Tété  qui  soit  la  fleurai- 
son  et  se  retrouvant  en- 
core clos  sur  la  plante 
un  an  après  leur  maUH 
rite  (Observ.  de  H.  J. 
Gajf).« 


étnicnt  déjk  tombés,  et 
la  plus  grande  partie  de 
ceuK  que  j*ai  recueillis 
alors  se  sont  ouverts  avec 
élasticité.  Les  légumes 
avaient  la  villosité  et  les 
dimensions  de  ceux  de 
VU.  turopœus  \  leurs 
graines  étaient  sembla- 
bles. 

Écoutons  maintenant  quelques-uns  des  scrupules  qu'éprouvait 
M.  Le  Gall  k  reconnaître,  dans  cet  ajonc  nouveau,  FA.  de  Pro- 
vence s  ce  On  est  d'abord  disposé,  dit- il,  k  regarder  cet  arbris- 
»  seau  comme  une  variété  à  moindres  dimensions  et  li  fleurs  pré- 
»  coces  de  l'ajonc  d'Europe ,  variété  qui  serait  duc  au  voisinage 
»  de  la  mer  \  mais  l'ajonc  d'Europe  se  développe  bien  sur  le  lit- 
»  toral,  et  sa  fleuraison  ne  se  trouve  aucunement  bâtée.  D'ailleurs, 
»  les  fleurs  de  la  première  plante  ne  sont  pas  seulement  plus  pe- 
»  litcs  que  celles  de  la  seconde  \  elles  sont  différentes  et  se  rap- 
»  prochcnt  beaucoup  des  fleurs  do  1'^.  nanus.  L'idée  dliybri- 
»  dite  ne  saurait  être  mieux  accueillie,  bien  que  l'ajonc  de  Pro- 
»  vence  (lisez  U.  Caitii)  ait  1rs  rameaux  de  rajonc  d'Europe  et 
»  presque  les  fleurs  de  l'ajonc  nain  i  ces  deux  derniers  ajoncs  ne 
»  fleurissent  pas  k  la  même  époque  \  l'un  est  en  pleine  Tructiflca- 

»  tion  lorsque  l'autre  se  crouvre  de  fleurs »  C'est  sur  les  deux 

extrémités  de  l'étang  dePoulben ,  \  Âuray ,  que  M.  Toussainu  ne 


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—  373  — 

montrait  cet  ajonc  qu'il  a?ait  si  bien  examiné ,  et  je  Tai  rera  k 
Ploaharnelf  en  allant  li  la  recherche  d*un  Eryng/om  qoi  n'est  pas 
moins  cnricnx  ;  mais  revenons  à  notre  Flore  hoedico-hunataise  t 
Saroihamnvt  scopnriut  $  Onoms  k  arvensts  Smilh^  commun 
dans  les  sahles^  fitedirogo  iupuitna^  strinto  commun,  marina 
Goromon «  mtnima ,  ffenlicultfa  et  apicuiala  /  Meblolvs  ptfr~ 
Vf'flora^    peu  commun;    Trifoltum    slricium^   gfomeraium^ 
suffucatum  ,   subterraneum ,    arvense  et  perpusHium    DC  f 
pratense ,   mnriiimum ,  scahrum  ,  strinlum ,  resvpinaium , 
frngiferum  et  procumbens;  Loivs  corniculaivs  et  var.  cras^ 
sif'iUus ^  hispidus  commun;  Lupinus  iinifolius  Roth,  Âgardh, 
Boreao  (/..  rpticulafus  DesT.)«  M  Lloyd  l'indique  rare  k  Hœdic; 
je  n'en  ai  vu  que  quelques  pieds  k  Honat ,  k  la  batterie  de  Gor- 
laj.  Ornithopus  perpusillus  commun,  vompressus  rare,  ebrac* 
ieatus  rare;  Viria  hirsvfa  ^  iulea^  très-commune  dans  les  flots 
avec  Vangtisti'foiia  f  Laihyrus  Aphaea  ^  sphœn'cus^  et  hir^ 
suius  i  —  Prunus  spinosa  /  Bubus  fruticosus  rare  ;  Poiên~ 
mil  reptnns  /  Alchemiiia  ftrvensù ,•  Polerium  sanguisnrba 
commun;  Rosa  pimpineltifoh'a ^  canina t  Cratagus  monogy'» 
na  R.  —  lythrum  hyssopifdia  ;  —  Tamartx  tfng/fca  Webb. 
surtout  autour  de  l'étang  d'Hœdic  ;  —  Btontfn  fontana  /  ~  Cor^ 
rigiola  Ut  ton  lis  /  Heminria  giabra^  et  hirsuta  $  Pt  igcar^ 
pan  tetraphyilum  /  Aderanthus  annuusf  —  Tiitma  muscosa , 
surtout  autour  du  moulin  de  Houat  ;  Sedum  ongltcum ,  et  ocre  / 
UmbiUcus  penduHnus  le  long  des  murs  Trais  et  des  toits  de 
chaume;  —  Saxffragn  trydactylites  f  —  Hydrocoiyie  vulga-* 
ris  i  Eryngium  cnmpestre  ,  maritimum  $  mais  je  n'y  ai  point 
TU  le  viviparum  Gay,  [pusiiium  Le  G  ail,  Fi.  du  Morbihan  ^ 
page  253 ,   non  L. ,  nec  Lam  ).  Cette  espbce  que  mentionnent 
MM.  Grenier  et  Godron,  est  encore  me  plante  que  les  botanistes 
Tiennent  demander  k  la  Bretagne  ;  mais  n'espérons  pas  la  trouver 
dans  nos  Iles,  pas  même  k  Bclle-lle,  trop  accidenté  par  ses  val^ 
Ions  encaissés  et  ses  coteaux  magniGqnes. 

Nous  n'avons  dans  nos  deux  fies  aucune  localité  qui  puisse  lui 
convenir  I  car  elle  se  plaît  uniquement  dans  les  landes  et  encore 


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—  374  — 

daM  les  parties  les  plus  basses  (nais  non  marécagenses)  qae  ks 
eaux  phiviales  Tiennent  couvrir  en  aalomne  et  eu  hiver ,  et  aban- 
donnent complètement  an  printemps,  au  milieu  des  lim  hl gt- 
nosa^Exartim  Cnndoflii^  Thrincia  hfrta ,  plantes  qne  le  vina- 
geoisvi«>nt  détacher  avec  le  sol  qni  les  nonrrit  pour  en  former  des 
engrais.  C'est  dans  ces  if arguas  ou  y  arquas  qa<5  ce  petit  panicaut 
étale  ses  rameaux  ornés  du  petits  capitules  li  chaque  dichotomie.  Si 
Fêté  est  très-sec ,  me  dit  M.  Toussaints,  les  capitules  se  détachent 
et  roulent  sur  la  terre  où  ils  se  multiplient  comme  les  autres  es- 
pèc  s  do  ce  genre  \  mais  lorsqu'il  survient  des  pluies  avant  Tentière 
destruction  de  la  plante ,  les  capitules  se  gonflent ,  et  bientôt  l'on 
voit  de  petites  touffes  de  feuilles  en  sortir  en  rosette  et  y  offrir  les 
rudimenls  de  nouveaux  pieds  qui  donneront  des  fleurs  et  des  fruits 
l'année  suivante  \  et  la  plante- m&re  elle-même  pousse  une  nou- 
velle rosette  de  feuilles  autour  du  collet  de  sa  racine.  —  Je  ne 
donnerai  point  la  description  de  cette  espèce,  décrite  très-an  long 
par  M.  Oay  (Ânn.des  Se.  nat.  3."  sér.  148) ,  et  par  MM.  Grenier 
et  Godron  {Fi,  de  France^  t.  1  page  754)  ,  ouvrage  que  chaque 
botaniste  doit  posséder,  malgré  la  trop  grande  sobriété  dans  les 
citations  de  localités.  GrUces  aux  recherches  de  M  Bémont ,  d'Au- 
ray ,  médecin,  qne  la  science  et  les  pauvres  regrt  Itent ,  recherches 
continuées  par  MM.Toussainls  (d'Auray),  Taslé  (de  Vannes',  et  Pon- 
ta.  lier ,  aujourd'hui  k  h apoléon  Vendée ,  on  connaît  huit  localités 
oh  cette  plante  croit  abondamment  t  Bf argués  de  Saint- Laurent, 
de  Saint-Sauveur ,  de  Kerimel,  en  Ploemel  (et  non  Ploe.  mel  comme 
l'écrit  M.  Gay)  par  M.  Hémont  \  —  de  Kergrimm  en  Camae  \  d'Er- 
deven ,  de  Conrconneau,  en  Erdeven^  du  Rongal ,  en  Plouhamel, 
parM.Toussainls. 
Je  repremis  la  suite  de  ma  Flore  hœdico-honataise  : 
Bvphvrvm  aristaium^  Scandix  pecfen,*  Anihriscus  syives- 
iris  \  T^rilt's  helvetica  et  nodosa  /  Vaticus  raroia  /  sur  les 
rochers  on  trouve  une  forme  maritime,  \  tige  courte,  épaisse,  très- 
hérissée  de  poils  blancs  étalés,  recourbés  dans  le  bas  et  \  lobes  des 
folioles  obtns,  mucronés;  c'est  alors  le  />.  hispidus  Bréb.  FL 
Horm.  (Lloyd)  t.  Apium  graveoiensf  Peir9seiinum  saiivvm  / 


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—  37S  -^ 

Copiam  maeulatum  /  Smyrm'um  Oiusatmm  ;  Hehsci^ftînm 
nodt/iorvm  B  ochreotttm  DG  ;  Œnanihe  pettcedanifoHa , 
Lachenalti^  étang  de  Hcedic,  et  crocotaf  JSihusa  t  yn'^piumf 
Crithmum  manUmufn$  Herficleum  Apondylium  G,  sa  *  les  ro- 
ckers frais  )  —  Hedern  Ueiix  i  —  Lônictfra  Pericfymenvm  f 
-^/titbia  peregtina  R;  Catium  arenanum  G,  Moiiugo  et 
Jparine  ;  Asperuia  cynatichica  ,•  shtrnrdin  orvensis  /  — 
Voiervineiln  oiiloria  et  eriovarpn  $  —  Dîpsocus  sylv^sfn'sf 
Scaùiosa  orvensis  f  —  BelUs  perennisi  Btdens  trfpnrtita^  k 
Besdic  ^  /iiirAr  crithmoid*s  PG  ^  Fila  go  germanica ,  mon  tan  n 
tXgaificaf  Neiichry^um  Stœchat;  Arlemisii  vufgarisf  inaîs 
point  >/.  campestfis  marifima  /  Oihanthus  monUmits  PG  ; 
Anihemis  nobiii»  ^  cofuia  et  ntixla  f  i.hrysfinthemwn  ino» 
dorum  B  m*nritimum ,  Porihenium  jardins  des  carés«  et  /^^e- 
Arm  /  Sênecio  va/gans  (k  f  et  3  fleurs  dans  les  sables)  ;  Jaco^ 
bma^ lattdes  et  coteaux,  iyfvatictts  sur l.s remblais  de  la  DooTelle 
Oitadelle  de  Houat^  Cirsfum  tancenialum  et  aroense;  i  arduus 
mariùnns  R ,  tenufflorus  CG  ,  et  nniansf  Arcfium  loppa; 
Kenfrophylhtm  fanffium;  Centaurea  f*ynnus  et  Cafcilmpff  f 
Aeofymus  hhpantcus  ;  Lampsona  commvnis^  et  minima  $ 
Thrihcfa  htrta  de  formes  diverses  <  He/mtnthia  echioides,-  Hy- 
ptithmris  glnbra  et  radicala;  Toraxacrtm  officinale  f  iOJt* 
chus  nsper^  et  mariiimus  bords  de  Fétang  d'fleedic  ;  Crépis 
tamxacifotia  G  k  Hsedic,  virens  et  bvibosa  GG  daos  les  sables 
des  deux  ties  \  Nieracium  piioseii^^  vmbeiiafum  ou  espèce 
trks-ToisiBe^  —  tobelia  urensf  ^  Jasione  montana  et  sa  va- 
riété B  marUlmof  Prismatocarpus  hybridus  f  ^  Erica  eine- 
rmR/  —  Ligustrum  vu  f  gare  f — Cynanchum  Fincetoxicumf 
—  Erytkrœa  Ceniaurium ,  et  marilima  var.  Occidvntoiisf 
Exacum  filiforme  %  ^  Convolvulus  arvensis  et  àoidanella  f 
Cuscuta  minorf  —  Heiiotropium  enropœttmi  Echium  vui- 
gf^rof  Lithospermum  officinale  près  du  Menhir  er  lan  k  Hœdic/ 
Lycopsis  arvensis  f  Borrogo  officinalis;  Myosotis  versicolor\ 
Cynoglossum  officinale  /  Omphalodes  liftoralis  GG  dans  les 
saMeSy  suftout  auprès  des  GareoMS^  —  Solanum  miniatum^  ti 


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—  376  — 

Duicamnru }  ^  Hynscynmus  niger\  Datura  Stramoniums 
Verbascum  schraderi^X,  biattarioides ;  Digitalis  purpureag 
Linatia  Pelùsenana  surtout  k  Houat,  an  fort  -de  Gourlaj^  et 
arenartfu 

J'ai  cherché  TaiDemi'Dt  k  Houat  et  k  Hœdic  nue  eapèce  nouvelle 
peut-être  pour  ia  Flore  do  France^  je  Tavais  rencontrée ,  le  11 
Sipt4:mbre  lb44  ,  au  Port  Bordcrie  en  BelIc-lle;  Je^l'ai  culiivée , 
depuis  celte  époque ,  pour  mieux  étudier  son  mode  de  Té|iétation  ; 
je  l*ai  revue,  en  1849 ,  sur  un  autre  point  do  la  même  tle  (Port 
Kerrel).  Laissez- moi ,  Messieurs,  interrompre  mon  aride  nomen- 
clature pour  TOUS  faire  son  histoire.  M.  Le  Gall  Pavait  étudiée 
dès  18'i7  k  Belle-Ile,  et  la  considérant  comme  non  enco  e  dé- 
ciite,  il  lui  coDsacra  les  lignes  suivantes  dans  sa  Flore  imprimée, 
mais  malheureusement  encore  inédite  du  t/orôi^an  {^zge  413): 
ce  L.  radicante.  l.  radicnn^  N.  Assez  petite,  vivace.  Tige  eou- 
»  chée  ou  ascendante,  radicante  k  la  base ,  rameuse,  assez  dure, 
»  poiluô  \  quelquefois  plusieurs  tiges;  ramuaui  allongés,  grêles. 
»  Feuilles  inférieures  opposées  ou  presque  opposées ,  ovales  ar*- 
»  rondies  ou  seulement  ovales ,  entières  ou  très-peu  dentées  \  les 
»  supérieures  alternes,  haslées,  et  quelques-unes  ovales-cordi- 
»  formes.  Fleurs  azillaires,  solitaires,  assez  petites ,  k  pédoncules 
»  longs,  capillaires,  presque  entièrement  glabres,  poilus  k  U 
»  base  et  au  sommet  ;  calice  poilu-hispide  «  k  divisions  lancéolées 
»  subulées ,  bien  scaneuses  sur  les  bords  \  corolle  blanchâtre  ou 
»  bleuâtre ,  k  lèvre  supérieure  d'un  bleu  clair,  k  palais  souvent 
M  taché  de  pourpre ,  k  éperon  long,  aigu,  très-recourbé.  Cap- 
»  suies  globuleuses,  dépassées  par  le  calice ,  assez  dures ,  brunes^ 
u  graines  ovoïdes,  rugueusesmuriquées ,  d'un  brun  assez  clair.  — 
»  Eté.  Coteaux  sablonneux  et  dunes.  TR.  Belle-Ue.  —  J'ai  caeilli 
»  cette  plante,  pour  la  première  fois,  au  mois  d'août  1817 ,  et  je 
»  la   regardai,  dès- lors,  comme  une  espèce  non  encore  dé- 
»  crite.  M.  Lloyd,  qui  Ta  cueillie  en  1838,  aussi  k  Bellc-Ue,  en 
»  parle  dans  sa  Flore  de  la   Loire- Inférieure ,  mais  sans  Pad- 
»  mettre  comme  espèce,  sans  lui  donner  un  nom.  Elle  a  été  cueil- 
»  lie  récemment  par  MM.  Debooz  etTaslé.  —  Est-ce  la  linaiiO 


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—  377  — 

»  que  M.  Bornhardi  a  nommée  Linaria  commuta ia  P  —  Je 
»  DVn  conoais  pas  la  description  ;  je  sais  seolemenl  qu'elle  passe 
»  pour  n'être  qu'une  variété  de  la  l,  Eiatiae.  »  (C'est  du  moins 
Topinion  de  M.  Bentham^  in  DC.  Prodr.  X.  p.  268  :  mais  M.  Wal- 
pcrs,  Reperi.  Boian,  T.  3.  p.  194  et  M.  Koch  en  font  une  es^ 
pèce.)  tt  Or,  notre  plante  n'a  véritablement  de  VEtaiine  que  les 
»  feuilles  et  les  pédoncules.  £lle  s'en  éloigne  par  la  tige  dure  et  ra^ 
i>  dicante  k  la  base,  par  ses  fleurs  de  moitié  plus  grandes,  k  divi- 
»  sions  calicioales  plus  étroites  et  plus  scarieuses,  \  corolle  offrant 
»  des  couleurs  moins  tranchées  et  un  éperon  très-courbé  ^  enfin  par 
»  la  capsule  plus  dure  et  surtout  par  ses  graines  chargées  de  pointes 
»  épaisses  très-rapprochées  an  lien  d'être  alvéolées  ou  creusées  en 
»  aillons  tortueux.  »  Ce  dernier  caractère ,  en  admettant  comme 
exacte  la  synonymie  du  Prodromus ,  nous  force  k  chercher  notre 
plante  dans  la  seconde  subdivision  des  ElatinoiJcs  s ...  Seminum 
testa  granuioso-iabercuiata  ^  et  la  L,  Grmca  Ghav.  s'offre 
h  nuns  dans  la  description  peu  complète  du  Prodr.f  mais 
la  fig.  21  {Expédition  de  Morée^  Botanique)  ne  représente  pas 
notre  plante  belliloise.  Le  teite  est  encore  pent-ôtre  plus  défavo* 
rable;  j'y  lis  (page  175)  :  Fleurs  entièrement  jaunes  $  éperon 
presque  drcit  /...  peduncuiis  cirrhescentéùus,..  Caractères 
cooOrmét  dans  la  description  de  la  même  plante  par  M.  Walpcra 
(page  194)  s ...  Coroiiœ  citrinm  caicari  arcuato^  demUm  rec- 
to. —  11  nous  faut  donc  revenir  k  la  L.  commvtata  Bcrhnardi , 
ai  toutefois  ses  graines  sont  semblables  aux  nôtres ,  caractère 
qu'oublie  de  mentionner  M.  Walpers,  ou  y  reconnaître  une  espèce 
inédite  et  alors  admettre  le  nom  proposé  par  M.  Le  Gall.  Voici,  du 
reste,  comment  elle  se  comporte  dans  mon  petit  jardin  botanique 
depuis  1845  i  Lorsqu'elle  provient  de  graines,  elle  prend  le  port 
de  VEiatine^  se  charge  de  fleurs  d'un  rose  tendre,  lavé  de  bleu, 
grandes  et  muoies  d'un  long  éperon  toujours  courbé  en  hameçon; 
et  lorsque  les  dernières  fleurs  se  montrent,  elle  émet  k  l'extrémité 
de  tous  ses  rameaux  un  grand  nombre  de  racines  k  la  façon  des 
Lycopodes  et  surtout  du  Lycnpodium  inundatum  ;  Ik  se  forme, 
avant  l'hiver,  un  petit  bouquet  de  feuilles  très-rapprochées,  ovales, 

26 


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—  578  — 

eotières,  Iîsmb,  peDdaot  que  le  reste  de  la  pUbte  mûrit  ses  capsolcs 
k  {^aincB  granuleuses- tuberculées.  Au  printemps  suhant,  la  plante 
continue  son  évolution  et  pousse  de  nouveau  des  feuilles  ovales  en 
cœur,  hastées  et  poilues.  —  Mais  il  est  temps  de  revenir  k  notre 
Flore: 

Veronica  Chamœdrys^  ûfficinnUs^  nrvensis^tX  hederœfoiiof 
Pedicuiarts  syivatica  f  BarUia  viscosa f  huphra^ia  Odun- 
m  es  /  —  Orobanc  he  Galii  sur  le  Caiium  arenarium^  minor 
sur  le  Piantago  Coronopîts  ,  et  Eryngii  sur  les  deux 
Bryngium  ;  —  Sahia  verbenaca  /  Ciinopodium  vuigar^  / 
Lamium  ampiexicaufe  /  Pntnelln  vuigans  /  Tehcrium 
Scorodonia  /  —  Vtrbena  officinaiis  ;  —  Lysimackia  Li'- 
num  steUalum  GG  au  milieu  des  Lagurusf  Anagaliis  ar" 
vensisf  Samotvs  Valerandi $  Glavx  maritima^  bords  du 
grand  étang  d'Hoedic;  —  ôtaiice  Armeria^  Limonium  \  Dœdic, 
Dodartii^  et  Occidtniaiis  /  tlaniago  Coronnpus ,  et  lanctfh 
iata  et  la  var.  B  ianttginosaf  —  Chenopodium  murate^album 
et  Vutvaria;  Beia  maritima  /  et  triplex  portuiacoides ,  et  /i^ 
/ordr/// Ilots  le  Guric^  le  Valhuec^  le  Glaiic^  Bass  Crefsti 
Bass  Tostf  Rumex  congiomerahu^  et  sa  forme  maritime, 
Puicher^  crispus^  aceiosa  ^  et  Acciosetiof  Poiygonum  am- 
phibium  k  Fétang  d'HoMlic,  murittmum  sables  de  Porh  Bras^  à 
Hœdie.  ^  Thesium  humifasum  \  Hoedic.  —  Arùiohchia  LU- 
mnîiiis  k  Houat,  BR.  —  Euphorbia  Hetioscopia ,  Paralias^ 
portiandicQ  /  Mercurialis  annua  ja  din  du  curé  de  Hooat.  — 
Urticaurens  Hmdic-^  Partetaria  officinaiis  f  ffumuius  Ivpu- 
itts  un  ou  deux  pieds  près  des  ruines  de  la  chapelle  de  Saint-Gil- 
das  k  Houat.  -->  salix  viminalis  planté  dans  le  jardin  du  curé  de 
Houat.  —  Bphedra  dislachya  G  dans  les  sables. 

ZanickelUa  palusiris  douves  de  Tétang  d'Hœdic  \  Zostera 
marina.  —  Lemna  minor,  —  Arum  ilalwum.  —  Orchis 
iaxiflora  Hœdic,  ^lorio  Houat;  Ophrys  a^anifera  GG  k  Honat 
entre  le  moulin  et  En  Tâl  et  du  port  k  Bass  TosU  —  Tricbâ- 
nema  Bvlbocodium  AG  \  iris  fœtidissima  /  P ancra titrm  ma- 
fiOmum  G  dans  les  sables  de  la  côte  Est^  k  Honat,  entre  le  port 


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—  379  — 

et  le  moalio ,  et  )t  Hœdic ,  eotre  le  phare  et  Pen  Gard.  —  Aspa* 
ragus  officinaifs  B  mùriêtmus  AG  /  Ifvscus  aculeatuêf  — 
Mpkodelys  aiàus  pointe  du  Bénipiet  \  Hooat^  Sciiia  autum- 
naUsi  Hyacinthus  non  script  us  G  sous  quelques  rochers  de  U 
pointe  du  Béniguct,  rare  aillcure;  Ailium  iphœrocephatum  GG. 
Juncus  maritimus  bords  de  la  côte  d^Hœdic  tris-rare,  aculus 

issez  commua;  et  capitaius  ÂG.;  Luzuta /  —  Cyperus 

iongus  étang  d'Hœdic;  Scirpas  setaceus^  et  tacusiris  étang 
d'Hœdte;  Canx  dMsa^  GG  autour  de  l'étang  d'Hœdic,  mûri-- 
cata^  arenaria  G,  Hornschuchiana  et  êxtensa  R.  —  Phaiaris 
minor  Hœdic  ;  Anthoxanihum  odoratum  et  la  var.  B  nanum^ 
plante  de  2  k  4  ceolimèlres  sur  les  rochers  GG;  Alopecurus 
agrbsiis  G  ;  Phieum  arenarium  AG ,  ptateusef  thamagroslis 
minima  G,  Cynodon  Daclylon  /  Agroslis  vuignris  G  ;  LagnrUs 
ovaius  formant  des  espèces  de  prairies  sur  quelques  dunts.  Les 
bestiaux  qui  y  paissent  ne  paraissent  pas  le  b  ou  ter,  au  moins 
quand  il  est  en  épi;  il  est  plus  rare  k  Hœdic  ;  Catamagtoslis 
arenaria  PG  ;  Gasiridium  iendigerum  /  Af  undo  phragtniUs 
G  \  l'étang  d'Hœdic  ;  R  k  Houat ,  car  il  crott  su.  les  rochers  du 
rivage  où  suinte  Teau  douce  ;  Kœieria  cristaia  G  ;  Aira  canes-- 
cens^  caryophyUacta  $  Hoicus  ianatus ,  et  moUis  s  Arrhena- 
naiherum  elaiius  $  Avenu  fatua^  et  fiavescensi  Triodia 
decumôensi  Poa  loitacea  C^pra/ensùf  Clyceria procumbens 
^Çs\Dactylis  glomerata  et  var.  hispanica  f  Cynosurus  cris- 
talus  f  Festùca  unf'giumis^  Bfyuros^  duriuscula^  rubra^ 
rigfda  et  dumetorum  GG  ;  forme  prairie  sur  quelques  flots  ; 
Lrachypudium  pinnatumi  Bromus  moiiis ^  sterHis^  timoili" 
formis  Lioyd  k  Hœdic;  Triticum  repens^tijunceunn  Hordeum 
marinum  var.  et  mariiimum:  Loiium perenne  GG,  et  temuien* 
ium  C  ;  Holtboel  ta  incurva  ta  G. 

Lhara  fragiiis  ^i\xa%  dHœdic;  —  Asplenium  marinum  sus- 
pendu aux  voûtes  des  grottes  de  la  côte;  ianceoiatum  R,  au  bé- 
niguet.  J'ai  vainement  cherché  VAdianihum  Captllus  Veneris  que 
M.  Lloyd  a  rencontré  k  Belle-Ile. 

3.«  MINERALOGIE.  —  J'ai  déjà  dit  que  le  sol  de  nos 


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—  580  — 

deux  tles  est  granitique  ;  les  îlots  voisins  que  j*ai  voulu 
visiter  pour  en  constater  aussi  la  nature  minéralogique, 
ne  ni*ont  offert  partout  que  du  graniL  A  Houat  et  aux  tlots 
qui  l'entourent,  c'est  du  granit  où  le  feldspath  existe  dans 
la  masse  en  gros  morceaux  {granit  porphyrdtdé)  et  à 
teinte  rosâtre;  —  à  Hœdic,  les  grains  sont  fins  et  l'as- 
pect est  gris. 

Il  existe  un  petit  filon  de  micaschiste  entre  le  bourg  et 
le  puits  creusé  à  Len  er  Hoet ,  d'un  mètre  de  large  envi- 
ron et  se  dirigeant  du  N.-E.  au  S.-O.  — A  Hœdic,  les 
travaux  du  fort  ont  aussi  révélé  l'existence  d'un  filon  de 
micaschiste  plus  délitable. 

Nantes,  mars  1850. 


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ANNALES 


DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  SÉANCES. 


Séance  du  5  juin  1850. 

PBÉSIDBNGB  DB  M.   GBÉ60IRB ,  YICE-PBÉSIDEIIT. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté. 

Correspondance  : 

1.^  Bibliothèque  générale  des  Écrivains  bretons,  par  M. 
T.-P.-A.  Gautier,  de  Dol.  —  Prospectus. 

2.^  Concours  pour  un  Almanacii  agricole,  pour  1851 , 
fondé  par  Jacques  Bujault. 

27 


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1 


—  582  — 

S.""  Association  Bretonne,  8.®  congrès,  à  Morlaix  (Fi- 
nistère),  octobre  1850. 

4.''  Congrès  scientifique  de  France,  pour  1850, 17.* 
session ,  à  Nancy. 

5.®  Société  nationale  et  centrale  d'Agriculture.  —  Bul- 
letins des  séances. — Compte-rendu  mensuel,  par  M.  Payen. 
1849. 

G.""  Mémoires  de  la  Société  d'Émulation  d'Abbeville, 
1844,  1845,1846,1847,1848. 

7.''  Bulletin  de  la  Société  d'Agriculture ,  Industrie, 
Sciences  et  Arts  du  département  de  la  Lozère.  N.<^*  1 ,  2 
et  3,  janvier,  février,  mars  1850. 

8."^  Sur  la  congestion  cérébrale,  par  M.  Bouchet,  de 
Nantes. 

9.°  Séances  publiques  de  la  Société  d'Agriculture,  Com- 
merce, Sciences  et  Art^  du  d.épfirtem^nt  de  la  Ifame; 
années  1847  et  1848. 

10.®  Hémoires  de  la  Société  d'Agriculture,  des  Sciences, 
Arts  et  Belles-Lettres  du  département  de  l'Aube.  T.  1 , 
2.«  série.  N."  7  et  8.  3.«  et  4.*  trimestres  de  1848. 

H.""  Discours  prononcé  par  M.  Lanjuinais,  représentant 
du  peuple,  dans  la  discussion  générale  du  budget  de  1850. 
—  Enseignement  professionnel  d'agriculture. 

BL  Grégoire  commence  la  lecture  d'un  travail  intitulé  : 
Études  sur  la  Ligue  en  Bretagne. 

H.  Livet  continue  ses  communications  sur  la  littérature 
des  Xyi.«  et  XVU.«  siècles. 


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—  585  — 
Séance  du  10  jxaiet  1850. 

PlIÉSUffinCB  DE  m.  QÈhl. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté. 

Correspondance  : 

l.""  Précis  analytique  des  travaux  de  F  Académie  des 
Sciences,  Belles- Lettres  et  Arts  de  Rouen,  année  1849. 

2.®  Problèmes  d'agriculture  et  d'économie  rurale,  à 
l'usage  des  Écoles  primaires  rurales,  par  M.  Neveu- 
Derotrie. 

L'auteur  accompagne  cet  envoi  d'une  lettre  par  laquelle 
il  demande  l'avis  de  la  Société  sur  l'utilité  de  la  direction 
qu'il  a  suivie  dans  la  composition  de  son  livre. 

M.  Ch.  Varsavaux  est  chargé  d'examiner  cet  ouvrage  et 
d'en  rendre  compte. 

S.""  Une  lettre  de  M.  Loreau,  docteur-médecin  à  Poi- 
tiers, qui  adresse  à  la  Société  les  ouvrages  suivants  : 

Projet  de  loi  sur  l'exercice  de  la  Médecine  et  de  la 
Pharmacie; 

De  l'organisation  delà  Médecine  rurale  en  France; 

De  l'Enseifaernent  médical  organisé.  —  Suppression 
des  Écoles  préparatoires  de  Médecine  et  de  Pharmacie. 

4."*  Carte  du  canton  de  Legé,  par  M.  de  Tollenare. 

M*  le  Président  lit  une  notice  nécrologique  sur  M.  Souêt 
d'Enxttgny,  enlevé  depuis  quelques moia à  la  Société: 

«r  M.  Souêt  d'Ermigny  était  né  à  Laon ,  département 
de  l'Aisne^  le  11  septembre  1772.  —  Sorti  du  collège  de 
la  Flèche,  tena  p^r  les  doctrinaires,  en  juillet  1789,  il 


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—  584  — 

entra  d'abord  comme  surnuméraire  dans  les  bureaux  de  son 
père,  directeur  des  fermes  générales  du  Berry,  à  la  rési- 
dence de  Châteauroux.  Partisan  des  idées  de  réforme  po- 
litique et  de  progrès  social,  qui  étaient  Tesprit  du  temps , 
il  embrassa  le  parti  de  la  Révolution,  et  servit  pendant 
près  de  deux  ans  dans  les  rangs  de  la  garde  nationale  de 
cette  ville.  On  sait  qu'alors,  de  toutes  parts,  on  courait  aux 
armes.  Tout  ce  qui  se  sentait  en  état  de  supporter  la  fa- 
tigue de  la  guerre  se  précipitait  dans  les  camps.  Un  jeune 
homme  eût  rougi  de  rester  dans  ses  foyers ,  lorsque  l'in- 
dépendance  nationale  paraissait  menacée.  Chacun  aban- 
donnait ses  études  commencées  ou  sa  profession ,  et  des 
armées  s'improvisèrent ,  qui  assurèrent  le  triomphe  de  h 
France.  M.  Souêt ,  par  ses  opinions  et  par  son  âge ,  ne 
pouvait  rester  étranger  à  cet  élan  militaire  ;  lui  aussi  il 
fut  un  de  ces  intrépides  volontaires  dont  on  n*a  jamais 
bien  su  le  nombre,  et  parmi  lesquels  se  trouvaient  des 
pères  de  famille,  qui  s'enrôlèrent  pour  marcher  au  secours 
de  la  patrie  en  danger.  Carrière  entr'ouverte ,  bmille, 
M.  Souêt  quitta  tout  et  se  fit  soldat.  Le  13  septembre 
1791,  il  fut  nommé,  par  Louis  XVI,  sous-lieutenant  au 
7."  régiment  de  chasseurs  à  cheval  en  garnison  à  Hague- 
nau.  Entré  en  campagne  au  mois  de  juin  1792 ,  il  se  rendit 
dans  le  Porentruy ,  aux  ligues  de  Weissembourg  et  sur  le 
Rhin,  et  assista,  sous  le  commandement  du  général  Cus- 
tîne ,  aux  prises  de  Spire ,  de  Worms  et  de  Hayence.  La 
France  se  trouvait  alors  dans  une  position  très-critique; 
les  étrangers  y  avaient  déjà  pénétré  par  plusieurs  points, 
et  les  principales  puissances  de  l'Europe  voulaient,  sinon 
sa  destruction  totale ,  au  moins  son  démembrement.  En 


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—  385  — 

1793,  M.  Souêt  fit,  avec  son  régimeot,  partie  de  la  gar- 
nison de  Mayence,  si  célèbre  par  sa  belle  et  longue  dé* 
fense.  Pendant  ce  mémorable  siège ,  il  passa  aide-de-camp 
du  général  Scbelinky,  polonais  au  service  de  la  France. 
Resté  dans  son  régiment ,  après  la  reddition  de  la  place , 
conformément  à  la  capitulation,  il  vint,  avec  le  corps  de 
la  petite  armée  formée  des  garnisons  du  Nord,  à  Nantes, 
pour  servir  à  Tlntérieur  contre  les  rebelles  de  la  Vendée. 
Là,  il  acheva  la  campagne  de  1793,  et  fit,  comme  lieu- 
tenant, celles  de  94  et  95  :  iescampagnes  les  plus  meur- 
trières de  la  Révolution  ont  été,  sans  contredit,  celles  de  la 
Vendée.  Trois  ou  quatre  armées  y  furent  successivement 
englouties,  notamment  18,000  hommes  levés  à  Paris  et 
aux  environs,  12,000  tirés  de  Tarmée  du  Nord,  qu*on  y 
dépêcha  en  mai  1793,  outre  les  troupes  qui  y  étaient  déjà 
et  les  garnisons  de  Mayence ,  de  Condé ,  de  Valenciennes, 
fortes  d'environ  16,000,  qui  arrivèrent  dans  les  premiers 
jours  de  septembre;  en  tout,  46,000,  qui  périrent  en  très- 
peu  de  temps.  M.  Souêt  échappa  à  ce  chancre  poliliqtiej 
coDome  on  l'appelait  alors ,  qui  dévora  tant  de  Français. 
Mais,  sur  la  fin  de  Tan  II,  voyant  sa  santé  ruinée  par  les 
&tigues  de  la  guerre ,  et  croyant  avoir  payé  sa  dette  à  la 
patrie ,  il  demanda  un  congé  de  réforme  et  l'obtint.  Sa 
carrière  militaire  s'étend  ainsi  de  1792  à  96  ;  elle  com- 
prend toute  la  guerre  à  laquelle,  dans  ces  derniers  jours, 
un  grand  citoyen,  le  maréchal  Gouvion  Saint-Cyr,  s'hono- 
rait le  plus  d'avoir  pris  part ,  <r  parce  que ,  disait-il ,  en 
même  temps  qu'elle  est  une  des  plus  saintes  que  la  France 
ait  soutenue ,  elle  est  aussi  celle  où  le  peuple  français  a 
déployé  le  plus  d'énergie ,  de  courage  et  de  persévérance. 


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—  586  — 

Le  but  de  ses  efforts  était  de  défendre  rindépebdanee  na- 
tionale contre  les  armées  de  l'Europe  coalisée.  Aussi  ce 
Alt  dans  cette  guerre  qu'il  acquit  le  plus  de  gloire ,  ri  h 
gloire  s'acquiert  en  raison  des  difficultés  vaincues  et  de  la 
justice  de  la  cause.  » 

j»  Après  avoir  renoncé  au  brillant  avenir  militaire  qui 
s'ouvrait  devant  lui,  car  chaque  soldat  portait  alors  le  bâton 
de  maréchal  de  France  dans  sa  giberne  ,  M.  Souêtdevmt 
contrôleur  de  la  garantie  des  matières  d'or  et  d'argent  à 
Nantes.  Fonctions  qu'il  a  exercées  jusqu'en  1834,  époque 
à  laquelle  il  fut  mis  à  la  retraite  sur  sa  demande. 

»  M.  Souët  était  amateur  érudit  et  soigneux  d'anti- 
quités: il  a  préservé  du  vandalisme  beaucoup  de  thosies 
que  l'Archéologie  et  les  Beaux- Arts  seront  heureux  de  re- 
trouver ;  il  laisse  un  musée  précieux  de  médailles,  de 
gravures,  de  pierres  gravées,  de  vitraux,  de  statuettes , 
et  autres  objets  rares  et  précieux  dont  il  se  plaisait  à  dire 
les  honneurs  de  la  meilleure  grâce.  H.  Souèt  était ,  en  effet, 
un  vieillard  aimable  et  qui  savait  vivre  :  causeur  spirituel 
et  piquant,  sa  mémoire,  qui  ne  tarissait  point  (FaneodoCes 
et  de  particularités ,  prouvait  qu'il  avait  traversé  la  vie 
en  philosophe  et  en  observateur.  —  II  était  depuis  long- 
temps membre  de  l'Académie  de  Nantes ,  de  l' Association 
Bretonne ,  de  la  Société  Archéologique,  qu'il  a  souvent 
intéressée  par  ses  communications.  » 

M.  Renou  (Guillaume-Félix),  né  à  Nantes,  le  27  fé- 
vrier 1802,  est  admis  au  nombre  des  membres  corres- 
pondants de  la  Société,  sur  un  rapport  fait,  au  nom  d'une 
Commission ,  par  H.  Auge  de  Lassus. 

M.  Renou  est  avocat  à  Gaen  et  auteur  d'un.  CaUdogue 


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—  387  — 

raùonni  des  plantes  vàsculaires  qui  croissent  spontané- 
ment dans  le  départefnent  du  Calvados.  Ouvrage  fait  en 
coUaboratioii  avec  MM.  Haraouin  et  Leclerc,  docteurs-mé- 
decins à  Caeu. 

S.  Vabbé  Fournîer,  curé  de  Saint-Nicolas,  de  Nantes, 
ne  à  Nantes,  le  3  mai  1803 ,  est  admis  au  nombre  des 
membres  résidants  de  la  Société,  sur  un  rapport  fait, 
an  nom  d'une  Commission,  par  H.  Ev.  Colombèl. 

i'ABBÉ  90UBII1BR. 

H.  Fabbé  Fournier,  curé  de  Saint-Nicolas,  de  notre 
TÎfle ,  se  présente  à  vos  suffrages.  Nous  ne  doutons  pas 
de  son  admission  comme  membre  résidant. 

Il  serait  vraiment  inutile  de  parler  des  titres  de  nôtre 
candidat  :  sa  position  dans  le  monde  clérical ,  son  activité 
chrétienne ,  ses  efforts  pour  orner  notice  ville  d'un  nouvel 
édifice,  les  suffrages  qu'il  a  obtenus  en  1848,  sa  nobté 
et  franche  conduite  à  TAssemblée  Constituante ,  certes , 
en  voilà  autant  qu^il  en  faut,  pour  que  l'Académie  sott 
fière  de  posséder  une  nouvelle  adhésion. 

Mais  je  sais  que  si  ces  titres  attirent  vos  suffrages  et 
tes  entraînent ,  il  en  est  d'autres,  plus  littéraires,  qui  sont 
mieux  goûtés  par  vous.  Votre  origine  vient  des  lettres,  des 
beBes-lettres ,  origine  qu'il  faut  revendiquer  dans  un  âge 
où  on  les  oublie  trop ,  où  on  les  oublie  au  point  de  né  plus 
tes  connaître  ! 

Comme  littérateur,  M.  Tabbé  Fournier  se  produit  en 
orafear,  en  orateur  sacré,  en  mattre  de  cette  tribune 
catholique  qui  est  une  des  gloires  de  notre  pays. 

L'éloquence  de  la   chaire  appartient  au  catholicisme. 


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—  388  — 

Rien  de  semblable  ne  nous  est  révélé  dans  les  fonctiom 
sacerdotales  du  paganisme.  On  a  voulu  comparer  à  notre 
éloquence  de  la  chaire  les  leçons  des  philosophes,  les 
déclamations  des  sophistes ,  les  harangues  des  rhéteurs. 
L'assimilation  est  inexacte ,  philosophes ,  sophistes  et  rhé- 
teurs, n'étaient  point  revêtus  de  ce  caractère  exceptionnel 
du  prêtre  chrétien.  Au  point  de  vue  moral,  Socrate,  ha- 
ranguant les  Grecs ,  ne  vaut  pas  notre  modeste  curé  de 
campagne ,  prêchant ,  le  dimanche ,  à  la  grand'messe , 
de  pauvres  cultivateurs  arrachés  à  leurs  moissons. 

Et ,  pourtant ,  chose  digne  de  remarque ,  l'aliment  des 
harangues  philosophiques  était  bien  le  même  aliment  des 
prédications  de  Massillon  ;  écoutez  Cicéron  : 

cr  De  rébus  bonis  ac  malis ,  expectendis  aut  fîigiendis , 
»  honestis  aut  turpibus ,  utilibus  aut  inutilibus ,  de  virtote, 
»  de  justitià ,  de  continentià ,  de  prudenti& ,  de  magni- 
»  tudine  animi ,  de  liberalitate ,  de  pietate,  deamicitià, 
»  de  fide,  de  o£ficio,  decœteris  virtutibus  etcontrariis 
»  vitiis.  (De  oratore ,  L.  III).  »  Voilà  quel  était  le  thème 
philosophique  de  l'antiquité.  La  harangue  antique  n'a  pas 
relevé  le  thème,  le  moderne  sermon  l'a  singulièrement 
exhaussé.  D'autres  diront  d'où  cette  différence?  Le  monde 
ancien  avait  élevé  à  la  morale  une  tribune ,  le  catholi- 
cisme lui  a  élevé  un  trône.  On  n'a  jamais  parlé  aux  hommes 
de  plus  haut  que  d'une  chaire. 

L'orateur  sacré  vient  du  ciel  ;  du  moins ,  il  doit  le 
croire ,  ce  qui  est  plus  que  de  le  faire  croire.  II  parle  au  nom 
de  Dieu;  il  vient,  en  son  nom,  parfois ch&tier  l'huma- 
nité ,  la  guider  souvent,  l'instruire  toujours ,  jamaisla  com- 
plimenter. L'auditoire  chrétien  n'est  pas  de  ceux  qu'oa 


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~  389  — 

flatte;  il  est  de  ceux  qu'on  blâme.  Le  prédicateur  qui 
monte  en  chaire  a  presque  un  ennemi  dans  chaque  cœur 
auquel  il  s'adresse ,  et,  cette  passion  ennemie ,  son  devoir 
lui  commande  de  Taborder  de  front. 

Cette  difficulté  de  position ,  spéciale  aux  orateurs  de  la 
chaire ,  nous  remet  en  mémoire  ces  autres  belles  paroles 
de  Cicéron  : 

«  In  causarum  contentionibus  magnum  est  quoddam , 
»  atque  haud  sciam  an  de  humanis  operibus  longe  maxi* 
»  mum,  in  quibus  vis  oratoris  plerumque  ab  imperitis 
n  exitu  et  Victoria  judicatur  :  Ubi  ad  est  armatus  adver- 
D  sarius,  qui  sit  et  ferrindus  et  repellendus  :  Ubi  sœpe  is 
n  qui  rei  dominus  futurus  est  alienus  atque  iratus,  aut 
•  etiam  amicus  adversario  et  inimicus  tibi  est  ;  quûm  aut 
»  docendus  isest,  autdedocendus,  aut  reprimendus,aut 
»  incitandus,  aut  omni  ratione,ad  tempus, adcausam, 
j»  oratione  moderandus;  in  quo  sœpe  benevolentia  ad 
»  odium,  odium  autem  ad  benevolentiam  deducendum 
»  est;  qui  tanquam  macbinatione  aliquft ,  tùm  ad  severita- 
0  tem ,  tum  ad  remissionem  animi ,  tum  ad  tristitiam ,  tum 
j»  ad  tetitiam  est  contorquendus.  (De  oratore ,  L.  II).  » 

Ce  que  Cicéron  redoutait  de  trouver  au  barreau,  le 
prêtre  chrétien  le  rencontre  à  Féglise. 

J'ai  comparé  le  barreau  à  la  chaire.  Répondrais-je  à  une 
question  banale  :  L'éloquence  de  la  chaire  est-elle  plus 
difficile  que  celle  du  barreau  ? 

Notre  avis  est  que,  dans  les  questions  qui  touchent  à  Tart^ 
il  n'y  a  point  de  solutions  absolues. 

L'éloquence  de  la  chaire  a  des  perspectives  plus  grandes 
que  celle  du  barreau.  Le  lieu  dispose  mieux  au  recueille- 


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—  390  — 

ment.  L'auditoire  est  plus  bienveillant.  [1  n'y  a  pas  de 
réplique  à  craindre.  Voilà  d'immenses  avantages.  Mais  si, 
d*un  autre  côté,  le  danger  est  moins  pressant,  le  péril  est 
moins  actuel.  Le  pathétique  se  prête  mieux  aux  luttes  de 
l'audience,  il  y  abonde  parfois,  quand  il  fuit  presque  tou- 
jours les  prédications  évangéliques. 

Et  même,  au  sujet  de  la  réplique,  on  a  fait  cette  juste 
observation.  Sans  doute ,  il  n'y  a  pas  à  l'église  de  contro- 
verse ouverte ,  apparente  de  réplique  toute  préparée ,  d'ob- 
jection, coràm  populo,  d'argumentation  à  Tencotitre  des 
théories  exposées  en  chaire;  ce  qui  se  trouve  au  barreau 
et  ce  qui  déconcerte  bien  des  discours  préparés  et  des  im- 
provisations arrangées  à  loisir; mais, dans  chaque  audfteur , 
11  y  a  une  réplique  sourde  ,  occulte  ,  cachée ,  d'autant 
plus  redoutable  qu'elle  est  muette. 

Aussi  un  bon  prédicateur  doit  atler  au-devant  de  Tar- 
gument  qui  ne  peut  se  produire,  il  doit  le  deviner, 
l'analyser,  le  poser  franchement  et  le  combattre  de  même. 
Les  convictions  sont  opiniâtres,  et  elles  s'entêtent  d'autant 
mieux  qu'elles  ne  peuvent  discuter.  Silence,  t)ottà  Vennemi, 
disait  le  grand  Condé,  quand  il  voyait  Bourdaloue  monter 
en  chaire. 

Puis,  voyez-vous,  les  distinctions  n'ont  jamais  conduit 
à  rien,  quoi  qu'en  disent  les  jurisconsultes,  mes  maîtres. 
L'éloquence  est  ou  n'est  pas.  Le  lieu,  la  circonstance^  les 
moyens,  tout  cela  n'est  pas  l'éloquence  ;  ils  peuvent  aider 
l'orateur ,  ils  ne  lé  font  point.  J'ai  toujours  été  tenté  dédire 
de  l'orateur,  ce  que  Boileau ,  qui  avtiit  Talr  de  s'y  connaître, 
disait  du  poète  :  C'est  en  x>aih  qu*atf   Parnasse 

Assurément,  il  convient  peu  de  généraliser,  mais  je 


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r 


—  59i  ~ 

kh  dm  règles  de  réioqoeûcele  oas  qvie  Démoslhènes  fusait 
de  quelques  critiques  athéniennes. 
9  AthéDÎens,  disait  le  grand  orateur,  lorsqu'il  s'agit 

•  du  destin  de  la  Gf ëce  ^  qu'in)f)orte  si  j'ai  employé  ce 

•  terme-ci  ou  celi»-ià,  si  j'ai  porté  ma  mahi  de  ce  cdté 

•  00  de  cet  autre » 

L'éloquence  est  au-dessus  de  ces  détails. 

En  suivant  des  routes  différentes,  nos  grands  orateurs 
de  la  chaire  ont  réaKsé  des  merteilles.  Massilloa  s'adresse 
an  cœur;  Bourdalooe,  à  la  raison  ;  Bossuet,  à  l'imagina- 
tion et  à  la  ToloBté.  De  là ,  l'éloquence  onctueuse  de  Mas-^ 
siUon;  de  là,  l'éloquenoe  irrésistible  de  Bourdaloue;  de 
là  aussi,  les  éclairs  que  hnee  Boesuet,  et  cet  empire  souve- 
rain qu'il  exerce  sur  eeM  qui  l'écoute. 

Laissons  chacun  suivre  sa  route  ;  Démosthines  sera 
pkin  de  vigueur  et  de  dialeetiqiie.  Cicéron ,  pkis  souple , 
s  élèvera  aux  grandes  nations  d«  juste  et  de  l'iniuste.  Mdb- 
dlon  émeut,  Bourdaloue  conquiert,  et  Bossuet  illuBiiae. 

BosBiiet  Bionte  en  chaire  :  ii  est  au  milieu  des  tombeaux 
des  rois;  la  cour  eu  deuil  se  presse  autour  d'un  riche  mau- 
solée, ronrteur  promène  sur  ceUe  foule  un  regard  long  et 
donioareui ,  il  ne  rooapt  son  silence  que  pour  s'écrier  : 
Rieu  miiesê  gfOiwi,  mai  frirê8....%.  Voilà  de  l'éloquenoe. 
Où  est  la  règle  7 

Bridaiae  débute  à  Saint**Sulptoe,  en  1750;  la  foule  se 
presse  aussi  autour  de  la  chaire.  Bridaine  ne  voit  que  des 
gens  riches^  des  heureux  de  ce  monde  ;  il  s'attriste  et 
deoMûde  pardon  à  Bieu  de  n'avoir  encore  annoncé  sa  pa- 
role qu'aux  pauvres  de  la  terre. 

<r  Jusqu'à  présent,  j'ai  publié  les  justices  du  Très^^Haut 


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—  592  ~ 

Il  dansdes  temples  couverts  de  chaume,  j'ai  prêché  les 
j»  rigueurs  de  la  pénitence  à  des  infortunés  qui  manquaient 
j»  de  pain,  j*ai  annoncé  aux  bons  habitants  des  campagnes 
»  les  vérités  les  plus  effrayantes  de  ma  religion .  Qu'ai-je 
»  fait,  malheureux  !  J*ai  contristé  les  pauvres ,  les  meilleurs 
»  amis  de  mon  Dieu  ;  j'ai  porté  l'épouvante  dans  ces  âmes 
»  simples  et  fidèles,  que  j'aurais  dû  plaindre  et  consoler. 
»  C'est  ici  où  mes  regards  ne  tombent  que  sur  des  grands, 
j»  sur  des  riches,  sur  des  oppresseurs  ou  sur  d'audacieux 
»  et  d'endurcis  pécheurs.  Ah!  c'est  ici  seulement,  qu*il 
»  fallait  faire  retentir  la  parole  sainte  dans  toute  la  force 
»  de  son  tonnerre,  et  placer  avec  moi ,  dans  cette  chaire, 
»  d'un  côté,  la  mort  qui  vous  menace,  et  de  l'autre,  mon 
A  grand  Dieu  qui  vient  vous  juger!  » 

Voilà  de  l'éloquence.  Où  est  la  règle? 

On  peut  dire,  cependant,  que  le  but  de  l'éloquence  sacrée 
est  triple  :  instruire ,  persuader,  émouvoir. 

Instruire  ces  grands  en&nts,  qu'on  appelle  les  hommes, 
de  ces  vérités  éternelles ,  qui  sont  comme  les  assises  de 
l'humanité. 

Persuader  que  la  bonne  conduite  et  l'observance  des 
règles  morales,  non*seulement  pèseront  dans  la  balance 
du  Très-Haut,  mais  encore  contribuent  à  assurer  à 
l'honmie  ici-bas  la  plus  grande  somme  de  bien-être. 

Émouvoir  le  riche  sur  les  infortunes  à  secourir  et  sur  les 
bonnes  œuvres  a  tenter. 

Sainte,  trois  fois  sainte  mission! 

Et  c'est  celle  qu'a  remplie  et  que  remplira  longtemps 
encore  notre  candidat  académique. 

Ev.  GOLOHBEL;  Evgèrb  TÂLBOT;  DELALÂNDE. 


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—  595  — 

H.  de  Rivas  rend  compte  des  travaux  de  la  Section  de 
Médecine  pendant  Tannée  1850. 

M.  Foulon  dépose  sur  le  bureau  une  proposition  ainsi 
conçue  :  Nommer  une  commission  chargée  d'apporter  des 
améliorations  à  la  division  actuelle  de  notre  Société  en 
sections.  Renvoi,  selon  l'usage,  au  comité  central. 

H.  Grégoire  achève  la  lecture  de  ses  Études  sur  la  Ligue 
en  Bretagne. 


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1 


RAPPORT 


SUB  LES 

TRAVAUX  DE  LA  SECTION  DE  MÉDECffiE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE 

DE   LA    LOIRE-INFÉBIECBE , 
PBKDAnT  LB  PB6MIBB  SBMBSTBB  1850  ) 

PAR  M.  LE  DOCTEUR  DE  ROSTAmC  DE  RIVAS, 

SlGRjftTAlU. 


Hessieubs  , 

Concourir  au  perfectionnement  des  connaissances  mé- 
dicales, mais  surtout  étudier  les  maladies  les  plus  ordinaires 
aux  pays  où  elles  ont  leurs  résidences,  tel  est  le  double  but 
que  doivent  se  proposer  les  Sociétés  de  Médecine.  Non-seu- 
lement ces  corps  savants  ont  à  s'occuper  du  meilleur  trai- 
tement à  préconiser ,  ils  ont,  de  plus,  à  rechercher  dans 
rinfiuence  de  Fair,  des  eaux  et  des  lieux,  Torigine  de  ma- 


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—  595  — 

ladies  non  moins  variées  que  ne  le  sont,  et  ces  mêmes 
influences,  etiesaptitudes  de  l'organisation;  seul  moyen  de 
prévenir  ces  nombreuse?  affectionsque  l'art  est  souventmôme 
impuissant  ^  guérir.  Lorsque  ces  affections  ont  pour  cause 
des  habitudes  vicieuses,  aux  Académies  appartient  d'en 
démontrçr  le  danger;  lorsqu'elles  tiennent  à  des  émana- 
tions d'un  sol  marécageux ,  à  elles  encore  de  réclamer  le 
concours  des  administrations,  pour  tarir  cette  source  de 
misère  et  de  mort:  leur  devoir,  en  un  mot,  est  de  faire 
pénétrer  dans  l'opinion  cette  vérité  déjà  sortie  de  la  plume 
de  Pariset,  que  si  I4  santé  publique  est  le  résultat  d'une 
civilisation  plusparfaite,  elle  en  est  encore  le  signe  in&iUible, 
et  peut-être  le  signe  unique. 

Votre  Section  de  Médecine,  Messieurs,  n'est  pas  restée 
^^-dessous  de  sa  mission  :  les  nombreux  mémoires  que 
contient  1^  journal  qu'elle  publie  depuis  1825,  l'attestent, 
et  les  travaux  qu'elle  a  mis  au  jour,  les  discussions  aux- 
cjuelles  elle  s'est  livrée  pendant  le  semestre  qui  vient  de 
s'écouler ,  témoignent  d'une  manière  évidente  que  ses 
membres  actuels  continuent  à  suivre  la  voie  ouverte  par 
leurs  devanciers. 

Notre  titre  de  secrétaire,  nous  faisant  un  devoir  de  vous 
présenter  le  compte-rendu  de  ces  derniers  travaux,  nous 
venons  aujourd'hui  nous  acquitter  envers  vous. 

Mon  prédécesseur,  M.  Chenant^is,  vous  a  fait  connattre 
la  composition  du  bureau  de  1 849*  U  vous  a  dit  que  les 
suffrages  de  la  Sectiop  de  Médecine  avaient  alors  appelé 
M.  le  docteur  Saliion  à  la  présidence.  Certes,  elle  ne  pou- 
vait faire  un  meilleur  choix  ;  nul ,  plus  que  M.  SalUon ,  ne 
comprend  la  dignité  du  corps  auquel  il  appartient;  nul. 


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—  396  — 

plus  que  lui ,  ne  réunit  les  qualités  qui  donnent  de  l'auto- 
rité à  un  président.  Cependant,  la  Section  étant  obligée 
d'obéir  à  son  règlement,  et  ses  articles  lui  détendant  de 
laisser,  deux  années  de  suite ,  le  même  membre  présida 
ses  séances,  M.  Pihan-Dufeillay,  son  vice-président,  a  été 
nommé  président  pour  1850,  et  M.  Bonamy  a  été  appelé 
à  la  place  que  ce  dernier  venait  de  laisser  vacante.  Hais 
M.  Sallion ,  avant  de  quitter  le  bureau ,  a  voulu  remercier 
ses  collègues  du  témoignage  d'estime  qu'il  en  avait  reçu, 
et  leur  donner  quelques-uns  de  ces  conseils  auxquels  son 
expérience  et  sa  haute  position  donnent  un  si  grand  poids, 
et  L'année  qui  vient  de  s'écouler,  leur  a-t-il  dit,  a  été  mar- 
quée par  deux  actes  qui  démontreraient,  à  eux  seuls,  l'uti- 
lité des  associations  médicales  :  Tun ,  a  été  les  nouveaux 
efforts  que  npus  avons  tentés  contre  le  projet  de  loi  du  1." 
octobre  1849,  par  lequel  les  médecins  seraient,  de  nou- 
veau ,  soumis  à  la  patente  ;  l'autre,  concerne  les  études  aux- 
quelles nous  nous  sommes  livrés  à  l'occasion  du  choléra.  » 
Puis ,  après  avoir  démontré  ce  qu'il  y  aurait  d'inique  à  sou- 
mettre à  l'impôt  une  profession  exercée  par  des  honames 
dont  l'existence,  presque  tout  entière,  s'écoule  à  remplir 
des  fonctions  gratuites  ou  à  soulager  des  malheureux, 
auxquels  ils  doivent  souvent  fournir  et  les  médicaments  et 
la  subsistance ,  il  s'étend  sur  le  dévouement  qu'a  montré  le 
corps  médical,  durant  la  dernière  épidémie ,  et  termine, en 
engageant  la  Section  à  ne  pas  perdre  de  vue  l'objet  princi- 
pal de  son  institution ,  qui  est  de  recueillir  les  observa- 
tions météorologiques,  topographiques  et  de  médecine  pra- 
tique ,  propres  à  établir  la  constitution  médicale  de  Nantes 
et  de  la  Loire-Inférieure. 


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-  397  — 

Vous  le  savez  déjà,  Messieurs,  Fart  médical  n'est  pas  le 
résultat  d'une  science  unique,  il  est  dû  au  concours  de  plu- 
sieurs sciences  dont  le  médecin  doit  au  moins  en  con- 
naître les  premiers  éléments,  s'il  veut  sortir  d'un  empi- 
risme aveugle   et  apprécier   sainement  les  phénomènes 
ainsi  que  les  perturbations  de  notre  organisme.  En  prenant 
possession  du  fauteuil,  M.  Piban-Dufeillay  a  fixé  l'attention 
de  ses  collègues  sur  ces  sciences,  dites  accessoires,  et  son 
discours  a  démontré  qu'il  savait  apprécier  toute  leur  im- 
portance, et  fait  espérer  qu'il  saurait  donner  une  excellente 
impulsion  aux  travaux  que  son  mandat  lui  prescrit  de  diri- 
ger, cr  Pourquoi,  a-t-il  demandé,  l'histoire  naturelle  médi- 
cale, qui  compte  dans  notre  Section  de  si  dignes  inter* 
prêtes,  n'y  prend-elle  jamais  rang?  Pourquoi  ceux  de  nos 
collègues  que  les  circonstances  mettent  à  même  d'étudier 
les  questions,  si  souvent  difficiles,  de  médecine  judiciaire  « 
négligent-ils  de  communiquer  aux  autres  le  fruit  de  leur 
expérience?  Pourquoi,  a-t-il  dit  encore,  les  savants  pharma- 
ciens que  nous  possédons  parmi  nous,  dérobtfnt  quelques 
instants  à  leurs  occupations  de  chaque  jour,  ne  sentent-ils 
pas  le  besoin  d'éclairer  l'obscurité  de  quelques-uns  de  ces 
faits  pratiques  de  pharmacie  et  de  chimie,  qui  embanras- 
sent  encore  le  médecin  dans  l'exercice  de  son  art?  Ces 
élucubrations  scientifiques  dont  notre  journal  se  ferait,  en 
quelque  sorte,  le  Moniteur,  auraient  les  résultats  les  plus 
avantageux,  et  pour  l'instruction  de  quelques-uns  et  pour 
l'illustration  de  notre  Société  médicale.  j> 

La  Section,  nous  n'en  doutons  pas,  s'efforcera  d'entrer 
dans  cette  voie:  elle  prêtera  l'oreille  aux  avis  d'un  homme 
qui  a  &it  de  chacune  de  ces  sciences  une  étude  spéciale  i 

28 


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—  398  — 

et  que  la  confiance  de  Tautorité,  l'estime  de  ses  confrères 
Tient  de  faire  choisir  pour  suppléer  le  professeur  de  chimie 
de  notre  École  de  médecine ,  et  de  faire  nommer ,  en 
même  temps  que  notre  secrétaire  général,  M.  le  docteur 
Malherbe,  membre  du  Conseil  de  salubrité  de  la  Loire- 
Inférieure. 

Mais ,  hfttons-nous  de  parler  du  sujet  même  de  ce 
rapport,  des  travaux  des  membres  de  la  Section  de  Mé- 
decine. 

Du  moment  qu'elle  a  conçu ,  la  femme  éprouve  dans 
tout  son  être  de  profondes  modifications,  et  le  changement 
qui  s'est  opéré  en  elle  se  feit  apercevoir  dans  toutes  ses 
fonctions.  De  ce  &it,  il  est  &cile  de  conclure  qu'une  mala- 
die survenant  pendant  cet  état ,  ne  suivra  pas  son  cours 
habituel.  Ce  point,  si  important,  M.  le  docteur  Aubinais 
s^est  proposé  de  Télucider  dans  un  mémoire  intitulé: 
Des  Fièvres  intermittentes  ou  rémittentes,  considérées  dans 
leurs  rapports  avec  la  grossesse.  Cette  nouvelle  communica- 
tion de  notre  laborieux  confrère  feit  partie  d^une  série  de 
mémoires,  relatifs  aux  affections  qui' atteignent  le  plus  ordi- 
nairement les  femmes ,  dans  le  cours  de  leur  gestation ,  aux 
accidents  dont  elles  peuvent  être  victimes ,  pendant  leurs 
couches,  ainsi  qu'aux  dangers  multipliés  qui  peuvent  être  à 
craindre  à  la  suite  de  cet  état  physiologique.  Plusieurs  de 
ces  mémoires  sont  déjà  publiés ,  les  autres  ne  tarderont  pas 
à  rètre. 

M.  Aubinais  reconnaît  tout  d'abord  que  la  simultanéité 
de  la  fièvre  périodique  et  de  la  gestation  est  un  fiiit  déjà 
signalé  par  les  accoucheurs  ;  que  ces  derniers  le  regarde 
comme  une  ftcheuse  complication  et  un  élément  pouvant 


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—  599  — 

déterminer  des  accidents  chez  la  femme  et  chez  le  fœtus. 
Une  longue  pratique  médicale ,  dans  un  pays  marécageux, 
lui  a  permis  de  constater  la  justesse  des  observations  de 
ses  devanciers,  et  d*y  ajouter  le  résultat  de  son  expérience. 
Il  signale  deux  cas  d'hypertrophie  de  la  rate ,  chez  des 
enfants  dont  les  mères  avaient  été  atteintes  d'accès  de 
fièvre  intermittente,  pendant  une  grande  partie  du  cours 
de  leur  grossesse. 

D'après  M.  Aubinais ,  le  premier  stade  d'un  accès  ré- 
gulier de  la  fièvre  des  marais  ,  c'est-à-dire  le  frisson  ,  en 
amenant  le   refroidissement  de  la  périphérie  du  corps , 
produirait ,  vers  les  organes  internes ,  une  congestion  suf- 
fisante pour  impressionner  le  fœtus  et  en  déterminer  les 
mouvements.  Il  s'est  assuré  que  cette  fièvre  périodique, 
d'abord  simple  et  régulière ,  n'entravait  pas  ordinairement 
la  marche  de  la  grossesse  ,  mais  que ,  cependant ,  aban- 
donnée à  elle-même,  son  caractère  primitif  se  modifiait 
bientôt  et  que  sa  gravité  augmentait.  Cette  transformation 
n'arriverait,   toutefois,  que  rarement,  dès  les  premiers 
accès;  et  ne  survenant  que  graduellement,  elle  laisserait 
aux  praticiens  le  temps  de  prémunir  leurs  malades  contre 
sa  funeste  influence. 

Pour  l'auteur  que  nous  analysons ,  l'accident  le  plus 
grave  et  le  plus  fréquent  qui  puisse  être  déterminé  par 
la  fièvre  rémittente ,  chez  la  femme  grosse,  est  l'éclampsie. 
La  crainte  de  cette  affection ,  la  plus  terrible  peut-être 
de  celles  qui  peuvent  accompagner  la  gestation  ,  a  engagé 
M.  Aubinais  à  administrer  le  sulfate  de  quinine ,  aussitôt 
le  mal  reconnu*,  et  immédiatement  après  l'accès;  il  affirme 
que  si  Ton  néglige  cette  précaution ,  le  proxîsme  suivant 
pourra  doubler  d'intensité. 


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—  400  — 

Cette  lecture  soulevait  d'importantes  questions  ,  sur  Té- 
tiologie  et  le  traitement  des  fièvres  intermittentes,  et  MM. 
Sallion  père,  Malherbe  et  Gély  ont  discuté  tour  à  tour  ces 
points,  encore  controversés. 

Nous  avons  maintenant  à  examiner  le  traitement  de 
quelques-unes  de  ces  maladies,  qui  atteignent  l'ouvrier  dans 
l'exercice  de  sa  profession.  Et  vraiment ,  c'est  bien  aux 
médecins  à  dire  ce  que  coûtent  de  labeurs  et  de  dangers 
ces  produits,  qui  nous  rendent  l'existence &cile,  car  tous 
les  jours  ils  ont  à  soigner  les  maux  inhérents  à  leur  mise 
en  œuvre ,  lorsqu'ils  ne  peuvent  traiter  l'industrie  elle- 
même,  en  faisant  disparaître  un  procédé  vicieux  :  ainsi, 
en  a-t-on  agi,  à  l'égard  du  travail  delà  boyauderie  qui ,  au- 
trefois si  infect,  ne  l'est  plus  ;  du  travail  des  monnaies  et  de 
celui  des  doreurs,  autrefois  si  pernicieux,  et  qui  ont  cessé 
de  l'être;  et  maintenant  des  centaines  d'ouvriers  qui ,  na- 
guère, encombraient  nos  hôpitaux ,  ne  quittent  plus  leurs 
ateliers,  le  sein  de  leur  Camille.  Cependant,  malgré  tant  de 
progrès  opérés  dans  ces  derniers  temps,  M.  le  docteur  Mal- 
herbe a  souvent  constaté  combien  les  tentatives  sont  restées 
inutiles ,  lorsqu'elles  ont  eu  pour  but  de  soustraire  à  l'in- 
fluence délétère  du  plomb ,  les  ouvriers  qui  manipulent 
ce  métal ,  sous  une  forme  ou  sous  une  autre  ;  il  a  égale- 
ment observé  que  si  les  moyens  de  traitement ,  aujour- 
d'hui préconisés ,  procurent  la  guérison  du  plus  grand 
nombre  des  individus  atteints  de  l'intoxication  saturnine, 
que  l'on  rencontre  souvent  des  cas  de  paralysie  incurables 
et  que  l'on  voit  même^  parfois,  des  malades  succomber 
à  l'encéphalopathie.  Notre  collègue  s'est  proposé  de  re- 
chercher s'il  n'y  aurait  pas  un  moyen  curatif ,  préférable 


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—  401  - 

à  ceux  employés  jusqu'à  ce  moment  ;  et,  depuis  1846  ,  il 
poursuit  ses  investigations  sur  cet  intéressant  sujet ,  dans 
les  salles  de  nos  hôpitaux ,  dont  il  est  un  des  médecins 
suppléants.  Le  résultat  qu*il  en  a  obtenu ,  il  nous  Ta  &it 
connattre  sous  le  titre  suivant  :  De  T utilité  de  la  belladone 
dans  le  traitement  de  la  colique  de  plomb,  —  Réflexions 
critiques  sur  quelques  points  de  la  thérapeutique  des  ma- 
l€ulies  saturnines. 

M.  Malherbe  a  donné  pour  base  à  son  traitement  ces 
deux&its:  1.''  Élimination  de  la  substance  toxique;  2."* 
Cessation  des  désordres  auxquels  elle  a  donné  lieu.  Et 
les  nombreuses  observations  qu'il  cite  à  l'appui  du  moyen 
thérapeutique  qu'il  propose  ,  prouvent  d'une  manière  évi- 
dente sa  parfaite  efficacité.  Pour  l'administration  de  la 
belladone ,  notre  collègue  a  adopté  la  formule  conseillée 
par  M.  Bretonneau,  contre  quelques  accidents  nerveux: 
il  prescrit ,  le  premier  jour ,  5  centigrammes  d'extrait 
de  belladone ,  unis  à  10  centigrammes  de  poudre  de  ra- 
cine de  la  même  plante.  Si  l'action  du  médicament  est 
manifeste,  il  continue,  à  la  même  dose,  les  jours  sui- 
vants ;  et,  après  trois  ou  quatre  jours ,  il  diminue  et  cesse* 
même  le  remède,  si  les  symptômes  de  l'intoxication  se 
trouvent  entièrement  neutralisés.  Mais  une  précaution  que 
M.  Malherbe  a  toujours  eu  soin  de  prendre ,  c'est  de  faire 
fractionner  la  dose  de  chaque  jour ,  en  5  parties,  qui  doi- 
vent être  administrées  dans  toute  la  journée  à  intervalles 
égaux. 

Après  cette  communication  si  remarquable ,  MM.  Thi- 
beaud,  Hignard,  Âubinais,  Mareschal,  Rouxeau  et  Bo- 
namy,  sont  venus  faire  part  de  leurs  lectures  et  de  leurs 
expériences  sur  le  même  sujet. 


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—  402  — 

Mais  la  chirurgie ,  Messieurs,  n'est  pas  restée  en  arrière  « 
dans  nos  luttes  académiques.  Nous  devons  à  notre  Prési- 
dent un  mémoire  riche  de  faits  nouveaux ,  et  rempli  d'une 
judicieuse  érudition,  sur  les  Plaies  intestincdes ,  leur  his- 
toire  et  leurs  traitements.  Cependant,  ce  travail  volumi- 
neux, dans  lequel  M.  Gély  a  ajouté,  aux  recherches  de 
Travers  et  de  Strauss ,  ses  propres  recherches ,  et  dont  la 
lecture  doit  occuper  plusieurs  séances ,  ne  nous  ayant  été 
communiqué ,  jusqu'à  cette  époque ,  qu'incomplètement , 
nous  en  remettons  l'analyse  à  notre  prochain  compte 
rendu. 

Il  nous  reste  encore  à  vous  entretenir  du  Rapport  sur 
Vépidémie  du  Choléra  morbm  asiatique,  observée  à  Kantes 
et  dans  diverses  parties  du  département  de  la  Loire-Infé- 
rieure ^  en  1849,  par  M.  le  docteur  Eug.  Bonamy.  Ce  nou- 
veau travail  de  notre  confrère,  rédigé  avec  cette  con- 
science et  ce  talent  d'observation  qui  le  distingue ,  rend 
ce  document  des  plus  précieux ,  non-seulement  pour  servir 
à  l'histoire  des  épidémies  dans  notre  département,  mais 
encore  comme  le  résumé  complet  des  tentatives  faites  pour 
combattre  un  des  fléaux  les  plus  terribles  que  l'homme 
ait  à  redouter.  Certes,  en  voyant  ainsi  réunis  les  résultats, 
si  souvent  stériles ,  de  tant  d'efforts  et  de  moyens  théra- 
peutiques, on  ne  peut  que  déplorer  l'impuissance  dont 
l'art  médical  a  fait  preuve  dans  cette  dernière  invasion  du 
mal  asiatique.  Cependant,  si  l'on  énumère  les  merveil* 
leuses  conquêtes  déjà  acquises  à  la  médecine,  et  le  quin- 
quina enlevant  à  une  mort  certaine  les  malades  atteint! 
de  la  fièvre  pernicieuse ,  et  la  vaccine  préservant  de  la 
variole ,  et  quelques  atomes  d'un  sel  métallique  neutrali* 


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~  403  — 

saut  un  virus  qui  fait  tomber  notre  corps  eo  dissdutiqn , 
au  milieu  même  de  la  vie,  l'on  reprend  courage  et  Ton 
ne  s'occupe  qu'avec  plus  d'ardeur  de  la  résolution  do  ce 
grand  problème.  Dans  ce  cas,  désespérer  de  l'avenir,  serait 
trahir  les  intérêts  du  genre  humain. 

II  est  un  fait  qui  pourrait  guider  les  médecins  dans 
leurs  luttes  contre  ces  redoutables  épidémies,  fait  dont  ils 
n'ont  pas  su  tirer,  jusqu'à  ce  moment,  tout  le  parti  pos- 
sible :  c'est  l'influence  de  certaines  industries  s^r  ces  épi- 
démies même.  Dans  toutes  les  pestes  qui  ont  désolé  les 
différentes  villes  et  dévasté  des  régions  entières,  nous  ap- 
prend Ramaszini ,  les  médecins  ont  observé  constamment 
des  arts  privilégiés,  mettant  à  l'abri  de  la  contagion  tous 
ceux  qui  les  exerçaient ,  et  d'autres  dont  les  ouvriers  pé- 
rissaient, sans  qu'il  en  restât  un  seul.  Ainsi,  dans  la  peste 
affreuse  qui  désola  Marseille,  en  1720,  tous  les  boulan- 
gers périrent,  et  Ton  fut  obligé  d'en  faire  venir  des  villes 
voisines  pour  su£Qr6  aux  besoins  du  peuple.  Au  contraire, 
dans  plusieurs  autres  pestes ,  on  observa  que  les  vidan- 
geurs échappèrent  à  la  contagion. 

Revenons  au  mémoire  de  H.  Bonamy.  Après  un  aperçu 
topographique  de  la  Loire-Inférieure,  l'auteur  donne  la 
date  de  l'invasion  du  choléra  morbus  sur  les  différents 
points  de  ce  département,  il  s'étend  sur  son  invasion 
dans  les  hôpitaux  de  Nantes,  et  récapitule  ainsi  les  cas 
traités  dans  ces  deux  établissements  : 

A  Saint- Jacques..  •  371  cas,  291  décès,    80  guérisons. 

A  l'Hôtel-Dieu. .. .  434        260  174 


Total. . .  805  cas,  551  décès,  254  guérisons. 


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—  404  — 

Il  a  été  impossible  à  H.  Bonamy  de  connaître  le  nombre 
des  cas  de  choléra  qui  se  sont  manifestés  dans  la  ville;  il 
n'a  pu  apprécier  que  celui  des  décès,  qui  s*est  élevé  à  556 , 
chiffires  auxquels  il  Taut  ajouter  ceux  de  551 ,  représentant 
les  décès  des  hôpitaux.  On  obtient  ainsi ,  pour  la  ville  de 
Nantes,  un  total  de  1,107  décès,  dont  508  appartenant  au 
sexe  masculin  et  437  au  sexe  féminin. 

Nous  avons  encore  remarqué  une  excellente  description 
du  choléra  morbus ,  de  nombreuses  observations  de  cette 
maladie,  son  étiologie  ainsi  que  l'exposé  des  moyens  em- 
ployés pour  la  combattre;  enfin,  le  résumé  des  différences 
principales  qui  ont  existé  entre  l'épidémie  de  1849  et  celle 
de  1832. 

M.  Bonamy  n'a  pas  voulu  achever  son  travail  sans  rap- 
peler la  belle  conduite  des  docteurs  Walezinski,  Cailleteau, 
Villeneuve  et  de  l'élève  Jalaber,  qui  sont  allés  porter  des 
secours  médicaux  aux  cholériques ,  sur  différents  points  de 
notre  département,  et  qui  se  sont  acquittés  de  leurs  tâches 
avec  un  zèle  et  un  dévouement  dignes  d*éloges  et  de  la  re- 
connaissance de  leurs  concitoyens. 

Hais  ce  que  M.  Bonamy  n'a  pas  dit,  et  ce  que  nous 
vous  dirons ,  c'est  le  courage  et  l'abnégation  dont  il  a  (ait 
preuve  lui  même  durant  cette  cruelle  épidémie.  Dès  1834, 
lors  de  la  première  invasion  du  choléra ,  il  obtint  une  mé- 
daille d'argent  pour  être  allé  secourir  les  malades  de  Saint- 
Nazaire.  La  même  année  et  la  suivante,  il  fut  délégué  dans 
plusieurs  communes  de  notre  département  pour  y 
combattre  une  dysenterie  épidémique ,  qui  y  causait  une 
effrayante  mortalité.  Tant  de  dévouement  devait  appeler 
sur  lui  l'attention  de  Tautorité  supérieure  ;  aussi ,  le  27 


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—  405  — 

iévrier  1846,  fai-il  nommé  médecin  des  épidémies  de 
Tarrondissement  de  Nantes,  sur  la  présentation  de  M. 
Fouré ,  qui  en  remplissait  le  pénible  service  depuis  40 
années. 

C'est  ainsi  qae  la  considération  publique  ne  semble  avoir 
accumulé  sur  la  tête  de  notre  vénérable  doyen  les  plus  hautes 
fonctions  médicales,  que  pour  lui  permettre  de  les  distribuer 
à  ses  élèves  les  plus  dignes  et  les  plus  capables,  après  en  avoir 
lui-même  augmenté  l'importance,  par  la  manière  dont  il  a 
su  les  remplir.  Devenu  possesseur  du  titre  officiel,  M.  Bo* 
namy  n'en  a  déployé  que  plus  d'activité,  et  bientôt  il  dut 
parcourir  les  communes  de  Sucé  et  de  laBoissière-du-Doré, 
pour  combattre  la  fièvre  thyphoïde,  de  la  Chapelle-Basse- 
Her  pour  la  scarlatine,  du  Loroux-Bottereau  pour  la  dy- 
senterie, de  Carquefou  pour  l'angine  couenneuse,etc.  Enfin, 
sa  belle  conduite,  lors  de  l'épidémie  de  1849,  lui  a  valu 
sa  nomination  dans  Tordre  de  la  Légion-d'Honneur ,  dis- 
tinction, certes,  bien  due  à  tant  d'éminents  services. 

Permettez-nous,  Messieurs,  avant  de  terminer,  de  vous 
signaler  une  autre  récompense  accordée  au  corps  médical, 
dans  un  de  ses  membres  les  plus  distingués,  M.  le  doc- 
teur Marion  de  Procé,  médecin  en  chef  de  l'Hôtel-Dieu^ 
membre  du  Conseil  de  salubrité,  presque  depuis  son  orga- 
nisation, qui  longtemps  a  été  un  des  travailleurs  de  votre 
Académie,  lui  aussi  vient  de  recevoir  la  croix  de  la  Légion- 
d'Honneur.  Ancien  membre  du  Conseil  municipal  de  Nantes, 
M.  Marion  de  Procé  a  été  également ,  pendant  quelques 
années,  professeur  de  clinique  de  notre  École  de  Médecine, 
place  que  sa  santé  ne  lui  a  pas  permis  de  garder,  et  dont 
cependant  il  n'a  pas  cessé  de  remplir  les  fonctions  ;  car 


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1 


~  406  — 

chaque  matin,  entouré  d'une  phalange  de  jeunes  docteurs, 
par  sa  pratique,  il  leur  enseigne  Tart  si  difficile  de  bien 
observer,  et  par  ses  conseils,  par  s<mi  exemple ,  à  recber* 
cher,  avant  tout,  dans  la  profession  qu'ils  viennent  d'em- 
brasser, une  position  sociale  honorable,  et  à  oiériterrestiine 
publique. 

Ce  compte  rendu.  Messieurs,  doit  vous  convaincre  que 
les  membres  de  votre  Section  de  Médecine  sont  poaétrés 
de  la  môme  pensée  qui  animait  le  directeur  de  TÉcole  de 
Médecine  de  Nantes,  lorsque,  dans  la  séance  de  la  distribu- 
tion des  prix  de  1847,  séance  qui  restera  gravée  dans  la 
mémoire  des  assistants,  qui  tous,  mattres  et  élèves,  avaient 
été  ou  étaient  encore  ses  disciples,  il  disait,  après  avoir 
énuméré  tout  ce  que  la  société  attend  du  médecin  :  «  Pour 
se  préparer  à  des  missions  aussi  graves  et  aussi  solennelles, 
il  faut  qu'il  y  pense  chaque  jour  ;  car,  encore  ici,  la  science 
marche,  et  il  &ut  qu'à  chaque  instant  il  en  suive  les  pro- 
grès, pour  ne  pas  cesser  d'être  son  digne  ministre  et  son 
légitime  interprète,  toutes  les  fois  qu'il  en  est  requis.  » 

Nantes,  1."  juillet  1850. 


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—  408  — 

lion,  bien  digne,  en  effet,  d*un  examen  attentif.  Plus  de 
cinquante  mémoires  nous  furent  adressés  des  divers  pojnts 
de  la  France,  et  nous  pouvons  dire  avec  vérité  que  plu- 
sieurs, qu'un  grand  nombre  même  de  ces  mémoires  trai- 
taient la  question  avec  une  grande  hauteur  de  vues  et  de 
saines  appréciations.  Plus  tard,  ce  dépôt  précieux  de  nos 
archives  pourra  être  consulté  avec  fruit,  car  la  question  est 
demeurée  et  demeurera,  sans  doute,  longtemps  encore  toute 
entière, et  avantqu'elle  n'aitreçu  sa  solution,  biendesétudes 
seront  faites,  bien  des  efforts  seront  tentés  pour  Félucider 
de  nouveau  et  la  faire  arriver  à  bonne  fin. 

Du  reste,  tous  les  auteurs  étaient  d'accord  pour  recoa- 
nattre  que  le  mal  était  réel,  que  le  mouvement  des  popu* 
lations  vers  les  villes  était  incessant,  et  que  ce  déplacement 
des  forces  vitales  du  pays  avait  des  conséquences  funestes 
qu'il  était  d'un  haut  intérêt  d'arrêter. 

Sur  les  causes  de  cette  émigration  le  même  accord  exis- 
tait, et  cette  unanimité  d'opinions  proave  que«  partout  en 
France,  les  mêmes  motifs  se  produisent  et  ont  le  même 
résultat. 

(]es  causes  sont  particulièrement  : 

Le  bas  prix  des  salaires  attribués  aux  travaux  de  la  cam- 
pagne. 

La  continuité,  la  dureté  de  ces  travaux. 

La  monotonie,  l'ennui  même  de  la  vie  des  champs. 

L'attrait  des  plaisirs,  du  luxe,  des  distractions  de  la 
ville. 

Le  prix  des  salaires  qui,  tout  au  moins,  en  apparence,  y 
sont  plus  élevés. 

La  réunion,  dans  les  grands  centres  de  populations,  des 


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—  409  — 

établissements  de  commerce  et  d'industrie,  les  travaux  im- 
portants et  continuels  qui  s'y  exécutent. 

Les  ressources  offertes  à  la  maladie,  à  la  misère  par  les 
établissements  de  charité  et  de  bienfaisance,  qui  ne  se  trou- 
vent que  dans  les  villes. 

Un  peu  de  fortune  acquise  ou  recueillie,  une  certaine 
éducation  reçue  et  qui  donnent  le  désir  de  se  produiresur 
un  plus  vaste  théâtre. 

Les  goûts  pris  dans  la  vie  militaire  et  qui  éloignent  en 
grande  partie  des  campagnes  les  soldats  libérés. 

La  domesticité  qui  se  recrute  généralement  dans  la  cam- 
pagne et  qui,  plus  tard,  vient  se  fondre  dans  la  popula- 
tion des  villes. 

Toutes  ces  raisons  et  d'autres  qui  peuvent  nous  échap- 
per, étaient  développées,  commentées,  de  manière  à  faire 
ressortir  jusqu'à  l'évidence,  que  les  causes  si  diverses  de 
cette  émigration  avaient  une  action  naturelle,  continue  et  en 
quelque  sorte  forcée. 

Mais,  si  le  mal  était  facile  à  reconnaître  et  k  signaler , 
il  n'en  était  pas  ainsi  du  remède.  Sur  ce  point  les  idées 
variaient  à  l'infini.  On  peut  même  dire  que  les  moyens  in- 
diqués ne  présentaient  presque  rien  de  pratique  et  de  réa- 
lisable. Certaines  indications  allaient  même  jusqu'à  l'excen- 
tricité, jusqu'à  l'impossible.  Et,  si  quelques-unes  semblaient 
justes  et  susceptibles  de  produire  un  bon  résultat,  on  pou- 
vait aussi  saisir  de  suite  les  nombreuses  diflicultés  de  leur 
application,  en  présence  d'habitudes  qu'il  iallait  rompre 
ou  tout  au  moins  modifier,  de  goûts  et  d'intérêts  auxquels 
il  fallait  trouver  moyen  de  donner  de  justes  compen- 
sations. 


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—  410  — 

Qu'on  ne  s*étonne point ,  au  surplus,  du  vague  de  l'in- 
suffisance des  moyens  indiqués.  II  suffit,  en  effet,  d'exa* 
miner  sérieusement  les  causes  que  nous  venons  d'assigner 
à  cette  émigration  ,  pour  juger  que  d'obstacles  naissent  et 
s'élèvent  pour  les  détruire  et  même  pour  les  combattre. 

Et  cependant  serait-il  sage  de  s'arrêter  devant  ces  diffi- 
cultés et  de  proclamer  ainsi  son  impuissance  ? 

Non ,  sans  doute. 

Un  fait  malheureusement  constaté ,  c'est  que  l'agricul- 
ture n'a  pas,  en  France,  toutes  les  ressources  qui  lui  sont 
nécessaires;  c'est  que,  surtout,  le  manque  de  bras  est 
souvent  nne  cause  de  son  insuccès,  une  cause  qui,  du 
moins,  arrête  son  développement. 

Un  autre  fait,  non  moins  évident,  c'est  que  les  villes 
s'encombrent  d'une  population  flottante,  qui  souvent  ne 
peut  trouver  d'emploi ,  arrive  à  la  misère  par  le  manque  de 
travail  et  devient  bientôt  une  charge  pour  les  villes  et  par- 
fois même  un  danger  pour  leur  sécurité. 

Si  ces  deux  faits  sont  constants ,  si  le  résultat  fâcheux 
qui  en  découle  ne  peut  être  mis  en  doute ,  il  faut  que  les 
esprits  sérieux  ne  se  lassent  point  d'apporter  leur  contin- 
gent de  lumières  pour  faire  cesser  un  état  de  choses  en 
opposition  manifeste  avec  l'intérêt  général  du  pays,  avec 
l'intérêt  même  bien  entendu  de  ceux  qui  prennent  part 
à  cette  émigration  imprudente. 

Nôtre  époque  a  senti  qu'il  est  des  besoins  auxquels  il 
est  sage  de  donner  satisfaction.  Beaucoup  de  bons  esprits 
ont  même  émis  l'opinion  que  les  questions  du  travail ,  des 
salaires,  de  l'assistance  publique,  devaient  être  l'objet  d'é- 
tudes constantes,  afin  d'arriver ,  s'il  est  possible,  àrépar- 


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—  4H  — 

tir,  d'une  manière  qui  6oit  profitable  à  tous,  les  res- 
gources  mises  à  la  disposition  de  la  grande  femille ,  à  amé- 
liorer surtout  la  position  de  ceux  qui  travaillent  et  qui 
souffrent.  Eh  bien ,  il  nous  semble  vrai  de  dire  que  dans 
la  solution  de  la  question  qui  nous  occupe,  se  trouverait 
la  solution  d'une  grande  partie  de  ces  questions  sociales , 
soulevées,  débattues  aujourd'hui.  On  sent  dès  lors  de 
quel  intérêt  il  devient  de  constater  d'une  manière  précise 
quelle  est,  en  réalité,  Timportance  de  ce  déplacement  des 
populations,  afm  que  le  mal,  mis  ainsi  à  nu,  il  devienne 
plus  facile  de  lui  trouver  un  contre-poids  ou  un  remède. 
C'est  là  le  but  que  nous  nous  sommes  proposé  dans 
le  travail  que  nous  venons  vous  soumettre.  Nous  sommes  en- 
trés ,  à  cet  efiét ,  dans  le  cœur  nnéme  de  la  question ,  et  sans 
rien  donner  à  l'hypothèse,  mais  en  nous  servant  unique- 
ment de  documents  et  de  chiffres  officiels ,  nous  avons 
résolu^  ce  nous  semble,  ces  deux  questions  que  nous  nous 
étions  posées. 
Le  mouvement  des  campagnes  vêts  les  villes  est-il  réel  ? 
Dans  quelle  proportion  ce  mouvement  s'opère-t-il  ? 
Pour  point  de  départ ,  voyons  d'abord  quel  a  été  le  chif- 
fre de  ht  population  de  la  France,  à  diverses  époques >  de- 
puis le  rétablissement  de  la  paix  ^continentale. 

Le  territoire  français,  rentré  dans  les  limites  que  les 
traités  lui  avaient  &ites,  présentait  :  ladîvidas. 

En  1815,  une  population  de 29,152,743 

En  1825,  cette  population  s'était  élevée  à.  30,451,187 
En  1835,  —  —  32,560,934 

En  1845,  —  —  35,401,761 

Ainsi,  dans  la  période  de  30  années,  de  1815  à  1845, 


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—  412  ~ 

l'accroissement  de  la  population,  en  France,  a  été  de 
6,249,018,  soit  une  moyenne  d'environ  2,000,000  par 
10  ans. 

Si  maintenant  nous  voulons  établir  cet  accroissement 
pour  la  période  de  20  années,  de  1826  à  1847  (les  do* 
cuments  pour  les  trois  dernières  années  n'étant  point  en- 
core suffisamment  établis),  nous  trouvons  : 

Population  en  1827.  .  .  .  31,851,545 

—         en  1846.  .  .  •  35,401,761 

Accroissement.  .  .  .  3,550,216 

Cet  accroissement  de  3,550,216  se  décompose  comme 
suit: 

3,011,164  Excédant  des  naissances  sur  les  décès. 
539,052  Augmentation  que  Ton  peut  attribuer  i 
l'émigration  et  à  l'établissement  d'étran- 
gers en  France. 


3,550,216 


Voici  comment  se  répartit  cet  accroissement  de  3,01  l,iS4 
individus,  provenant  de  l'excédant  de  naissances  : 

naissances.  Décès. 


1827  980,196  791,125  189,071 

1828  976,547.  837,145  139,402 

1829  964,527  803,453  161,074 

1830  967,824  809,830  157,994 

1831  986,709  802,761  183,948 

1832  938,186  933,733  4,453 

1833  969,983  812,548  157,435 


A  reporter.    6,783,972       5,790,595  993,377 


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—  415  — 


0O6ê8> 

AMroitMment. 

lort... 

6,783,972 

5,790,595 

993,377 

1834 

986,490 

917,828 

68,662 

1835 

993,833 

816,413 

177,420 

1836 

97«,820 

771,700 

208,120 

1837 

943,349 

«78,701 

64,648 

1888 

961,476 

846,199 

115,277 

1839 

957,740 

780,600 

177,140 

1840 

952,318 

816,486 

135,8S2 

1841 

976,929 

804,7<2 

1^2,167 

1842 

982,896 

836,152 

146,744 

1643 

983,107 

611,435 

171,672 

1844 

967,324 

776,526 

190,798 

184S 

992,033 

754,701 

237,332 

1846 

983,473 

831,498 

151,975 

19,444,760 

16,433,5% 

3,011,164 

C'est  sur  ces  20  années  de  1827  à  1846  et  sur  ce  chiffre 
de  3,550^216  que  nous  allons  opérer.  Nous  ferons  re- 
marquer que  ,  dans  cette  jpériode ,  une  année  a  été  signa- 
lée par  une  violente  épidémie.  En  1832,  en  effet,  le  cho- 
léra a  sévi ,  en  France ,  avec  une  grande  intensité ,  mais 
cette  circonstance  viendra  encore  donner  plus  de  force  au 
résultat  que  nous  obtiendrons^  car  il  est  positif  que  les 
ravages  du  éholéra  ont  été  bien  phis  meurtriers  dai^s  les 
villes  qm  dans  les  campagnes. 

Or,  avons-nous  dit,  la  population  officielle  de  la 
France ,  en  1827,  était  de  3U85U54S  individus.  L'accrois 
sèment  de  3,550^216  donne  ainsi,  sur  la  population  géné^ 
raie,  «ne  progcesoion  de  U|14  7o« 

29 


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—  414  — 

Pourarriver  au  but  que  nous  voulons  atteindre,  il  importe 
maintenant  d*étabir  dans  quelle  proportion  les  villes  et  les 
campagnes  ont  contribué  à  cette  augmentation  totale  de 
la  population. 

En  1827,  la  population  des  86  chefe-lieux  de  préfec- 
tures, était  de '. 2,781,661 

Celle  des 276  sous-préfectures,  de.. .   .  1^766,814 

4,548,475 
En  1 846 ,  cette  population  se  trouve  : 

Préfectures.  .  .  .  3,135,337 

Sous-préfectures.    2,023,153 

Accroissement 610,015 

5,158,490  5,158.490 

Dans  cette  période  de  20  années ,  l'accroissement  de  la 
population  des  362  principales  villes  de  France  a  ainsi  été 
de  610,015  individus. 

Soit,  dans  une  proportion  de  13,41  Vq. 

Si ,  enfin ,  du  chiffre  total  de  la  population  ,  aux  deux  épo- 
ques que  nous  comparons, nous  déduisons  celui  qui  s'ajqpli- 
que  à  ces  362  villes,  nous  avons,  pour  former  la  population 
des  campagnes  : 

1827 27,303,070 

1846 30,243,271 

Accroissement 2,940,201 

30,243,271         30,243,271 

Cette  augmentation  de  2,940,201  individus  sur  le  chiffre 
primitif  de  27,303,070  né  présente  plus  qu'une  proportion 
de  10,76  •L 

Ainsi,  voici  un  fait  acquis.  Dans  la  période  de  20 
années,  de  1827 à  1846, 


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—  41B  — 

La  population  générale  de  la  France  s*est  accrue  dans 
une  proportion  de  11,14  7q. 

Et  les  villes  entrent  dans  cette  progression  pour  1 3,4 1  ^/o. 

Tandis  que  les  campagnes  n'y  figurent  que  pour  10^76  7o. 

De  ce  rapprochement,  il  résulte  la  preuve  la  plus 
évidente  que  la  population  s'accroît,  en  France,  dans 
une  proportion  plus  forte  dans  les  villes  que  dans  les  cam- 
pagnes. 

Cette  différence ,  en  tant  qu'elle  s'applique  à  la  France 
entière  n'est  sans  doute  pas  très-sensible,  mais  elle  s'élar- 
git d'une  manière  notable ,  lorsque  la  comparaison  s'établit 
sur  les  grands  centres  de  population.  On  va  pouvoir  en  ju- 
ger par  quelques  détails  dans  lesquels  nous  croyons  conve^ 
nable  d'entrer,  afin  de  donner  une  idée  aussi  complète 
que  possible  de  la  manière  dont  s'établit  cette  progi^essioâ 
sur  divers  points  de  la  France. 

Commençons  d'abord  par  notre  défMUPtement  : 

En  1827,  la  population  oflicielle  de  la         Habîuois. 

Loire-Inférieure  était  de 457,090 

En  1846,  elle  s'éleva  à..*.     517,265 

Accroissement 60,175 

517,265         517,265 

Cette  augmentation  de  60,175  donne,  pour  le  départe*- 
roent,  une  proportion  de  13,16  V*. 

En  1827,  la  population  de  Nantes  était  de.  71,739 

Celle  d'Ancenis 3^145 

Chàteaubriant 2,145 

Paimbœuf. 3,646  ^       *^'^^* 

Savenay 1,845 


A  reporter,.,,,,      82,520 


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~  416  — 

Rep<H*t 82,SM 

En  1846,1e  chiffre  de  cette  popalation 
se  trouve  ainsi  fixé  : 

Nantes 88,250 

ÂDcenis 3,746 

Ghftteanbf iant. . .       3 ,867 

PaimboBuf 3,473 

Savenay 2,299 

Acoroissement 19,115 

101,635         101,635 

Augmentation  de  la  population  de  nos  cinq  principales 
villes  du  déparieiMDt ,  19,115  ;  soit  :  23,17  •f^. 

£a  1827 1  la  population  du  reste  du  département,  corn* 
prenaut  les  campagnes,  était  de 374,570 

En  1846 ,  elle  s'éleva  à 415,630 

Acevoiss^neiit 41,060 

415,630        415,630 

Augmentation  de  la  population  des  campagnes  41,060; 
soit!  10,96  Vo. 

Ainsi ,  pendant  ces  20  années ,  l'accroissement  de  la 
population,  dans  noU^  département,  présente  les  propor- 
tions suivantes  : 

Pour  le  département  entier 13,16  •/•• 

Four  les  villes 23,17  Vo» 

Pour  les  campagnes 10,96  Vo* 

BOUCHBS-DU-RBÔNB. 

1827.  Population  du  département*  326,302 

1846.         -  -  4*3,918 


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—  417  -~ 

Accroissement 87^616 

Soit:  26,85  Vo- 

1827.  Population  des  villes  (I). .  <58,»44 

1846.  —  —  213,225 

Accroissement « .  «  54,281 

Soit:  34,15  «/o. 

182.7.  Population  des  campagnes.  167,358 

1846.  —  —  20a,693 

Accroissement 33,335 

Soit:  19,91  Vo- 


1827.  Population  dji  département  538)151 

1846.  —  —  602,444 

Accroissement 64,293 

Soit:  11,94  Vo. 

1827*  Population  des  villes <1(H826 

1846.  ^  —  144,338 

Accroissement. ?3,512 

Soit  :  30,23  7o. 

1827.  Population  des  camtognes.  427,325 

1846.  ~  —  458,106 

Accroissement 3f0,78i 

Soit  :  7,20  Vo- 

BAS-IMim* 

1827.  Population  du  département.  535^467 

1846.  —  —  580,373 


* I Il  II  iiiiii 


(1)  Préfectures  et  Soas-Prëfectores. 


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—  418  — 

Accroissement 44,906 

Soit  :  8.38  Vo- 

1827.  Population  des  villes 70,447 

1846.  —  —  81,620 

Accroissement 11,173 

Soit:  15,85  Vo- 

1827.  Population  des  campagnes.  465,020 

1846.  —  —  498,753 

Accroissement 33,733 

Soit  :  7,25  Vo- 

HÀUTE^iJlOHraS. 

1827.  Population  du  département.  407,016 

1846.  —  —  481,936 

Accroissement 74,920 

Soit:  18,40  Vc 

1827.  Population  des  villes 64,764 

1846.  —  —  95,269 

Accroissement 30,505 

Soit  :  47,01  %. 

1827.  Population  des  campagnes.  342,252 

1846.  —  —  386,667 

.  Accroissement 44,415 

Soit:  12,97  Vo. 

HAIRE-ET-LOIRE. 

1827.  Population  du  département.  458,674 

1846.  _  —  504,963 

Accroissement 46,289 

'Soit  :  10,09  Vo- 


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—  419  — 


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1 


—  420  — 

Accroissement 9,8é7 

Soit  :  34,23  Vo- 

1827.  Population  des  campagnes.  261,334 

1846-  —  —  273,707 

Aocroissement 12,373 

Soit  ;  4,73.  «/o. 

SÀRTHE. 

1827.  Population  du  département.  446,519 

1846.  —  —  474,876 

Accroissement.  • 28,357 

Soit:  6,35  Vc 

1827.  Population  des  villes 34,487 

1846.  —  —  40,212 

Accroissement 5^725 

Soit:  16,6»  Vo» 

i  827,  Population  des  cam.pag.ne$ .  4 1 2,032 

1846.  —  —  434,664 

Accroissement. 22,632 

Soit  :  5,25  Va- 

VÂB. 

1827.  Population  du  département.  311,095 

1846.  —  —  349,859 

Accroissement. .  « 38,764 

Soit:  12,45  7o.. 

1827^  Population  des  villes 57,892 

1846.  —  —  70,674 

Accroissement 12,782 

Soit  :  22,09  V«. 


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—  4âi  — 

18i27.  Population  des  campagnes.  253,203 

1846*  ~  —  27»,1»5 

ÂecroiBBenient 25^982 

Soît  :  iO^  V«* 

ÀLLIEB. 

t827.  PopuIalioB  du.  département  285,302 

1846.  —  —  329,540 

Accroissement 44,238 

Soit:  15,50  »/<>. 

1827.  Population  des  villes 26,363 

1846.  —  —  30,656 

Accroissement 4,293 

Soit  :  16,33  7o. 

1827.  Population  des  campagnes.  258,939 

1846.  —  —  298,884 

Accroissement 39,945 

Soit  :  15,42  Vo- 

Nous  ne  croyons  pas  devoir  pousser  plus  loin  nos  calculs 
comparatifs.  Qu'il  nous  suffise  de  dire  que  nous  avons  fait 
la  même,  opération  sur  un  bien  plus  grand  nombre  de 
départements  ,  et  que  le  résultat  obtenu  constate  que  par- 
tout en  France ,  le  mouvement  de  la  population  est  à  peu 
près  dans  un  sens  identique. 

Cependant,  Taccroissement  de  la  population  est  loin 
d'avoir  partout  la  même  importance.  Il  y  a,  sur  ce  point, 
des  différences  notables ,  doai  il  acHwit  certainement  utile 
d'étudier  les  causes.  Sans  insister  davantage  sur  cette  dif- 
férence ,  noua  nous  contenterons  de  signalqr  les  départe- 


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—  423 


ments  dans  lesquels  la  population  s'est  le  plus  développée 
et  ceux  où  elle  est  demeurée  à  peu  près  stationnaire. 

En  première  ligne ,  il  &ut  citer  le  département  de  la 
Seine ,  qui ,  dans  les  20  années  que  nous  analysons ,  a 
vu  sa  population  s'élever  de  1,013,373  à  1,364,933,  soit 
de  34,69  y,. 

Puis,  viennent  ensuite,  par  rang  d'accroissement: 


LB  BHÔAB. 


1827.     416,575 
1846.     545,635 


Accroissement.   31  7«* 


BOVCHBS-DU-RHÔm. 

1827.  326,302 
1846.  413,918 


COBSB. 


1827.  185,079 

1846.  230,271 

1827.  369,298 

1846.  453,786 


LOIBE. 


FiniSTÈBE. 

1827.  502,851 
1846.  612,151 

PYBÉNÉBS-OBIBIITALBS^ 

1827.  151,372 
1846.  180,794 


26,85  Vf 


24,41  •/.. 


—     22,87  •/.• 


21,73 


—     19,41  •/.. 


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—  425  — 

HiUT-BHIN. 

i827.     408,74t  )     .        .  .„  .^     . 

}    Accroissement.   19,19  %• 
1846.     487,208  (  ' 

niÈrBB. 

1827.     271,777) 

1846.     322,262  j  "~  **'"   ''" 

CHBB. 

1827.     248.589)  _ 

1846.     294,540  (  **'**   /" 

HlCTB-fiABOIinE. 

1827.     407,016 


1846.     481,938'  ""  *M0  •/•• 


nOBD. 

1827.     962,648 
1846. 1,132,980 

TBNDÉE. 

1827.  322,826 
1846.  376,184 


ÀBDBRnES 

1827.  281,624 
1846.  326,823 


17,69  Vo- 


16^52  •/.. 


—     16,04  •/.. 

AKDfcCHB. 

1827.  328,419  | 

1846.  379,614       ~     *^'^*  " 


Digitized  by  CjOOQ IC  


—  434  — 


AUJE». 


1827.     285,302  j 

1846.    $29,540  j    ^<«'«'sseinent.   15,50  •/.• 


VIEW*. 


OAM, 


1827.  267,670 
l'846.  308,391 

1827.  347,550 
l'946.  400,381 

DOUBS. 

1827.  254,312 
1846.  292,347 

1827.     276,351 

1«46.     314,739 
Viennent  ensuite: 

L'Aisne 

L'Isère 

L'Hérault 

La  Loire-Inférieure 


15,21  •/.. 


15,20  •/,. 


14,95  •/.• 


—  1-3,89  V.. 

~  13,86  •/.. 

~  1-3,78  •/.. 

—  «,6S  V.. 

—  13,16  •/.• 
Dans  cette  période  de  20  années,  trois  départements 

seulement  ont.  vu  leur  population  subir  une  légère  décrois- 
sance. 
Ce  sont: 

LA   HAKCHq, 

Dont  la  population  était,  en  1827i  de  611006»  et  qui 
ne  se  trouve  plus,  en  1846,  que  de  604,024. 


Digitized  by  CjOOQ  le 


—  42S  — 


LB   CANTÀI.. 


1827. 

262i013 

1846. 

260,479 

U  CALTÀDOS. 

1827. 

500,965 

1846. 

498,385 

Les  autres  départements  dans  lesquels  le  mouvement 
ascendant  de  la  population  s'est  fait  le  moins  sentir , 
sont: 

t'SVHfi. 

1827.     421,665 

«*,-      .o,».^,.       Aceroissement.     0,37  7,. 

1846.     423,247  )  ' 

TAUMnr-««iMmB. 

1827.    241,586  , 

'  0,37  7.. 


1846.    242,498 

ULB-Bf-'VlLAINE. 

1827.     553,453 
1846.     562,958 


dkHM. 


1827.  434,379 
1846.  442,107 


ntA. 


1827.  310,282 
1846.  316,150 


1,71  7.. 


1,77  7.. 


1,89  V.. 


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426  — 

BASSES- ALPES. 

1827. 

153,063 

A  iw>i*#\ice 

1846. 

156,675 

«EES. 

1827. 

307,601 

1846. 

314,885 

LOT-BT-«AIOiniB 

1827. 

336,886 

_ 

1846. 

346,260 

LOZÈIB. 

1827. 

138,778 

1846. 

143,331 

■ATBIWB. 

1827. 

354,138 

1846. 

368,439 

LOT. 

1827. 

280,515 

1846. 

294,566                 ~ 

BCBE-BT-LOnS. 

1827. 

277,782  1 

1846. 

292,337  ' 

ou». 

1827. 

385,124  ( 

1846. 

406,028 

2,36  •/.. 


2,78  •/.. 


3,28  V^ 


4,03  •/.. 


5  •/.. 


5,24  •/.. 


5,42  •/.. 


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—  427  — 

HAUTE -SAÔNE. 

1827.     327.fi4l    ) 


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—  4Î8  — 

La  Haute-Loire 7,51 

L'Ain 7.53 

lûdre-et-Loire 7,66 

Seine-et-Oise ,  etc 7,72 

Les  différences  que  nous  venons  de  signaler  dans  le 
mouvement  de  la  population  des  départements ,  se  font 
remanjuer,  et  même  dans  de  plus  larges  proportions,  pour 
les  villes.  Il  en  est  qui ,  favorisées  par  leur  position  ou 
par  des  avantages  commerciaux  et  industriels ,  ont  reçu 
une  notable  augmentation  de  population. 

Dans  cette  catégorie,  nous  poutons  citer  parmi  les 
préfectures  : 

Paris,  dont  la  popula- 
tion s'est  élevée  de.  .  .  890,431  à  945,721  Soit    6,207. 

Marseille,  —       115,943     167,872         44,78  7. 

Lyon,  ~       145^675     161,763  11,04  7. 

Bordeaux,         —        93,549     120,203  28,50  7. 

Nantes,  —         71,739       88,250  23,01  •/« 

Toulouse,        —         53,319       83,489  56,59  •/# 

Strasbourg,      —        49,708       62,094  24,91  7. 

Nîmes,  —         39,068       49,442  26,55  7. 

Angers,  —        29,978      40,628  35,52  •/• 

Montpellier,     —         35,842       40,105  11,89  7. 

Nancy,  —         29,122       38,795  33,217. 

Limoges,         —        25,612      Î4,180  33,45  7. 

Tours,  —         20,920      27,120  29,68  7. 

Le  Mans,         —         19,477       24,153  24    •  •/. 

Blois,  —         11337       15,900         40,24  •/• 

LaRocheBe,    —        11,073       14,136  27,66  7. 

plusieurs  obefe*lieux  de  préfectures  ne  présenteht  qu'an 


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^  4â9  — 

si  fiûèle  accroissement,  que  Ton  peiH  regtfder  ie  môu- 
yemaDt  de  h  population  comme  à  peu  près  st^tionnaire 


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~  450  — 

Auch,  lapopulaiion  e$t descendue  de.  i  0,844    à   9,474 
Melun,  —  7,199        6,822 

Chaumont,  —  6,027         5,924 

Foîx,  —  4,958         4,378 

Mézières,  —  4,159         3,893 

Mais ,  une  remarque  que  Ton  peut  généralement  &îre  , 
c'est  que  cette  déperdition ,  faible  d'ailleurs ,  ne  se  bit 
point  au  profit  des  campagnes ,  mais  bien  plutôt  en  fa- 
veur de  quelques  autres  villes  voisines  qui  présentent  ou 
plus  d'agréments  ou  plus  d'avantages. 

Si  nous  descendons  aux  sous-préfectures ,  nous  verrons 
toujours  se  reproduire  les  mêmes  différences,  et  nous  en 
trouverons  encore  la  cause  dans  la  création  de  quelques 
établissements  industriel ,  dans  quelques  bcilités  de  com- 
merce qu'acquièrent  certaines  villes.  Les  populations  alors 
se  déplacent  et  se  groupent  de  préférence  là  où  se  trou- 
vent leurs  convenances ,  et ,  dans  ce  mouvement ,  cer- 
taines villes  perdent  évidemment  ce  que  les  autres  ga- 
gnent. 

Parmi  les  villes  sous-préfectures  qui ,  dans  ces  vingt 
années ,  ont  ainsi  accpiis  un  accroissement  marqué  de  po- 
pulations ,  nous  pouvons  surtout  signaler  : 
Saint-Étienne  »  dont  la  population  s'est  élevée 

de 30,615  à  47,302 

Toulon,  —  30,171       45,434 

Rhéims,  —  34,862       42,538 

Boulogne,  —  19,314       29,741 

Le  Havre,  —  21,049       27,053 

Saint-Quentin,  —  17,661       23,362 

Brest,  —  26,655       35,163 


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—  451  — 
Cherbourg,  dont  la  population  s'est  élevée 


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1 


de 


-  45â  — 

Dôle,  dont  la 

population  est  descendue 

.  .  9  847 

à   9,322 
8>863 

Yvetot , 

— . 

9,853 

Schélestadt^ 

— 

9,6W 

8,995 

Coutances , 

— 

9,037 

7,442 

Mayenne , 

— 

9,799 

9,322 

Vire, 

— 

8,116 

7,515 

PoniiTjr , 

— 

7,775 

6,456 

Toul, 

•          — 

7,507 

7,158 

Loudéac, 

— 

7,033 

6,486 

Valognes , 

— 

6.955 

6,224 

Saint-Flour, 

— 

6,640 

5,473 

Gourdon , 

— 

5,990 

4,971 

Ploërmel , 

— 

5,984 

4,608 

ThionTiUe, 

— 

5,821 

5.425 

Loudun , 

— 

5,044 

4,570 

Rocroy , 

— 

3,500 

2,815 

Mortain ,  etc. , 

— 

2,715 

2,106 

Des  divers  tableaux  que  nous  ^jenons  de  présenta ,  il 
résulte ,  ce  nous  semble ,  la  démonstration  la  p)us  évi« 
dente  des  deux  propositions  que  nous  nous  étions  posées. 
Ainsi ,  la  population  en  France ,  mobile  parfois ,  suivant 
certains  avantages  qu'elle  trouve  à  un  déplacement  : 

1.^  S'accrott  d'une  manière  constante  ; 

2.^  Cet  accroissement  a  lieu  dans  les  villes  dans  une  pro- 
p<Mrtion  plus  large  que  dans  les  campagnes. 

Hais  cettte  dilFérence  proviendrait-elle  de  ce  que,  dans 
les  villes  ,  l'excédant  des  naissances  sur  les  décès  serait  plus 
considérable  que  dans  les  campagnes?  Il  n'en  est  rien ,  et 
la  proportion  est  justement  dans  un  sens  inverse.  Il  nous 
sera  facile  de  le  prouver. 


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-  435  — 
On  le  sait  d'ailleqra ,  les  villes  offirrat  des  eauses  de  knor- 

■Î^J       ,* -_     x-^ -i        ^^î-^A 4.^^^       J ±       A 1^^ 


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—  454  — 

Et  cependaot,  dans  cet  intervalle^  la  population  de  Stras- 
bourg 8*est  élevée,  ainsi  que  nous  Tavons  dit ,  de  49,708 
à  62,094,  et  s'est  conséquanment  accrue  de  12,386. 
A  Angers ,  môme  résultat  ; 

Les  décès  ont  été  de 24,948 

Les  naissances  de 22,949 

Excédant  des  décès i,949 

Et  la  population  d'Angers  s'est  néanmoins  élevée  de 
29,978  à  40,628  et  a  reçu  ainsi,  un  accroissement  de 
10,650. 
A  Toulouse,  même  résultat  encore  : 
Dans  ces  20  années ,  les  décès 

ont  été  de.  ... 46,032 

Les  naissances  de 42,541 

Excédant  des  décès a,491 

Et  Toulouse  n'en  a  pas  vu  moins  sa  population  s'élever 
de  53,319  à  83,489  et  s'accroître  ainsi  de  30,170. 

A  Marseille,  durant  cette  période,  le  nombre  des  nais- 
sances et  des  décès  est  à  peu  près  le  mèn»  : 

Il  est ,  pour  ces  premiers ,  de*  •     102,583 

Pour  les  décès ,  de 102^574 

Et  la  balance^  en  faveur  des 

naissances,  est  ainsi  de.  .  .  9 

Et  néanmoins  la  population  de  Marseille  a  été  portée 
de  115,943  à  167,872,  et  s'est  ainsi  aocrne  de  51,929. 

A  Lyon,  la  balance,  en  faveur  des  naissances,  s'é- 
largit s 


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—  456  — 
Elles  ont  été  de 109,914 


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—  466  - 

cours  dé  ces  20  années,  de  890,431  à  945,721,  et  s'est 

ainsi  aiocf Ue  de  S5<290. 
Et  d'un  autre  côté  : 

Les  naissance  ont  été  de 597,513 

Les  décès  de 540,897 


56,616 


Ainsi ,  comme  nous  venons  de  le  faire  remarquer,  l'ex- 
cédant des  naissances  est  à  peu  près  le  chiffre  iiiteie  de 
raccroissement  de  la  population. 

On  pourrait  conclure  de  là  qœ  Parts  n'a  rien  enlevé  aux 
populations  de  la  prov4nce.  Ce  serait,  très^probablement, 
une  erreur.  Hais ,  à  Paris ,  la  population  est  évidemment 
plus  mobile  que  nulle  part  ailleurs,  et  les  recensements 
officiels  ne  comprennent  point,  sans  dbnte,  ces  légions 
d'ouvriers  nomades^et  surtout  de  eurieux  qui ,  parfois ,  dou- 
blent la  population  de  la  capitale. 

Les  exemples  que  nous  venons  de  citer  et  que  nous  au- 
rions pu  multiplier,  prouvent  donc  clairement  que  Tac- 
croissement  de  4a  population  des  ^villes  n'a  point  pour 
cause  l^excédant des  naissances  sur  lesdéeès. 

Quel  est  donc  surtout  l'élément  de  cet  accroissement? 

Nous  4'avoAS  déjà  dit,  et  notre  conviction  est  complète 
à  cet  égard,  cet  accroissement  est  principalement  dû  aux 
emprunts  que  les  Villes  font  aux  populations  des  campa- 
gnes. 

En  voici,  du  restée  une  nouvelle  preuve. 
'     Lorsque  Lille  avait  à  supporter  une  perte  de  2,538  par 
l'excédant  des  décès  sur  les  naissances ,  le  reste  An  dépar- 
tement présentait  : 


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—  437  — 

Naîssanoas 654,#|7 

Décès 516,378 


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—  458  — 

Lorsque  Aogers  perdait  1,949,  le  reste  diidépartem^t 
de  Maine-et-Loire  présentait: 

Naissances 212,298 

Décès 188,409 

Et  gagnait  par  conséquent  .  .      23,889 

Lorsque  Nantes  ne  recevait  qu'un  accroissement  de 
3,033,  le  reste  du  département  de  la  Loire-Inférieure 
offrait  : 

,  Naissances 224,109 

Décès 184,026 

£t  gagnait 40,083 

Ce  qui  offre  un  accroissement  proportionnel  plus  que 
double  de  celui  obtenu  à  Nantes. 

Lorsque  Lyon  gagnait  7,723,  le  reste  du  département 
du  Bbône  présentait  : 

Naissances 206,277 

Décès 155,961 

Et  gagnait 50,316 

Ici  encore  la  proportion  d'accroissement  est  de  beau- 
coup moins  forte  pour  Lyon  que  pour  le  reste  du  dé- 
partement. 

Pour  compléter  ces  renseignements,  disons  cependant 
que  Bordeaux  fait  exception,  et  que  Text^édant  des  nais- 
sances sur  les  décès  y  est  dans  une  proportion  plus  forte 
que  dans  le  reste  du  département.  Ainsi  que  nous  rayons 
dit,  en  effet,  la  ville  de  Bordeaux  a  gagné,  de  1827-1846, 


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—  439  — 

9,942  iodifidusparrexciédQni des  naissances.  Le  reste  da 

département  présente*: 

Naissances.  •  • 204,876 

Décès. 188,967 

Et  n'a  gagné  ainsi  que 15,909 

Quoi  qu'il  en  soit,  de  ce  que  nous  venons  d*exposer,  il 
ressort  : 

1.®  Que  la  population  des  grandes  villes  en  France 
s'accrott  d'une  manière  notable,  et  que  cet  accroisse- 
ment n'est  point  dU  à  l'excédant  des  naissances  sur  les 


2.®  Que,  dans  les  campagnes,  l'excédant  des  naissances 
sur  les  décès  est,  au  contraire,  dans  une  proportion  plus 
considérable  que  dans  les  villes,  et  que,  néanmoins,  la  ba- 
lance d'accroissement  de  population  est  de  beaucoup  plus 
forte  dans  les  villes  que  dans  les  campagnes. 

La  conséquence  logique  et  irréfutable  de  ces  faits  est  que 
cet  accroissement  de  population  des  villes  a  pour  aliment 
rémigration  des  campagnes. 

La  Société  Académique  de  Nantes  avait  donc  donné  une 
preuve  de  l'intelligence  qu'elle  a  de  l'intérêt  réel  du  pays, 
en  cherchant  à  jeter  la  lumière  sur  une  question  à  laquelle 
se  trouve  si  essentiellement  lié  l  avantage  des  campagnes 
et  des  villes  même.  Mais  jusqu'ici,  à  notre  connaissance  du 
moins,  si  le  mal  ne  semblait  pas  douteux,  on  n'avait  pu 
apprécier,  d'une  manière  précise,  quelle  en  était  l'impor- 
tance. Nous  avons  voulu  combler  cette  lacune  et  nous  dé- 
sirons y  avoir  réussi. 

Quant  au  remède  à  appliquer,  nous  n'oserions  le  dis- 


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—  440  — 

ctittf,  ^r  DOS  étttdesne  nèus  penneOrMeDipts  de  le  Mft 
d'une  manière  convenable.  Noos  nooftcooUmterons  donc, 
en  termÎQapt,  d'exprimer  le  vif  désir  de  voir  les  hommes 
spéciaux»  ie  Gouvernement  .surtout^  sepréoceoperdes  in- 
convénients, des  dangers  même  de  cette  émigration,  et  de 
s'efforcer,  par  tous  les  moyens  possibles,  d'y  apporter  un 
>leniie  opi  tout  au  moins  on  remède. 

Nantes,  1."  mars  1850. 


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—  442  — 

qu*un  pâle  reflet  d'Alexandrie,  dont  on  a  brûlé  la  biblio- 
thèque. Oo  s'aperçoit  du  vide  qu'on  a  fait ,  on  veut  le  rem- 
plir: ÂFmanon,  accordant  la  paix  à  Michel  III,  empe- 
reur de  Constantinople ,  stipule,  dans  ses  conditions,  la 
liberté  de  rechercher  les  livres  de  philosophie  qui  se  trou- 
vaient dans  la  Grèce ,  pour  les  bire  traduire  en  langue  arabe  ; 
nous  avons  vu  Aaron  al  Raschid  envoyer  en  présent  une 
horloge  à  Charlemagne. 

C'est  sur  le  sol  de  notre  Fk^ance  que  se  sont  arrêtées  les 
conquêtes  des  Arabes;  c'est  en  France,  en  Italie,  en  Alle- 
magne, que  se  sont  réveillées  les  traditions  des  sciences  et 
le  goût  des  beaux  arts  :  notre  horlogerie  trouve  son  berceaa 
dans  ces  trois  pays. 

Les  artistes  qui  ont  inventé  les  premières  horloges  à 
roues  dentées,  marchant  et  se  réglant  sans  le  secours  de 
l'eau,  sont  morts  sans  cette  postérité  de  l'artiste,  un 
élève  ;  le  génie  de  la  mécanique  est  si  rare,  qu*ils  n'ont 
pas  trouvé  qui  pût  les  comprendre  et  leur  succéder,  leurs 
œuvres  ont  péri  sans  avoir  été  décrites  ou  imitées. 

Les  premières  fabrications  spéciales  d'horloges  sont  d'Al- 
lemagne :  soit  que  les  artistes  de  ce  pays  aient  connu  et 
imité  les  cGmvres  de  nm  compatriotes,  soit  qu'ils  les  aient 
inventées  de  noavetaUi  ilssarent  fornaer  des  ouvriers,  pro- 
pager le  nouveau  mécanisme  et  réaliser  ce  progrès  auquel 
le  monde  entier  à  pris  part. 

Il  est  des  objets  dont  la  connaissance  a  tellement  influé 
sur  les  connaissances  humaines ,  que  la  date  de  leur  appa- 
rition est  devenue  une  ère  nouvelle  pour  la  société  qui 
en  a  profilé.  Telles  sont  :  le  télescope ,  l'imprimerie ,  la 
poudre.  L'horlogerie,  si  on  ne  la  oitë  pas  comme  les  pré- 
cédentes,  parce  qu'elle   s'est  présentée  lentement  aux 


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hommes  dans  ses  perfectionnements  successifs ,  est  un  de 
ces  arts  dont  Taction  a  été  aussi  importante  que  les  précé- 
dents sur  les  destinées  sociales. 

Oh  !  oh  !  doit-on  dire  autour  de  moi ,  vous  êtes  orfèvre, 
Monsieur  ....?  —  Oui,  Messieurs,  et  que  mon  enthou- 
siasme ne  vous  semble  pas  déplacé  :  je  pi*étends  vous  le 
&ire  comprendre,  et  peut-être  même  partager. 

L*horlogerie  a  pris  à  l'astronomie ,  à  la  mécanique ,  à  la 
(rfiysique ,  les  connaissances  qui  Font  portée  au  degré  de 
perfection  et  d'utilité  qu'elle  a  de  nos  jours;  puis  elle  a 
rendu  à  ces  sciences,  et  à  d'autres,  et  au  centuple,  les 
services  qu'elle  en  a  reçus. 

Quelle  est  la  science  qui  ne  doive  à  l'horlogerie  quelques- 
uns  de  ses  principes  et  de  ses  progrès?  Médecins ,  la  décou- 
verte de  la  circulation  du  sang  ne  lui  doit-elle  rien  ?  Et  dans 
les  observations  journalières  de  la  pathologie ,  n'avez- vous 
pas  à  chaque  instant  recours  à  elle?  Physiciens ,  comment 
eussiez-vous  connu  la  vitesse  de  propulsion  delà  lumière  et  du 
son?  Mécaniciens,  le  temps  n'est-il  pas  un  des  termes  de  la 
ilurmule  des  forces?  Navigateurs,  à  qui  devez-vous  la  connais- 
sance des  longitudes  en  mer?  Généraux,  le  grand  homme, 
dont  la  tactique  a  changé  l'art  militaire,  ne  fondait-il  pas  sur 
l'exactitude  de  vos  montres  la  précision  de  vos  mouvements 
combinés?  Et  la  justesse  du  tir  de  l'artillerie  n'a-t-elle  pas 
basé  ses  calculs  sur  Textrême  précision  de  la  mesure  des 
courts  instants  où  votre  projectile  se  meut  dans  l'espace? 
Ma  mémoire  s'épuise  à  rassembler  les  sciences  dont  les  ob- 
servations s'appuient  sur  l'horlogerie ,  et  qui  prennent  de  ses 
battements  réguliers  et  comptés  les  indications  certaines  de 
leurs  calculs;  Thydraulique ,  l'aéronautie,  la  pyrostatique, 


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la  géologie;  comment  eût-<m  connu,  sans  son  secours,  k 
mesure  de  la  terre?  la  preuve  de  son  véritable  mouvemeol? 
l'aplatissement  de  ses  pâles?  la  remarque  si  curieuse  des 
terrains  denses  qui  abaissent  le  niveau  de  la  mer  des  ter- 
rains légers  qui  relèvent?  La  musique  ne  doit-elle  pas  aux 
horlogers  le  métronome  qui  réduit  lerhythmeàTunité?  qui 
eût  pu  compter,  sans  eux ,  les  ondes  harmonieuses  des  ac- 
cords? C'est  à  l'usage  des  horloges  <pi'on  doit  rimreotion 
des  cloches,  comme  aux  monftes  à  répétkioQ  celle  des 
ressorts  sonores  dont  on  a  dit  des  musiques  portatives,  ob« 
jet  tout  nouveau,  qui  a  Breguet  pour  auteur. 

Ajoutez  à  cette  énumération  ^  déjà  teop  longue^  les  be- 
soins des  rapports  de  la  vie  sociale  pour  le  travail ,  le  repos, 
les  vojagjBs,  le  commerce.  Ofces  des  seiences  les  perfection- 
nements qu'elles  lui  doivent,  beaucoup  d'elles  retomberont 
à  retint  d'ignorance.  Otez  à  la  civilisation  ce  moyen  de 
régler  les  relations  des  citoyens  entre  eux ,  et  la  vie  sera 
semée  d'ennuis ,  de  déceptions  et  d'erreurs,  car  le  Caoïps  «H 
Vétoffi  dmt  la  vie  esi  faile;  et ,  dans  nos  cités,  oà  chaque 
moment  est  compté  et  promis ,  sa  omnaissaoce  est  indis- 
pensable. 

L'invention  de  l'horloge  n'était  pas  chose  |fiBM»le;  Tfaorloge 
est  un  objet  complexe ,  composé  d'un  moteur,  d'un  rouage, 
d'un  modérateur;  l'eau  des  clepsydres  était,  à  la  fois,  mo- 
teur par  son  poids,  index  par  son  nifeau^  régulateur  par 
son  écoulement;  il  fallait  dégager  la  penaée  de  ce  vieux 
mode  auquel  elle  était  habituée,  inventer  le  poids motenr, 
l'encliquetage  qui  permet  de  le  remonter  sans  déplacer  les 
pièces  du  rouage;  enfin,  lo  balancier,  récbappe8Mi]i;oo 
aura  pr^oièreiQ^it  essayé  un  volant  analogue  à  cehii  des 


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—  445  — 

tourne-broches  :  la  machine  dut  alors  prendre  un  mouve- 
ment accéléré  f  comme  celui  d*un  corps  qui  tombe,  jus- 
qu  à  ce  que  des  frottements  et  le  déplacement  de  l'air  aient 
fiût  équilibre  à  cette  excessive  vitesse  ;  on  aura  ensuite 
ajouté  des  ailes  pour  ralentir  à  volonté  ce  mouvement  ;  or , 
le  premier,  qui ,  considérant  ces  essais,  se  dit  :  Mes  devan- 
ciers ont  pris  pour  régulateur  de  Tborloge  les  résistances 
du  frottement  et  de  l'air;  erreur!  erreur!  Rien  de  plus 
variable.  Il  n'y  a  qu'une  résistance  mécanique,  immuable 
et  régulière  :  c'est  l'inertie;  en  donnant  au  volant  un 
mouvement  alternatif,  sa  masse,  à  chaque  instant,  lancée 
et  arrêtée  offrira  im  modérateur  toujours  renouvelé ,  tou- 
jours le  même;  celui  qui,  ayant  trouvé  ce  principe,  sut 
l'appliquer,  est  l'inventeur  des  horloges;  C'e  trait  de  génie 
a  doté  le  monde  d'un  art;  c'est  là  l'idée  mère  devant  la- 
quelle nous  devons  nous  incliner. 

Des  horloges  admirables  pour  le  temps  où  elles  furent 
&ite8,mais  dont  nous  ignorons  les  détails,  démontrent 
que,  quand  une  invention  devance  le  temps  de  son  utilité , 
elle  jette  un  éclat  passager,  comme  un  feu  qui  disparait 
avant  d'avoir  été  propagé  ou  réfléchi  ;  en  ces  jours  de  bar- 
barie et  d'ignorance ,  le  temps  avait-il  prix  pour  les 
hommes?  Les  seules  retraites  de  paix  étaient  les  cloîtres, 
et  qu'importait  aux  frères  cette  vie  passagèi*e ,  dont  ils  dé- 
siraient le  terme?  Avaient-ils  le  désir  d'en  économiser  les 
moments?  Ceux  qui  s'occupaient  d'étude  se  livraient  à 
des  travaux  collectifs  qui  n'engageaient  particulièrement 
aucun  d'eux.  Quand ,  pour  prendre  date  de  l'invention  des 
horloges,  on  cite  qu'en  1108  le  sacristain  du  monastère 
de  Ctuny^  oà  mourut  Saint-Uugues ,  sortait  la  nuit  pour 

31 


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^ 


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voir  les  étoiles,  afin  de  déterminer  l'heure  des  offices, 
concluant  de  là  qu'elles  n'étaient  pas  connues,  cette  raison 
ne  me  semble  pas  fondée,  car  ils  pouvaient  avoir  des  clep- 
sydres. Il  importait  moins  aux  frères  de  diviser  le  temps, 
que  de  connaître  une  heure  donnée:  veille  donc,  valet,  les 
moines  dorment ,  et  si  Theure  est  oubliée,  tu  seras  respon- 
sable devant  Dieu  du  manquement  à  la  règle. 

Quelques  auteurs  croient  que  les  machines  que  feisait, 
en  510,  Boéthius  ou  Boéte,  étaient  des  horloges:  nous 
levons  lieu  d'affirmer  que  c'étaient  des  clepsydres. 

L'honneur  de  la  première  horloge  à  roues  dentées  est 
attribuée  à  Pacifius,  archidiacre  de  Vérone,  qui  vivait  au 
temps  de  Lothaire,  fils  de  Louis-le-Débonnaire ,  en  850; 
cette  machine  fort  curieuse,  était  mue  par  un  poids ,  et  mar- 
quait les  heures  sans  le  secours  de  l'eau  ;  nous  n'avons  au- 
cun détail  du  mécanisme,  aucune  notion  sur  sa  régularité. 

La  seconde ,  date  de  996  ;  son  auteur,  célèbre  à  plus  d'un 
titre,  fut  Gerbert,  né  en  Auvergne ,  moine  de  l'abbaye  de 
Saint-Gérard  d'Aurillac,  et,  depuis.  Pape,  sous  le  nom  de 
Sylvestre  II;  même  obscurité  sur  le  mécanisme,  qui, 
comme  celle  de  Pacifius,  ne  fut  ni  décrit,  ni  reproduit, 
ni  compris  peut-être  de  ses  contemporains.  Quand  leur  au- 
teur cessa  d'en  prendre  soin ,  elles  tombèrent  rongées  de 
rouille,  perdues  dans  les  ruines  du  monument  qui  les  con- 
tenait, comme  dans  l'ignorance  de  leur  siècle. 

Près  de  300  ans  après,  l'horlogerie  apparaît  à  mesure 
que  la  lumière  se  fait:  quatre  horloges,  monuments  de  cet 
art,  sont  célèbres  en  Europe,  et  Tune  d'elles  a  pu  être  vue 
et  décrite  par  Julien  Le  Roy. 

La  première  date  de  1326,  elle  fut  faite  par  Richard 
Walingfort,  abbé  de  Saint-Alban,  en  Angleterre.  Les  au- 


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leurs  anglais,  fort  enthousiastes  et  exclusifs,  comme  tou- 
jours, disaient  que  cette  horloge  n'avait  pas  sa  pareille  dans 
toute  l'Europe. 

Charles  V,  dit  le  Sage,  fit  venir  d'Allemagne  un  artiste 
nommé  Henry  de  Vic^  qui  fit  l'horloge  du  Palais,  en  1370 
environ  ;  nous  en  donnerons  la  description. 

En  1382,  le  duc  de  Bourgogne  fit  enlever  en  la  ville  de 
Courtray,  une  horloge  et  la  fit  apporter  à  Dijon,  où  elle 
était  encore  en  1802,  sur  la  tour  de  l'église  Notre-Dame; 
c'était,  disait-on,  une  des  plus  belles  que  l'on  connût,  tant 
en  deçà  qu'au  delà  des  mers. 

Jean  de  Dondis,  médecin  et  astronome  de  Padoue,  fit 
une  horloge  qui  lui  mérita  le  surnom  d'Orologio ,  que  sa 
fiimille  a  conservé  depuis;  cette  horloge  marquait  le  cours 
du  soleil,  de  la  lune  et  des  planètes,  les  fêtes  de  l'année,  le 
mois,  le  jour,  l'heure  ;  Jean  de  Dondis  eut  un  fils  qui  expli- 
qua le  mécanisme  de  cette  horloge,  dans  un  ouvrage  resté 
manuscrit. 

William  Zelander  construisit,  pour  la  même  ville,  une 
horloge  encore  plus  compliquée,  qui  fut  restaurée  dans  le 
XVL*  siècle,  par  Josselin  Turianus.  Cette  seconde  horloge 
n'excita  pas  la  même  attention  que  celle  de  Jean  de  Don- 
dis; e$t*ce  parce  que  la  curiosité  avait  été  épuisée  par  la 
première,  ou  parce  qu'elle  était  moins  savante?... 

Il  y  avait  dans  la  cathédrale  de  Lunden,  en  Suède,  une 
horloge  et  un  cadran  surprenants  :  on  y  distinguait  Tannée, 
le  mois,  la  semaine,  le  jour  et  l'heure,  avec  les  fêtes  mo- 
biles et  fixes;  le  mouvement  du  soleil  et  de  la  lune  et  leur 
passage  par  chaque  degré  de  l'écliptiqne.  L'horloge  est  si 
artistement  composée,  dit  le  chroniqueur,  que  lorsqu'elle 
sonne  les  heures,  deux  cavaliers  se  rencontrent  et  se  portent 


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autant  de  coups  que  Thorloge  va  sonner  d'heures; alors,  une 
petite  porte  s'ouvre,  et  Ton  voit  un  théâtre  où  la  bienheo- 
reuse  Vierge  Marie,  assise  sur  un  trône,  avec  son  Fils  enlre 
les  bras,  est  accompagnée  des  trois  Rois  Mages  avec  kur 
suite;  les  Rois  se  prosternent  et  offrent  chacun  un  présent; 
deux  trompettes  sonnent  pendant  la  cérémonie  pour  ea 
solemniser  la  pompe.  Nous  n'avons  pas  de  date  à  assignera 
l'exécution  de  cette  horloge,  mais  je  pense  qu'elle  estpos- 
tériejure  à  celle  dont  j'ai  parié  précédemment. 

L*horloge  du  Palais  de  Paris,  que  je  vais  décrire,  n'était 
pas  aussi  compliquée;  destinée  à  donner  l'heure  au  hautd*une 
tour,  à  faire  entendre  ses  avertissements  à  tout  un  quartier, 
toute  une  ville,  elle  fut  réduite  dans  ses  fonctions  am  strictes 
exigences  de  son  utilité.  C'est  laplusanciénnemeat  connue 
des  horloges  à  sonnerie;  peut-être  la  sonnerie  estrelle  de 
l'invention  de  son  auteur;  son  mécanisme  est  d'autant  plus 
curieux,  que  c'est  celui  qui  fut  employé  dans  la  plupart 
des  horloges^  et  qui  l'est  encore  dans  nos  pendules  de  cjw- 
minées. 

Le  mouioement  (ce  mot  est  employé  pour  dealer  k 
rouage  régulateur,  par  opposition  au  rouage  de  la  sonne- 
rie) ,  le  mouvement  est  composé  de  deux  roues  phtes, 
d'une  roue  de  rencontre^  de  la  verge  et  du  bakocier;  la 
sonnerie  est  composée  de  deux  roues  plates,  d'une  détente, 
d'un  marteau  et  d'un  volant  à  larges  ailes  modératrices; 
les  pignons  sont  à  lanterne  ;  le  tout  est  monté  entre  des 
platines  liées  entre  elles  et  formant  un  chftssis  appelé  la 
cage;  les  roues,  la  cage,  les  axes  sont  en  fer  forgé. 

L'axe  de  la  première  des  grandes  roues  porte  un  cylifldre 
de  bois  sur  lequel  est  enroulée  la  corde  qui  porte  le  poids, 


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qui  est  de  500  livres;  comme  la  force  d'un  homme  ne  suffi- 
nitpasàle  remonter,  une  roue  dentée,  accessoire,  tient  au 
cy^XÈÛte^  et  engrène  dans  un  pignon  auquel  s'adapte  la 
manivelle.  La  roue  est  de  80,  le  pignon  de  8,  le  rayon 
de  la  manivelle  est  long  du  double  de  celui  du  cylindre;  le 
poids  de  500  livres,  divisé  par  10,  puis  par  2,  n'oppose 
plusqu'uneréBi8tancede25  livres,  qu'un  homme  peut  fa- 
cilement vaincre. 

La  roue  principale  porte  un  cliquet,  qu'un  ressort  pousse 
sur  le  rochet  qui  fait  partie  du  cylindre;  quand  on  re- 
monte la  machine,  le  cliquet  retombe  dans  les  dents  du 
rochet  jusqu'à  ce  que^  l'opération  terminée,  le  poids  agisse: 
le  cylindre  tend  à  tourner  en  sens  inverse,  le  cliquet  l'arrête, 
il  ne  peut  suivre  le  mouvement  que  lui  commande  le  poids, 
qu'en  entraînant  la  roue. 

Le  poids  descend  de  32  pieds  en  24  heures  :  la  tour  de 
l'horloge  était  donc,  comme  celle  du  Bouffay  de  Nantes, 
construite  et  employée  seulement  pour  le  service  de  l'hor- 
loge. La  première  roue  a  deux  pieds  de  diamètre  et  fait  un 
tour  par  heure;  elle  porte,  hors  de  la  cage,  un  pignon  de 
8  dents  engrenant  une  roue  de  84  (^  =  ^2)  ;  la  roue 
de  84  &isait  donc  un  tour  en  12  heures  et  portait  l'ai- 
guille extérieure  ;  douze  chevilles  sont  fixées  sur  cette 
roue  et  servent  à  élever,  à  chaque  heure,  la  détente  qui 
retient  la  sonnerie. 

Cela  connu,  il  s'agit  de  savoir  comment  on  obligera  cette 
roue  principale  de  fiiire  un  tour  par  heure. 

Sa  denture  est  de  60  dents  :  elle  engrène  le  pignon  de 
8  de  la  seconde  roue  ^=  7  1/2  ;  cette  seconde  roue  fera 
d<mc  7  tours  1/2  pendant  une  révolution  de  la  grande^  en 


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1 


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une  heure;  elle  porte  64  dents.  Le  pignon  de  la  dernière  roue 
est  de  8,  encore;  -,-  =  8  la  roue  de  rencontre  devra  donc 
faire  8  tours  pendant  un  de  la  seconde  roue,  qui,  elle-même 
en  fait  7  1/2  par  heure;  7  1/2x8=  60;  la  roue  de 
rencontre  fera  60  tours  dans  une  heure ,  un  tour  par 
minute. 

La  roue  de  rencontre  a  30  dents;  chacune  d'elles,  agis- 
sant une  fois  d'un  côté,  une  fois  d'un  autre  sur  la  verge 
du  balancier,  donne  deux  vibrations  à  chaque  tour;  ces  30 
dents  font  donc  60  vibrations  par  minute,  une  par 
seconde. 

Donnez  au  balancier  le  poids,  le  diamètre  nécessaire 
pour  que  son  inertie  ne  permette  qu'une  vibration  par 
seconde,  la  première  roue  fera  un  tour  en  une  heure,  avec 
toute  l'exactitude  possible. 

L'échappement  est  disposé  ainsi  qu'il  suit  : 

La  roue  de  rencontre,  dont  Taxe  est  horizontal,  comme 
les  autres,  a  son  plan  vertical. 

La  verge  est  verticale,  le  balancier,  dont  elle  est  Taxe, 
est  horizontal;  il  est  suspendu  par  un  cordon,  qui  rem- 
place un  pivot  supérieur,  et  évite  les  énormes  frottements 
que  son  poids  ferait  subir  au  pivot  du  bas,  qui  roule 
librement. 

La  denture  de  la  roue  de  rencontre  est  posée  de  champ 
et  en  forme  de  rochet  ;  deux  palettes  font  partie  du  corps 
de  la  verge  ou  axe  du  balancier  ;  leur  plan  est  parallèle  à 
son  axe,  elles  font  entre  elles  un  angle  d'environ  90<>;  les 
dents  de  la  roue  de  rencontre,  en  agissant  alternativement 
sur  l'une  et  l'autre  palette ,  impriment  au  balancier  un 
mouvement  circulaire  alternatif  d'environ  150<*  d'étendue. 


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Deux  petits  poids  sont  accrochés  aux  rayons  du  balan- 
cier, ressemblant  aux  poids  des  balances  à  la  romaine  : 
ils  peuvent  être  posés  à  différentes  distances  de  son  centre, 
et,  par  là,  augmenter  ou  diminuer  à  volonté  son  inertie, 
suivant  la  quantité  déterminée  par  la  marche  de  Thorloge. 
C'est  là  l'appareil  de  réglage,  très-ingénieux  pour  son  tempe, 
mais  très- grossier,  comparé  à  ceux  que  nous  employors 
aujourd'hui. 

Ce  mécanisme ,  sauf  les  modifications  de  nombre  ou  de 
dimension  des  roues  ,  arrangées  par  le  caprice  ou  le  génie 
des  horlogers ,  fut  la  base  de  tous  ceux  des  horloges  qui 
se  firent ,  peut-être  depuis  Pacifius  et  Gerbert ,  à  coup 
sûr  depuis  le  X1V.«  siècle  jusqu'au  milieu  du  XVII/ ,  c'est- 
à-dire  pendant  trois  siècles  et  demi ,  et  ne  fut  changé  aue 
par  l'application  du  pendule  aux  horloges  et  sa  substitu- 
tion aux  bahinciers. 

Tout  l'appareil  moteur  de  la  sonnerie  est  semblable  à 
celui  du  mouvement  déjà  décrit  ;  le  cylindre ,  le  poids,  le 
remontoir,  l'encliquetage  ;  la  première  roue  a  deux  pieds 
de  diamètre ,  elle  porte  six  chevilles  destinées  à  élever  le 
marteau  ;  son  axe  dépasse  la  cage  et  porte  un  pignon  du  côté 
opposé  au  cadran  ;  la  denture  de  la  roue  engrène  le  pignon 
d'une  seconde  roue  qui  conduit  le  volant  ;  le  nombre  de 
ces  dentures  importe  peu  :  il  suffit  qu'ils  donnent  au 
volant  assez  de  vitesse  pour  que  les  coups  de  marteau 
soient  convenablement  distancés. 

Je  vais  expliquer  l'appareil  qui  sert  à  compter  les  coups  : 
depuis  i  heure  jusqu'à  12 ,  l'addition  du  nombre  de  coups 
sera  de  78  ;  la  roue  principale  à  6  chevilles ,  elle  fera 
donc  13  tours  en  12  heures;  sa  vitesse  est  un  peu  plus 


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—  4S2  — 

grande  que  celle  de  la  grande  roue  du  mouvement  ;  le 
pignon  qu'elle  porte  hors  de  la  oage  est  de  6  ;  il  engrène 
une  roue  de  78  dents ,  laquelle  finit  aussi  le  ehaperon  ou 
roue  de  compte  ;  chaque  dent  de  cette  roue  représenle 
un  coup  de  marteau ,  puisque  le  pignon  qui  la  conduit , 
attenant  à  la  roue  de  chevilles^  est  en  nombre  ^al  à 
celui    des  chevilles. 

La  détente  est  montée  sur  deux  pivots  (i&és  à  la  cage, 
porte  un  bras  hors  de  la  cage  qui  reçoit  l'atteinte  des  che- 
villes; un  second  qui  vient  arrêter  la  seconde  roue  de  son- 
nerie ,  et  un  troisième  qui  agit  sur  le  chaperon.  A  chaque 
heure  elle  est ,  avons-nous  dit,  enlevée  par  la  roue  qui  con* 
duit  l'aiguille;  la  sonnerie  ne  part  pas  aussitôt  que  la  dé- 
tente, en  s'élevant,ami8  cette  roue  en  liberté  ;  elle  tient 
le  volant  arrêté  tant  qu'elle  reste  enlevée^  et  ne  laisse  le 
rouage  courir  que  quand  elle  retombe.  Cette  fonction , 
qu'on  nomme  le  délai ,  est  très-ingénieuse,  et  fieiit  toute 
la  précision  des  sonneries.  Alors ,  comme  l'obslade  de  la 
deuxième  roue  ne  rencontrera  la  détente  qu'après  une  ré- 
volution ,  le  rouage  court  pendant  sa  durée  qui  suffit  à 
frapper  un  coup,  soit  une  heure. 

Nous  avons  dit  qu'une  roue  de  78  dents  portait  le  cha- 
peron ;  le  chaperon  est  le  compteur  de  la  sonnerie  :  c'est 
une  roue  unie  où  sont  creusées  douze  entailles  placées 
à  différentes  distances ,  et  ^  do  telle  sorte ,  que  les  inte^ 
ralles  aient  des  longueurs  graduées  qui  représentent  2,3, 
4  heures ,  ou  autant  de  coups  de  marteau  ;  quand  la  dé- 
tente repose  sur  l'un  de  ces  intervalles ,  elle  reste  enierée 
et  le  rouage  court ,  le  marteau  frappe ,  le  beffroi  résonne, 
le  chaperon  s'avance  jusqu'à  ce  qu'une  entaille  se  présen- 
tant ,  la  détente  y  tombe  et  arrête  le  rouage  ;  on  com- 


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—  4B5  — 

prend  fiiciiement  que  la  longueur  de  la  partie  unie  dé- 
termine le  Bombre  de  coups  que  le  chaperon  doit  compter^ 
et  que  ces  longueurs  sont  réglées  de  façon  que  chaque 
heure  y  trouve  son  compte. 

Un  axe  qui  se  meut  en  cage  porte  un  double  levier, 
dont  l'un  des  bras  reçoit  laction  des  chevilles  de  la  pre* 
mière  roue  qui  relèvent  en  passant  successivement  «  l'autre 
la  transmet  au  marteau  par  des  renvois  de  fils  de  fer.  Le 
calcul  du  poids  du  marteau,  basé  sur  celui  du  moJleur,  est 
une  simple  question  d'équilibre  mécanique. 

Tel  est  le  mécanisme  de  la  sonnerie  simple,  sauf,  toute- 
fois, les  modifications  de  nombre,  de  distribution  de  dimen- 
sion ,  qui  sont  louvrage  particulier  de  chaque  artiste.  Plus 
tard,  on  fit  ajouter  un  coup  pour  annoncer  la  demi-heure  : 
c*est  le  mécanisme  actuel  de  nos  pendules  de  cheminées; 
on  fit  ensuite  annoncer  les  quarts ,  puis  on  fit  des  carillons 
ou  airs  joués  par  des  coups  frappés  en  cadence  sur  une 
octave  de  cloches. 

On  a  ajouté  aux  horloges  des  figures  ^  des  indications, 
des  complications  savantes  et  ingénieuses  qui  furent  le  goût 
du  temps  ;  un  art  tend  toujours  à  progresser  ;  un  ar- 
tiste ingénieux  cherche  à  bire  mieux  que  ses  prédéces- 
seurs ;  le  mécanisme  principal  très-borné  et  les  applica- 
tions très-imparfaites  dans  les  résultats  qu'iis  connaissaient 
alors ,  n'attendait  guère  de  perfection ,  et  le  talent  des  ou* 
vrîers  se  détournait  d'un  but  qu'ils  ne  pouvaient  apercevoir 
pour  chercher  la  gloire  dans  l'accessoire  ;  de  nos  jours , 
cet  accessoire  est  rejeté  de  Tborlogerie  qui  ne  reconnaît  de 
sou  domaine  que  tout  ce  qui  assure  une  marche  régulière. 

Les  horloges  de  Strasbourg  et  de  Lyon  sont  restées 
comme  les  chefe-d'œuvre  de  ce  genre.  ^ 


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—  454  — 

La  première  est  i*œuvre  de  Conrad  Dayspsodius,  qui  Tt 
finie  en  1570.  Une  tourelle,  pièce  d'ornement  dans  Tar- 
chitecture  de  la  cathédrale ,  s'élève  au-dessus  du  méca- 
nisme et  porte  un  grand  cadran  de  la  forme  d*un  astio- 
labe,  qui  indique  Theure  et  la  minute,  puis  le  mouve- 
ment annuel  du  soleil  et  de  la  lune  dans  l'écliptique; 
au-dessus ,  est  un  cadran  qui  indique  les  phases  de  la  lune; 
au-dessous,  différentes  statues  représentent  les  jours  de 
la  semaine  par  des  divinités  dont  les  planètes  portent  le 
nom;  celle  du  jour  est  dans  un  char  porté  par  des  nua- 
ges ,  et  disparaît  à  minuit,  remplacée  par  celle  du  lende- 
main. £n  avant  est  un  globe  porté  sur  les  ailes  d'un  péli- 
can ,  autour  duquel  tournent  le  soleil  et  la  lune  symbo- 
lisés par  deux  personnages  dont  la  marche  suit  le  mou- 
vement apparent  de  ces  astres  ;  au-dessous,  enfin,  sont  trois 
cadrans  :  Tun ,  rond  et  composé  de  plusieurs  cercles  con- 
centriques, indique  les  jours  du  calendrier,  les  fêtes 
mobiles  et  annuelles  et  autres  époques  remarquables;  les 
deux  autres  cadrans  latéraux  sont  carrés ,  et  indiquent , 
Tun,  les  éclipses  de  soleil,  Tuutre,  les  éclipses  de  luoe. 
Au-dessous  des  cadrans  principaux,  sont  quatre  personnes 
symbolisant  les  âges  de  la  vie  :  au  premier  quart  de  cha- 
que heure ,  la  jeunesse  frappe  ;  au  second  ,  TadolesceDce; 
au  troisième,  la  vieillesse;  quand  vient  Theure ,  le  spectre 
de  la  mort  apparaît,  et  est  chassé  par  J.-C.  sortant  du 
tombeau.  Deux  anges  l'accompagnent  :  l'un  frappe  la  cloche 
avec  un  sceptre  ,  l'autre  retourne  un  sablier  qui  s  écoule 
pendant  l'heure  suivante  ;  différents  animaux  crient  imi- 
tant la  nature  :  un  coq  allonge  le  cou ,  bat  des  ailes  et 
chante  avant  l'heure. 


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—  455  - 

Cette  curieuse  machine  a  été  dérangée  pendant  de 
longues  années  ;  depuis  dix  ans  environ  ,  un  habile  hor- 
loger en  a  entrepris  la  restauration  complète  qui  a  été 
terminée  à  son  plus  grand  honneur ,  et  devint  un  de  ses 
titres  à  la  médaille  d'or  qui  lui  fut  décernée  à  l'exposition 
de  1844.  lia  cependant  modifié  le  jeu  des  automates. 

L*horloge  de  Lyon  ,  un  peu  moins  célèbre,  a  du  moins 
eu  le  mérite  de  marcher  longtemps  sans  dérangement. 
Leppuis^  de  Bàle,  en  est  l'auteur  ;  elle  fut  réparée  le  siècle 
dernier ,  par  M.  Nourrisson. 

Elle  indique,  sur  les  différents  cadrans,  la  marche  an- 
nuelle et  diurne  du  soleil  et  de  la  lune;  les  jours  de  Tannée 
et  leur  longueur  ;  le  calendrier  civil  et  ecclésiastique.  Un 
cadran  particulier  indique  le  jour  de  la  semaine  ;  un  coq 
bat  des  ailes,  s'agite  et  chante  trois  fois  avant  l'heure. 
Des  marteaux  viennent  frapper  différentes  cloches  qui  for- 
ment le  chant  d'un  hymne,  pendant  qu'un  tableau  se  dé- 
couvre et  représente  l'Annonciation  de  la  Vierge  ,  scène 
harnfK>nieuse,  exécutée  par  des  figures  articulées.  Une  co- 
lombe descend  des  nuages ,  et  enfin,  l'heure  sonne. 

A  l'un  des  côtés  de  l'horloge  est  un  cadran  ovale,  mar* 
quant  les  heures  et  les  minutes  ;  les  aiguilles  s'allongent  et 
se  raccourcissent  suivant  la  longueur  du  demi-diamètre  de 
Telipse. 

Ces  admirables  pièces  d'automatie  sont  négligées  de  nos 
jours;  l'industrie  cherche  l'utile;  je  ne  parlerai  donc  pas 
des  autres  pièces  qui  ont  fait  Tétonnement  et  l'admiration 
des  populations  des  différentes  villes  d'Europe. 

Les  horloges  se  multiplièrent  ;  les  ouvriers  de  Nurem- 


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^ 


—  456  ~ 

berg  se  disiÎDguaient  par  leur  adresse;  cependaDt,  oes  ina- 
chÎDes  informes ,  œastiives  «  imparfiiites ,  n'étaient  em- 
ployées que  pour  les  services  publics  ;  elles  étaient  placées 
dans  les  églises  où  elles  prenaient  beaucoup  de  place,  ou 
dans  des  monuments  qu'elles  occupaient  ezcluaivenient 

En  1484 ,  nous  trouvons  le  premier  exemple  d*borloge 
acquise  par  un  particulier  :  ce  dut  être  un  homme  d'étude , 
et  la  science  qui  demmda  la  première  des  indicaUons 
exactes  dut  être  Tastronomie.  Walterus  (  qui  ne  reganle 
pas  à  la  dépense  ,  dit  Bailly),  en  achète  une  des  ouvriers 
de  Nuremberg ,  en  proportions  réduites  ;  il  avertit  qu'elle 
est  bien  réglée  ,  et  donne  exactement  l'intervalle  d'un  midi 
à  l'autre. 

Après  lai,  le  landgrave  de  Hesse  eut  des  horloges.  Ticho- 
Brabé  en  avait  quatre  qui  marquaient  les  minutes  et  ks 
secondes;  mais  déjà  l'observateur  exact  saperçoit  que 
leur  marche  n'est  pas  assez  n^gulière  pour  indiquer  l'ia- 
stant  d'un  phénomène.  Il  les  croit  sujettes  à  varier  sous 
l'influence  de  la  température  et  des  vents,  même  en  les  te- 
nant enfermées  dans  des  étuves  où  la  clialeur  était  entre- 
nue  à  un  degré  uniforme.  Ceci  est  en  1560. 

«  Ticho-Brabé  avait  quatre  horloges,  dit  Lalande ,  qui 
j»  marquaient  les  minutes  et  les  secondes  ;  la  plus  grosse 
»  n'avait  que  trois  roues,  dont  la  première  et  la  plus 
»  grande,  avait  1,200  dents  et  trois  pieds  de  diamètre.! 

Voilà  qui  nous  explique  suflSsamment  l'irrégularité  de 
la  marche  des  horloges  de  ce  temps  ;  les  rouages  si  grands 
et  si  lourds  (celle-ci  était  peut-être  en  proportion  réduite) 
devaient  exiger  une  grande  force  motrice  (1,000  à  1^200 
livres  de  poids  dit  Julien  le  Roy),  cette  force  et  leur  propre 


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—  4B7  — 

poûk  causaient  à  leurs  pivots  et  à  leurs  engrenages;,  alors 
très*gffOssièreBneDt  esiécutés^  des  frottements  éoonnes;  or, 
les  frotteoMOts  sont  entre  les  résistances  mécaniques  les 
moins  uniformes;  ils  sont  défectueux  et  destructifis,  mauvais, 
même  dans  leurs  applications  mécaniques  très-rares;  les 
frottements  sont  encore  la  principale  cause  d^anomalie  dans 
nos  pièces  d'horlogerie  les  mieux  exicutées,  où,  cepen- 
dant, ils  sont  presque  aooullés  par  la  finesse^  la  trempe 
et  le  poli  des  pivots  roulant  dans  des  pierres. 

Nosanciens  confrères  n'avaient  point  de  puissants  moyens 
de  réglage ,  comme  sont  pour  nous  le  pendule  et  le  spi- 
ral; ils  n'avaient  aucun  principe  d'isoclironisme;  toutes 
les  fluctuations  de  la  force  motrice,  altérée  par  les  frotte- 
ments et  autres  causes^  se  produisaient  dans  la  marche, 
et  cauaaient  ces  variations  que  Ticho  Brahé  attribuait  à 
tort  aux  changements  da  l'atmosphère  et  de  la  tempéra- 
tare,  puisqu'elles  étaient  enfermées  dans  des  étuves  à 
Tabri  des  influences  extérieures. 

MoestHn  fut  le  premier  qui  se  servit  des  battements 
d'une  horloge  pour  mesurer  les  intervalles  célestes  ;  il  me- 
sura le  diamètre  du  soleil  en  1 577. 

Son  horloge  donnait  2,528  vibrations  à  l'heure;  146  se 
firent  entendre  pendant  le  passage  du  soleil  :  il  en  con- 
clut le  diamètre  de  34'  3" 

De  cette  époque ,  jusqu'à  celle  de  l'invention  du  pen- 
dule, de  nouveaux  faits  se  sont  produits  que  nous,  allons 
analyser  brièvenient,  désireux  que  nous  sonames  d'arriver 
à  la  grande  découverte  qui  fut  la  transformation  de  notre 
an. 

Les  essais  d«s  astroiH>me6|  qui  font  de  rhorlogerie  le 


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—  458  — 

{Nrincipal  agent  de  ragrandissement  de  leur  scienee, 
échauffent  le  zèle  des  artistes  ;  les  savants  voient  que  de 
la  perfection  de  leur  intrament  dépend  la  justesse  de  leurs 
observations,  et  paient  généreusement  ;  les  ouvriers  de  Nu- 
remberg augmentent  en  nombre  et  en  habileté  ;  les  ini- 
tiés se  répandent  en  Europe  et  sont  accueillis  avec  bvenr. 

L'invention  du  ressort  moteur  permet  de  bire  des 
horloges  plus  petites ,  pour  mettre  dans  les  appartements; 
on  bit  enfin  des  montres. 

Des  moines  inventent  le  réveil,  afin  de  n'avoir  plus 
besoin  de  se  lever  la  nuit  pour  consulter  les  étoiles  ;  ces 
réveils  étaient  fiuts  pour  sonner  autant  de  fois  dans  la 
nuit  qu'il  était  nécessaire,  et  aux  heures  indiquées. 

En  1544  ,  François  I.«'  établit  Thorlogerie  en  corps  de 
maîtrise  par  un  édit  qui  portait,  art.  X  :  «r  Nuls  de  qu'el- 
j»  qu'Etat  qu'ils  soient,  s'ils  ne  sontreçusniaitres,nepour- 
»  ront  faire  ni  faire  feire  horloges,  reveils-matin,  montres 
D  grosses  ni  menues ,  et  autres  ouvrages  dudit  métier  d'hor- 
j»  loger,  dedans  ladite  ville,  cité  et  banlieue  de  Paris,  sous 
»  peine  de  confiscation  desdits  ouvrages  et  d'amendes  ar- 
»  bitraires.  d 

Plusieurs  noms  illustres  se  trouvent  mêlés  à  l'histoire 
de  l'horlogerie  :  Gerbert ,  que  nous  avons  cité ,  devenu 
pape;  frère  Anthelme,  autrefois  empereur.  Tandis  que 
François  I."  instituait  la  maîtrise,  son  puissant  rival, 
Charles-Quint ,  se  retirait  au  couvent  de  Saint-Just,  appe- 
lait près  de  lui  Janellus  Turianius,  et  cherchait  dans 
l'horlogerie  un  aliment  à  son  activité,  une  ressource  contre 
les  ennuis  du  cloître;  mais^  comme  fait  dire  Casimir  De- 
lavigne  a  Péblo,  jeune  novice ,  dans  don  Juan  d'Autriche  : 


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—  459  — 

«  Vous  aurez  beau  pousser  les  aiguilles,  frère  Anthelme, 
le  temps  n'en  ira  pas  plus  vite.  »  Oui,  Messieurs,  cette 
étoffe  dont  la  vt>  est  faite ,  dont  certains  hommes  cher- 
chent à  utiliser  le  moindre  pli ,  est  pour  certains  autres 
d'une  longueur  insupportable.  Ils  cherchent  mille  artifices 
pour  arriver  plutôt  au  terme  d'une  journée  oisive.  Pourquoi 
la  Providence  n'a- 1- elle  pas  permis  que  l'homme  indolent 
et  ennuyé  pût  céder  une  part  de  ce  temps,  qui  lui  pèse,  à 
l'homme  studieux,  actif,  laborieux,  dont  les  jours  s'écou- 
lent toujours  trop  vite  ! 

Charles -Quint  et  son  élève  gémissaient  de  voir  leurs  hor 
loges,  dont  s'émerveillaient  les  pères,  varier  considérable- 
ment. Galilée  n'avait  pas  paru  :  il  n'était  pas  donné  à  un 
empereur  de  devancer  le  temps  et  de  trouver  ce  qui  devait 
être  l'œuvre  d'un  autre  génie;  les  grands  de  la  terre  doi- 
vent un  tribut  de  respect  à  la  science ,  car  ses  œuvres  dé- 
fient et  dépassent  souvent  leur  puissance. 

L'horloge  du  Rouffay ,  qui  a  si  longtemps  donné  l'heure 
à  notre  ville  et  vient  de  jeter  son  dernier  soupir,  date  de 
1661.  Une  décision  de  la  ville  fit  démolir  celle  établie  au 
port  Maillard.  Liors  de  l'installation  de  celle  du  Bouffay^ 
en  l'an  1661,  le  fondeur  Landouillet  qui  s'était  engagé  à 
foire  la  cloche  principale  d'un  certain  poids,  la  fit  plus 
légère.  II  eut ,  avec  Tautorité  municipale,  une  instance  qui 
dura  deux  ans.  Landouillet  fut  condamné  à  la  refondre ,  elle 
fut  donc  descendue ,  transportée  à  la  Cour  des  Comptes  et 
refondue  en  1663.  Elle  pèse  16,532  livres;  la  tour  fut 
achevée  ainsi  que  l'horloge ,  la  charpente  et  les  huit  ap- 
paux  dont  on  ajouta  six  aux  deux  qui  existaient  déjà, 
Tannée  suivante ,  H.  Macé  de  la  Roche ,  étant  maire. 


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1 


—  460  — 

Pendant  le  temps  où  elle  fut  démontée ,  la  ville  gagea 
Hiérosme  Barbereau ,  pour  frapper  les  heures  sur  la  clo- 
che qu'elle  a?ait  au  clocher  de  la  cathédrale ,  et  lui  pa^t 
273  livres  pour  ce  travail  d'utilité  publique. 

Voici  le  compte  des  dépenses  laites  pour  rborloge  du 
Bouflay  et  pour  la  docbe  qui  fut  fondue  trois  fois. 
La  maçonnerie  de  la  tourna  17  livres  10 

sous  la  toise. 2,150  liv. 

La  balustrade  en  fer,  pesant  11,702  livres 

à  4  sous  6  deniers 2,633 

Plomb,  dorure  et  peinture. 4,S00 

La  descente  de  la  cloche,  sa  rupture ,  son 
transport  à  la  Cour  des  Comptes  pour  être 
refondue ,  son  retour ,  Télévatioa  et  les  huit 

appaux  nouveaux 292 

Les  mouvements  et  poids  de  Tborioge.  .  •       1,900 

Le  métal  ajouté  à  la  cloche. 3,000 

Le  battant 60 

La  charpente 1,420 

La  restauration  de  la  charpente  qui  était 
restée   découverte    pendant  le  procès  avec 

Landouillet 400 

La  refonte  de  la  cloche 550 

16,905 

Les  rouages  de  l'horloge  du  Bouffay  avaient  été  bits 
à  une  époque  où  ce  mécanisme  était  ua  peu  vulgarisé; 
les  roues,  axes^  pignons  et  la  cage  étaient  en  fer;  un  fort 
cylindre  servait  à  la  sonnerie  des  quarts,  et  portait  des 
camçsqui^  passant  devant  une  raogéede  leviers  liés  aox 


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—  461  — 

marteaux  des  clochetons  qu'ils  devaient  frapper ,  les  éle- 
vaient en  passant ,  faisant  sonner  une  ganame  ascendante 
pour  le  premier  quart,  un  air  pour  la  demi-heure,  une 
gamme  descendante  au  troisième  quarts  enfin,  un  air 
avant  l'heure  ;  un  second  roui^e  se  mettait  en  mouvement 
et  frappait  Theure  sur  la  cloche  principale. 

Le  cylindre  qui  faisait  sonner  les  carillons  était  percé  de 
petits  trous  carrés  comme  un  canevas  dont  la  trame  eut  re- 
présenté les  notes,  sa  chaîne,  leur  valeur;  les  cames  pou- 
vaient être,  placées  indifféremment  danschaouQ  de  ces  petits 
trous,  et  leur  arrangement,  facile  à  calculer,  formait  les 
airs  qu'on  faisait  jouer. 

Le  régulateur  avait  d'abord  été  un  balancier ,  puis  on 
y  avait  substitué  un  pendule  avec  lëchappement  à  aiM^re , 
d'une  disposition  singulière  de  l'idée  de  celui  qui  avait  fait 
le  changement. 

Cette  antique  et  respectable  machine  qui  marchait  d'une 
manière  fort  irrégulière,  comme  chacun  a  pu  l'apprécier, 
était  d'une  exécution  si  grossière  que  des  grincements  af- 
freux se  faisaient  entendre  pendant  sa marobe^ 

Galilée  est  né  en  1564  ;  il  était  mathématicien  du  duc  de 
Florence.  Cet  homme  éminent,  qui  enrichit  la  science  de 
tant  et  de  si  précieuses  découvertes ,  porte  à  sa  tîouronne  de 
martyr  trois  glorieux  fleurons  dont  un  seul  suffirait  à  illus- 
trer la  vie  d'un  homme  :  l'invention  du  télescope  céleste , 
celle  du  pendule,  la  démonstration  du  véritable  mouve- 
ment de  la  terre. 

Poursuivi  par  le  fanatisme  ignorât,  enfermé  dans  les 
cachots  de  l'inquiâtion ,  il  dut  subir  une  réprimande  et 
nue  réfutation  de  la  sublime  vérité  qu'il  avait  découverte , 

32 


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--  462  — 

basée  sur  l'autorité  des  livres  saints.  Repris  pour  Tavoir 
encore  enseignée,  il  fut  condamné,  comme  relaps,  à  un 
emprisonnement  perpétuel  après  une  seconde  abjura- 
tion qui  lui  fut  dictée  en  ces  termes  :Moi,  Galilée,  dans 
la  70/  année  de  mon  âge,  à  genoux  devant  vos  éminences, 
ayant  devant  mes  yeux  TÉvangile  que  je  touche  de  mes 

mains J'abjure,  je  maudis  et  déteste  l'erreur  et  Fiiéré- 

sie  du  mouvement  de  la  terre.  Après  l'avoir  prononcée, 
frappant  du  pied  la  terre,  il  dit  encore  à  mi-voix  :  E  pwt 
simuove.  «  Oui ,  barbares^  qui  prétendez  protéger  Dieu, 
n  ce  globe  qui  nous  porte,  tourne  dans  l'espace,  nous  em- 
»  portant  tous  dans  sa  rotation  immense ,  et  toutes  vos 
i>  fureurs  ne  retarderont  pas  d'une  minute  son  mouvement 
»  et  celui  de  la  vérité  qui  se  fait  jour,  a 

Galilée  avait  pressenti  cette  loi  de  la  gravitation  que 
devait  expliquer  Newton  ;  il  considérait  la  pesanteur 
comme  une  loi  attachée  à  la  nature  des  corps  matériels, 
une  force  constante  qui  produisait  l'accélération  de  leur 
chute  libre.  Il  avait  fait  des  expériences  sur  la  chute  des 
corps  du  haut  de  la  tour  penchée  de  Pise;  ce  singulier 
monument ,  par  son  inclinaison  et  l'égale  distance  de  ses 
galeries,  servait  admirablement  ses  études,  mais  il  lai 
manquait  une  mesure  exacte  des  courts  instants.  La 
goutte  d'eau  des  clepsydres ,  le  battement  des  balanciers  des 
horloges  étaient  trop  irréguliers  pour  cet  observateur  mi- 
nutieux. 

Un  jour,  il  vit ,  dans  une  église ,  la  lampe  suspendue  se 
balancer  d'un  mouvement  qu'il  jugea  d*abord  égal  ;  il  fut 
saisi  de  ce  spectacle  qui  n'avait  jamais  été  observé ,  quel- 
que fréquent  qu'il  se  présentât  aux  regards  des  hommes. 


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-r-  463  — 

Il  fit  des  expériences  et  constata  Tisocbronisnie  desoscil-* 
lations  des  corps  suspendus.  Il  apprit  que  les  pendules  de 
ffUme  longueur  font  des  vibrations  d'égale  duriez  et  que 
les  vibrations  des  pendules  inégaux  sont  en  raison  directe 
du  carré  de  leur  longueur.  Il  proposa  donc  le  moyen  de 
mesurer  la  hauteur  de  la  voûte  des  églises.  Il  imprima 
aussi  un  petit  Traité  du  pendule  simple.  (Paris,   1639.) 

Il  y  indique  :  Qu'un  poids,  nais  dans  un  filet,  peut  de* 
venir  une  horloge',  qui,  suivant  la  longueur  qu*on  lui  donne, 
fait  un  certain  nombre  de  vibrations  dans  un  temps  donné. 
II  donne  le  moyen  de  le  faire  aller  plus  ou  moins  vite.  Il 
le  met  en  usage  pour  la  connaissance  des  longitudes  et  les 
observations  des  éclipses;  pour  observer  la  vitesse  des  mou- 
vements perpendiculaires  ou  inclinés  ;  pour  les  problèmes 
de  la  chute  des  corps;  pour  la  médecine,  la  musique, 
la  chasse,  les  arpenteurs,  et ^  le  croirait-on?  les  prédica- 
teurs. 

N'est-il  pas  singulier  qu'il  ne  lait  pas  appliqué  aiAc 
liorloges?  Est-ce  oubli  ou  dédain? 
.  Bien  des  artistes  de  mérite  revendiquent  la  priorité  de  ce 
perfectionnement  de  notre  art;  parmi  les  plus  remarquables 
sont  :  Vincent  Galilée,  son  fils  ;  Justus  Borgen,  inventeur  du 
compas  de  proportion,  qui  entreprit  et  acheva  Ténormé 
travail  du  calcul  des  sinus  de  2  en  2  secondes:  TrefiDer,  hor- 
loger du  grand-duc  de  Toscane,  qui  dit  Tavoir  fait  sous  les 
yeux  de  Galilée  l}ii-même,  et  enfin,  Huyghens. 

Les  artistes,  dans  la  juste  répartition  des  éloges  qu'ils 
donnent  aux  inventeurs. qui  enrichissent  leur  idole ,^  réser- 
vent souvent  la  plus  forte  part  à  celui  qui  rend  une  inven- 
tion pratique  et  complète  ,.çt  oublient  celui  qui  vient  ensuite 


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—  464  — 

présenter  un  échantillon,  dont  il  avait  peut-être  lai-même 
ignoré  toutes  les  qualités;  ainsi ,  que  nous  importe  qu'un 
comte  Magalotti  affirme  avoir  tu  l'horloge  à  pendule  de  Tréf- 
iler, ou  que  Gaspard  Dones  ait  raconté  qu*on  voyait  h 
Prague,  au  temps  de  l'empereur  Rodolphe,  une  horloge  k 
pendule  deBirge  ou  Borgen ,  dont  Ticho  Brahé  s'était  servi? 
Huyghens ,  après  avoir  feit  plusieurs  de  ces  instruments,  les 
avoir  observés,  réglés,  fait  imprimer  la  description  de  ses 
essais  et  de  ses  réSuHats ,  et  nous  dotme  sa  belle  théorie  du 
centre  d'oscillations  et  de  l'isochronisme. 

Ebn-Sounis  avait,  dit-on,  employé,  au  X.*  siècle,  le 
pendule  à  la  mesure  des  temps  ;  plusieurs  auteurs ,  traduc- 
teurs des  ouvrages  d^stronoinie  arabe ,  lui  donnent  l'hon- 
neur die  cette  invention;  le  peu  d'accord  entre  eux,  le 
manque  de  description  de  mécanisme ,  la  difficulté  de 
consulter  des  livres  authentiques  pour  un  petit  nombre 
d'initiés,  nous  &it  accueillir  ces  renseignements  avec  une 
extrême  réserve,  et  ces  essais  n'ôtent  rien,  à  nos  yeux,  de 
la  gloire  de  Galilée.  Cette  remarque  même  ne  doit  pas 
nous  faire  oublier  les  grands  travaux  d'Ebn-Sounis  per- 
dus dans  l'ignorance  de  sa  nation. 

Le  pendule  fut  longtemps  à  atteindre  la  régularité  qu'on 
hti  a  donnée  et  qui  peut  s'augmenter  encore. 

Je  vais  donner  quelques  éclaircissements  sur  les  lois  qui 
le  régissent,  et  après  avoir  exposé  ces  fisiits  si  curieux 
et  si  utiles,  je  reprendrai  la  suite  de  l'histoire  des  hor- 
loges. 

Centre  d'oeefUaHm.  «—  Cette  théorie  se  lie  intimement 
à  ceHe  de  la  gravité  ;  la  vibration  d'un  pendule  indique  la 
gravité  des  lieux  où  il  est,  et  le  renveraetttefnt  de  la  formule 


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^  465  — 

iodique  la  durée  de$  oscillations  suivant  h  gravité  ;  c'est  à 
Taide  du  pendule  que  Borda,  l^  premier,  a  fait  connattre  exac- 
tement rintensité  delà  pesanteur.  {Fig.  1.)  Supposez  un 
point  matériel  A  suspendu  à  un  GI  sans  pesanteur  et  oscil- 
lant dans  le  vide;  ce  poipt  sera  le  centre  d*osciilation ,  sa 
distance  au  point  de  suspension  B  sera  la  longueur  du 
pendule  simple.  Suspendez  une  branche  de  métal  d'égale 
grosseur  dans  sa  longueur  :  elle  oscillera  comme  un  pen- 
dule, mais  sera  plus  longue  d'un  tiers  pour  une  égale  durée 
de  vibration.  Un  corps  sphérique  au  lenticulaire  suspendu 
n'aura  pas  son  centre  d'oscillation  au  centre  de  la  sphère  ou 
de  la  lentille^  mais  un  peu  au-dessus,  en  raison  de  la  longueur 
du  pendule ,  de  sa  grosseur,  du  poids  du  fil.  Un  poids  ajouté 
au  pendule  au-dessus  du  centre  d'oscillation, le  fait  avancer; 
au-dessous,  le  Eût  retarder  ;  au-dessus  du  centre  de  suspen- 
sion, il  fera  retarder  le  pendule  jusqu'à  ce  qu'il  le  rende 
d'équilibre,  ou  alors  il  s'arrêtera;  tous  les  pendules  que 
nous  employons  sont  donc  sensiblement  plus  longs  que  le 
calcul  du  pendule  simple  ne  le  ferait  supposer. 

Le  pendule,  suivant  la  loi  de  la  chute  des  corps,  voit 
augmenter  sa  vitesse  avec  la  gravité.  Il  acciâlère  ses  vibra- 
tions en  descendant  vers  le  centre  de  la  terre  et  approchant 
des  pâles;  il  retarde  quand  on  l'élève  ou  quand  on  le  tran- 
sporte vers  Téquateur;  un  pendule,  réglé  à  terre,  ne  Test 
plus  au  b^ut  d'une  tour  ou  d'une  montagne,  ni  au  fond 
d'une  mine. 

La  force  oeatrifuge  du  mo^yement  de  rotation  de  la 
tene  tend  à  fidre  retarder  le  pendule. 

Ce  ki%  impprtant  fut  deviné  par  l'Académie  Française  en 
corps;  il  fiit  résolu  qu'un  de  ses  membres  irait  en  faire 


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•^  466  ^ 

Tessai  ;  Richer  fut  désigné  pour  aller  à  Cayenne  ;  le  roi 
paya  les  frais  du  voyage.  II  trouva  qu*il  fallait  que  le  pen- 
dule à  seconde,  réglé  à  Paris,  fut  raccourci  de  2  lignes; 
son  horloge  retardait  de  2'  48"  par  jour,  et  cette  quantité 
fut  exactement  celle  qu'indiquait  le  calcul  pour  réquation 
de  ta  force  centrifuge  combinée  avec  le  renflement  da 
globe  sur  Téquateur. 

La  longueur  du  pendule  simple,  à  seconde,  sous  k 
latitude  de  Paris,  au  niveau  de  la  mer,  est  de  0,99390017; 
il  est  de  0,9935474  à  Bordeaux.  Un  pendule,  réglé  à 
Paris,  retarde  à  Bordeaux  de  18"  par  jour;  au  Spitzber]; 
le  pendule  est  de  996  :  il  avance  de  1*  34"  2*"  sur  sa 
marche  à  Paris  :  il  y  a  dans  les  termes  extrêmes ,  du  pôle 
à  réquateur,  3'  22"  de  différence  dans  la  marche. 

hochronisme. — Une  des  premières  observations  d*Huy- 
ghens ,  après  avoir  adapté  le  pendule  aux  horloges ,  fut  que 
Ui  vibrations  du  pendtde  n'étaient  isochrones  qu'ouiM 
qu*eUei  conservaient  une  égak  étendue,  et  qu'elles  retar- 
daient en  raison  du  sinus  de  Varc  qu'elles  parcouraient;  ce 
dé&ut  avait  échappé  à  Galilée  à  cause  du  peu  de  continuité 
de  ses  épreuves.  Pour  y  remédier  {pg.  2) ,  il  suspendit  le 
pei\dule  à  une  soie  a,  et  ajouta  à  sa  suspension  ane  sorte 
de  pince  6  b*  formée  de  deux  lames  de  cuivre  contre  les- 
quelles U  soie  s'appuyait  dans  ses  vibrations;  leur  courbe 
parabolique  avait  été  calculée  par  le  grand  géomètre,  de 
telle  sorte, qu'elles  ramenaient  les  vibrations  à  une  égale 
durée.  Ce  moyen  servit  longtemps,  puis  devint  inutile; 
Huyghens  s'était  servi  de  l'échappement  à  roue  de  ren- 
contre, le  seul  connu  alors;  un  autre,  plus  convenable, 
l'échappement  à  ancre,  fut  inventé  par  Clément  de  Tours, 
qui  le  fit  à  recul  et  perfectionné  par  Graham ,  qui  le  fit  à 


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—  467  — 

repos  ;  il  faisait  parcourir  de  plus  petits  arcs  au  pendule , 
et ,  alors ,  au  lieu  d'en  chercher  Tisochronisme ,  on  réduisit 
avec  son  parcours  ses  chances  de  variation  ;  on  est  arrivé 
ainsi  à  une  grande  précision  ;  mais  la  question  n'était  pas 
résolue.  On  fit  des  échappements  libres  qui  marchèrent 
moins  bien;  on  pourvut  les  trous  et  les  levées  de  pierres, 
et  ces  perfectionnements  donnaient  une  marche  moins 
bonne  que  quand  un  frottement  assez  intense  retenait  quel- 
que peu  les  écarts  du  balancier  ;  on  dut  reconnaître  alors 
qu'on  couvrait  un  défaut  par  un  autre,  laissant  quelque 
chose  au  hasard  qui,  parfois  encore,  humiliait  les  horlo- 
gers par  des  variations  incomprises. 

Il  était  donné  à  un  homme  qui  a  des  droits  éternels  à 
mon  respect  et  à  ma  reconnaissance,  à  mon  maître  d  ap- 
prentissage ,  mon  frère ,  de  résoudre  complètement  ce  pro- 
blème vainement  étudié  depuis  Galilée.  Il  avait  constaté 
que  le  pendule  ordinaire  variait  de  12"  en  vingt-quatre 
heures  avec  une  différence  de  2  °  dans  l'étendue  de  ses 
vibrations ,  et,  par  l'adjonction  au  pendule  principal  (Foy. 
fig.  4),  d'un  petit  pendule  D,  suspendu  par  une  lame  de 
ressort  placée  un  peu  au-dessous  du  point  de  suspension , 
calculé  d'après  des  règles  certaines,  soumis  aux  expérien- 
ces les  plus  précises ,  il  est  parvenu  à  ramener  le  pendule 
à  risochronisme  complet,  dans  sa  plus  grande  force  comme 
dans  ses  vibrations  les  plus  légères. 

Cet  objet,  admis  à  l'Exposition  dernière  où  il  a  figuré 
pour  la  première  fois,  sera-t-il  estimé  comme  il  le  mérite? 
Cf.  J'ai  la  gloire  de  n'être  compris  par  personne,  m'écrit-il, 
»  le  résultat  seul  me  donne  raison,  d  Puisse  cette  gloire , 
Messieurs,  de  pas  retomber  du  nom  de  l'homme  de  génie 


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1 


—  468  ~ 

modeste,  à  cdui  d'un  de  ces  chàrlttans,  frdions  de  rin- 
dustrie. 

Compensation.  —  La  perfection  donnée  à  l'boriogerîe  par 
l'échappement  nouveau,  ses  principes,  ses  dérivés,  avaient 
permis  aux  horlogers  de  reconnaître,  dans  les  horloges,  de 
iK>uvelle8  causes  de  variations  très-peu  sensibles  jasqa*a^ 
lors.  On  observa ,  entre  autre  chose,  que  te  dilatation  de  k 
branche  métallique  du  balancier  produit  environ  20**  par 
jour  de  Thiver  à  l'été;  de  0  •*  à  27  *  réaumur. 

Le  talent  s'était  réfugié  en  Angleterre.  Cette  nation  com- 
mençait à  sentir  Theureux  effet  de  la  liberté  qu'elle  avait 
su  retirer  de  ses  troubles  civils.  Les  querelles  de  ménages 
de  ses  rois,  les  troubles  de  religion  ne  versaient  phis  le 
sang  des  citoyens,  qu'avait  répandu  abondamment  les  grands 
événements  politiques.  Un  homme,  dont  le  nom  est  resté 
abhorré  dans  l'histoire,  avait  mis  de  l'ordre  dans  ses  finan- 
ces, ses  lois,  ses  forces.  La  guerre  avait  chassé  Tindustrie 
(fÂIiemagne,  l'intolérance  l'exila  de  France.  C'est  en  An- 
gleterre que  se  firent  les  principaux  progrès  de  ce  temps. 
Georges  Graham  fut  le  premier  qui  essaya  de  compenser  la 
dilatation  du  pendule,  en  plaçant,  dans  un  tube  de  fer,  du 
mercure  dont  la  chaleur  élevait  le  niveau  et  déplaçait  le 
centre  d'oscillation,  d'autant  que  l'allongement  du  tube  le 
frisait  descendre  ;  ce  moyen  était  incomplet.  Le  nième 
présenta  le  balancier  à  gril,  qui  fut  adopté  et  reste  encore 
comme  le  type. le  plus  parfait  de  la  compensation.  C'est 
par  la  différente  dilatation  linéah^e  de  deux  métaux,  l'acier 
et  le  cuivre,  que  l'on  corrige  l'allongement  de  la  tige  prm- 
cipale. 

La  dilatation  linéaire  de  l'acier  est  de.  0,00i079;  1/927. 


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f 


~  489  — 

La  dUaUtion  Unéaire  du  euhrce  est 
de 0»001889;  1/529. 

Leur  rapport  asi  environ  :  :  3  :  S. 

(Fig^  3.\ljà  tige  priacipale  en  acier  a,  an  lieu  de  sou- 
tenir direoteineni  la  lentille  G,  est  chevillée,  au  bas,  à  une 
traverse  Cj  qui  «Mitient  deux  branches  de  cuitre  qui  s*éiè* 
vent,  dans  h  hauteur  du  pendule,  parallèlement  à  la  pre- 
mière; une  seconde  traverse  d  reçoit  leur  extrémité 
supérieure,  et  soutient  deux  branches  d'acier  qui  descendent 
au-dessous  de  la  première  traverse,  en  soutenir  une  autre  ô 
qui  supporte  encore  deux  branches  de  cuivre,  lesquelles 
sont  goupillées  à  leur  extrémité  supérieure  à  une  dernière 
traverse  t;  celle-ci  supporta  les  deux  dernîèffes  branches 
d*aoier,  complément  du  système.  En  tout,  neuf  barres: 
cinq  d'acier,  quatre  de  cuivre;  la  barre  du  milieu  exceptée, 
chaque  jeu  est  couplé,  ce  qui  bit  trois  longueurs  d'acier  se 
dilatant  de  haut  en  has,  deux  de  cuivre  se  dilatant  de  bas 
en  haut.  Le  rapport  de  leur  dibtation  est  environ  de  3  à  5. 
La  lentille  attachée  à  la  dernière  traverse  o  serait  élevée  par 
l'effet  de  la  chaleur,  puisqu'il  y  aurait  excès  de  compensa- 
tion, si  l'appareil  occufNkit  la  longueur  du  balancier  ;  mais 
il  y  a  des  longueurs  perdues  et  une  disposition  qui  permet 
de  diokinuer  la  longueur  agissaote  du  dernier  couple,  de 
telle  sorte  qu'elle  demeure  à  la  même  hauteur,  malgré  l'in- 
fluence de  la  température. 

Bim  d'autres  systèmes  ont  été  essayés:  chaque  horloger 
a  son  compensateur,  plusieun  même,  où  Ton  peut  arriver  à 
bien  iiire  par  tant  de  moyens  différents,  que  leur  nombre 
est  considérable.  Les  principaux  systèmes  autour  desquels 
gravitent  toutes  les  modifieationa,  sont  :  le  compensateur 


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—  470  — 

à  gril,  celui  par  la  suspeusion,  celui  par  des  leviers  qui  élè- 
vent des  niasses  compensatrices,  par  des  lames  bi-roétaiii- 
ques,  qui  se  courbent  en  élevant  la  lentille,  et  enfin  par  des 
tiges  de  bois.  Cette  dernière  est  la  plus  simple:  le  bois 
n'est  pas  dilatable  par  la  chaleur,  mais  par  rhuroidité;  on 
enferme  la  tige  dans  un  étui  métallique  imperméable  à 
Fair  ;  la  lentille  est  attachée  au  bois. 

La  compensation  du  balancier  isochrone  de  mon  frère 
(Fig.  4),  ne  pouvant  être  exécutée  par  la  branche  principale 
sur  la  longueur,  se  fait  par  deux  lames  bi-métalliques  cir- 
culaires  g  g*  placées  près  de  la  lentille,  et  qui  supportent 
des  masses  h  h*  qu'elles  font  mouvoir  par  l'effet  de  la  cha- 
leur^ de  manière  à  compenser  la  dilation  du  pendule. 

De  la  suspension.  —  Pour  achever  d*expliquer  les  pro- 
priétés du  pendule,  il  me  reste  à  dire  comment  on  le  sus- 
pend. Il  doit  vibrer  en  toute  liberté,  pour  que  sa  vertu  ré- 
gulatrice soit  efficace;  d  abord,  il  fut  porté  par  des  pivots, 
comme  les  autres  mobiles,  puis,  comme  il  ne  devait  par- 
courir qu'une  partie  de  cercle,  on  fit  un  pivot  à  la  verge 
du  côté  opposé  à  lendroit  où  il  y  était  attaché,  età  la  place 
du  second  pivot  était  un  petit  couteau  en  acier  bien  trempé, 
oscillant  dans  une  gouttière,  aussi  bien  trempée  et  polie. 

La  cycloïde  d'Huyghens  fit  adopter  là  soie ,  on  continua 
de  remployer  quand  on  abandonna  la  cycloïde:  sa  disposi- 
tion ,  qui  est  représentée  fig.  5,  reste  encore  à  la  plupart  de 
nos  pendules  de  cheminées;  puis,  quand  on  fit  Téchappement 
à  ancre  et  qu'on  réforma  les  pendules,  la  soie  devint  trop 
fragile  pour  les  lentilles  pesantes  dont  on  les  pourvut;  on 
fit  alors,  tantôt  des  suspensions  à  couteau  {Fig.  7.),  tantôt 
on  attacha  le  pendule  à  une  double  hrnie  d'acier  {Fig.  6). 

Ce  dernier  moyen  est  à  présent  préféré  :  les  couteaux, 


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^'  A7i  ^ 

quelque  léger  que  soit  leur  frottement,  ereusent  la  gout> 
tière  et  s*y  engagent.  Bréguet  avait  fait  une  suspension  com- 
posée de  deux  pointes  en  acier,  oscillant  dans  des  cuvettes 
en  agaihe,  et  disait  à  Tun  de  ses  ouvriers,  son  élève,  son 
compagnon,  son  conseil  :  elle  fait  moins  de  résistance  que 
Tautre  (la  suspension  à  ressort).  C'est  vrai,  répondit  H. 
Merceron,  mais  cette  résistance  sera  moins  égale.  En  effet, 
la  marche  observée  prouva  le  fait. 

Une  invention  récente  de  M.  Brocot  a  fait  remplacer, 
dans  nos  pendules  de  cheminées ,  ta  soie  par  une  lame 
d'acier. 

L'importance  du  sujet  que  je  viens  d'étudier,  m'a  fait 
devancer  la  suite  chronologique  des  perfectionnements  suc- 
cessif des  horloges  ;  j'ai  cru  .ne  pouvoir  séparer  les  faits 
qui  s'y  rattachent;  j'ai^  d'ailleurs,  déblayé  d'autant  la  route 
que  je  vais  parcourir. 

ir  est  des  hommes  chez  qui  la  science  remplace  l'imagi- 
nation et  qui,  parce  qu'ils  n'inventent  pas,  disent  qu  il  n'est 
rien  de  nouveau  sous  le  soleil.  Parlez  de  l'électricité ,  ils 
montreront  l'expérience  du  morceau  d'ambre,  connu  des 
Grecs;  du  magnétisme,  les  hyéroglyphes  d'Egypte  le  repré- 
sentent; du  vaccin,  les  ruines  de  Thëbes  en  font  les  frais; 
la  vapeur,  c'est  une  éolipile;  le  pendule  est  attribué  aux 
Arabes  ;  peu  s'en  faut  qu'on  ait  trouvé  des  montres  dans 
les  cimetières  presque  diluviens  dont  on  retire  les  momies. 
Quand  le  ressort  fut  inventé,  on  trouva  dans  Vitruve  un 
mot  :  anisocydej  désignant  un  instrument  dont  on  ignore 
Tusage,  on  en  voulut  conclure  qu'il  était  connu  des  Romains. 
Un  de  nos  auteurs  fait  la  remarque  que  ce  mot,  qui  signifie 
cercles  inég<xux^  peut  aussi  bien  désigner  des  boucles  de 


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cheveux,  et  que  l'instrumeiit  qu'il  défiîgoe  poiurait  èleeun 
fer  à  friser. 

L'invention  du  ressort  moteur,  roulé  en  spirale  et  enfimné 
dans  un  barillet,  date  de  1550  ;  son  histoire  se  rattache  plutôt 
à  cellede  la  montre  qu'à  celle  des  horloges,  cependant  c'est 
ce  qui  fiicilita  la  diminution  de  volume  <fes  horloges,  qui  pé- 
nétrèrent alors  dans  les  appartements^  se  placèrent  sur  les 
cheminées,  et  prirent  sous  cette  nouvelle  forme  le  nom  de 
pendules. 

J'ai  dit  les  perfectionnements  qu'on  apportait  eo  An- 
gleterre à  cet  art  languissant,  dont  un  homme  de  génie, 
l'horloger  SuUy,  tenta  vainement  de  remuer  les  cendÉies. 
Ce  fut  Julien  Leroy  qui,  aidé  de  la  protection  royale,  par* 
vint  à  le  relever.  Il  changea  Ja  forme  et  les  dispositions  des 
horloges.  Leur  cage  était  posée  verticalement,  et  les  mobîks 
étages  entre  les  châssis  qui  soutenaient  leurs  pivots;  tout 
cela  était  en  &r,  partie  noire,  partie  limée  ou  adoucie,  et 
ressemblait  assezaux  tourne-broches  qui  décoraient  la  cuisine 
de  nos  pères;  d'ailleurs,  on  s'était  contenté  de  changer 
l'échappement  et  le  balancier,  et  pendant  la  stagnation  de 
cette  industrie,  peu  de  nouvelles  horloge^  avaient  été  laites. 

Julien  Le  Roy  posa  les  roues  sur  un  paraUélogranune 
rectangle,  placé  horizontalement,  et  employa  le  cuivre  écrouî 
pour  faire  les  roues.  Il  publia,  en  1741,  un  mémoire  très- 
curieux  sur  les  horloges  et  les  moyens  de  les  rendre  moins 
variables.  En  fois^nt  q^e  les  détentes  de  la  sonnerie  soient 
plus  faciles  à  lever,  il  réduisit  la  ftme  motrice  du  mouve- 
ment au  strict  qécessaire;  ainsi,  dit-U,  en  modifiant  le 
mouvement  de  l'horloge  du  Pabiis,  on  pourrait  n'anpbyer 
qu'un  poids  de  16  livrer  au  Ijeu  d'un  de  500,  et  l'on  rédui- 


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—  475  — 

railles  frottements  et  les  variatioDs,  l'usure  et  les  réparations 
dam  h  proportion  de  1  à  31. 

Quelc^ues  personnes  préfèrent  les  anciennes  pendufes  à  mou- 
vement earré,  dont  les  ressorts  vigoureux  leur  semblentcon- 
duireplus  sûrement  la  machine.  C'est  une  grave  erreur,  car 
leur  grande  force  motrice  est  un  défaut  qui  nuit  à  la  régu- 
larité de  leur  marche  et  une  preuve  de  la  grossièreté  de  leur 
exééution. 

MM.  Roussel  et  ThiôUt  ont  contribué,  pour  leur  part,  en 
son  temps  et  môme  avant  lui,  à  la  transformation  des  hor- 
loges. 

Les  horloges  ou  pendules  d'appartement  se  disaient  chez 
les  horlogers  de  Paris,  tme  à  une,  difficilement,  lentement; 
c'était  de  la  fabrication  en  détail;  at!icun  centre  de  produc- 
tions ;  de  là,  Yïianque  d'unité  dans  les  calibres  de  ce  temps;  les 
pendules^  placées  coAtre  le  mur,  aux  dessins  rocaille  et  rococo 
que  la  mode  recherchait  il  y  a  quelques  années,  étaient  de 
ce  temps  :  on  en  voit  qui  portent  encore  l'échappetnent  à 
roue  de  rencontre  âfvec  les  cycloîdes  dHuyghens.  La  fabri- 
cation des  bronzes  se  liai  celle  des  pendules,  s'établit  à  Paris,y 
prit  droit  de  cité  et  s'est  considérablement  développée  depuis. 
Quand  la  paix  et  Tempiredenos  lois  constitutionnelles  eurent 
donné  au  commerce  la  sécurité  dont  il  a  besoin  pour  faire 
œuvre  durable,  des  fabriques  demou  vements  de  pendules  ne 
tardèrent  pas  à  s'élever.  Douillon,  Japy,  Pons,  Tincenti  et 
d'autres,  dont  le  nom  m'échappe,  donnèrent  aux  ouvriers 
de  Paris  'des  mouvements  en  blanc,  c'est-à-dire  en  ébauche, 
et  de  nombreux  ateliers  finissaient  ces  mouvements,'^  les 
adaptaient  à  la  destination  que  leur  demandait  le  com- 
merce. 


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—  474  — 

On  fait,  en  Franche-Comté,  des  pendules  à  poids,  à  grand 
balancier,  qu'on  enferme  dans  ces  grandes  boîtes  de  sapin, 
donl  la  forme  na  pas  changé  depuis  un  siècle. 

Les  ouvriers  de  la  Forèt-Noire  nous  donnent  les  peo-» 
dules  de  bois,  horloges  du  pauvre,  et  ces  petits  cartels  à 
réveils,  modèles  premiers  de  nos  pendules  de  voyage. 

Londres  et  Liverpool  livrent  aussi  des  penduks,  mais  qui 
ne  peuvent  lutter  de  concurrence  avec  nos  produGtioos 
françaises,  pour  le  prix  ni  pour  la  qualité. 

Tant  que  1  horlogerie  fut  grossière,  on  régla  les  pendules 
sur  le  temps  moyen  ;  l'heure  officielle,  légale,  n'avait  pas 
d'antre  loi  que  Tombre  du  soleil. 

Les  horloges  étaient  réglées  jour  par  jour.  Dès  que  les 
instruments  devinrent  exacts,  ils  mesurèrent  des  intervalles 
égaux.  Pour  qui  ne  voulait  pas  déranger  constamment  Tai- 
guille  de  son  horloge  etavoir  recours  aux  tables  d*éqoatioii, 
il  fallut  des  horloges,  des  pendules,  des  montres  qui  corri- 
geassent les  variations  du  soleil.  Cette  question  exerça  le 
génie  des  horlogers  ;  le  père  Alexandre,  Passenaant,  Sully, 
Julien  Le  Roy,  puis  Lepaute,  Berthoud^  Breguet  inventèrent 
des  mécanismesfort  ingénieux  pour  Téquation.  Depuis  qu'une 
ordonnance  royale,  de  1824,  décida  que  les  horloges  pu- 
bliques seraient  réglées  au  temps  moyen,  ils  sont  devenus 
inutiles  et  je  ne  m'arrêterai  pas  à  décrire  ces  travaux,  au- 
jourd'hui presque  sans  objet. 

Après  avoir  décrit  le  mécanisme  et  les  améliorations 
successives  des  diverses  branches  dliorlogerie  à  pendule , 
il  me  reste  à  expliquer  Tétat  présent  de  chacune  d'elles  ; 
mais  avant,  jetons  un  coup  d'œil  en  arrière  pour  rassem* 
bler  les  matériaux  épars  de  la  première  partie. 


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—  475  — 

Une  horloge  apparaît  en  France  avec  le  roi  Charles- 
le-Sâge;  ce  prince,  dont  la  vie  fut  l'étude  de  Féconomie  « 
qui  racheta ,  de  ses  épargnes ,  une  partie  de  la  France 
envahie  ,  dut  comprendre  le  prix  du  temps  ;  ses  actes  rap- 
pellent notre  épigraphe  et  cet  autre  aphorisme  de  Fran- 
klin :  Le  temps ,  c'est  de  Vargent.  Je  dois  à  M.  Livet,  notre 
collègue^  un  curieux  document  :  c'est  une  ordonnance 
réglant  lemploi  des  cloches  et  les  heures  auxquelles  on 
doit  les  sonner. 

«  Le  pape  Savinien  ordena  que  on  sonast  les  cloches 
aux  XII  heures  du  jour  par  les  églises.  Et  ce,  a  ordoné  le  roi 
Charles,  premier  à  Paris,  les  cloches  qui  à  chascune  heure 
sonnent  par  poins,à  manière  d'orloges  ;  si  comme  il  apiert 
en  son  palais  et  aux  boys'  et  à  Saint-Pol.  Et  a  fait  venir 
ouvriers  d'estranges  païs,  à  grans  frès  pour  afaire ,  afin 
que  les  religieux  et  autres  gens  sachent  les  heures  et  aient 
propres  manières  et  devocion  de  jour  et  de  nuit  pour  Dieu 
servir.  Comment  que,  par  dei^ant,  on  sonnast  une  fois  à 
prime  et  deux  fois  à  tierce,  si  n'avait  on  mie  si  certaine  co- 
gnoissancedes  beurescomme  on  a,  et  peut*on  dire  d*icelui 
Charles  le  V.%  roi  de  France,  que  Sapiens  domincAitur 
astris;  car  luise  le  soleil  ou  non,  on  sait  toujours  les  heures 
sans  défaillir ,  par  icelles  cloches  a  trempées.  Et  devons 
savoir  qu'il  y  a  en  église  cinq  manières  de  cloches  c'est  as^ 
savoir  :  Esquelles ,  timbres,  noies  ou  noletes  et  cloches.  La 
cloche  sonne  en  l'église,  Vesquelle  en  refectouer  le  timbre 
au  cloistre ,  la  noie  au  chœur ,  la  nolette  en  l'orloge.  » 

Pourquoi  les  siècles  de  Léon  X,  des  Médicis^  de  la  gran- 
deur de  Venise  ne  nous  rapportent-ils  rien  de  notre  art? 
Est-ce  que   les  sciences  mécaniques  ont  été  dédaignées 


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—  476  — 

quand  les  Hidiel-Ange,  les  Raphaël  captaient  à  eax  et  à 
leur  école  TattenUon  de  leurs  cootemporaiDs  ? 

Nous  voyons  apparaître  les  montres  à  la  coar  efféminée 
de  Henri  HI  ;  ce  n*est  pas  encore  un  objet  utile  ;  ce  soat 
les  cenb  de  Nuremberg,  les  montres  émaillées  de  Venise. 
Puis ,  toute  trace  de  cet  art  disparaît  pendant  les  troubles 
civils;  il  se  montre  faible  et  grossier  sous  Louis  Xin;sous 
Louis  XIV,  la  France  et  l'Angleterre  renrichîssent  à 
Tenvi ,  et  ses  produits  se  répandent  dans  toutes  les  cla«es 
de  la  société;  or,  déjà,  on  distingue  parmi  ceux  qui  con- 
sultent llieure,  trois  sortes  de  personnes  :  les  oisife,  d*abord, 
qui  ne  regardent  que  TaiguiHe  des  heures  ;  puis  les  gens 
occupés,  qui  s'odressent  à  Taiguille  des  minutes  ;  les  ob- 
servateurs dont  l'oeil  ne  cherclie  que  celle  des  secondes. 
On  connaît  même  déjà  ceux  dont  les  yeux  suivent  con- 
stanHBcnt  la  course  des  trois  lûgaîUes,  qui  demandent  à 
notre  art  des  indications  nouvelles ,  des  effets  nouveaux , 
des  perfecttonnements  ,  des  inventions  ;  je  veux  parler  des 
amateurs  qui  font  le  tourment  et  parfois  la  fortune  des 
horlogers  ;  c  est  contre  Fun  d'eux  que  Boîleau  lançait  cette 
épigramme ,  qui ,  peut-être  par  prévention ,  me  semble 
peu  digne  de  l'auteur  : 

Sans  cesse  autour  d«  six  pendifles, 
De  deux  moatres ,  de  trois  cadrans , 
Lubin,  depuis  trcnte-qaalre  ans 
Occupe  SCS  soins  ridicuks  ; 
Mais  ,  k  cet  emploi ,  s'il  tous  plaft , 
A-t-il  acquis  quelque  science? 
Sans  doute ,  et  c'est  Iliomine  de  France 
.  Qui  sait  le  mieux  l'heure  qu'il  est. 

^  chute,  d'aiReurSy  est  iaiblCi  ainsi  que  le  flémontre 


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r 


—  477  — 

cet  essai  de  J.-B.  Rousseau ,  qui  tenta  de  r^re  l'éfM- 
gramme  plus  piquant  en  en  renversant  le  sens. 
Il  changea  ainsi  les  quatre  derniers  vers  : 

Mais  k  ce  métier  qai  hn  plaît , 
Loin  d'acquérir  quelque  science, 
C'est  peot-ètre  l'homme  de  France 
Qui  sait  le  moins  l'heure  qu'il  est. 

C'est  d'un  amateur  que  Bréguet  obtint  les  premières 
richesses  qui  lui  permirent  d'exécuter  et  de  populariser 
ses  beaux  travaux. 

Il  n'est  pas  pour  l'amateur  de  régulateur  assez  exact , 
de  montre  assez  réglée;  il  n'est  pas  de  main-d'œuvre 
assez  belle  ;  il  connaît  la  pureté  des  formes  et  la  finesse 
du  poli  aussi  bien  qu'aucun  artiste  ,  mais  il  n'est  pas  de 
prix  qui  l'effraie  quand  il  a  jugé  un  objet  digne  de  sa  con- 
voitise; je  ne  sais,  à  vrai  dire,  pourquoi  notre  critique  a 
jeté  le  ridicule  sur  l'amateur  d'horloges,  plutôt  que  sur 
celui  des  tableaux,  des  statues  ou  de  poésie. 

Horloges.  —  Revenons  à  l'état  présent  du  mécanisme 
des  horloges.  Leur  cage  est  encore  le  parallélogramme 
horizontal  de  Julien  Leroy;  celles  qui  sonnent  l'heure  seu- 
lement ont  deux  corps  de  rouage;  leur  compteur  est  un 
chaperon;  celles  qui  sonnent  les  quarts  ont  trois  corps 
de  rouage ,  un  chaperon  supplémentaire  compte  les  quarts; 
leur  échappement  est  à  ancre  ou  à  chevilles  ;  leur  pen- 
dule est  à  l'unité  de  longueur  et  marque  la  seconde. 
Bien  des  perfectionnements  partiels  y  ont  été  apportés  ; 
la  description  de  la  plupart  d'une  nature  trop  déliée  pour 
&ire  partie  d'un  exposé  général  d'horlogerie  serait  ici 
déplacée.  Je  signalerai  donc  les  plus  saillants.  Dans  l'exé- 

33 


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—  478  — 

cution,  on  continue  de  faire  la  cage  en  fer,  les  rones 
en  laiton,  les  pignons  en  acier,  leurs  pivots  trempés; 
les  pignons  sont  à  lanterne  ;  on  en  a  fait  dont  chaque 
fuseau  était  un  rouleau  mobile  qui  tournait  sous  la  pres- 
sion de  Tengrenage,  afin  d'en  rendre  le  frottement  plus 
doux  et  d'éviter  l'usure.  M.  Gourdin  présente  de  belles 
horloges  avec  les  pignons  pleins  en  acier  trempé ,  polis 
comme  ceux  des  montres. 

L'appareil  nommé  remontoir,  destiné  à  rendre  la  force 
motrice  constante  à  l'endroit  de  1  échappement,  a  été  in- 
venté par  MM.  Lepaute,  où  plutôt  l'appareil  déjà  connu, 
placé  par  eux ,  la  première  fois,  à  Thorloge  de  la  bourse 
de  Paris.  La  roue  moyenne,  celle  qui  conduit  le  pignon 
de  la  roue  d'échappement,  est  montée  sur  un  support  mo- 
bile qui  a  pour  centre  de  mouvement  celui  de  la  roue 
d'échappement ,  et  peut  tourner  autour  sans  perdre  son 
engrenage  ;  le  poids  de  ce  support  et  de  sa  roue ,  mo- 
difié par  des  contre-poids ,  devient  le  moteur  de  l'échap- 
pement, et  est  remonté,  après  une  courte  période,  par 
le  rouage  auquel  un  volant  sert  de  modérateur  et  d'ar- 
rêt. 

Ce  mécanisme  de  force  constante,  fut  appliqué  aux 
montres  ;  un  ressort  en  était  le  moteur  ;  mais  la  chaleur, 
en  dilatant  ce  ressort ,  en  &isait  varier  la  force  ;  tous  nos 
auteurs  y  ont  travaillé  et  ont  échoué  à  cet  écueil  ;  or , 
M.  Arago  déclara ,  d'après  l'autorité  de  Bréguet ,  qu'au- 
cune récompense  ne  serait  donnée ,  aux  expositions ,  aux 
horlogers  qui  s'attacheraient  à  cet  objet.  J'ai  cependant 
vu,  en  1844,  une  montre  dont  le  ressort  de  remontoir 
était  une  lame  bi-métallique,  qui  trouvait  dans  sa  con* 


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—  479  — 

struction  une  compensation  continuelle  à  ce  dé&ut,  et  cette 
construction  ingénieuse  ne  fut  pas  considérée  ;  encore  une 
injustice  des  grands  talents  qui  préjugent  les  découvertes 
futures. 

M.  Wagner  a  construit  des  horloges  dont  l'échappement 
donnait  Timpulsion  au  pendule  au  moyen  de  petits  poids 
soutenus  par  des  chaînes ,  et  qui  se  posaient  alternative- 
vent  sur  Tune  et  l'autre  extrémité  d'un  levier.  M.  Hirt , 
habitant  de  notre  ville,  a  fait  un  régulateur,  dont  Té- 
chappement  à  force  constante,  donne  l'impulsion  d'une 
manière  à  peu  près  analogue. 

Un  horloger  de  Strasbourg  a  imaginé  de  faire  mouvoir 
les  conduites  d'aiguilles  des  cadrans  placés  aux  diverses 
faces  d'un  monument  par  un  mouvement  alternatif  com- 
muniqué par  des  fils  de  fer  et  des  équerres  analogues  à 
ceux  des  sonnettes,  substituant  ainsi  un  appareil  très- 
léger  aux  lourdes  tiges  de  fer  aux  engrenages  angulaires 
qu'on  a  employé  pour  traverser  les  salles  et  se  répéter  aux 
angles  des  murs. 

Pendules  Comtoises.  —  Elles  sont  d'exécution  grossière 
et  d'un  prix  modique  :  elles  nous  sont  expédiées  tout 
emballées  dans  leur  enveloppe  formée  par  le  cadran  ,  le 
fond  et  les  portes  latérales  ;  leur  long  pendule  est  plié 
par  des  articulations  ;  leur  sonnerie  a  un  compteur  qui 
leur  est  particulier ,  qui  est ,  je  crois ,  d'invention  an- 
glaise, et  se  nomme  cramaillère.  Ce  système,  différent  des 
chaperons,  résume  avec  ce  dernier  les  deux  principes 
desquels  ont  été  formées  les  différentes  sonneries.  Là , 
deux  pièces  concourent  à  cette  fonction ,  le  limaçon  ,  la 
cramaillère  :  le  limaçon  est  porté  par  la  roue  d'heures; 


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—  480  — 

la  ligne  spirale  qui  forme  soa  contour  est  calculée  de 
telle  sorte,  que  son  point  le  plus  élevé  se  présente  sous 
le  bras  de  la  cramaillère  quand  Taiguille  marque  une 
heure,  son  point  le  plus  bas ,  quand  il  est  midi  ;  les  points 
intermédiaires  suivent  Féchelle  des  heures.  Quand  l'heure 
doit  sonner ,  la  détente  relevée  à  l'avance  par  la  roue  qui 
porte  l'aiguille  des  minutes,  rencontre  une  entaille  et  tombe 
subitement ,  déplaçant  une  seconde  détente  qui  arrêtait 
le  rouage  et  soutenait  la  cramaillère  ;  celle-ci  en  tombant 
rencontre  le  limaçon  qui  lui  présente  un  point  plus  ou  moins 
élevé  sur  lequel  elle  s'arrête  ayant  passé  autant  de  dents  que  le 
nombre  d'heures  que  le  rouage  doit  sonner;  le  rouage  déga- 
gé, court  alors  et  lève  le  marteau  qui  frappe  le  timbre;  ce- 
pendant ,  uixe  petite  came  enlève  la  cramaillère  d'une  dent, 
à  chaque  coup ,  jusqu'à  ce  qu'elle  soit  entièrement  relevée 
et  que  la  détente ,  reprenant  sa  place ,  arrête  le  rouage. 

Pendule  de  cheminée.  —  Les  pendules  de  cheminée 
sont  enfermées  dans  un  support  qui  porte  le  nom  gé- 
nérique de  cabinet ,  et  qui  représente  tantôt  une  borne  de 
bois  ou  de  marbre,  carrée  ou  galbée,  tantôt  un  petit  mo- 
nument assez  ridicule,  formé  de  quatre  colonnes  entre  les- 
quelles apparaît  un  cadran  et  se  meut  un  pendule.  Parfois, 
le  mouvement  est  destiné  à  être  accroché  près  d'un  mur, 
et  prend  le  nom  d'œil-de-bœuf ,  ou  de  tableau ,  suivant 
qu'il  est  de  forme  ronde  ou  carrée.  Parfois  encore,  c'est 
un  riche  sujet  de  bronze  ou  de  marbre ,  sculpté  avec  art, 
doré  ou  bronzé,  couvert  d'un  verre  qui  le  préserve  du  con- 
tact de  l'air,  ou  paré  d'une  dorure  moins  susceptible  d'al- 
tération, et  qui  se  présente  aux  regards  sans  cet  accessoire 


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-  481  ~ 

Le  goât  et  Tesprit  des  Français  ont  créé  un  art  dont 
les  produits  étonnent  par  leur  profusion  et  leur  diversité , 
une  industrie  qui  n'a  pas  de  rivale  au  monde;  depuis  Boulle 
jusqu'à  Otten ,  Denières  et  Ciodion ,  le  modelé  des  pen- 
dules passant  par  le  ciseau  de  /annest,  de  Vittoz  et  d'Otten , 
a  acquis  une  perfection  souvent  admirable.  Bien  des  artistes, 
illustres  dans  la  sculpture  et  la  plastique,  ont  donné  aux 
bronziers  des  statuettes  empreintes  de  leur  génie,  ont  em- 
belli nos  salons  de  ce  talent  qui  se  déploie  dans  les  parcs  des 
châteaux.  L'art  de  Vaucanson,  s'alliant  à  cette  plastique  en 
miniature ,  a  récréé  nos  yeux  par  des  mouvements  imitant 
ceux  des  êtres  animés  ;  des  musiques  mécaniques  ont  uni 
des  accords  à  leurs  gestes  cadencés;  enfin,  des  ressorts 
sonores  ont  remplacé,  dans  quelques  sonneries^  le 
bruit  du  timbre ,  par  leurs  vibrations  graves  et  harmo- 
nieuses. 

La  personne  ignorant  la  fabrication  et  qui  parcourrait 
DOS  salons  serait  tentée  de  s'écrier  comme  Napoléon , 
parlant  de  notre  pauvre  espèce  humaine  :  a  Pas  deux  en- 
veloppes qui  se  ressemblent ,  pas  un  intérieur  qui  diffère.  » 
En  effet,  si  les  enveloppes  sont  d'une  diversité  presque  in- 
finie, les  rouages  qu'elles  renferment  sont  tous  taillés  sur  le 
même  patron ,  exécutés  sur  le  même  calibre ,  et  les  légères 
différences  qui  sont  entre  eux,  datent  seulement  de  quel- 
ques années.  Je  vais  donc  vous  donner  la  description  d'un 
mouvement  de  pendule,  tel  qu'on  les  fait  aujourd'hui ,  et, 
la  comparant  avec  celle  des  premières  horloges,  que  j'ai 
donné  précédemment ,  vous  jugerez  des  progrès  de  notre 
art  ;  tenant  les  deux  bouts  de  cette  chaîne ,  vous  pourrez 
en  étudier  et  compter  les  anneaux. 


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~  482  — 

La  cage  est  formée  de  deux  platines  rondes ,  de  3  à  6 
pouces  de  diamètre  :  la  première  porte  quatre  piliers  sur 
lesquels  la  seconde  s'ajuste,  y  repose  et  est  arrêtée  par 
des  goupilles  passées  au  travers,  les  deux  rouages  sont 
enfermés  entre  elles  et  se  composent  ainsi.  Le  mouvement: 
d'un  barillet,  sorte  de  coffret  cylindrique  où  est  enfermé  le 
ressort,  long  ruban  d  acier  roulé  sur  lui-même;  le  barillet  est 
fermé  par  un  couvercle,  roule  libr<îment  sur  son  axe  qui 
le  traverse  et  porte  dans  sa  cavité  un  crochet  où  s'attache 
le  bout  du  ressort  ;  Tarbre  de  barillet  traverse  la  grande 
platine,  porte  le  rochet  d'encliquetage  sur  un  carré  qui 
vient  se  présenter  au  niveau  du  cadran  et  sert  à  monter  le 
ressort.  Le  barillet  est  armé  d'une  denture  qui  engrène  di- 
rectement le  pignon  de  la  première  roue  nommée  roue  de 
temps  ;  celle-ci  engrène  le  pignon  de  la  seconde  roue  ou 
grande  moyenne  qui  conduit  l'aiguille  de  minutes.  Les 
nombres  sont  calculés  de  telle  sorte  que  le  barillet  Caitun 
tour  pour  70  de  la  seconde  roue ,  le  développement  da 
ressort  étant  de  6  à  10  tours ,  la  pendule  peut  marcher 
20  jours  et  plus.  Je  n'ai  vu  que  très-rarement ,  et  à  des  pen- 
dules d'origine  anglaise,  employer  la  fusée  pour  régula- 
riser l'action  du  ressort,  la  propriété  régulatrice  du  pen- 
dule suffit  à  en  atténuer  les  effets. 

Sur  la  grande  tige  de  la  roue  du  centre  est  placée 
la  chaussée ,  roue  de  cuivre  qui  engrène  une  petite  roue 
de  même  diamètre  et  de  même  nombre ,  nonmiée  roue  de 
renvoi  ;  celle-ci  porte  un  pignon  qui  conduit  la  roue 
d'heures,  dont  le  nombre,  12  fois  plus  grand,  fait  que  sa 
révolution  ne  s'accomplit  qu'en  12  heures.  La  chaussée 
porte  l'aiguille  des  minutes ,  elle  est  ajustée  à  frottement 


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—  483  — 

sur  la  tige  qui  la  porte,  en  sorte  que,  quand  on  fait  tourner 
l'aiguille,  rajustement  cède,  et  pendant  la  marche  de  la 
pendule  il  suffit  à  vaincre  les  petites  résistances  des  poids 
de  l'aiguille  et  des  fonctions  de  détente. 

La  deuxième  roue  ou  grande  moyenne  engrène  le  pi- 
gnon de  la  troisième  roue  ou  petite  moyenne ,  celle-ci  mène 
la  roue  d  échappement  :  les  nombres  sont  calculés  de  ma- 
nière à  faire  faire  60  tours  par  heure  à  cette  dernière  roue. 

La  roue  d*échappement  reste  pleine  dans  Tébauche, 
sa  denture  n'est  pas  divisée.  Quand  le  mouvement  est 
choisi ,  Touvrier  mesure  qu'elle  est  la  plus  grande 
longueur  qu'on  puisse  donner  au  balancier;  cette  lon- 
gueur détermine  le  nombre  de  vibrations  qu'il  donnera 
dans  une  heure ,  et  par  conséquent  le  nombre  de  dents 
qu'on  donnera  à  la  roue  d'échappement.  Il  y  a,  dans  cha- 
que atelier,  un  petit  barème  calculé  pour  cet  usage;  on 
taille  alors  la  roue  d'échappement  et  Ton  fait  l'ancre,  petite 
pièce  d  acier  qui  reçoit  d'elle  le  mouvement  alternatif  qui 
communique  au  balancier;  celui-ci  est  attaché  soit  à  une 
soie ,  soit  à  la  chape  d  une  suspension  d'un  nouveau  genre, 
formée  d'une  mince  lame  d  acier;  il  est  formé  d'une  tige 
de  fer  portant  un  crochet  à  sa  partie  supérieure;  il  est  ter- 
miné par  une  masse  lenticulaire  plus  au  moins  lourde, 
suivant  le  genre  de  sa  suspension  et  l'étendue  des  arcs 
qu'il  doit  parcourir. 

La  sonnerie  est  mue  par  un  ressort  enfermé  dans  un 
barillet  semblable  en  tout  à  celui  du  mouvement;  la  pre- 
mière roue  est  nommée  roue  de  chaperon ,  parce  que  son 
pignon  porte  le  compteur;  cette  roue  mène  la  roue  de 
chevilles  qui  commande  à  la  roue  de  totaux;  les  nombres 


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—  484  — 

sont  calculés  de  manière  à  ce  que  cette  troiaiteie  roue 
fiisse  un  tour  pour  chaque  coup  à  sonner;  ses  révolutions 
sont  accordées  avec  celles  de  la  roue  de  chevilles  et  de  cfaa« 
peron  :  elle  porte  la  cheville  qui  arrête  le  rouage  sur  la  dé- 
tente ;  une  quatrième  roue  se  nonmie  roue  de  àtiti  >  porte 
une  cheville  qui  sert  à  cette  fonction  déjà  décrite^  ainsi 
que  celle  des  détentes  et  du  compteur.  La  roue  de  délai 
engrène  enfin  le  volant  ou  modérateur  du  rouage  formé  de 
deux  allés  ou  palettes  qui  trouvent,  dans  la  résistance  de  Tair, 
le  ralentissement  de  la  marche  du  rouage.  La  sonnerie  est 
dite  pour  marcher  plus  longtemps  que  le  mouvement  parce 
que,  quand  elle  s'arrête  la  première,  l'accord  entre  les  ai- 
guilles et  la  sonnerie  se  trouve  dérangé;  d'ailleurs  elle  est 
l'auxiliaire  du  mouvement,  son  esclave  presque,  et  doit 
être  toujours  à  sa  disposition. 

Deux  chevilles,  placées  sur  la  chaussée ,  élèvent  en  pas- 
sant et  deux  fois  par  heure  le  détentillon  qui  dégage  hi  dé- 
tente et  arrête  la  roue  de  délai  ;  quand  il  retombe ,  le  rouage 
part,  fonctionne.  Le  marteau,  formé  dune  tige  pivotant 
entre  les  deux  platines,  porte  une  came  engagée  dans  les 
chevilles  de  la  seconde  roue ,  qui  l'enlèvent  en  marchant; 
le  marteau ,  ajusté  sur  cette  tige  en  dehors  des  platines, 
frappe  le  timbre  qui  est  aussi  en  vue. 

Les  mouvements  de  pendule  sont  livrés  au  cetfimerce 
en  ébauche  par  les  fabriques  de  Pons^  de  Vincent!  et  de  Ja- 
py;  les  ouvriers  de  Paris  les  ajustent,  les  repassent ,  les 
polissent,  font  Téchappement ,  y  mettent  le  timbre,  k 
cadran,  les  aiguilles;  après  les  bronziers,  les  ébénistes, les 
albàtriers ,  les  doreurs,  les  bombeurs  de  verres,  qui  s'occn- 


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—  485  — 

pent  de  la  partie  matérielle,  les  dépendances  du  méca- 
nisme ,  les  cadrans ,  les  aiguilles,  les  plaques  d  ajustement , 
les  vis  même,  le  polissage  des  cuivres,  sont  autant  d'in- 
dustries différentes  qui  occupent  à  Pliris  un  grand  nombre 
d'ouvriers. 

Les  fiibri<|ues  de  mouvements  de  pendules  sont  établies 
à  la  manière  des  fabriques  de  montres  de  la  Suisse  dans  les 
campagnes  ;  celle  de  M.  Pons  est  aux  environs  de  Dieppe  ; 
écoutons  le  récit,  que  me  fait  un  de  mes  confrères,  d'un 
voyage  entrepris  pour  obtenir ,  de  M.  Pons ,  une  modifica- 
tion nouvelle  aux  dispositions  de  ses  mouvements  :  «  Après 
j»  une  course  pénible  dans  les  sables,  sous  un  soleil  qui 
»  me  rappelait  les  récits  de  la  campagne  d'Egypte ,  je  vois 
»  une  terre  plus  ferme,  quelques  arbres  rabougris,  un 
»  peud*berbe,  enfin,  une  chaumière.  »  (Tout  est  chau- 
mière pour  les  Parisiens  quand  ils  s'éloignent  des  villes.) 
ir  Je  demande  la  demeure  du  contre-maître  de  M.  Pons. 
—  Allez  dans  cette  direction,  me  dit-on  (il  n'y  avait  pas 
»  de  chemin) ,  et ,  après  avoir  passé  la  troisième  marre , 
ji  vous  verrez  sa  maison.  — J'allai,  je  vis  un  paysan  cou- 
a  vert  d'une  blouse,  coiffa  d'un  bonnet  de  coton ,  parlant 
a  un  lainage  à  peine  intelligible  au  premier  abord  ;  je  lui 
»  demande  le  contre-maître  :  c'était  lui  ;  je  lui  expliquai 
»  ce  que  je  désirais ,  je  trouvai  un  homme  intelligent  qui 
9  me  comprit  et  le  fit  exécuter  à  mon  entière  satisbc- 
tion.  D 

Depuis  ce  temps,  le  pays  s'est  peuplé,  le  village  s'est 
accru,  l'argent  qu'y  a  apporté  l'industrie  a  amélioré  la 
culture ,  assaini  les  maisçms,  distribué  à  propos  l'engrais 


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^  486  — 

aux  terres,  riostruction  au^  hommes,  et  en  a  (ait  ud  jar- 
din dans  les  dunes. 

M.  Pons  fit  admettre  ses  produits  aux  expositions  de 
l'industrie  française  ;  on  y  voyait  entassé  une  quantité  de 
monuments  de  pendules,  et,  quand  les  membres  du  jury 
d'examen  prenaient  au  hasard,  dans  cette  pyramide  de 
cuivre,  un  des  moments  qui  la  formaient,  on  y  voyait  des 
dentures  égales  et  bien  taillées ,  des  pignons  d'acier  dur  et 
bien  poli ,  et  chacun  de  ceux  livrés  par  M.  Pons  au  com- 
merce était  égal  en  qualité  à  cet  écliantillon. 

M.  Pons  a  modifié  la  sonnerie  des  pendules  de  chemi- 
née en  y  exécutant  la  sonnerie  à  râteau,  d*après  le  prin- 
cipe de  la  cramaillère.  L'ancien  mécanisme  est  sujet  à  mé- 
compte :  chacun  de  vous  a  pu  voir  sa  pendule  sonnant  une 
heure  difierente  de  celle  qu'elle  marquait^  car,  dès  qu'une 
circonstance  vient  déranger  l'accord ,  la  différence  continue 
d'exister  tant  qu'on  ne  vient  pas  la  rétablir.  La  sonnerie  de 
H.  Pons  n'a  pas  ce  défaut;  c'est  une  heureuse  combinai- 
son du  rouage  des  pendules  ordinaires  avec  la  cramail- 
1ère  des  Comtoises;  le  jeu  des  détentes  reste  le  même,  il 
a  conservé  la  fonction  du  délai;  par  ses  dispositions,  on 
peut  faire  avancer  ou  reculer  les  aiguilles  sans  rien  dé- 
ranger à  la  sonnerie. 

Il  a  été  décerné  à  M.  Pons  une  médaille  d'or. 

Les  artistes,  dans  leur  inquiète  recherche  des  moyens  de 
perfectionner  leur  art  et  d'étendre  son  domaine,  créent  par- 
fois des  besoins  pour  la  société.  L'empressement  ou  le  dé- 
dain du  public  démontre  alors  ce  que  l'invention  peut 
avoir  d'utile  ;  il  arrive  parfois  que  tel  instrument  auquel 


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—  487  — 

on  n'avait  jamais  pensé  devient  à  peine  produit,  un  objet 
indispensable. 

Les  pendules  de  voyage,  sans  être  d*une  haute  utilité, 
sont  le  sujet  d'une  industrie  importante  :  leur  origine  est 
peu  connue.  De  rares  échantillons  se  produisent  portant  le 
cachet  d'une  &brication  ancienne.  Depuis  une  vingtaine 
d'années,  il  en  a  été  fait  beaucoup  à  Paris.  M.  Berola  a 
entrepris  cet  objet  comme  une  spécialité.  Bien  des  ouvriers 
le  font  comme  objet  de  fantaisie.  Les  inventeurs  d'échap- 
pements nouveaux  les  essaient  à  des  pendules  de  voyage. 
MM.  Moser  frères  ont  porté  ce  produit  en  Asie  et  jusqu'aux 
confins  de  notre  continent.  L'utilité  des  pendules  de  voyage 
se  résume  ainsi  :  quand  une  famille  se  rend  à  un  châ- 
teau, à  une  ville  éloignée,  les  montres  ne  peuvent  en  tout 
point  remplacer  les  services  d'une  pendule;  on  peut  oublier 
de  les  monter  une  seule  fois,  et  on  peut  être  privé  de  Theure 
pendant  le  reste  de  la  route  et  à  son  arrivée.  C'est  un 
meuble  gracieux  qu'on  suspend  dans  la  voiture,  qu'on 
place  sur  la  cheminée  d'une  chambre  d'auberge ,  qui  orne 
celle  du  château.  La  pendule  de  voyage  doit  marcher  quinze 
jours  sans  s'arrêter  ;  elle  sonne  en  passant  et  à  volonté,  est 
à  réveil,  et  diffère  des  autres  en  ce  qu'elle  a  un  échappe- 
ment et  un  balancier  de  montre  circulaire  avec  un  spiral. 
Cette  construction  &it  qu'elle  n'est  pas  dérangée  par  le 
mouvement  de  la  voiture,  peut  être  placée  dans  n'importe 
quelle  position  ;  machine  mixte,  elle  résume  les  avantages 
des  deux  objets  de  la  nature  desquels  elle  participe  ;  sa 
forme  et  son  utilité,  toutes  de  caprice ,  font  qu'elle  se  prête 
à  des  indications  nombreuses;  leur  botte ,  ordinairement 
fermée  par  des  glaces,  permet  à  l'œil  de  suivre  et  d'étudier 
leur  mécanisme. 


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—  488  — 

Un  horloger  de  Paris  imagina  de  modifier  le  pendule 
en  faisant  un  balancier  circulaire  chargé  en  un  point  de 
sa  circonférence  :  ce  dé&ut  d'équilibre  le  fait  osciller;  son 
réglage  est  &cile«  Cette  disposition,  toute  gracieuse  et  très- 
ingénieuse,  n'avait  qu'un  début  :  une  marche  très-irréga- 
lière,  de  l'aveu  même  de  son  auteur. 

Quelques  horlogers  ont  pensé  faire  un  perfectionnement 
en  adoptant  un  balancier  de  montre  aux  pendules  de 
cheminée ,  pour  éviter  que  l'objet  ne  soit  dérangé  par  dé- 
but d'aplomb  ou  par  les  mouvements  qu'on  peut  lui  im- 
primer. Ils  ont  appliqué  à  l'objet  qui  doit  être  immobile 
la  faculté  de  pouvoir  être  balloté,  remplacé  le  régulateur 
simple  de  Galilée  par  le  régulateur  si  complexe  des  mon- 
tres ;  cette  belle  découverte  du  corps  isochrone  par  lai- 
mémo  a  bit  place,  pour  eux,  aux  causes  si  multiples  de 
variation  des  balanciers,  de  leurs  ressorts  réglants,  qui 
ne  donnent  de  beaux  résultats  dans  les  chronomètres  que 
par  des  efforts  de  génie,  d'aptitude  et  d'observation. 

Le  temps  a  toujours  bit  justice  de  cette  naïveté;  peut- 
être  d'autres  inventeurs,  ignorant  les  principes  de  l*hor- 
logerie  et  les  déceptions  de  leurs  devanciers,  viendront-ils 
encore  échouer  dans  cette  feusse  route. 

On  a  fait  des  pendules  et  des  horloges  en  substituant 
des  vis  aux  engrenages,  et  donnant  la  vitesse  nécessaire 
tout  en  supprimant  une  roue  intermédiaire  ;  comme  éco- 
nomie d'argent,  c'est  fort  peu  de  chose;  comme  diminu- 
tion de  frottement  dans  le  mécanisme ,  c'est  une  erreur; 
car  la  vis  fait  plus  de  frottement  qu'un  engrenage,  et  un 
frotlenoent  plus  défectueux.  Ces  essais  n'ont  pas  eu  de 
suite  de  la  part  de  leurs  auteurs,  et  n*ont  pas  été  imités. 


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—  489  — 

Si,  maintenant,  je  questionne  l'avenir,  lui  demandant 
ce  que  notre  art  peut  espérer  ou  craindre  du  temps,  je 
vois  une  révolution  imminente,  un  perfectionnement  de 
la  plus  haute  importance  qu'il  est  près  d'atteindre  dans  la 
marche  des  horloges  des  grandes  villes. 

Un  jour  j'étais  monté  sur  le  haut  de  l'église  de  Notre- 
Dame-de-Paris  ;  je  m'extasiais  devant  le  magnifique 
panorama  étalé  sous  mes  yeux  ;  je  supposais  les  progrès 
de  cette  riche  cité ,  son  agrandissement  successif  depuis 
Philippe- Auguste  jusqu'au  nouveau  mur  d'enceinte,  et  aux 
fortifications  élevées  par  Louis-Philippe  ;  je  pensais  à  Du- 
laure,  à  Victor  Hugo,  à  Ârago,  que  sais-je?  quand  un 
bruit  harmonieux  et  lointain  m'annonça  l'heure  de  midi  ; 
douze  coups  se  succédèrent  lentement ,  puis,  un  autre  son 
se  fit  entendre,  et  bientôt  encore  les  clochetons  d'une 
autre  horloge,  annonçant  les  quarts,  mêlent  leur  accord 
à  ce  bruit  ;  une  mélodie  étrange ,  formée  par  des  sons 
partant  de  tous  les  points  de  l'horizon ,  exécute  un  con- 
cert diffus,  au  milieu  duquel  l'horloge  de  la  basilique  com- 
mence à  bruire  sous  mes  pieds,  et  annonce  à  son  tour 
midi  :  des  coups  qui  semblent  sans  mesure  continuent  le 
carillon  où  toutes  les  cloches  de  la  ville  font  leur  partie  ; 
il  n'était  pas  fini ,  que  le  son  qui  avait  entonné  ce  chant 
bizarre  sonna  le  premier  quart  après  midi. 

£t  quoi  !  s'écria  tout*à-coup  près  de  moi  une  voix  gron- 
deuse, les  horloges  de  Paris  mettent  vingt  minutes  à  son- 
ner midi  I  Malgré  toute  mon  autorité ,  mes  exhortations 
n'ont  pu  réussir  à  les  faire  accorder  !  Messieurs  les  horlo- 
gers, qui  vous  prétendez  des  artistes  et  qui  feites  payer  si 
chèrement  vos  ouvrages,  le  tort  que  font  au  public  les  er- 


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^  490  — 

rements  et  les  divagations  de  vos  machines  m'indigne,  et 
j'y  cherche  vainement  un  remède. 

—  Monseigneur ,  lui  dis-je  en  m*inclinant,  j'avais  re- 
connu rhomme  chargé  de  veiller  à  la  ville,  et  dont  h  sol- 
licitude, sans  cesse  éveillée,  doit  couvrir  d*unsoin  pater- 
nel ses  intérêts  matériels.  Monseigneur,  je  ne  suis  qu*an 
simple  ouvrier  dans  lindustrie  que  vous  apostrophez  si  vi- 
vement ;  je n*ai  à  conduire  quune  seule  des  horloges  dont 
la  marche  excite  votre  colère,  et  l'administration  des  mes- 
sageries à  laquelle  elle  appartient  exige  qu'elle  soit  en 
avance  de  dix  minutes  sur  l'heure  réelle.  Plus  de  vingt 
horlogers  sont  chargés  de  la  conduite  et  de  Fentretien  des 
différentes  horloges  de  la  ville;  indépendamment  des  or- 
dres qui  leur  sont  donnés,  chacun  d'eux  a  confiance  dans 
rheure  qu'il  observe  dans  son  cabinet,  et  y  règle  ses  hor- 
loges, sans  s'occuper  de  ses  confrères.  Il  résulte  de  ces 
intérêts  divers  la  différence  dont  vous  vous  plaignez,  et 
que  vous  seul  pouvez  réglementer.  Une  ordonnance  de  po- 
lice ferait  plus  que  vos  exhortations ,  la  crainte  d'une 
amende  plus  que  l'amour  du  bien  public;  vous  disposez  de 
la  voie  publique,  vous  pouvez  proscrire  une  enseigne  in- 
convenante ou  séditieuse  ;  exigez  que  tout  cadran  public 
marque  l'heure,  et  les  horloges  s'accorderont. 

—  Ah  f  de  l'arbitraire  ! 

—  Mais,  Monseigneur,  c'est,  certes,  un  abus  regret- 
table ,  que  cette  diversité  d'indication  dans  les  cadrans  de 
la  ville  ;  mais  j'ai  peine  à  comprendre  le  tort  que  vous 
supposez  qu'elle  feit  aux  intérêts  publics. 

—  Vous  ne  comprenez  pas  ! que  quand  une  personne 

va  d'un  quartier  dans  un  autre,  si  l'heure  indiquée  n'est 


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—  491   — 

pas  la  même,  elle  perdra  du  temps,  soit  qu'elle  devance, 
soit  qu'elle  dépasse  l'heure  à  laquelle  elle  était  attendue, 
et  en  fera  perdre  à  la  personne  qui  avait  affaire  à  elle  ;  les 
relations  commerciales  exigent  une  exactitude  extrême. 
Eh  bien  !  dans  cette  population  d'un  million  d'habitants,  le 
désaccord  de  nos  cadrans  fera  perdre  à  chacun  de  ceux  dont 
le  temps  a  une  valeur,  et  ceux-là  forment  plus  de  la  moitié  de 
la  population,  10  minutes  peut-être  chaque  fois  qu'un  dépla- 
cement l'obligera  à  avoir  recours  aux  aiguilles  des  hor- 
loges ;  et  cela  en  moyenne  quatre  fois  au  moins  par  jour. 
C'est  donc  24  millions  de  minutes,  400  mille  heures,  33 
mille  jours  dépensés  chaque  jour  en  pur  perte  :  comptez  la 
valeur  de  ce  temps,  en  moyenne,  à  10  fr.  par  jour,  cela 
dit  333  mille  francs  par  jour,  10  mille  par  mois,  120 
millions  par  an  ;  ajoutez  à  cela  les  voyages  manques,  les 
occasions  ou  le  retard  d'une  minute  peut  faire  perdre  plu- 
sieurs jours ,  il  est  ]eié  au  néant  par  votre  faute.  1  million 
1/2  de  jours  en  un  an,  333  ans  par  an,  de  la  vie  active, 
commerciale,  industrielle!  Horlogers,  réglez  mieux  vos 
machines ,  car  te  temps  est  l'étoffe  dont  la  vie  est  faite ,  et 
leur  irrégularité  dépense  en  un  an  peut-être  pour  150 
millions  de  francs  du  miel  qui  s'élabore  dans  cette  vaste  et 
opulente  ruche! 

—  Je  comprends  maintenant  ces  réflexions  que  seul 
vous  pouvez  faire  ;  mais  la  science  est  une  habile  fée.  Per- 
mettez-moi de  vous  décrire  un  de  ses  miracles  :  Si ,  prenant 
sa  baguette,  je  faisais  marcher  toutes  les  aiguilles  d'un 
même  pas,  frapper  toutes  les  cloches  d'un  même  coup, 
n'ajouteriez-vous  pas  une  grande  importance  à  cette  in- 
novation ? 


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—  492  — 

—  Sans  nul  doute. 

Je  démontrai  alors  comment  un  morceau  de  fer  doux 
peut  devenir  f  sous  l'action  d'un  courant  électrique,  un 
aimant  d'une  grande  puissance,  et  retomber  à  rioerlie 
complète  par  l'interruption  de  son  action;  comment  on 
fil  conducteur,  courant  sous  le  pavé  des  rues  peut  aller 
porter  ,d*un  monument  à  l'autre,  la  vie  qu'il  reçoit  de  saa 
point  de  départ  par  une  pile  de  Volta. 

Comment,  enfin,  un  régulateur,  placé  à  TObservatoire 
sous  la  surveillance  des  Arago  et  des  Leverrier ,  dont  la 
marche  ne  pourrait  dévier  d'une  seconde  sans  que  le  ciel 
et  la  terre  n'en  avertissent,  donnÎBrait  le  mouvement 
à  un  appareil  fort  simple  qui  servirait  à  interrompre 
et  rétablir^  de  minute  en  minute,  l'effet  électrique. 
Je  démontrai  alors  que  les  ainoants  artificiels,  attirante 
eux  un  fer  placé  à  portée  de  leur  action  et  les  laissant  re- 
tomber suivant  que  le  fluide  courrait  dans  les  hélices  du 
fil  conducteur  ou  cesserait  d'agir,  feraient  avancer,  par  os 
déclic ,  une  roue  de  60  dents,  d'une  division  à  chacun  de 
leur  mouvement;  cet  appareil,  placé  à  chaque  cadran, 
remplacerait  le  mécanisme  compliqué  de  l'horloge. 

—  C'est  fort  bien,  me  dit-il  alors,  mais  qu'est-ce  que 
cela  coûterait  ? 

Je  supposai  alors  le  chemin  que  parcourrait  à  travers  le 
réseau  des  rues  de  Paris  un  £1  de  cuivre  pur,  couvert  de 
soie  et  enfermé  dans  une  enveloppe  de  caoutchouc  ;  je  bii 
évaluai  le  poids  en  mètre  courant;  ma  pensée  posa  des 
chiffres,  des  chiffres,  que  je  résumai  en  une  somme  dont 
l'énoncé  fit  frémir  mon  auditeur. 

•—C'est  trop  cher,  me  dit-il. 


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—  495  — 

—  Vendez,  disTjeeti  reprenant  ^  les  ehé&d'œnlnre  des  Ro- 
bin, de$  Lepaute  et  des  Wagner  aux  petites  villes  des  pro- 
vinces et  de  l'étranger ,  et  lepr  prix  paiera  amplement 
notre  nouvelle  iostallation  et  les  frais  de  dépavage  qtfe  seul 
vous  i^vez  le  droit  d'ordonner;  comparez  ensuite  cette 
faible  somme  aux  miHîons  que  vpus  avez  supposés  perdus 
par  notre  incurie  et.... 

Une  détonation  violente  se  fit  entendre;  un  mouve- 
ment inaccoutumé  troublait  la  ville;  des  hommes  qui  n'a- 
vaient pas  le  droit  de  remuer  les  pavés  des  rues  en  for- 
maient des  barricades  ;  une  autre  heure  sonnait ,  et  le  canon 
et  la  mousqueterie  en  étaient  les  timbres ,  l'heure  de  la 
chute  d'une  dynastie  ;  bientôt  une  nouvelle  administration 
était  chargée  de  mettre  en  harmonie  des  intérêts  bien  autre- 
ment importants  que  ceux  des  horloges.  Pourtant ,  à  l'ex- 
position dernière,  M.Wagner  exposa  un  système  complet 
qui  donna  l'heure  dans  toutes  les  salles  de  l'exposition , 
au  moyen  d'une  machine  unique  dont  le  mouvement  était 
porté  par  des  fils  conducteurs  d'électricité. 

Je  désire  présenter  à  l'administration  municipale  de 
notre  ville  un  projet  ayant  pour  but  de  mouvoir  par  ce 
moyen  nos  différentes  horloges;  de  placer  même  dans 
chaque  carrefour ,  chaque  centre  de  population  ,  des  ca- 
drans dépendant  de  la  conduite  principale. 

Notre  population  étant  à  peu  près  le  dixième  de  celle 
de  Paris ,  les  chiffres  que  j'ai  cités ,  divisés  par  dix,  peuvent 
servir  à  la  même  démonstration ,  et  les  arguments  subsi- 
ster dans  toute  leur  force. 

Au  moment  où  la  construction  d'une  ou  deux  horloges 
devient  nécessaire ,  les  fonds  qui  y  seraient  employés  ^er- 

34 


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—  494  — 

viraient,  avec  éconoraie^  à  cette  amélioration,  qui  devient 
utile  à  mesure  que  l'étendue  et  la  multiplicité  des  relaticms 
nous  rendent  le  temps  plus  précieux. 

Je  demanderai  à  la  Société  son  appui  pour  rot>tenîr,à 
ceux  de  ses  membres  qui  ont  fait  étude  des  effets  si  curieux 
de  galvanisme ,  conseil  pour  l'exécution. 


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Ldh  Charprruùr  Aa/Ues 


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ANNALES 


DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


PROCÈS-YERBAUX  DES  SÉANCES. 


Séance  du  7  août  1850. 

Le  procte-ferlNil  de  la  ptéeédcate  sétoce  est  lu  et 
adoplé. 

GorvespofidaiGê  : 

1.^  Une  lettre  de  M.  Serre,  qui  demande  à  éohaager 
son  iMre  de  menbre  résidant  efi  celui  de  correspondant. 
Aocordé, 

t5 


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—  496  — 

2.®  Précis  analytique  des  travaux  de  rAcadémie  des 
Sciences,  Belles-Lettres  et  Arts  de  Rouen,  année  1849. 

3.^  Bulletin  des  séances  de  la  Société  nationale  et  cen- 
trale d'agriculture,  janvier,  février,  mars  1850. 

4.°  Bulletin  trimestriel  de  la  Société  des  Sciences, 
Belles-Lettres  et  Arts  du  département  du  Var.  1850.  N.*' 
1  et  2.  ,       .     ,  - 

S.*"  Bulletin  de  rAtbétfé^duBetUTaisis,  !•«'  semestre 
de  1850. 

6.""  Aperçu  des  travaux  de  la  Société  des  Sciences  na- 
turelle! du  ctépartement  de  la  Gharante-Inférieur»,  daptis 
sa  fondation,  en  1836,  jusqu'en  1849,  par  H.  Sauvé, 
secrétaire. 

T.*"  Culture  des  bois  daos  le  royaume  Lombard-Vénitien, 
par  Filippo  Re,  traduit  de  l'italien,  par  M.  Phelippe- 
Beaulieu. 

8.''  Catalogue  des  animaux  de  la  race  chevaline  qui  se 
seront  vendus  par  adjudication  aux  enchères  publiques, 
à  l'Ecole  régionale  d'agriculture  de  Grand-Jouan  (Loire- 
Inférieure). 

9.''  La  pureté  du  Cœur.  —  Histoire  de  la  Rédemption. 
—  Deux  ouvrages,  par  Tabbé  Frédéric-Edouard  Chaasay. 

Sur  une  proposition  du  Comité  central,  il  est  décidé 
qu'une  invitation  sera  adressée  au  congrès  de  rAssociatioo 
Breuiniie,  siégeant  mite  année  à  Morbûi^ponr  l'engager 
à  choisir  Nantes  pour  le  lieu  de  sa  session  de  1851»  el  loi 
offrir  le  local  de  la  Société  pour  les  séances  4e  la  «eation 
d'Affebéologia. 

M.  Varsanttttx  lit  un  ranK>rt  sur  un  ovvfigeidoILNeviNi- 
Derotrie,  intitulé:  ProbUmei d'AgrieuUure  et  d'Bc0mmk 


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rmatêé  Su  saifton  de  i*aliMéde  cette  pnMicatiofi ,  Ift  Société 
déeide  i|Mr  le   rapport  sera   renvoyé   an  comhé  des 


M.  BukMhel  piaeeee  î|Q'il  a  liM;  un'  traveit  sur  la  cana- 
lieafioo  htétàkt  dé  b  Loiret  «I  demande  qa'UM  eoimnrssion 
soit  cbargte  de  rexamiper. 

MH.  Cottin  de  MettefHIe,  Bocbef,  Wohky,  Htiette  et 
jRéDoiÉl  aéiit  désigaéa  pour  composer  cette  commission. 
'Jl.  Siuion  eontHiae  sa  leetore  sur  la  iKtérature  persane. 
Ml  CoIoidM  Ut  k  wiiie  de  ses  éludes  sur  le  communisme 
a«  XVL«  siècle*  . 

Après  otiie  lactwe,  M.  Aiuton ,  tout  en  louant  la  forme 
claire  et  précise  du  travail  de  H.  Colombel,  exprime  le 
regret  que)  sous  fetleeiafté  apparente,  se  cache  Tobscnrité 
du  foMis. 

L'aatear  n'a  pae  parlé  de  Pépoque  pharaonique,  les 
ÈffpâÊfai'étàkM  cmmnkM^ ,  les  Grecs  et  les  Romains  ne 
eoaalitBent  paa  to«të  TnMiquHé. 

M*  Fœloii  B'epproQve  pas  le  communisme,  fl  lé  trouve 
Aande  et  iÉyanitMe  à  dtecnter;  mais  !lne  volt  pas  qu'on 
ail  dénoDtié  dbirMiént  que  le  christianisme  ne  lui  avait 
pas  feuraf  de  racineb  :  H  Ikut  ici  fiiire  une  distinction  entre 
les  écrits  des  Pères  et  le  texte  de  fÉcriture  Sainte ,  qui ,  lui, 
n'autorise  pas  le  communisme. 

H.  Foâtoii  ajottte  qu'il  ne  vbit  pas  de  solution  ressortant 
du  travail  qui  vient  d'être  lu. 

M.  Colombel  répond  que  la  communication  qu'il  vient 
de  fiiire,  n'est  qy*uo  pcéUmiaeire  à  l'étade  da  Wl^*  silcle; 
avant  d'arriver  à  cette  ipoqèen  il  dev^iétiidier  b  propriété 
sous  le  régime  monacal  et  féodal.  Pour  lui,  l'aatiquHé 


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toat  eniiëve  se  tésune  dans  les  Grées  et  les  Me 
jMurceque  eux  seuls  ont  Wasédes  Godes  de  kiîe,  ei  c'est 
au  point  de  vue  de  la  législation  qu'il  s'est  placé.  Im  4|MS- 
tion  de  rfigypbe  est  obscure ,  eUen'étaîfc  passoas  les  Pha- 
raons la  mèoie  qpiesous  Mébeioet-Ali;  le  Ui  allégué  par 
H.  Foulon  est  douteux  et  non  aoquts  à  b  acicDûe;  ici,  la 
certitude  historiqoe  était  nécesasite» 

Les  Pères  de  rÉgUse  prêchaient  f  égaitté  »  raaia  ib  n'ont 
point  voulu  être  et  n'ont  point  été  des  bommesd'État;  leur 
but  était  plus  élevé.  Leurs  textes  ne  doivent  point  être  in- 
voqués à  l'appui  des  théories  sociales,  qu'ite  ne  voiibicnt 
point  fonder ,  conune  les  thitonciens  nodamea  en  ont 
l'intration. 

M.  Foulon  reproduit  les  argomenls  «pi'il  a  déjà  ans  en 
avant;  il  ajoute  que  le  communisme  a  besoin  d'être  d^ 
fini;  pour  lui,  c'est  le  monopole  du  Gouvernement  et 
l'usufruit  des  particuliers.  Il  but  ku  opposer  fiadividoalisnie 
avec  lequel  il  a  toujours  été  en  Intte.  La  question  serait  de 
faire  à  chacun  de  ces  deux  pvinoipea  «ne  juste  part.  Il 
voit  dans  notre  époque  beaucoup  de  coOiBiiioJame  déguaé , 
par  exemple,  sous  les  noms  de  fisc  et  de  ministère  de  fagri- 
culture;  mais  la  solution  actuelle  ne  lui  semhk  pas  bonne, 
elle  en  appelle  une  autre. 

Séance  extraordinaire  du  21  août  1850. 

PBÉSmBlICS  DB  H.  TÀimnuu 

Le  procès^erbal  de  la  précédente  séance  est  In  et 
adopté  après  quelques  rectiScations  réclamées  par  M, 
Foukm, 


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—  4f»  — 

La  Sodèlé  A  reço  : 

1.»  LacarteéoeailoadeNMltB^iMvM.  <leToltoiMre) 

2."*  Des  participes  passés,  réduits  à  une  seale  règle, 
excaylien ,  méthode  emièremeal  noiiveHa,  précédée 
de  k  théorie  duiwèe,  p«r  M.»»  EHta  Itorin; 

3/  Biographie  hretonùe,  7.*  li?rmOD,  par  H.  liovot  ; 

4**  Catalogue  des  légendes  des  mowiaiei  méravtiigien- 
nes ,  par  ordre  alphabéliqM  des  niss  de  liem ,  par  H. 
GiiiiienDt  fils  siné. 

M.  Goérattd  Hl  la  Ba  du  preÉûer  chapitae  du  travail  de 
M.  Bizeul,  intitulé  de  l'aocieiuie  eapitole  des  Namnèlea. 

IL  Vaadier  lîl  une  étude  sur  la  X¥.*  siècle ,  intitulée 
Alain  Cbarlier  et  son  opaque. 

M.  GaUaud  coanmanque  frfusîeurs  fcbles  de  sa  cpMpo-* 
skioa. 

.  Séance  du  4  ieptembre  18S(K 

PRÉSIDBRCB  DE  H.  GÉLT. 

Le  procès-Torbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté.    - 

Correspondance  : 

l.^"  Lettre  des  habhanls  de  PrélûHes^  relstîfement  à  la 
nécessité  de  travaux  à  &ire  pour  la  conservation  de  la 
source  d^eau  ferrugineuse  qui  se  trouve  dans  leur  pays.  Ren- 
voi à  la  section  de  médecine  ; 

2.*  Lettre  de  M.  Dubochet ,  envoi  de  pièces  relatives  à 
son  projet  de  canalisation  latérale  de  la  Loire.  Sur  la  de- 
mande de  Fauteur,  M.  Simonin  est  adjoint  aux  membres 
déjà  désignés  pour  prendre  connaissance  de  son  travail. 


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~  5M  — 

3."^  Dtscoors  prononcé  par  M.  ie  Pféfcl  ée  tk  Loire-in- 
fériama  à  l'auMiMe  dftkfleMiott^ CMsai  géaéntl,  le 
26MilitlMO; 

4.''  Ménm  4e  ftelfgie  iHiênalk  pmr  IL  Gai^Bt ,  juge- 
de-paix  du  «HMn  4ki  MonliMl  fSaiOl^  ; 

^.^  Leitm  de  M.  Lebergne,  D.*M.,  q«i  demande  i écfaaD- 
g»r  sa*  lika  de awnhre  danrebpoiMiiBl  en  oeW^mftn- 
bre  réaidasl*  Cette  danandb  eat,  af^èèè. 

6.®  Du  préjudice  causé  à  l'agriculure  el  ae  cwmiwiio 
i«r  lea  ehanganeiM  in«9odnil$  dtaa  lee  proeMès  du  nflE- 
nage  des  sucres  ^  par  M.  Bartis.   . 

M.  Vandierlii,  au  nom  d'une  boonrisaiony  vn  rapport 
approuvé  par  le  Comité  ceaUial  i  qn  eeneitt  mi  rajet 
d'iMeprepeiition  de  M;  G«Hi|ad,  aynt  pMrlml  de  rendre 
publiques  les  séances  de  la  Société.  Les  conclusions  du 
rapport  sont  adoptées. 

H.  Talbot  lit  un  rapport  sur  fes  travaux  de  la  section  des 
lettres. 

M.  Talbot  lit  un  travail  historique  sur  Jean  Bocold. 

Séance  exlraorâmaire  du  18  septembre  1850. 

inÉatBhnca  M  ■.  eiÉsôiia ,  vHx-FtttaBBÉT.' 

Le  procèsrverbal  de  la  précédente  séance  eat  lu  et 
adopté. 

Carve^ndaQce  : 

1."*  M*  Fontceeau  écrit  à  la  Société ,  ponur  demander 
qu'une  conunission  soit  chargée  d'examiner  sa  découverte 
relative  aux  armes  à  piercussioo» 


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—  901  — 

MM.  tfaniii  dé«Mi*UM,  CiUMdv  W4*y<  Mènmiét 

Dttê  letta  é»  M,  Gkmwt,  sAr  le  mèiw  objèl ,  m|  v«n^ 
voyée  à  la  commission  à  titre  de  renseignement 

M.  DrioHBt  lit  n  Mmil  fur  k  sahMlé  d»  Jogeatents 

aOi||IVlèlS* 

A  ^r^^  de  Mlle  laciQve ,  M.  FmIob  rsppèlto  tes  idées 
^il  a  émises  en  1843,  eiirlesM>giineiitsii*ouRnKerftt  idéeb 
qa'il  pensait  réaliser  au  moyen  d'une  aaseeitkbn  bieafiii*- 
eiolB.  il  pcpB  toiq^nri  que  toa  système  serait  lemiiillBur. 
U  est  opposé  an  système  des  prknës  ;  il  voît^  vret  peîM, 
riaterweéiÉi  et  râlât ,  sons  quelque  forme  qu'cUe  se 
pvodniai  dans  une  pareiUe  question.  N  conçoit  faction 
4'Kne  Société  conciliaBt  fkitérèl  du  ptodueteur  et  cekii  dn 


M.  DrtoUet  fint  remarquer  que  le  ayalètte  de  M.  Fealen 
ne^  slypliqas  qu'a  ttae^raclioa  de  la  popnlatien  ;  il  fidl^ 
attaqttsrleaelefi  grand,  sans  déplaper  ha  îttéaUs,  et 
qeOt  penr  y  aàwir^  k  système  des  primes  est  laiwitàMe. 

M.  Colombel  parle  danakaiâflie  aens  qœlf.Jkmiki; 
il  ajoute  que  si ,  comme  H.  Foulon ,  on  est  opposé  à  toute 
force  collective ,  se  produisant  sous  la  forme  de  pouvoir  pu- 
blic, il  devient  impossible  de  concilier  les  intérêts  privés, 
qui  ne  peuvent  se  concilier  d'eux-mêmes.  Les  lois  ne  peu- 
vent pas  produire  grandlcboee^  la  loi  nouvelle,  elle-même 
sera  impuissante,  parce  qu'on  songe,  avant  tout,  à  res- 
pecter la  propriété.  Pour  réparer  le  dommage  que  Ton 
ftit  par  foie  subir  aux  particuliers,  il  &ut  de  toute  néces- 
rite  que  la  fortune  publique  intervienne  sous  la  forme  du 
budget.  M.  Colombel  appuie  la  supériorité  du  système  des 


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~  6M  — 

piiaMBiuriuiiiitGOÉMide  tow^l'aoïélioralîènéekligiie 
des  ponts  qu'on  aobtenne  par  oeaiqreD;aiDsdoirte,loat 
n'eolpts  ChI  eDûove,  votas  le  réraket  obtenu  eii  déjà  très- 
satisfiiisani. 

IL  FoqIm  saoCiiot  que  ma  syalAMest  ewaptieilement 
pratique ,  et  il  n'admet  pas  que  les  hommes  actîb  d'aiiîoiir- 
d'btti  aoiettl  en  poseessionde  eelte  méiMqttaUlé.  Le^- 
tème  légal  a  éeboiié  m  AlkÉMgoe et  ailleun,  tandis  que 
le  sien  a  véossi  en  Angleterre. 

A  propos  de  cette  diacuasâon  j  il  s'en  engage  ime  antre 
sur  les  égoûts  et  les  fesses  d'aisanoea,  d'à*  il  résulte  que, 
si  d'un  oôté  on  a  raison  de  ne  pas  ^pandiar  daaa  le  innie 
le  contenu  des  fesses  d'aisances  qui  ofte  une  ptéGâense 
ressource  à  l'agrioultare,  de  l*autie  ona  en  tort  jusqu'ici  de 
ne  pas  apporter  assez  de  soin  à  la  construction  dea  fesses, 
dene  pas  prendre  toutes  las  précautions néoessairea  pour 
opérer  la  vidange  des  matières  qu'ailes  contiannant  Ces 
feits  aant  de  nature  à  appeler  tièa^aérionacment  l'aMaptioD 
de  rAttlarilé,  à  cause  dea  inconvénients  qui  en  panaent  ré- 
ran  point  de  vue  de  b  salubrité. 


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RAPPORT 

DB  M.  €IL  VARSAYAUX 

Mm  LU 

PROBLÈMES  D^AGRICULTURE 

ET  D'ÉCONOMIE  RURALE 

A  L'USAGE  DES  ÉCOLES  PRIMAIRES  RURALES, 
PAR  ■.  lllVlII-MIoniB. 


Mbssisubs, 

Gfai^  de  vous  rendre  oonyle  de  roavrage  iatiliilé  : 
m  ProMmes  iàgnonHmn  «I  d[  Économie  rmrok  à  fuHige 
•  iêi  écotm  frimoirm  r%rok$  »  par  M*  Neveii^DeroIrie.  » 
Nous  venoDS  ntiafidre  à  b  devende  q«e  k  Société  Acidé- 
siique  nom  a  fiûirboaaeiir  de  nous  adresier. 


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—  604  — 

Il  n'est  pas  dans  ses  usages  d'autoriser  des  rapports  sur 
les  ouvrages  publiés  par  ses  membres,  mais  elle  a  voulu  y 
déroger,  à  titre  d'exception,  dans  cette  circonstance,  attendu 
qu'il  s'agit  d'agriculture  et  d'instruction  primaire,  c'est-à- 
dire  des  premiers  et  des  plus  cbers  intérêts  de  la  société. 
L'état  de  souffrance  ^at  de  4étip$e  dans  lequel  se  trouve 
rindustrie  agricole  excite,  en  effets  la  sollicitude  publi- 
que. Rechercher  les  moyens  d'y  remédier  autant  que  pos- 
sible, secoAdér  las  acbéliOraiioud,  tes  peifeationnements 
qui  doivent  assurer  l'avenir  de  l'agriculture,  les  fidre  con- 
naître et  les  répandre  en  tout  lieu,  tel  est  le  but  que  pour- 
suivent avec  persévérance,  au  milieu  de  nos  commotions 
pqlitiqi^  ies  Connoes  ,  lea  Sooiélés  savantes  et  les 
hommes  qui  ont  à  cœur  la  prospérité  du  pays. 

Sous  ce  point  de  vue ,  il  est  à  propos,  ce  nous  semble,  de 
vous  entretéodr ,  panlant  quelques  instaats,  d'un  livre  que 
nous  croyons  destiné  à  rendre  des  services  agronomiques 
aux  écoles  ^rimairas  des  cffiHpagnes. 

L'auteur  s'est  proposé ,  comme  il  le  dit  lui-même  «  De 
»  fixer  l'attentiâttrics  4lliies  surtefiits  lasplus  intéressants 
»  de  l'économie  rurale  et  de  l'agriculture  perfectionnée, 
»  en  présentant  ces  fiiitsiKnis  la  forme  de  problèmes  dont 
D  la  solution ,  quoique  &cile ,  a  besoin  de  quelque  travail 
»  de  l'esprit.  » 

L'ouvrage  renferme  200  problêmes  que  les  instituteurs 
petfvMt  donner  It  rèsawire  aux  élèves  qui  ont  atteint  les 
ii0niieie  degrés  de  l'enseignement  primaire. 

•  Ces  {MbMmes  cempf^niiettt  rêoODomie  ttârale  dans  ses 
liriocipales  di»^iiciens ,  mmik  t 

«  Les  assoiements ,   les  clmMeatioM  des  terres  et 


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m  amendements,  les  engrais  «  les  instruments  aratoires  et 
»  constructions  rurales,  les  céréales  et  plantes  fourra- 
M  gères  ,  le  service  du  bétail ,  les  mesures  agraires  et  de 
»  capacité  I  les  plantajlioiu  et  exploitatioos  des  boia«  » 

Pour  vous  doDDier  uoe  idée  plus  exttcto  des  détaik  de 
TapplicatioD  pratique ,  oo^s  meiUms  sous  vos  yeux  quel- 
ques exemples  extraits  de  l'ouvragd  même,  en  vous  fusant 
observer  que  les  faits  qui  servent  à  coftiposer  les  que«U<>ns 
suivantes  ne  sont  pas  absolue,  invariables,  wm  subor*** 
donnés  aux  circoBstanoea  locales  et  aux  diverses  naliires 
de  sol  et  de  climat  : 

ÉCONOMIE  RURALE. 

PRODUIT  RST. 

fràbUme  n.*"  1. 

»  Un  cultivateur  explohe  une  feme  de  10  hectares  de 
»  terres  bboutables  et  3  hectoiet  (le  prairik^  Il  paie 

•  moneUem^t  SO  fr.  de  fermage  par  haetàre  'de  terre , 

•  ei  100  fr.  par  hettate  de  ptairie.  Il  paie  de  plus  les 
9  impte  qui  s'élèvent  an  dixième  du  revsna  et  les  répa- 
»  rations  locatives  estimées  50  fr.  par  an.  Il  doit ,  en 
a  ontw,  deux  journées  de  ciMrffoispar  aimée,  évaluées  6 

•  frane8la}ournée.  La  dépense  moyenne  annuelle  m  été 
»  de  i7l  fraoca  par  hectaore  pour  lea  terres  consistanl  en 
m  fitaris  de  cuhttDe,  de  vécohes,  d'entretien  des  harnais, 
»  natensiies,  et  de  34  frahos  par  bactare  df  prairies.  Ré- 
»  capitulant  au  beut  de  9  ans  la  valeur  de  tous  «ses  pro- 
a.  dftîte,  il  iromia qu'Os  s'élèvent  à  25,302  fr*  M  c  On 
»>deiMndb  ipiél  aélé  sM  praArit  net? 

»  Résultat  :  408  fr.  60  c. 


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—  506  — 

▲SSOLUOBtfT. 

ProblimiB  n.""  58. 

ff  Un  cultivateur  a  2i  têtes  de  bétail  pesant  ensemble 
»  6,350  kilogrammes.  On  demande  quelle  devra  être  Té- 
»  tendue  de  la  culture  fourragère  pour  les  nourrir  pendant 
»  122  jours,  à  raison  de  15  kilog.  750  grammes  par  jour 
»  pour  iOO  kilog.  de  poids  vivant  de  bétail,  sachant  que 
»  les  fourrages  donneront  2  coupes  et  que  chaque  coupe 
»  produira  en  moyenne  357  kilog.  892  grammes  par 
»  are. 

»  Solution  :  1  hectare  70  ares  46  centiares.  » 

KiieiÂis. 
Pràblime  n/"  95. 

«  Uo  cultivateur  a  famé  sa  fetre  en  y  dépoeant  240 
a  kitog.  d'engrais  par  are  ;  chaque  are  a  ptodoit  26  titras 
a  83  centilitres  de  froment.  On  demaBde  quelle  quantité 
a  d'engrab  et  quelle  snr&ce  de  temin  il  faudra  dans  les 
a  mêmes  circonstances  pour  produire  45  beetoUtrea  de 
a  froment. 

a  Solution.  SutCmc  :  i  hectare  67  ares  72  centiares; 
a  quantité  d'engrais  :  40,252  kilog.  800  grammes,  a 

Jusqu'à  ce  jour,  lea  questioni  d'arilfamétiqae  Ibimulécs 
dans  lés  écoles  primaires  ne  renfermaient  rien  4'agrioole. 
EHea  étaient  posées  en  dehors  de  tonte  notion  de  ce  genre, 
parce  que  les  inatitnteurs  en  général  n'avaient  pas  de  cou* 
naissances  sulBnntes  en  agronomie.  L'enseignéoMnit  élé- 
mentaire offrait  une  lacune  à  cet  égard  ;  il  fidUt  chercher 


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—  S07  — 

à  y  aqpptéir  ;  pmonne  ibniiepas,  on  n'iinproTtse  pas 
des  agronomes  da  jour  au  lendemain. 

Toiei  donc  un  onvnigct  qui  peut  senrir  de  spéoknen.  Il 
préaenlet  dans  un  cadre  restreint  et  d'une  manière  précise 
et  lucide ,  des  questions  d'arithmétique  dont  la  formule 
rémiit ,  en  même  temps,  des  fiiits  de  culture  intéressants. 
L'idée  est  ingénieuse  et  neuve,  ou,  du  moins,  c'est  la 
première  fois  que  l'on  publie  des  exemples  de  son  appli- 
cation dusique.  Nous  pensons  que  cette  méthode  doit 
aider  à  perfectionner  les  études  des  jeunes  agriculteurs. 

En  eSet,  l'habitude  de  ces  exercices  profitera  surtout  à 
ceux  qui,  sortis  des  écoles  primaires,  entreront  comme 
af  prentis-élè?es  dans  les  fermes-écoles.  C'est  ainsi  que  ces 
derniers  établissements,  destinés  à  former  des  ouvriers 
agricoles,  des  contre-maîtres,  des  métayers  et  des  petits 
fermiers,  atteindront  complètement  leur  but  et  produiront 
le  bien  qu'il  est  permis  d'en  attendre  en  France,  où,  par 
salle,  de  la  dîyision  des  pn^riétés,  la  grande  cidture  dispa- 
raît dd  jour  en  jour, 

.  Déjà  nous  sommes  à  même  de  vous  signaler  des  succès 
remarquables  dans  notre  département. 

M.  Guillard,  instituteur  à  la  Ghapelle-sur-Erdre,  a  obtenu, 
dans  son  école,  d'excellents  résultats  de  l'étude  des  pro- 
blèmes arithmétiques,  appliqués  à  l'agriculture;  M.  Heur- 
tevent,.  a|i  Gflvre,  a  suivi  la  même  méthode;  deux  de  ses 
élèves  sont  aujourd'hui  les  meilleurs  sujets  de  h  Ferme- 
École  de  Saint^Gildas. 

Enfin,  M.  Spal,  instituteur  à  Couëron,  après  avoir  fiiit , 
defioîs. ptaM^u»  années,  im  cours  élémentaire  aux  adul- 


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—  508  — 

469,  féémi  iffdmnbuimt  paMémm  ks  ^uealieM priaci- 
pales. 

Ceft  t3roÎ3  ioâitittUdiira  ûdA  été  pluneun  {obcoaroDMs  par 
le  comic0  oesAral,  pow  les  bewevx  résultats  de  laor  anaei- 
goasent  agric4>le  élémentaire, 

ki  9  nous  esprimerons  le  vœu  de  voir  adopter  généra- 
fenient  une  mesure  déjà  prise  avec  succès  eA  difiéieatcs 
localités  :  elle  consiste  à  }<Miidrè  ^pietques  pai^^elles  de  ter^ 
rain  à  la  maison  d'École  «  pour  donner  aux  enfrftts  des  Da- 
tions ppemières  et  le  goàt  du  jardinage, 

Ceaexwiples  ne  sauraient  trouver  trop  d'imitateurs ,  car 
oià  sait  queUo  puissante  influence  les  instituteurs  prinMÎres 
peuvent^  exercer  sur  la  destinée  des  fiis  des  cultivateurs»  par 
leurs  observations  et  leurs  conieib ,  en  un  mot ,  s'ils  aaveat 
remplir  eaUàveinent  les  devoirs  de  leurs  fonctiona. 

Là  doit  étpe  un  des  moyens  les  phissùis  à  naettre  ai 
usage  pour  modérer,  le  plus  posaiUe,  rémigratioû  des 
campagnes  vers  les  villes,  dans  des  teo^  tels  queles 
nôtres,  lorsque  les  états  de  la  Statistique  crimincUe  «  publiés 
récemment  par  T  Administration,  constatent,  pour  la  pé- 
riode des  vingt  dernières  années^  de  1826  à  1847 ,  uae 
notable  augo^entation  de  certains  crûpaes  et  délits  dafts  les 
grands  centres,  industriels,  et  surtout  lorsque  le  sein  de  la 
patrie  est  décàiré  par  nos  discordes  civiles. 

La  nécessité  de  contenir  ce  penchent  des  populatioas 
rurales,  nécessité  si  vivement  sentie  denosîours,  était  re- 
connue déjà,  même  à  la  fin  du  siècle  dernier»  pir  un  de 
nos  écrivains  les  plus  célèbres  qui,  des  bauteura  de  son 
génie  littéraire,  s'occupa  d'agriculture  pratique çpannet- 
tez-moi  de  le  rappeler. 


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■^  50»  — 

Aprte  avoir  fiiii  eséeuter  â'ÎBQporiantA  l«av<Ma  afrimbd 
à  Ferney  où ,  plu»  d'une  foi&i  il  vint  en  aide  à  de»  o«l* 
tWateiD»  ]iialbeiireuie«  Volfaife  tt'ft^-U  pas  dit,  daoa  iea 
devoiàrea  aonéaa  de  soa  eMsiaoee  :  «  Ji*ai  fiuit  ute  efaoao 
»  uUU  dans  ma  vi^,  >'aî  eidtiiré  la  terre  ;  cekiî  qui  eutlive 
»  un  champ^  esl  plua  mile  ^  son  pays  qae  toua  Ijaa  bfir- 
j»  bouilleurs  de  papier  du  monde.  » 

Si  Voltaire  existait  aujourd'hui  même,  en  présence  d'une 
situation  pleine  de  difficultés  et  d'incertitude,  instruit  par 
l'expérience  des  révolutions,  il  ne  manquerait  pas  de  re- 
commander au  bon  sens  public ,  les  écrits  consciencieux  ^ 
les  œuvres  de  mérite,  tout  ce  qui  diffère  des  systèmes 
chimériques  et  des  utopies  dont  il  a  iait,  en  s'exprimant 
ainsi  >  la  critique  amère  et  spirituelle. 

Il  n'est  pas,  en  effet,  sans  importance  pour  la  société, 
selon  nous,  d'accueillir  avec  sympathie,  d'encourager  et  de 
répandre  les  bons  ouvrages  élémentaires  destinés  à  l'en- 
seignement professionnel  des  campagnes. 

Il  importe  plus  que  jamais^  sous  l'empire  des  idées  et 
des  institutions  actuelles,  d'éclairer  moralement  les  jeunes 
générations  rurales  et  de  rattacher  à  leurs  villages ,  parce 
qu'ils  y  trouveront  à  l'avenir ,  grâce  aux  progrès  de  la  ci- 
vilisation sans  doute,  un  accroissement  de  ressources  et 
de  moyens  d'existence,  ces  travailleurs  des  champs  qui 
sont  à  la  fois  les  meilleurs  soldats  de  la  France  et  ses  ci- 
toyens les  plus  paisibles. 

En  résumé,  les  Problèmes  d'Agriculture  et  d'Économie 
ruraUe  à  Ttuage  des  écoles  primaires^  présentent  un  nou- 
veau témoignage  des  vues  éclairées  de  l'auteur  et  du  zèle 


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—  510  — 

laborien  qai  TMinM  depuis  loDglemps  m  Cifaur  des  popu- 
Ifttions  agriooles.  C'est  rapplioâtHNi  des  principes  posés 
dans  ses  VeiUéei  fUltfgtsoûei»  livre  dont  sept  édîtioDs  at- 
testent le  sQOcès  popolaire;  anssii  croy<MiSHM>us  rendre 
justice  à  cette  oeuvre  nouvelle  en  reecwnaissaDt  les  bonnes 
et  patriotiques  intentions  qui  l'ont  inspirée. 


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RAPPORT 
SUR  LE  PERFECTIONNEMENT 

DE  M.  FOWTENEAU 
APPLIQUÉ  AUX  ARMES  A  PERCUSSION. 


Messieubs, 

La  oonunissioii  que  vous  arez  chargée  de  pr^idre 
coDnaMsance  du  perfectionnement  apporté  par  M.  Fon- 
tenean  dans  les  armes  à  percussion,  s'est  réunie  pour  en 
eunloer  ks  pièces ,  leurs  fonctiœs ,  les  résultais  qu'on  en 
espère,  et  vous  rend  compte  par  me  voix  de  ses  observa- 
tions et  de  ses  expériences. 

L'înveiklion  de  M.  Fonteneau  a  pour  but  de  rendre  les 
aoddents  produitapar  les  armes  à  feu,  non  pas  impossi* 

36 


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—  512  — 

blés  (rétourderie  des  hommes  a  des  ressources  inouïes 
contre  leur  propre  sûreté) ,  mais  du  moins  beaucoup  plus 
rares. 

Au  temps  des  fusils  à  mèche,  cette  arme,  tout  au  plus 
dangereuse  pour  celui  qui  en  était  menacé,  ne  firappait 
point  son  possesseur;  quand  vinrent  les  batteries  à  silex, 
des  accidents  résultèrent  de  la  plus  grande  facilité  qu*ih 
offraient  à  l'embrasement  de  la  poudre;  et,dq>uis  que 
remploi  des  fusils  à  piston  est  devenu  général  pour  la  chaase 
et  pour  la  guerre,  les  accidents  se  sont  présentés  aussi  fré- 
quemment; chaque  année,  de  nombreux  meurtres  signa- 
lent la  saison  de  la  chasse  :  l'étonnante  fecilité  avec  laquelle 
un  léger  choc  détermine  la  combinaison  des  éléments  du 
fulminate  et  l'explosion  qui  en  résulte ,  &it  que  les  causes 
les  moins  prévues  et  les  plus  futiles  en  apparence ,  vien- 
nent apporter  la  mort  au  milieu  des  joies  et  des  distractions 
de  la  chasse.  En  effet,  un  obstacle  fait  choir  le  chasseur,  il 
franchit  un  fossé:  dans  les  secousses  qui  résultent  de  ces 
mouvements,  le  chien  peut  s'abattre;  qu'il  se  serve  de  son 
arme  poar  écarter  les  branches  d'un  buisson,  qu'il  la  retire 
d'entre  les  bancs  d'une  voiture,  le  chien  peut  être  élevé  et 
retomber  sur  la  capsule;  vous  retirez  votre  fusil  de  son 
étui ,  de  la  botte  où  vous  le  placez  en  mentant  à  cheval,  un 
mouvement  brusque  de  votre  monture,  le  cabot  d'un  véhi- 
cule ,  la  patte  d'un  chien ,  la  main  d'un  enfimt,  mille  causes 
qu'on  ne  saurait  prévoir  peuvent  fitire  fonctionner  la  batte- 
rie de  l'arme ,  et  c'est  la  poitrine  déchirée  que  le  malheu- 
reux déplore  l'imprudence  qui  lui  arrache  la  vie. 

Pour  prévenir  ces  malheurs,  les  armuriers  ont  diverse- 
ment modifié  leur  batterie  :  d'abord,  oefot  la  eron  d$  Hkreii 


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—  515  — 

de  Lspftge*  qui  arrête  le  cbirâ  au-deesw  de  la  capsule, 
quand  le  doigt  ne  pressait  pas  la  détente.  Puis  vint  le  fusil 
de  M*  Hossard  :  là,  le  chien  ne  peut  s'armer  sans  que  Ton 
sfpnie  sur  une  sorte  de  s&uê-garde  à  secret  ;  cette  dispo- 
flition  est  compliquée  dans  son  exécution ,  et ,  à  cause  de 
cela ,  peut^tre,  peu  employée.  M.  Coataleau  a  bit  un  cran 
àe  eûireîi  à  double  effet  qui  empêche  le  chien  de  firapper  la 
cespBxàe  et  de  s'armer  quand  le  doigt  ne  presse  pas  la  gâ- 
chette. Toutes  ces  invitions,  plus  ou  mcnns  ingénieuses, 
reodeot-elles  le  fiisil  inoffensif?  Non;  les  accidents  se  re- 
nouvellent, le  concours  des  petites  circonstances  nécessaires 
pour  mettre  en  jeu  les  ressorts  peut  se  produire  fortuite- 
ment dans  b  chute  de  l'arme,  par  reuchevètrement  des 
petites  branches  dans  la  batterie,  par  le  tâtonnement  de 
mains  imprudentes  ouinexpmmentées;  quelquefois,  ayant 
ôté  la  capsule  d'un  fusil  on  le  croit  sans  danger ,  il  retfe 
un  atome  de  poudre  fufaninaiotte, on  joue  avec ,  le  coup  part, 
et  tue! 

Un  de  nos  compatriotes ,  M.  de  Raymond ,  expire  il  y  a 
quelques  années  sous  le  coup  d'une  détonation  impré- 
vue. Quand  cbaoun  déplore  sa  perte ,  M.  Fonteneau ,  l'un 
de  ses  amis,  plus  péniblement  affecté  que  chacun  d'eux, 
puise  dans  ses  regrets  le  désir  de  prévenir  le  retour  de  ces 
terribles  événements,  et,  après  uoe  longue  élaboration, 
car  rien  n'est  si  difficile  que  les  choses  simples,  produit  le 
système  dont  je  vais  donner  k  description. 

Rien  n'est  changé  au  canon;  rien  n'est  changé  dans  la 
batterie;  la  cheminée  a  une  embase  plus  lasge ,  plus  résis- 
taate,  oi  n'est  pas  &ite  cette  disgracieuse  double  entaille 
destinée,  dans  les  cheminées  ordinai^,  à  servir  de  point 


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—  514  — 

d'i^ppai  aa  tourne-vis  ;  le  chien,  dont  lafdniieapeadiaDg&, 
vient  reposer  sur  cette  embese  sans  que  le  fond  du  dé 
porte  sur  k  cheminée  :  il  eiiste ,  au  conttaiie,  enlre  eux, 
une  distance  égale  à  l'épaisseur  du  cuivre  de  la  capsule;  il 
résuite  de  cette  disposition  toute  nouvelle,  que  la  partie  su- 
périeure de  la  cheminée  ne  sera  pas  dégradée  par  les 
chocs  répétés  du  tir,  sa  forme  ne  s'imprimera  pas  dans  le 
dé,  et  la  capeule  ne  sera  pas  découpée  comme  par  un  en- 
porte-pièce ,  laîssani  dans  la  lumière  une  rondelle  de  cuivre 
qui  rendra  le  tir  impossible  jusqu'à  ce  qu'elle  soit  eaqwlsse. 
La  capsule  se  trouvant  enfermée,  on  ne  sera  plus  expoaék 
dire  blessé  par  ses  éclats;  enin,  la  capsule  retirée,  l'anae 
ne  pourra  plus  partir,  car  bien  qu'il  restât  quelques  parcel- 
les de  fulminate,  elle  ne  serait  pas  touchée  par  le  chien; 
voilà  qui  rendra  le  tir  plus  sâr,  les  accidents  moins  fré- 
quents ,  les  chiens  et  les  cheminées  plus  durables. 

Le  fond  du  dé  est  formé  par  une  vb  qu'on  peot  des- 
serrer ou  retirer,  quand  on  ne  veut  pas  se  servir  de  l'anme; 
il  arrive  alojrs,  dans  ces  deux  cas,  que  le  chien  ne  pou- 
vant plus  toucher  la  capsule,  l'arme  devient  înoSoDsive  et 
raccident  impossible  ;  car ,  afin  qu'un  frottement  ne  pnisie 
desserrer  k  vis  ou  la  replacer  quand  elle  aura  été  déto»- 
née,  M.  Footeneau  a  imaginé  un  moyen  fort  ingémeax 
consistant  en  un  petit  ressort  qui  tient  k  place  de  Ton  des 
filets  de  la  vis,  et  produit  sur  les  parois  des  trous  uae 
pression  telle ,  que  l'action  de  k  volonté  est  nécessaire  pour 
la  kire  tourner. 

Cette  disposition,  qui  complète  l'inventinil  de  IL  Foa- 
t«aeau,  a  des  conséquences  d'une  immense  portée  taat 
pour  l'emploi  civil  que  pour  le  militaire.  Tout  d'abord, le 


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transport  de  l'âme  «  sechatei  le  meitiemeat,  sont.cftns 
danger  quand  la  via  eel  dàiownée.  Quand  Tanne  n'est  plus 
entre  les  mains  éû  chasseur  et  ^u'il  en  a  retiré  la  vis,  elle 
peut  être  abandonnée  aux  enfcnts  ;  ils  peuvent  iinpuné*- 
mcnt  renonvelnr  celle  affreuse  plaisaaierie  qui  a  tué  tant 
de  penonnes ,  mettre  quelqu'un  en  joue  et  Urer.  Un  niai- 
finteur  peut  s'emparer  de  votre  arme,  et,  la  vis  (née, 
il  ne  peo^  la  tourner  contre  vous,  tandis  que,  vous-même, 
possédant  la  clé  magique,  pouvez  la  rendre  morteUe  en 
un  instant. 

Cette  imneatiûtt  pout-^Ue,  do^  être,  même,  appliquée 
an  fittik  de  notre  armée.  En  temps  de  paix,  les  vis  des 
fasils,  repérées  et  munérotées,  seraient  gardées  par  les 
chefs.  Alors,  plus  de  ces  meurtres,  asses  mres  d'ailleurs, 
qne  eûsnmettent  parfais  des  hommes  avides  de  vengeance  ; 
plus  de  ces  suicides  par  leurs  armes  dont  Nantes  a  vu  un 
Inste  exemple.  Qu'june  émeute  éclate,  et  que  les  armes 
des  arsenaux  soient  pillées,  ks  Bmgasins  des  armuriers 
dévastés,  qu'une  compagnie  soit  désarmée,  on  ne  pourra 
tourner  oonire  dos  soldats  les  armes  ainsi  dérobées.  Bans 
Me  campagne,  un  désastre  £sât  craindre  que  les  armes 
tombent  dans  les  mains  ennemies  :  comme  Tartilleur  en- 
doee  les  canes»  qu'il  est  forcé  d'abandottuer,  le  soldat 
enciouera  son  fusil  en  retirant  la  vis ,  et  il  ne  sera  alors 
d'aucun  secours  i  celui  qui  TaDia  conquis. 

EkMgnona-fnons  de  ces  stippoaîtàons. pénibles,  ponr  ne 
pas  dire  impossibles,  en  songeant  que  mus  parions  de 
l'amna  française;  le  aeUat  nesera  plusoUigé  de  couvrir  la 
cheminée  de  son  fuaîl  de  raccessoire  ridicide  du  tampon  ; 
qsmA  à  l'exercîee  i  blanc^  on  commandera  le  feu«  un 


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—  616  — 

brait  sensible  k  l'oreille  du  commandaDt  remphoen  œ 
coup  mol  et  sourd;  l'État  ne  dépensera  plus  les  iOO,000 
francs  que  lui  coiktent  tnnuellemeat  les  réparations  dn 
chiens  et  des  cheminées  des  fusils. 

Messieurs,  quand  une  invention  présentée  à  la  Société 
est  empreinte  de  quelque  mérite,  tos  sympathies  lui  sont 
d'abord  acquises;  le  rapporteur  lui4Bèaie  a  recoeilfi  pov 
des  objets  que  le  succès  n*a  pas  couronnés ,  des  paroles 
d'une  affectueuse  bienveillance;  à  plus  forte  raison,  qoaad 
à  un  mérite  réel  se  joint  un  succès  éclatant,  quand  k 
succès  a  pour  objet  la  sûreté  de  la  vie  des  hommes,  notre 
Société  doit-elle  donner  ses  plus  efficaces  encouragemeato 
et  prodiguer  à  l'auteur  ses  plus  louangeuses  paroles.  Li 
commission ,  reconnaissant  le  mérite  réel  de  l'ioventioD  de 
M.  Fonteneau  et  le  sentiment  philanthropique  qui  l'a  con- 
duit, vous  propose  d'adresser  à  l'auteur  l'expression  de 
votre  adhésion  à  ses  travaux ,  de  le  remercier  de  sa  com- 
munication et  l'encourager  de  tout  votre  pouvoir  dans  la 
poursuite  d'une  invention  aussi  utile. 

La  commission  vous  demande  l'impression  de  ce  rap- 
port, et,  vous  rappelant  l'article  40  de  votre  Règlement, 
qui  dit  que  la  Société  Académique  décerne  des  médailles 
aux  artistes  et  aux  inventeurs  qui  lui  font  part  de  leurs 
œuvres,  quand  ces  oeuvres  Je  méritent,  vous  propose  de 
décerner  à  M.  Fonteneau  une  médaille  d'argent. 

La  commission ,  enfin ,  s'adressent  à  l'auteur ,  et  lui  rap- 
pelant que ,  quand  il  s'agit  de  préserver  la  vie  des  hommes, 
aucune  précaution  n'est  à  dédaigner,  émet  le  vœu  qu'il 
ajoute^  autant  qu'il  lui  sera  possible,  aux  armes  qui  re- 
cevront son  appareili  les  systèmes  de  sûreté  qui  tiennent 


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—  Ô17  — 


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ANNALES 


DE  LA.  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  SÉANCES. 


Séance  du  2  oetobfe  1850. 

pttÉsirancs  ni  m.  ottr. 

Le  prooès*verbal  de  la   précédente  séance   est^  hi  et 
adopté. 

La  Société  a  reçu  : 

1.0  Guide  du  Voyageur  aérien ,  sans  nom  d'auteur. 

37 


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—  520  — 

2.''  Rapport  à  rAcadémic  des  Inscriptions  et  Belles- 
Lettres,  au  nom  de  la  Commission  des  Antiquités  de 
France,  par  M.  Lenormant. 

S.""  Séance  publique  annuelle  de  la  Société  d'Agri- 
culture, Commerce,  Sciences  et  Arts  du  département  de 
la  Marne. 

4.^  Letlre  de  M.  Priou;  prospectus  de  son  ouvrage  in- 
titulé :  lUustralions  Brekmnes. 

5."  Lettre  de  M.  Wolski^  pour  demander  la  nomina- 
tion d'une  Commission  chargée  d  examiner  un  procédé 
de  foncement  de  puits  qu*il  a  imaginé  et  appliqué  avec 
succès  dans  le  bassin  houiller  de  fifaine-et-Loire. 

MM.  Cottin  de  Melviile,  Bertrand-Geslin ,  Malherbe, 
Callaud  et  Bobierre  sont  désignés  pour  composer  cette 
Commission. 

M.  le  Président  foit  connaître  h  la  Société  que  son  bureau 
a  été  invité  à  aller  visiter,  chez  M.  Lotz  (ils,  fondeur,  une 
machine  à  broyer  la  canne  à  sucre,  exécutée  daas 
ses  ateliers,  et  à  assister  à  l'essai  de  cette  machine. 

M.  Lotz  père ,  modeleur  en  bois ,  a,  de  même ,  invité  le 
bureau  de  la  Société  à  aller  voir  chez  lui  le  modèle  d'un 
pont  de  biais  destiné  à  la  gare  du  chemin  de  fer. 

Après  un  rapport  fait,  au  nom  d'une  Commission,  par 
M.  Vandier,  et  approuvé  par  le  Comité  central ,  relative- 
ment à  l'admission  des  étrangers  à  la  Société,  il  est 
décidé: 

i.«  Tout  étranger,  n'ayant  à  Nantes  qu'une  résidence 
passagère,  pourra  être  admis  temporairement  à  la  Société 
Académique ,  sous  le  titre  de  visiteur,  et  en  exemption  de 
tout  droit. 


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—  521  — 

La  présentation  motivée  sera  signée  de  trois  membres 
résidants. 

2."  Sur  le  vu  de  la  présentation  motivée,  le  Comité 
central,  s'il  juge  les  titres  suffisants ,  soumettra  la  demande 
à  la  Société ,  qui  statuera ,  au  scruliu  secret ,  dans  sa  plus 
prochaine  séance. 

3.^  Après  répreuve  du  scrutin,  l'étranger  admis  recevra 
du  Président  de  la  Société  une  carte  nominative  et  per- 
sonnelle»  qui  lui  accordera  la  libre  entrée  de  l'Académie 
pendant  trois  mois,   à  dater  du  jour  de  l'admission. 

4.*  Les  avantages  dont  jouissent  les  membres  de  la 
Société  seront  acquis  à  l'étranger  admis  comme  visiteur, 
sauf  le  droit  de  délibération. 

II  disposera,  mais  sans  déplacement,  des  livres  de  la 
bibliothèque. 

5.^  Chaque  membre  résidant  aura  la  faculté,  sous  s^i 
responsabilité  personnelle,  d'introduire  un  étranger  dnns 
l'Académie ,  mais  avec  l'obligation  de  l'accompagner 
pendant  la  visite  du  local  que  celui-ci  aura  désiré  faire. 

6.^  Aucun  étranger  ne  pourra  être  admis  à  une  séance 
de  la  Société  ou  da  l'une  de  ses  Sections,  s*il  n'est  pré- 
senté par  un  membre  résidant,  et  s'il  n'a  obtenu  l'au- 
torisation écrite  du  Président  de  la  séance. 

7."  Tous  les  cas  d'admission  d'étrangers  non  prévus  par 
les  dispositions  ci-dessus,  sont  laissés  à  l'appréciation  du 
bureau. 

M.  Callaud  lit^  au  nom  d'une  Commission ,  uû  rapport 
favorable  sur  le  perfectionnement  apporté  aux  armes  à 
percussion,  par  M.  Fontenau.  La  Société  décide ,   sur  la 


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—  522  — 

proposition  de  la  Cmnmission ,  qu'une  médaille  d'argent 
sera  décernée  à  M.  Fontenau,  et  que  le  rapport  sera  ren- 
voyé au  Comité  de  rédaction. 

Séance  exlraordinaire  du  16  octebre  1850. 

PRÉSm£RGE    DE     M.     GBÉGOIBE  ,     TICB-PRÉSIDBIIT. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté. 

m.  A.  Guéraud  lit  l'introduction  d'un  travail  intitulé  : 
Histoire  et  Bibliographie  de  la  Société  Acaiémi^ie  de  la 
Loire- Inférieure. 

M.  Simon  achève  la  lecture  de  ses  travaux  sur  la  Lit- 
térature persane. 

M.  Foulon  lit,  au  nom  de  M.  Bizeul,  l'analyse  du  ma- 
nuscrit de  Fournier,  sur  les  antiquités  de  Nantes. 

Séance  du  6  novembre  1850. 

P&àSIDERGE  B£  K.   GÉLY. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 


Correspondance  : 

1.^  Mémoire  sur  la  résurrection  de  rArchitecture  go* 
thique,  par  M.  le  baron  de  Wismes. 

2.°  Boulangerie  sociétaire;  ses  dangers,  par  M.  E. 
Merson. 

3.°  Rapport  de  la  Commission  des  Remèdes  secrets  de 


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—  525  — 

la  Société  de  Médecine ,  Chirurgie  el  Pharmacie  de  Tou- 
louse. 

4.''  Bb^mphie  hretaine,  8.«  livraison,  par  JK.  Levot. 

M.  le  Maire  de  Nantes  écrit  à  M.  le  Président,  pour  de- 
romder  TaTis  de  la  Société  Académique  sur  l'utilité  que 
pourrai!  «roir  la  publication  de  tout  ou  partie  du  ma* 
nuscrit  laissé  par  Fournier. 

Sur  UQ  raj^ort  lu  par  M.  Talbot,  au  nom  d'une  €oin«« 
naissioo,  M*  Chartes  liiiret,  né  à  Versailles,  le  t8  sep- 
tembre 1800,  proviseur  du  Lycée,  a  été  admis  au  nombre 
des  membres  réaîdants  de  la  Société* 

Lorsqu'au  itiois  de  novembre  1849,  a  dit  M.  Talbot^  une 
décision  ministérieUe  éleva  le  regrettable  H.  JuUien  à  la  di- 
gnité de  Recteur  de  l'Académie  de  Lyon,  les  esprits  des  fonc- 
tionnaireadu  Lycée,non  moins  que  ceux  des  familles,  furent 
sérieusemeot'  préoccupés  du  choix  que  ferait  le  Conseil  de 
riDstructton  publique  pour  remplacer  le  Proviseur  que 
nous  perdioné.  Un  moi  prononcé  par  M.  Théry,  recteur  de 
TAycadémiedeReiines,  en  installant  notre  nouveau  dief, 
vint  ootts  rasaorer  tous.  «  Quand  il  s'est  agi ,  dimt  M. 
Théry ,  de  remplacer  M.  Julliea ,  l'admiiiistration  supé- 
rieure n'a  pas  jeté  les  yeux  sur  l'un  des  plus  dignes,  mais 
sur  le  plus  digne  :  elle  a  choisi  M.  Huret.  » 

Cet  éloge  ^  prononcé  avec  l'accent  d'une  intime  convic- 
tion et  enipreînt  d'une  gravité  imposante  en  rateon  de  la 
situatioa  élevée  de  celui  qui  le  faisait,  n'avait  rien  d'exa* 
géré.  Aiqottrd'hui  >  Messieurs ,  que  nous  avons  ru  M.  Huret 
à  l'œuvre,  nous  comprenons  que  H.  Jullien  lui-même  n'eût 
pas  souhaité^  pour  kii  succéder,  un  fonctionnaire  plus  dé- 


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—  524  — 

voué  à  rintérèi  des  élèves  et  des  femilles,  un  admiiiislra- 
leur  plus  éclairé,  plus  affectueux,  plus  digne  de  la  confiance 
et  du  respect  de  tous  ceux  qui  entrent  en  relation  arec 
lui. 

11  arrive  souvent  que  riiorame  qui  se  livre  aax  travaux 
de  rintelligenoe  et  aux  études  du  cabinet  manque  des  ta- 
lents tout  spéciaux  que  réclame  la  gestion  d'un  grand  éta- 
blissement ou  d'une  grande  aiFaire.  Autre  chose  est  un 
écrivain ,  autre  chose  un  administrateur.  Lorsqu'on  se  sent 
entratné  vers  la  méditation  et  le  silence  de  la  pensée ,  vers 
ces  réflexions  calmes  et  sérieuses  où  vous  plonge  la  lecture 
d'un  poète ,  d'un  historien ,  d  un  philosophe,  il  est  difficile 
qu'on  tienne  contre^  ce  tumulte  incessant  de  l'esprit,  ces 
préoccupations  continuelles,  ces  anxiétés  de  chaque  mi- 
nute ,  auxquelles  vous  attachent  les  fonctions  administra- 
tives. Par  un  heureux  privilège  de  nature  et  de  caraetère, 
M«  Huret  a  sa  rapprocher  ces  éléments  en  discorde;  il 
a  fait  tourner  au  profit  de  l'administrateur  les  aimables 
qualités  de  Thonune  de  lettres  :  il  a  mis  au  service  do 
Proviseur,  ce  père  d'une  si  nombreuse  lamiUe,  les  habi* 
tudea  graves  et  solides  du  philosophe.  Nui  ne  l'aborde,  qui 
ne  soit  frappé  de  cet  harmonieux  mélange  d'amabilité  et 
de  réserve ,  d'élégance  dans  lé  langage  et  de  fermeté  dans 
le  jugement,  qui  lui  a  déjà  conquis  tant  d'estime  et  de 
si  vives  sympatiiies.  £n  l'entendant  parler  avec  précision  et 
avec  justesse  des  moindres  détails,  de  ces  mille  petits  bits 
qui  composent  la  vie  quotidienne  du  Lycée,  on  voit  qu'on 
a  en  iace  de  soi  un  homme  versé  dans  tous  les  secrets  de  la 
pratique,  mais  aussi  un  esprit  accoutumé  à  la  réflexion, 


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—  535  — 

à  .la  généralisation ,  à  ces  vues  d'ensemble  qui  caractérisent 
celui  sur  qui  repose  tout  le  soin  d'un  important  service  ; 
et  Ton  86  retire  alors  en  répétant  avec  Voltaire  :  ir  Le  bon 
sens  s'applique  à  tout.  » 

C'est  que  cotte  qualité  précieuse  est ,  en  effet ,  le  fond 
même  du  naturel  de  notre  candidat  ;  et  les  premières 
études,  vers  lesquelles  il  a  dirigé  son  intelligence,  ont  ré- 
pondu au  besoin  qu'il  avait  d'exercer  ce  don ,  trop  rare 
parmi  les  hommes ,  ou  bien  ont  contribué  puissamment' 
à  le  développer  en  lui. 

Parmi  les  différentes  écoles  de  philosophie  qu'a  enfcn- 
tées  le  doute  raisonné  de  Descartes ,  mêlé  à  l'esprit  d'a- 
nalyse de  Locke  ,  il  en  est  une  surtout  qui ,  dans  ces  der- 
niers temps ,  a  joui  d'un  succès  mérité  :  nous  voulons 
parier  de  l'école  écossaise.  Les  meilleurs  esprits  de  notre 
époque ,  les  Royer-Gollard ,  les  Cousin ,  les  Jouffroy  se 
sont  plu  à  faire  connaître  en  France  les  travaux  des 
Thomas  Reid ,  des  Fei^son  tout  remplis  d'excellentes 
théories,  d'observations  ingénieuses,  d'analyses  limpides 
et  cependant  profondes.  Tandis  que  la  philosophie  aile- 
nnande  se  perd  daos  les  conceptions  nuageuses  ,  les  Écos- 
sais^ se  fondant  sur  lexpérience  et  sur  le  raisonnement,  par- 
tent des  fsits  reconnus  vrais,  pour  en  tirer  des  inductions, 
et  n'imposent  point  à  l'esprit  humain  des  modaUlés  arbi- 
traires. Ib  reoonnaifBent  dans  l'entendement  certains  prin- 
cipes qui  ne  dérivent  pas  de  l'expérience  et  qui  sont  ir-* 
réductibles  aux  sens,  mais  qui  sont  inhérents  à  notre 
constitution  intellcctueUe. 

Guidés  par   le  célèbre  axiome  de  Leibnitx  :   NikU  est 


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—  526  - 

m  iateUeclu  qmn  prim  fuerit  m  imèêU;  extife  :  nim  ift^ 
inteUwlus^  iU  ramènent  à  des  praporiions  raisonnables 
cette  £imeuae  théorie  des  idées  Uioéesquî  a  fui  prodiguer 
tant  de  flot^  d'encre  et  de  paroles.. 

£n  un  mot,  ils  se  déclarent  les  clmmpîons  du  bon  sens 
coutrp  le  vague  des  systèmes  et  robecurité  des  rAveries 
philosophiques. 

La  tournure  d'esprit  de  If^  Uuret  le  conduisait,  par  une 
voie  toute  oaturelle ,  vers  les  œuvres  de  ces  sages  pen- 
seurs. Sa  première  publication  fut  donc  une  traduction  des 
Essais  philosophiques  (Phihtophical  Esêoys) ,  de  DagaU- 
Stewart ,  l'un  des  plus  illustres  disciples  de  Reid  et  de 
Ferguson.  11- a  âiauîie  pria  part  a  la  publication  d'éditions 
classiques,  d'auteurs  grecs  et  latins,  qu'il  a  édairées  de 
notes  judi<»euses  et  savantes,  jusqu'à-  ce  qu'enfin  ka  (Mic- 
tions administratives  aient  absorbé  tont  son  ten^ps,  et  ré- 
ckmé,  depuis  près  de  vingt  années,  les  heures  mêmes 
qu'il  consacrait  avec  tant  de  ancres  à  l'élude  des  langues 
anciennes  et  modernes. 

Nonuaé  d'abord  priaaipai  à  Dinan ,  puis  à  Perpignan 
où  s'est  écoulée  une  partie  de  sa  carrièna  laborieuse,  M. 
Huret ,  dont  la  modestie  n'a  pu  caeber  la  valeue  el  le  zèle 
au  Conseil  de  rioatruotion  publiii|tte>  a  été  suoeessivement 
nommé  proviaeur  à  Amiens,  où  il  n'a  fait  que  passer,  pour 
y  laisser  de  profonda  negMts>  puis  à  Nantes,  où  nnuasoBMies 
heureux  de  le  posséder. 

Dans  le  court aéjonr  qu'il  a  fait  parmi  noua,  il  a  su 
se  concilier,  vous  le  savez,  Messieurs,  la  faveur  éeiairée 
de  tous  ceux  qui  le  connaissent. 


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~  537  — 

L'aveûir ,  lyovs  en  sommes  convaincus  ,  montrera  mieux 
encore  ce  que  vaut  M^  Huret,  et  la  prospérité  du  beau  Lycée 
qu  il  ackniaîstre  sera  h  preuve  de  la  justesse  des  éloges 
accordés  k  son  directeur.    . 


M.  Bobierre.  lit  ,  au  nom  d'une  Commission  ,  un  rap- 
port sur  le  procédé  inventé  par  M.  Wolski ,  pour  foncer 
les  puits ,  à  travers^  les  couches  aquifères  inépuisables. 
Renvoyé  ap  Comité  de  rédaction. 

M.  Colombel  lit  un  travail  intitulé  :  Législation  des 
Valois. 

Séance  publique  du  24  novembre  1850. 

M.  Gély,  président,  entouré  des  principales  autorités 
de  la  ville  et  du  département ,  prend  place  au  bureau. 

A  une  heure,  IL  G^y  ouvre  Uséanoepar  un  discours 
dans  lequel  il  s'attache  à  démontrer  que  les  associations 
savantes  dmvont  détourner  leur  attention  des  spéculations 
hasardées ,  pour  fiiire  de  la  science  utile  et  sérieuse  ,  et 
marcher  dans  la  voie  du  véritable  progrès. 

M.  le  SeoréCaire  générai  rend  compte  des  traviaux  de 
la  Société  pendant  Tannée  1850. 

9f.  Tatbot,  seeré^îre  adjoint,  fait  connaître  les  résul- 
tats du  concours  de  1850.  Le  prix  proposé  pour  la  ques- 
tion de  la  médecine  des  pauvres  es^  accordé  à  M.  Verger, 
D.-M.  à  Châteaubriant  ;  MH.  Cazin,  médecin  à  Boulognc- 


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—  628  — 

sur-Mer;  Pîedvache  ,  médecin  de  i*bôpital  de  Dinàn;  Go- 
guel,  de  Sainte-Suianne  ,  près  de  Moatbéliard  (Doubs); 
Macé,  soldat-iufinnier  au  Val-de-GiAce,  étudiani  en  mé- 
decine de.seconde  année,  obtiennent  chacun,  dans  Tordre 
où  ik  sont  désignés,  une  mention  honorable  représentée 
par  une  médaille  de  bronze. 

La  Société  Académique  accorde  une  médaille  d'argent 
à  M.  Fontenau ,  pour  son  perfectionnement  des  armes 
à  percussion. 

M:  le  Président  fait  ensuite  connaître  les  questions  pro- 
posées pour  le  concours  de  1851  et  pour  celui  de  1852. 

€mwk€mm¥m  dm  1SM« 

Quelles  peuvent  être ,  pour  Nantes ,  les  conséquences  de 
rétablissement  du  bassin  à  flot  de  S^int-Nazaire  ? 

Indiquer  les  moyens  de  rendre  cet  établissement  le  plus 
profitable  possible  aux  intérêts  de  Nantes  et  de  son  com- 
merce. 

emntm'urm  de  ISftt. 

1."  Histoire  abrégée  de  la  Bretagne  «  pour  servir  à  ren- 
seignement élémentaire. 

2.^  Essai   d'une  bune  de  la  Bretagne. 

Une  médaille  d*or  de  300  fr.  sera  déeemée  à  Fauteur 
du  meilleur  mémoire  sur  chacune  de  ces  questions. 

Les  mémoires.devront  être  adressés  fircmeo  à  M*  Talbot, 
secrétaire  général  de  la  Société,  avant  le  15  juillet  1851 
pour  la  première  question ,  avant  le  15  juillet  1852  pour 
les  deux  autres. 


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—  529 


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—  B30  — 

Section  des  Lettres,  Sciences  et  Arts. 

MM.  De  Wishes. 
Vàndieb. 
SiHon. 

Section  des  Sciences  nalureUe». 

MM.  DUCOUDR^Y-BOCRGAULT. 
De  TojLLEIfAEB. 

Peadal. 


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~  552  — 

rhéritage  des  hommes  éminents  qui  se  sont  succédé  à  h 
place  que  j'occupe  en  ce  moment.  —  Il  aurait  conquis  la 
faveur  de  c^tte  assemblée  en  déployant ,  comme  il  l'a  bit 
dans  son  discours  d'adieu,  les  ressources  d'une  imagina- 
tion vive  et  d'un  style  s^nimé.  —  Dans  ce'discours,  que  je 
me  plais  à  rappeler  ici ,  non -seulement  à  cause  de  son 
mérite,  mais  parce  qu'il  était  en  quelque  sorte  destiné  à 
cette  séance  >  notre  collègue  avait  pour  but  de  rappeler 
les  avantages  qui  découlent  des  associations  scientifiques, 
et ,  tout  naturellement  entraîné  par  ses  goûts  et  ses  habi- 
tudes ,  il  avait  spécialement  insisté  sur  ceux  qui  sont  le 
fruit deë  éludes  littéraires  et  de  la  poésie.  —  Non  pas,  as- 
surément ,  de  cette  triste  littérature  qui  déifie  les  passions 
humaines  et  qui  marché  à  la  lueur  du  flambeau  de  la  fa- 
talité^ mais  de  la  poésie  sjpilritualiste  qui  élève  l'âme  et 
console  l'humanité.  —  Qu'il  me  soit  permis  d'emprunter, 
pour  un  moment ,  ses  propres  paroles ,  ce  sera  le  moyen  le 
plus  sûr  de  payer  à  notre  collègue  absent  le  public  tribut 
d'estime  et  de  regret  que  nous  lui  devons,  a  Au  milieu  de 
tous  ces  désordres  du  domaine  de  la  pensée,  vous  disait 
M.  Lambert,  s'il  est  une  chose  (fui  soit  restée  pure,  digne, 
élevée ,  spiritualisle,  enfin ,  c'est  encore  la  poésiç.  —  Étu- 
diez-la dans  les  grandes  œuvres  qu'elle  a  produite^  :  vous 
la  verrez,  à  défaut  du  monde  qui  s'abandonne  à  lui-méipe, 
se  réfugier  dans  la  nature,  tout  animer  en  elle,  spiritua- 
liser  la  création  et  l'admettre  sans  cesse  en  tiers  dans  nos 
pensées,  pour  les  élever  à  sa  tranquille  majesté  et  la 
mêler  à  nos  tristesses,  pour  les  enivrer  de  ses  éternels  sou- 
rires-. — Elle  exprime  partout  que  les  beautés  sans  nombre 
dont  la  nature  est  remplie  répondent  à  nos  plus  secrètes 


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—  555  — 

et  intimes  impressions,  et  qu'elle  est  faite  pour  le  dévelop- 
pement de  nos  instincts  moraux,  bien  plus  encore  que 
pour  la  sattsfiiciion  de  nos  besoins  phjrsiqueé,  parce  qu'elle 
parle  incessamment  à  notre  cœur,  pour  en  épurer  la 
flamme  «  à  nos  passions  pour  en  calmer  le  paroxisme,  à 
nos  souvenirs  pour  adoucir  leurs  regrets,  à  nos  espé- 
rahees  pour  alléger  leurs  ailes.  —^.Théorie  charmante  et 
douce,  philosophie  consolante  et  vraie  que  cette  fusion 
de  nos  deux  natures  pour  les  purifier  Tune  par  Tautre  et 
pour  endormir  les  souffrances  de  celle  qui  est  périssable 
par  le  dégagement  de  celle  qui  est  éternelle.  Lien  mys- 
térieux entra  nous  et  la  création ,  lien  brisé  trop  souvent 
par  la  main  glacée  de* ce  spectre  myope  et  sourd  qu'on 
appelle  le  scepticisme,  par  le  souffle  desséchant  de  la 
philosophie  de  Tesprit,  mais  rattaché  puissamment  par 
la  philosophie  du  cœur,  c'est-à-dire  par  la  poésie.  » 
M.  Lambert  ay  vous  le  voyez  >  une  noble  manière  de 
comprendre  la  poésie.  Elle  n'est  pas*  pour  lui  un  simple 
délassement  de  l'esprit,  la  forme  plus  ou /moins  heureuse 
que  revêtent  nos  mœurs^  nos  idées,  nos  sentihients,  il  lui 
voit  yne  autre  mission  dans'  la  vie  morale  des  peuples. 
«  L'art,  la  science ,  la  poésie  ne  sont  pas  seulement  pour 
lui  des  questions  d'orgueil  national  et  d'avenir  intellec- 
tuel ,  mais  d'admirables  instruments  de  bîen-ôtre  et  de  mo- 
ralisation  sociale.  » 

S'il  était  possible  que  les  sociétés  savantes  vinssent  à 
perdre  de  vue  cette  vérité,  ce  ne  senait  pas, -assurément,  à 
une  épo<}ue  tourmentée  par  l'esprit  de  seote  et  Tindivi- 
dualisme.  -^  Ramener  l'harmonie  au  sein  de  l'humanité  en 
foisaot  un  appel  à  ce  que  la  nature  de  l'homme  renferme 


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~  554  — 

(le  plus  élev^  ,  réprimer  par  cette  iÀflaeuce  l'exal- 
tatioo  donnée  aui  intérêts  matérieU  am  dépens  des  plas 
nobles  instincts,. tells  est  la  route  dans  laquelle  doivent 
marcbertous  les  hommes  généreux  ,  et  dans  laquelle  les 
sociétés  eomme  la  nôtre  -doivent  s'engager  les  premières. 
— -  Si,  dans  les  temps  de  loisir  et  de  calkne,  elles  peuvent 
borner  leur  ambition  à  réunir  sur  le  terrain  fécond  de  Té- 
tude,  dans  un  oommerce  empreint  d'aménité  et  debîen- 
veillamce,  des  personnes  que  leur  nature  ou  leur  positioD 
sociale  auraient  séparé^  s'il  leur  suffit  alors  de  grouper 
toutes  les  forces  vives  de  Tesprit  dans  un  foyer  dont  la 
salutaire  iitfluence  développe  et  fortifie  tout  ce  qui  peut 
être  utile  à  Tiiomme^  leîir  rdié  cliange  et.  grandit  dans 
les  temps  d'agitation  morale,  où  elles  ont  surtout  pour  de- 
voir de  casserver  intact  le  précieux  dépdt  de  la  science  et 
de  la  philosophie.  ^-^  La  science  qui  enseigne  ce  qui  est 
vrai,  la  pjiilosopbie  qui  dirige  la  raison  humaine  dans  la 
recherche  de  la  vérité.  —  Sans  doute  ces  divines  émana- 
tions sont,  comme  les  devinées  humaines,  au-dessus  de 
toute  atteinte  et  n'ont  rien  à  craindre  <lu  triomphe  mo- 
mentané de  l'ersettr;  mais  l'ordre  moral  est  si  étroitement 
lié  à  leur  sort,  qu'il  reçoit  le  contre*coup  de  tout  ce  qui  les 
altère.  -^  Le  repos  des  sociétés  et  le  bonheur  des  indivi- 
dus sont  troublés  aussitôt  qae  leur  lumière  est  obscurcie 
par  les  éclats  trompeurs  du  sophisme  travaillant  à  détruire 
réâific&de  l'expérience  au  profit  de  systèmes  mensongers. 
—  Toute  science  est  sociale  dans  son  application  défini- 
tive, à  ce  point-,'que  celles  qui  paraissent  s*élôignar  davan- 
tage de  ce  but  concourent  encore  pour  quelque  chose 
aux  chanoes  diverses  que  subit  l'humanité.  Pour  la  plupart 


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-  83»  ~ 

d'eatteieUës,,iLserait&al0*diô  signaler» en ttaçant leiurhik. 
toÎpe>  ViûùXÈ^ïnoe.  ifoe  leurs  vftriati<M{ks  qnt  exercée  sar  la 
maittbe  (le-  Teppèce  )  boiiiaiDe%  Leâ  suécAs,- les  foutes,  la 
graodewoa  U  ruine  des  nations  présenlent  one  Ikison  in- 
time avec  la  direction  imprimée  à  diVersos  époques  aux 
études  lUtéraires  el  scientifiques.  Et  qui  pourrait  douter 
que  rinfluèno6«de  la.  philosofiiie  ne^  ^it  aussi  réelle  que 
celle  de  la  seienceqiiienémaneî^-^.a^C'estninfait,  disait 
riUusire  Aqyev-CoUaid,  qne  la  molpale  .publique  et  privée, 
qiie:ronlre>de&  sociétés*  et  .le.btoheur  des  individus  sont 
eûgagés  dans  le  débft  de  la  vt:aie  et  d^e  la  faasse>phi{o^- 
pliie.  n  Les  procédés  ,de  Tesprit  humain  dans  la  redier- 
cbe  oies  vérilïés  fendapieotales  ne  sauraient  être  &U$$és 
sao&  Gonduii^à  ^desorfreurs  touÎQurs  pféjudtciabies  ;  et  là 
où  les  mauvaises  méthodes,  les  abstractions  insaisissables, 
les  oondusiûBà  téméraires^ont  pris  In  place  d'un^  piKldente 
obaèliivalion  et  d'une'  habitude  de  déduction  ngout««ui9f, 
là  où  il  y  •aerqeurdras  la  manière  de^  poser  iuneformtlle 
scieDlifiqtie,  il  y  a. toujours  un  péril  poiiir  la  société,  atiësi 
bien  daM  Tordre  physique  que  dans  l'ordre  knorial,  aussi 
hiqa  pour .  l'élude  de*  la  vapeqr'que  pour  œll^  des  condi- 
tions desqdakiilité*  La  caupe  â»  oetle-ci  ne  saurait  donc 
être  sépàiéei  de  ceU&;de  la^  sctenee  et  de  h  «philosophie. 
,Les.ooDiiai8s^çe6:humaines;  <|ui.  touchent ^le  très  prés 
sL^oiiguMpaiioD  jdts  sociétés,  sont  aussi  celles' •qui  pnésen- 
tept  plustile  dangers-  datis  tours  déviations^,  et  qu^ilfiiBl, 
par  'ooaaéqneot^  aouméttre  pins  rigomteiisemept  au  con^ 
trôle  d'une  .analyse  sévère  et  d'une  prudepte  expérimen- 
tation. Eu'peceiUa  matière^,  l'aulorité  de  la  raison»  eitquel- 
que choatv  mais^  l'aulbsité  de«reipérienob  est  tout'  «*  Pr4« 

38 


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—  536  — 

jdoDa  .iaterrogilk^  quasi  dimidiask  scieatiœ ,  »,  diaatt  Bwoa, 
préeepte  auwi  sage  que  pm  roflyecté  de  noi  joura.  Pnompt 
à  s'afficayer  du  mal  ou  à  en  eiagérer  k  portée,  aideoU 
désirer  le  bieot  împaiieot  de  le  réatber  «  i'Jiamnie  eraît  ie 
saisir  dès  qu'il  l'a  toirevu,  ai,fiiliguéde  l'attendre,  ilpréftie 
s'acconunûder  d'une  solution -ineomplële,  pkrtdi  que  de 
rester  dans  le  doute.  De  là  tf  nt  de  systèmea  inspirés  par 
ce  secret  besoin  dp  transformation  qui  germe  an  sein  des 
société  modernes,  lueurs  trompeuaes  qui  ptéteddent  à 
l'autorité  de. la  3cience  et  qui,  destinées  à  guérir  les  maux 
de  rfaumanité,  n'ont  encore  féuaai  iqu*à  lapoosser  sur  des 
éfipeils. 

Des  acienees  d'observation  qui  peuvent  prétendre  i  un 
.  cciractèru  positif  et  qui,  grâce  à  oe  privilège,  doitrent  eur- 
cer  upe  grande  iofluanoe  dans  le  goAvarnement  du  monde, 
ont  été  faussées  par  l'iatroduction  d'éiémeûts  édos  dans  h 
(écûqde  iniagioaiion  des  fondateum  de  doctrine.  -Cetlè  si- 
tuation in^pose  un  devoir  aux  bomidaea  qui  ae  eonsaereat 
ans  travauji.  de  la  pensée ,  qui  culUvent,  saas  pr^oecofiatioii 
de  parti ,  le  domaine  des  sciences  d'observation  ;  c'est  à 
eiii.  de  séparer  l'or  de  ce,  trisié  alliage,  de  bire  Japart 
de  la  science  vraie,  qui  seule  peut  élever  quehpieéhosede 
solide  dabtl  l'ordre  inatériel  cômtne  dans  Taidre  moral. 
L'amour,  i'allais  dire  la  passion  da  vrai,  qui  duit  être  leur 
prineipsL  mobile,  les  met  k  même  de  rendre^aqpurd'liii  à 
la  société  le  plus,  grand  de  tous  les  services,  ear«  ainsi  que 
Fa  dit  un  puUicistie  moderne  :.«  La soîeooa  vira»  mèoe  à 
la  vraie  politique.  » 

&i,<pour  cQiwrver  notre  valable  rAte,  nous  n'avons 
pasià  d^ieendif  dans  de  brûlantes  adualitéa^  si  notre  mis- 


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^  557  — 

sksa  ^oit  60  bomer  à  préparer  les  matériaai  qtie  d'autres 
se  chargeront  d'utUiaer,  tecbons  la  remplir  a?ec  inteIKgefkce 
et  fenfeieié,  en  ^  disent  tourner  a tf  profit  du  corps  social  le 
mouvemcal  incQBDU  qui  Tagiteet  qui  tend  à  l'ébranler.  Ce 
iMuveineni,  qui  prend  sa  aource  dans  ée  justes  aspirations 
vers  un  état  meilleur  que  la  Pro^îdetice  n'a  sains  doute 
pas  refusé  à  l'humaiiilé,  n'«st  pat  de  ceux  qu'on  airrôte  ; 
mais  il  veQt  èlre^lirtgé,  sous  pleine  d'aboutir  à  un  terrible 
catqisljrsme*  Acceptons  les  conditions  qui  nous  sont  infli- 
gées^ et,  saoA  notis  irriter  eonti'e  notre  époque,  mettons- 
nous  oonrageiisement  à  Vuamte  dti  salut  comnran.  Montrons 
à  ceux  qui  se  laisaent  entrirfner  par  de  trop  impéimeux 
désira  dé  réalisatioa  immédiate,  que  les  éléments  sur  lés» 
qiieb  ils  s'afqpuieot  ont  besoin  de  s'épurer,  d^  se  mtrir 
pour  établir  leur  autorité  ;  que ,  pour  prétendre  à  fixer  la 
règle  dés  sociétés  modernes,. il  faot  autre  chose  que  des 
stériles  ébauches,  il  fiiut  des  résultats  hautement ^atiooés 
par  k  Science  et  sanctionnés  par  bpratiq«e  ;  que,  poér 
aspirei  à  on  ^palml*  honnàir,  une  synthèse  >  si  t>riUante 
qu'elle  smt.,*  dbit  au  mofals  s'appuyer  snr  un  commence- 
ment d'expérience,  dans  des  conditions  qui  ne  laissent 
aqcmi  donteaor.la  portjée  de  son  application*  ' 

Que  les  sociétés  savantes  s'eiForcent  surtout  de  rame- 
ner aiMc  boimes;  métiiedes  dans  l'étude  des  sci eftetfs  qnl  ont 
servi  de  point  d'appui  à  ces  fiotioms  laborieusem^t  éla- 
borée», qu^6n  a  déeoré  du  nom  de  science  sociale.  Cette 
doctffiiMl'des  Ètmpa  modernes ,'  qni  pnamet  de  tout  expli- 
quer-, de  tout  résDvdre ,  de  délier  le  mend  de  toutes  les 
djikaidés  de  Tordit  moral ,  est  cependant  TaeNe  à  oon- 
veiaere.  d'errem*  *^  de  sieriliUd  ,  '  parée  qu'elle  foule  aux 


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—  558  — 

pieds  les  règles  éternelles  qui  doivent  giûder  lir  raison  ba- 
maiqe  dans  la  découverte  de  la  v^ité.  Ramener  les  esprits 
à  des  habitudes  de  sévérité'  dans  l'analyse  et- dans  les 'dé- 
ductions logiques  f  ce  serait  frapper  sérieusement  ces  sys- 
tèmes, qui  peuveul ,  au  premier  irbord,  provoquer  lacu'^ 
riosUé  et  même  atlireç  Tintérèt^  mais  doot  la  logique  ne 
saurait  soutenir  L'épreuve  d'uu  examen  sérieux.  * 

Les  eonoaissances  sur  lesquelles  se  sont  appujés  ces 
systèmes  ont-elles  été  nûeux  respectées  que  la  lo^oe  ? 
L'histoire,  exclusivement  envisagée- à  un  seul  point  de 
vue ,  trop  souvent  dénaturée  par  uno  critique  hostile  et 
des  appréciations  passionnées  ou  tronquées  par.  des  omis- 
sfons^  volontaires  ,  n'a  été  ,  en  quelque  sortes ,  iliterrogée 
par  ^eux  que  comme  un  iémoin  à  la  clurge  -de  la  société , 
qui  devait  la  convaincre  d'impuissance  et  de  déerépitude. 
Cette  société  est  vivante  et  .fo^te  cependant  :  il  loi  soffit, 
pour  se  défendre  ^  des  forces  qui  loi  ont  donné  naissance 
et  qui  sont  immuables ,  parce  qu'elles  déeoufent  de  h  na- 
ture de.i'horome  ;  mais  s'il  lui  convenait  de  cbercben  des 
armes  dans  l'histoire,  elle  y  ^trouverait  devnmnbrenses 
preuves  des  échecs  subisipar  certaines  dooirines ,  qui ,  biea 
des  fois  ressuscitées,  oaiété,.chaqlie,fots,  :C0QdaQmée5par 
l'expérience. 

Les  nombreux  emprunts  dits  à  l'économie  politique 
ont-ils  été  plus  rationoek  et  plus  profitables?  Bes  études 
incomplètes,  des  résultat»  prématurés  eut  Irqp  souvent 
acMpvi  de  base  à  des>  assertions  exlravagantes  daila  les- 
quelles on  ne  parvient  que  dtfSciltioent  à  débrouiller  le 
vrai  ;  et  si  l'on  jdevait  persévérer  dans  une  setnUable 
route,  la  science  économique  .recevrait  btentAt  lecootre- 


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~  559  — 

coup  du  discrédit  qui  fc&pptra  œs  stéMies  conceptions.  Il 
y  a  là  un  Tasie  cliemp  d'études  que  les  Académies  ne 
saufftieoi  abandonner  plus  longtemps  à  une  exploitation 
inintelUgente  etpaastonnécEUes  peuvent  rendre  de  grande 
services  en  posant  atee  éclat  e|.  fermeté  dimportadtee 
questions  'd'éeonomiô  soeinle  ,  en  faisant  un  appel  à  des 
travaux  sériéux«et  mnlNrement  élaborés,  et  en  les  appuyant 
de  Fautorité  qui  s'attache  nécesâairemeql  au  jugement 
d'hommes  dévoués  et  compétents. .  En  persévérant  dans 
cette  voie -où  Vous  vous  àtes  heureusement  engagés  depuis 
quelques  anqéçs ,  vpus  contribue^ei ,  dans  la  spbtoe  de 
votre  înfluenise,'  è  ramena  l'ordre  et  les  bonnes  méthodes 
d'analyle  dans  une'  étude  d'une  haute  importance' ,  et 
vous  aurez  préparé  la  solution  de«quélques-unes  des  nom*- 
breuses  difficultés  qui  surgissent  au  sein  de  la  société 
actuelle. 

Mais,  pour  se  crohre  le  droit  d'enseigner  à  l'homme 
cette  loi*  nouvelle 'qui.  doit  changer  ses  conditions  so- 
ciales «il  fiiut  ^ionnaftre,  appi;ofondir  sa  natuire,  son  ca^ 
ractère,  ses* aptitudes^  il  faut  scruter  ses  besoins,  ses  fa- 
cultés, sesinstiiiots^  a^  affections;  voire  système  doit 
l'absorber  tout  pati^,  sous  peine  d'être  bientôt  brisé  à 
la  première  tentative  d'application.  La  prétention  de  bien 
connaître  l'homiAe  sorus  tous  ces  rapports  n'est  pas  ce 
qui  manque  aux  novateurs  modernes;  mais  il  n'en  est  pas 
moins  vrai  que^  chez  eux,  la  physiologie  et' la  psychologie 
sont  à  la  hauteur  de  l'économie  politique.  Chacun  d'eux 
a,  pour  ainsi  dire,  refait' Tbomme  à  l'usage*  de  son  sys^ 
tente.  On  a  méconnu  ou  .nié  les  contrastes  f{uè  présente 
la  ngture  humaine  ;  les  passions  qui  l'agitent  et*  qui  réa-- 


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—  ô4e  ~ 

gissent  sur  la«0Gvétf  ne  tout  pas  nummi^e»  en  eUes-mémes, 
ce  soQt  des  ressorts  qu'une  bonne  organisation  sociale 
parvientbtt  à  utiliser  !  i.es  uns  n'ont  pas  sa  tenir  coMpte 
de  ce  qu*il  y.  a  de  grandeur  et  de  dignité  dans  son  ca- 
ractère, de  profondeur  dans  ses  attlchemente  et  de  sin- 
cérité daoe  ses  croyances;  (es  autres  ont  glorifié  ees  pas- 
sions ou  n'ont  tenu  aoeun  comptedes  tristes  infirmitésmo- 
latesqui  l'assiègent*  On  hii*  a  tmèé  une  voie  sans  mesurer 
ses  forces  pouria  parooul'ir,  et  l'on  a'surtodt  surexeilé  son 
désff  de  bien-être  au  dépens  de  êsl  dignité^  et  des  plos 
nobles  «entiments:  Il  ètf  est  qui  n'ont  pas  craint  de  heurter 
de  front  «cet  impérieux  besoin  de  liberté  qui  est  comme 
son  essence;  et  qui  peut  seul  donner  hi  mesure  dn'mérite 
desea actions.    ■         '     •  *  ^        % 

Que  d'erreurs  à  redresser,  Vfue  de  vérités  à  remettre 
en  -lumière  !  Multiplions  nos  efforts  pour  poser  plus  se- 
ri^isement  des  problèmes  résolus  af  ec  une  légèreté  dont 
on  ne  "paraît  pas  avoir  le  'sentiment*  Opposons,  *sans  re- 
lAclie,  les  données  positives /le  la  science  à  la  déviation  Ai- 
neste  impridiée  aux  principes  les  plus  tiémetftaires.  Réta- 
blissons dans  leur  autorité  légitime  les  ftits  primordiaux 
de  rbiàtoire  de  l'humanité  :  c'est  anjourd'fttlti  plus  qu'un 
devoir,  c'est  un  pressant  besoin  auquel  doivent,  répondre 
les  associations  scientifiques. 

Créé  pour  vivre  en  ^bciété ,  l'hortimer  accomplit  sa 
destinée  en  développant  successivement  des'insfhûtions 
qu7  donnent  la  mesui^  de  sa  *ptiissiance  et  qui  le  condui- 
sent graduellement  au  plus  haet  degré  de  dévelojppement 
moral  et  intftlie<^tuel  qu'il  lui  soit  pbrmis  d'atteindre.'  Ls 
sociétf's  c^ast  l'association  qui,  commue  la  iàmiHe,  découle  des 


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—  «41  — 

lois  I  furtilliiN  tie  Ip  MUpe  hamaâiiê.  Mms  b  fbnhe  dé 
OÊÊU  mKHâé  doitHBile  varier  toivADt  l'iateUtgence  «t  ta 
volcurti  di  ItMMnme,  siiiviat  desctroonilaaoes^KtériéttreB 
de  dmml^^ét  soi?....  Oubies  mIhI  éwil  iAmm  I«b 
biiflBilairfcBi]Hmifti^ttel'M80CMlimi4oitrei^Mif  UM  foiiM 
uni^Bief  se  ooaeti^er  sur  ime  tonuéB  identifeiiae  «U' 
joVir  perla  foieMe  de  nos  a^detnes  réfélatews  f  Eh  MM 
oaa,  cfllte^ionBMile  eit  diffioife  à  reconnaître  an  niiieo  des 
aysMaaasrqal  ont,  pour  parler  ici  Içtelgâge  des  adeptes^ 
«  divisé' cÉ  sohdiKaé  ia  penaée  mare  dfi  ïeveoir.  »  Noms 
avQDSt  disail  nafake  le  priocipaiMpréseBtantdeoesdoGCii- 
aes:  s  NoHssMHisdes^ecfteseifMKiQt  d'église,  despUlaèepliies 
ittOompaliUes  et  pas  de  ratigion^  pas  de  orojra»ce  col* 
leotive  jmliaoi  les  fidèles  sous  un  seul  sigae  et  haraaènisaiit 
levas  efbrifl.  »  Ce  jogeaaeiit  porfé  sur  la  aoieoce  nmfielle 
par  œux,^  Aecraignaat  pas  de  &ire  «a  fippel  anai  pas«- 
sioBs  kumaines  pour  la  soutenir,  n'eslnil  pas  la  plus  ter- 
rîMe  condiMsuiatiop  '  tiu'oQ.  puisse  proMncer  oeotre  elle-? 
K'eat'^il.pës  la  prefive  évidente  que^bienloiadkMrearriaée.à 
l'époqpe  pratiqua,  eUe  est  oaoqre  doBiioée  par  Tiacertilude 
eft  reothousiasaaeyaoflDnie  l'ont  été  presque  lobtes  ks  cob« 
naiasanees  buMaines  à  leur  bcroom't  * 

Osai  de  .plus^propra  à^fitire  proscrire  le  principe  de 
raaaoclatibn  que  les  tristes  eKsès  de  cew  qui,  le  poussant 
au-delà  de  ^toutes  les  limites  qui  lui  sont  imposées^pa^  la 
natiBre Jwaaaiiie,  enontrftit  un  aaoyen dlattaque  etde des- 
timiion  eenire  la  religion,  la  fiuniUe^^.propnéléyr^Otîvité 
et  rîntellîgaaoe  de  VboBamèii  a*exerçant  dans  4a  sphèHe  de 
sa  lîb^.  fie  doit  être,  -en  coatraira^  im  pinsaont  potif 
poiir;amdier  l'étndedaeé  principe  féoond,  de^ce  grand 


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Utiec  de  ia  ^iviiiNtUoA»  è  jdès  mnm  qui  ae  femBU  que  le 
ccmpromeHre  aux  yeux  du  publie^  el  qui  teadeat,  toat  an 
rogios,  à  appeler  sur  lui.  «ne  profonde  dàbrettr  db  k  part 
d^  boonieB  qui  préekleBi  à  la  direction  des  affûnas  ptablî- 
quea;  uoe  raisoa  de  phis  de  s  efforcer-^ -le  soumatm  à 
dm  reoheidies  ^ieoftefiy  patienieftet  propres  à  le  dégÊfsCj 
soiis»>Uietes  aes  ftces,  des-èlMeiiriléfrqQi  l'eMeloppent. .     ' 

Plus  ij  a  élé  eonprooiis,  dénaturé  daiis^on  bot  bumi* 
nitaire,  plus  iï  iniporte  de  «levreleirer  et  de  lui  rendre» 
valeur  et  ^  difirûté,  sans  a'étenner,  sans  éê  téoaUer^  outre 
mesure,  des  éehecs  qui  ont  été  la  suite  d'une  précipitation 
trofl  cotamuine.  Sachons  poussuivre  avec  prudence  Tétude 
de  son  dév^loppeaient.efrde  son  application  pour  em  Sùtt 
sortir,  s^il  se  peut,*de  nouveaux  éléments  de  boolleiir  et  de 
prospérité.  Si  dou^  ne  devons  pas  souffrir  i|u'oû  détruise; 
enaonnoTO;  la  société  ifttuelie,  pour  élever  sur  «ses  ruines 
une  société  inconnue,  nous  .devons  aussi  nous  rappeler 
que*  rhumaoité  progresse,  depuis  rorigiue^du  Inbnde,  vers 
uji  état  meilleur,  et  qu'il  n'est  donné  à  personne  de  peser 
déslMrnes  à  ce  mouvement  provi4entiel.  Anlèsureqneles 
siècles  s'écoulent,  la  masse  des  (Sonnakasnces  gvandh,  leur 
lumière  s  épure,  les  niosurs  s'adoueisseat,  un  plus  grsod 
nombre,  d'boraihes  arrivent  à  la  culture  de  ^intelligence, 
et  Tordre  social  ae  développe  en  propertûnn  de  Tondre 
moral  et  intelleotoei. 

Le  passé  du-meinde  nous  prouve  que  Dieu  n'a  pas  coa- 
d$mné.l%ûmrae  à  l'immobilité.  Si  chienne  en  particolier, 
doit  lt|vaille^  à  amélioser  sa  cfndilion/  la  société  ne  doit- 
elle  pas  aussi  chercher  sans  cesse  à^se  perisctHmner.?-  . 

Les  fiMites  et  les  malheurs>  de  Thuàmoité  nfe  sont  pas 


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~  B45  — 

complétemeni  srts  remanie  ;  ce  remède,  ik>us.  le  trouverons 
d'ftbord  dans  la  rèUgion,  qui  s'adressOi  ce  que  l'iiopinie  a 
de  plus  pur  et  de  plus  élevé  dans  Tesprit  et  le  cœur.  Nous 
le  trouverons  aussi  dans  u^e  étude  sérieuse  et  métliodique 
des  connaissances  humaines  et  dans  Tautorité  de  Texpé- 
rience,  qui  dpiy^i  »  raipeoer  Tordre  d^ns  le  domaine  de 
riuteUigence  et  de  ia  raison.» 


f 


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n 


COMPTE  RENDU 

DES  TRAVAUX  .  " 
LA   SOCIÉTÉ   ACADÉMlOUE  DE  HAKTES, 

PBifOÂin  L*AiiiiS£  1850; 
*    PAR  M.  MÂLHEÏIBE  ,^  D.-M. , 

SBCBiTAIU  6]fafiBA.l. 


Messieurs, 

Chargé  de  rendre  coihple  de  vos  travaux  pendant  Tannée 
1850,  j'éprouve  un  séntiflaent  d'inquiétude  bi^n  légitime. 
Le  mérite  de.^seux  qui  m'ont  précédé  à  cette  placn  tft'aorait 
fait  craindre  d'y  paraître  après  eux,  ai  voua  ne  ni'avtex 
donné  un  gage*  assuré  de  votre  bienveillance,  en  me  con- 
fiant la  tâche  honorable  dont  je  viens  m'acquitter  aujour- 
d'hui. 


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—  543  — 

PersoDoe  de  vous,  Messiears,  n'a  p«  ouMief»  tes  éner- 
giques el  sévères  paroles  pvec  lesquelles  M.  Renoul ,  dans 
votre  séince  publique  de  J'aïinée  deroière ,'  flétrissait  Té- 
gaisme,  le  vice  domioanlde  notre  époque,  Qootplus  que 
les'  éloges  bien  sentis  qu*i)  donnait  aux  vertus  contraires  ; 
vos  applaudissemeots  lui  tat  ténkoigné  votre  sympathie.- 

.Vous  avez  de  oième  éboutéavec  uià^  fiiveur  marquée 
l'intéressant  rappdrt  de  M.*  Grégoire.  .Dans  cette  même 
séance ,  je  bisais  connaître  les  Résultats  du  concours  ouvert 
pour  1M9  y.êt  M,  ie  baron  de  Wismes  rendait  compte  des 
visites  lattes  pftr  les  commissaires  de  la  Société  dam  di- 
vers ateliers  industriels  el  ar.tisiiq'ues  de  la- villes 

Le  lendemaini  de  cpite  sétinoe;  la  Société  a  procédé  au 
renouvellement  de  son  bureau  et  de  son  cbnseti  d'adminis- 
tration. M.  Lambert  ^  été  élu  président ,  M.  le  docteur 
Gély,  vice-président;  vous  m'avez  chargé des'ibnotioas  de 
secMfairé  général;  et  U.  Talbot  a  été  nommé  seerétaire 
adjoint.  •      .  t  •  . 

M.  NuRud  a  été  mainteriu  4ans  )ee  fonctions  de  trésorier  ; 
MM.  les  docteurs  Le  Ray  et  Delamaredans  celles  de  bîblio* 
tlié(îaire  et  de  bibliothécaire  adjoint. , 

Le  Comité  céhtral  a  été  cornoosé  :   .  «      ^ 

l."»  Pour  la  Section  ^l'Agriculture,  Gommei^oe  et  Indus* 
trie,  dé.  MM.  Wohki ,  Goupilleau ,  ^areavaux  fils» 

2.''  Pour  la  Section  ^er  Médeeine,  de.  MM*.  Bonamy  ^ 
Marcé'^et  JouloD.  ^  * 

S."*  Pour  la  Section  des  Sciences ^  Lettres  et  Arts,  de 
MM.  «Grégoire  ,  JSoette ,  de  Wismes.  -  • 

4.®  Pour  la  Section  des^Sciences  naturelles,  de MH.. De- 
lalatKlè,  Dueoudray-Bonrgault,  de  Tollenare. 

Mais  bientôt  le  Ëtuteuil  de  la  présidence  est  resté  vacant 


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~  B46  — 

par  1^  départ  de  Mw  Umbei«,  qii^  son  élévatim  dans  la 
hiéirarcbie  judlamife  forçait  à  quitter  notre  vilte  ;  et  la 
Société  a  dà  pourvoir  a  son  reBopiacement  par  de  Nouvelles 
élections^iqui  ont  eu  lieu  danssàséaDee  exMordinaire  du 
19  décembre  1849.  ♦       •  *  .■  *  *. 

AL  Gétyi  vice-pi*é6id^l  ^  a  élé  élu  préaident;  11.  Gré- 
goire «.membre  d«.  Caraîté  central, -a  été  élu* vice-prési- 
dent^ en  remplaQçmeût  de  M/  Gély  ^  erH.  Vandier  a  été 
appelé  au  Comité  centrai  à  II»  place  de  M.  Grégoire.    *     * 

Depuia.  l'année  derniëKe  la  mort  a- Grappe  uiTcIe  nos 
menibresréaidanis;  M.  Souél  d'Ërmigny.  }^à*Laon,  en 
1772 ,  il  se,  tron^va  laooe*preagu*au  sertir  du  coliéjie  dans 
ce  déluge  .d'idéea  de  réformes  politiques  et  tieptogi^ès»  so- 
cial qui  agixaienl  alors  les  esprits.  Quelques  années  pins 
tard,  il  s'a$soeia  à Télan- généreux  qiy*  feisait  voler  tètite  ta 
jeuneasci  frtuçaise  au^  secMre  de  k  pairie  ei^danijer.*  H 
servit  aiiecdiitiflctieo,  d*abord  à  l'armée  duAhin ,  pais*  en 
Vendée ,  jusqu'en  95.  Yoyant  alors  sa  santé  ébranlée  par 
leali^tigwes  de  la  vie  militaire,  il  demanda'  fet  obtint  sa 
réfot^e..  Depuis  ce  moment,  il  a  exercé  à  Nantes  les  fonc- 
tions d'essayeur  de  la,  garamie  des  maiièves  d'or  et.  d'ar- 
gent ,  jusqi|'en  1 83Â ,  où,,  sur  ^  demandé ,  il  Sut  mis  à  la 
retraita  Ho9(USie  ainuiblc^autanf  qu'amateur  plein  de  gbùt 
et  d'érudiiion  «  Mv  '  Sou^  eoriserve  une  "flact  dans  la  mé-' 
moire  de  cous  cauxH|ui  l'otti  x^onnu*     «  ^ 

Nous  avons  vu  avec  peine  s'éloigner  de  nous  plosteors  de 
uo$  ooUèguee  que  leur^tnté,  leur  âge  oiidesoodttpat i  ons  mul- . 
tipliées  ont  déterminé  à  nous  adresser  leur  dânission  (1). 

T" — '^'-^-^ — r ; : c— ' 

{,{)  MM.  Maiionde  Precé,  Miehel^Jftobineau.de^qvgoii;  Mi-;* 
chel  de  la  Monronnais,  L.  Guéraud ,  Gharyau ,  Légal ,  Roaillard. 


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-  S47  — 

Mais  opu&uoiis  eslimoiis  beureux  dee  honorables  «Ijoiictiôns 
qaî oui fiigiudé Te  cours  àe  cette  année;  ainsi,  au  nombre 
de  vos  mcmbras  césidants ,  vous  amez  reçu  iL^  Càrissan  ^  litté- 
rateur; 4(.  .Champenois^  D.-M.;  M.  .Bobi^re,  chimiste, 
vérificateur  en  chef  des  eogmis;  M.  Bize«A  fils,  fV.-4lf. ; 
jtf.  ïfHihé  Fqiiriiier ,  Cvxé  dosia  poroisse  Saint*Nice|a»,  dont 
le  jïiérite  est.  trop  eonna  pour  que  j'ai  besoin  de  le  rap- 
peleç;  enfi;i«  M.Huret,  proviseaivdtt  Lyeée,  qui  a  su-,  non 
pas  tâ^  .ouhl4er>  Biais  empêche^  da  regfetttiÉ  >d6Bq  hono- 
rable pc4déoesseur,.M/'Jallien  (1). 

Vous  avez  admis  parmi  vos  correspondants  M!  ikmoix , 
.  avQoat  à  Caen  ai  J^lanhte  distingué  (S). 

MM*  Duptlessix,  «i<ambert  et  Serre, >  forcés  de  quitter 
Ne^fes,  oçt  vouhi  rester  memibres  oorrespooiiants  de  la 
Société;  MM.  Aubacbétet  beborgoe^  revenant 'sVjr  Gxer 
apnte  uo^iQBgua«abs8qce,''6esont«effftpre&séSde  réclamer 
leurs  pkteeaj^amii  y^  membres  résidante. ,       >      * 

j^ant  d'abdrder  Kexpesë  de  vos  travaux ,  je  dois  piirler 
4eë  impi^taptes  déciatons  que  vous  avez  prises  pendant 
Tannée  qui  vient  de  s'écMlev.  .'  •    '  ^ 

Laprefbière,  et  la^ptus  «iiio  detcfutes,  x  éié4e  cfaan- 
•gefoent  de  k>oal.  Depitts*  longtemps  nous^étions  resserrés 
dans  lin.  iipfiarteipen|sin£9Dfi[^nl  et  f^u  eÂ.iraf^oït  avec 
riaiportana».vde  la  pvemiëre  «Soaiété  savant^  d'une  des 
phia  gnHUks  viHesr  de^raaee/ïnbardis  ^r  ia  bianveii*- 
lance.  .dom  n*adn<inistvation,.  soil  départementale,    soit 


(l)  Sur  les  rapports  de  MM.  Talbot ,  RouzeaU|  Malherbe  ,  Baré 
et  Colomb'el. 
^l)'6ûr  an  rapport  «de  M;  Àagé  Se  tassul  '      *     '       '      ' 


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-  548  — 

muniçipalef  notift  a  déjà  duHmk  tml  de  pMums,  nous 
avons  choisi  up  Ueu  coovenablev  qui  dm»  pemettia 
dfi  recevoir  (ÛgiieiiiâDi  Im  ^étraogeis  qai  wendront'  iioos 
viiîtar--         ...%..  •  ♦         '  •     •  • 

Pofir  iimufwtri  ea  quelque  sorte,  votre^Donveau  leeal, 
vous  %vez  adrea^^uoie  iwci^iiMi  aa  Gongqèade  F  Associa- 
tioD  Bretooae,  eo  meUani  voina  isaUe  'des  aéancea  à  la 
diq)oaitiop  dç  sa  SeoUâajd'Ârobéologie.  Nou^,  saisiGsons 
l*ocfia^a  pyciBjmte.  poiv  aoqjQBcer  qiie  votre  înviiàtieD  a 
été  i^cceptée  et  que  le  Congrès  iieôdra  à  Naolesaa.sessioo 
de  1#61,        .  .   •,  '  .    • 

Dans  1^  vastes  aalles  dont  vouSi  dispoaex  maiatêoanc, 
voiis^aveGt  pu  ranger  les  livres  de  votre  biUiollièque  dans 
un  ordre.  |)His  conwQode  ptor  rètude,  et. donner  la  plcce 
qu'elle^  Qiép^i.à  1^  riche  baUection  d'ouurages  de/niéde- 
ciae  qyuB  vo^a  jéigiuie,  en  mpurimt,.  Tim  de  Vos  mem- 
bres lés  plus  hoooaabie^  4^  m  rap^Ueraitjxmit  ici  les 
qualités,  brillantes  et  ^Ud/es  qui  jpm  rendilieai  si  ebère 
la  présence,  cariai  noiis,  du.docAeurPaloia;^  jae  redirai 
point  c^tte  faciUté  et  celte  éléga3^  de  parole  qu'il' con- 
servait, pialgi^  les  pio^èa  de  rftge^  oe^te  di|pDi^  avec 
laqueliejl  s'acquittait  dèafoociioaaiido'  la.|>iéaidence  c|pBt* 
v(Mjis  i>vijlz  ptùsiefica-fi^is  boAori;  oyûa  je  doi^- rendre  un 
téoQoigwge  ppblic  à  Vatteehementqu*iL  a  toujours  HMintré 
pour  ^ptre  Société,  au&trâvamJl^  laquelle,  pair  de  joues 
avant  sa  moipt,  il  prenati  encore  une  pari  tctive*.  Enfin , 
ne*  pouvant  s^  d^ider  à  vous  guitter*  mûoie'  poii^  noiourir, 
il  avôulus^assurerune  place  durable  dans  vos  souvenirs, 
en  vous  léguant,  en  quelque  sorte,  une  partie  ^e  lui- 
même,  ses  livres^,  pe  qu!uu  homipedUtUjle  possède  de 
plus  précieux. 


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—  349  — 

inprmef  «aux  éttties  une  impulsion  mtm  et  en  même 
lempft  une  utile xKreetioii,^  c'est,  pmt  les  associations 
sevâritiBy  up  sérieux,  devoir  qqe  vout^oue  éte&  toujours 
montrés  «ouôleux  de  remplir^  en  mettant  au  côncoura  des 
questîMsdonllii  s^httioA  importait  en  bien^re,  soitpby- 
sâqve^  soit  mondilé  la<eaciété.  Enedoptant^  cette  année, 
de  «068  diap^itioss  régl^mslUàiree  sur>èe  sujet,  vous 
avexdi)iiné  «aux  concurrents  d^^raaties  ffii  ajjouteront  à 
raOtoMtè  de  ^oejugemeiitSt  et^endront  plus  désiraMes  les 
Incompensée  qm  tous  acooiderea.    - 

Vous  vous  êtes  aussi ,  daos  unade  vos.  derniers  séances, 
préoccupés  des  moyens  d'exercer  tes' devoirs  àë  l'kospita- 
Klé  à  4'égard  des  sairants  étrangers  ^  eéjeorneraient  lasci- 
defat^Ueoaênt  dans  la'viUe; 

Si  je  if  avais  été  devancé  par  Mtre  hoaoraUe  Président, 
•je  devrais* vois  parler  do^remarquaMe^diMMirs  prononcé, 
dans  votre  séance  de  décembre*^  iMt,*  par  M*  Lanobert. 
I^BMfu'en'fenam  isceuper  la 'place  nufïi  rlaissak  vacante, 
M.  Qitf  tepvima  eombîen  était  regrettable  Tabseitce  d'Un 
uaeMbrie doué, d'aussi éminiinces  qualités,  chacun  de  v6us 
^flÇaasocîa'à^sa  |wttsée,  es  aafonnl'hui  4Uius  afiplandiftons 
tous^ji  rboBlmuige  puMloqui^vienideluidure  reudd;  . 
.  Je  me  bile  d^atriver  à'  la  partie  essentielle  de .  i^  rapport  : 
Vinofflératioii  de  vos  tiaveux  ;  comme  mes  prédécesseurs, 
je  les  (désseiui  d'apHsrrofdre^e  vee  ieotionl.-     '    * 

•Mltvia  éàgtiMitnre^  cimmeree  et  lisdttoirlé. 

I«es.p|u4fs  9ii  serrant  à  la  notirriture  dé  rbomme  em*- 
prmtteBt  Ji  la  lerra  uneaçantf  des  éiéqieiiu  4^  i«ur  eom- 


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~  560- 

position,  <naU  le  soi.  s'épttisenttjL  lMntôt,.iû  m  ne  lai 
reii4^, après  un  ceruia.  tcfknpfi,.  ce.qur'U  n*a  réeUmieiy 
fait  qtto  prêter.  '  II.  cooviept  diyi^  -d'étudié-  avec;  aoli^  4b6 
subsCtoces  féeoadaoles^car  da4epr  «hoix,iiidtçiettx  ou  pon, 
dé|i6ad  Tabondance  ouia  pfmetfe^desfécdtBa,  et  par  wite 
la  prospérité  ou  la  œisàre  publique.  Fente  ^O'CQiuiailDp  ks 
véritableslôiiVle.  la  végétàtioDf^a.n'e  looglemp»  possédé 
sur  06  '8i4€t  ^ue  des^dûopéesiiiconiplètes  ou  jecnoaées; 
aujoOrdlitti ,  aa  coatràke.;  eoipme  jsous  i>  jsposè  tM .  fieiv 
tin,  grâce  aux  progrès  <ie  la diimie  or^puûfuei  oa  «  pu 
fonniiterd^  lois  d-uoe.  <eMB^i|udc  itethénriptiquc  /On  à. peu 


M.  fi^tio  iGOûclut  (les.  étodas  auxquelles  41  s'est  iim, 
que  l'efficacité  des  engrais  dépend. 'des  substaÎM^pa  niîpé- 
raies  qu'ils Tenfecment,^  qu'il  est  iiMfispensabié  à  l'agri- 
culteiind^  cçcMMittre  leur  ooP»posiUèii  sous  ce  ca|q)ori,  s^l 
veuï  lesappli^r  a#sa  diasoriiinMDt.»  .  .  * . 

Malbeureiiseiueotfia'Spéqiiliitio^jS'est  enpafée^dj|^«ii9- 
inerce'des  eQgrâis#  et  soiivout  léSAdullératioM  qu'ol^  leur 
fait»  subir  «les -rendent  in^M^^ee  i  dmmertles^résuilats 
qulon  aurait  droiide  lûur  demander*  Gelte«coupafile  bma4^ 
causée  à. l^gmulloço  «o  .ii^eatfiulàlAe,  piÀfiidîce^y  qai.nk 
point  écheppé  ii^tt^tion  de  l'adnsiuislnieucéolaîrélque 
nous  avons  à  iâ  t^  der  notre. défHiriement;  Nttl4onte.qQe 
les  sages  mesures  4|u*i4  a  ^n^^^ne  liassent  himit<i»  dispa- 
raître d*9assi  regrettables  abus. 
•  Il  est ^uste  »  Messieurs  y.de  rendre  |i(iÇBin|g^ jt  ]fi,^i^qffi 
pour  tous  les  ré^ituts  utiles  dont  elle  nobs  a  dotés  ;  nous 
possédons -maintenant  assez  de  luntièretf  pourVeWlHs  i^gri-. 
cultvre  pro|pèr0(e^JorisM«ll^f«<|{^pefldaHtY'qû^^m  adm)- 


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^  ^51   - 

râbles  que  soient  les  découvertes  des  savaitts,  quelque  fé- 
conds que  ptiissent  être  leurs  précefifes,  ils  resteront  sans 
effet,  si  nous  manquons  de  force  matérielle  pour'les  ap- 
pliquer. Car,  Messieurs,  aujourd*htPî  cofnnîe  au  commen- 
cement, ce  n'est  qu'à  la  sueur  de  son  corps*  que  llîomme 
peut  arracher  à  la  terre  ce  qui  doit  servir  h  entretenir  sa 
vie;  et  la  perfection  des' théorie^  ef  des  méthodes  n'a  point 
le  pouvoir  d'effacer  l'arrêt  qui  le  condamne  au  travail.  En 
présence  d'une  pareille  nécessité ,  n'at-on  pas  lieu  de  s'ef- 
frayer de  la'  dépopulation  des  campagnes ,  et  n*est-on  pas 
conduit, 'comme  malgré  soi,*à  rechercher  les  causes  de  ce 
mouvement  incessant  qui  entraîne  leurs  habitants  vers  les 
villes. 

Dans  certaines  localités,  'cette  dépoiyjlatron  rend  très- 
difficile  l'acc&mplissement  des  travaux  agricoles  ;  mais  la 
plfas  grave  de  toutes  ses  conséquences^  c'est  de  contribuer 
à  accroître  dans  les  grande  centres'  d^activît^  ces  masses 
populaire^,  qui  ^nt,  dams  tous  les.  tetnps,  un  embarras ,  et 
aux  époques  d'agitation  politique  un  daftger  toujours  me- 
naçant. 

Sachant  bien  qu'on  n'aVàit'encore  pu  saisir  les  véritables 
causes  dii  phénomène  dont  nous  parlons ,  et  bomprenaDt 
tout  Tîntérét  qui  s'attache  à  la  solution  'd'un  pareil  pro- 
blème ,  M.  R'choul ,  sans  prétendre  le  résoudre ,  a  pensé 
que  c'était  déjà  beâtrcoifp  fetre  que  de  le'  poser  sous  -son 
vrai  jour.  Laissant  de  côté  le  point  de  vue  théorique  ,'ir a 
abordé  la  difficulté  par  son  côté  positif,  ei  ,'au  moyen  d'une 
masse  considérable  de  donnéj^  numériques,  puisées  aux 
sources  officielles  ,il  a  'composé  un  travail  sthtistique ,  qui , 
sous  le  titre  de  :  Mouvement  comparé  de  la  population  des 

39 


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—  552. — 

villes  et  de»  campagnes  en  France,  contieDt  un  exposé 
lucide  et  exact  des*&its  pour  toute  l'étendue  de  notre 
pays.  W  nous  est  impossible  de  suivre  Tauteur  dans  les 
détails  dû  son  œuvre ,  les  chiffres  noué  *^nt  interdits;  lâais 
tous  leç-  hommes  sérieux  liront  avec  intérêt  le  métBoîre 
de  M.  Renoul,  et,  à*  TavenipV  il  devra  être  consalté  par 
tou§  ceux  qui  voudront.écrire  sur  le  même  sujet. 

Nous  sommes  naturellement  an\ené  à  mentionner  un 
livre  intitdlé  :  ProbUffief  d'agricûUtire.  Nous  ne  jurions 
trop  louer  la  pensée  qu*a  eu^  M.  Neveu-Derotrie  de  s'a* 
dresser  à  cette-classe  intéç^saflte  d'écoliers  de  qui  dépend 
l'avenir  de  notre  agriculture; et  de  venir  en  aide,  aux  in- 
stituteurs ruraux,  qui  ne  possèdent  pas  tous,  sur  lès  tra- 
vaux des  champs,  les  connaissances  pratiques  qu'on  pour- 
rait désirer.  Parmi  les  produits  de  rintelligenci^  humaine  il 
en  est  qui  peuvent,  pàn^leur  élévation  ou  leur  profondeur, 
préiendre*à  une  carrière  plus  brillante  ;  mais,  assurément, 
quant  à  l'utilité  f  aucun  n^Femportepa  sur  le' modeste  ou- 
vrage dont  nous  parlons. 

•  M.  Callaud  a  achevé  la  lecture  de  son  Histoire  de  la 
division  du  Temps.  Vous  dire  que^dans  l'exposé  de  l'indus- 
trie des  pendules*,  industrie  pour  laquelle  aucun  pays  ne 
peut  rivaliser  avec  la  France ,  M.  Catlaud  a  toujours  su 
captiver  Tattention  de  son  auditoire  par  la  variété  du  style 
et  la.  finesse  des  aperçus ,  ce  sérail  répéter  les  éloges  qui 
lui  ont  été  si  justement  donnés  pac  mon  prédécesseur. 
Mais  son  mémoire  s'est  terminé  d'une  manière  inattendue. 
On  s  est  toujours^  plaint,  a  (^it  y.  Callaud,  du  désaccord 
des  horloges  entr'elles,  et  c'est  avea  raison  :  combien  de 
désappointements,  de  malheurs  même,  dans  là  pratique 


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—  555  - 

de  te  vie,  dépendent  de  peUe  seirie  cause  J  Eh  bien  !  rien 
de  plus  fecile  que  de  remédier  au  mal'.  Au  moyen  de  1  e- 
lectric^,- mettez  en  commuurcation^toutes  les  horloges 
d'une  viU6,*et  vous  aurez  une  marche  par&itemeai  syn- 
chronique  ;  il  i^e  restera/ plus  qu'à  bien  régler  celle  qui 
devra  guider  toutes  les  autïes.  M.  Calhiud  ast  tout  prêt  à 
faire  l'application  de  son  système,  qu'il  a  exposé  aveic  dé- 
tail devant  le  Qouseil  général  du  département. 

Outre  ce  travail  original ,  nous  devons  à  M.  Callaud  un  * 
rapporteur  le  perfectionnement  apporté  aux  armes  à  per- 
cussion, par  M.  Fontanàû,  habitant  de^notre  ville.  Cette 
admirable,  découverte,  dont  la  simplicité  égale  l'impor- 
tance, si  précieuse  pour  l'humanité  à  cause  des  terribles 
accidents  qu'elle  est  destinée  à  prévenir ,  n'intéresse  pas 
moins  vivement  I^dministration  de  la^guerre,  puisque  son 
adoption,  par  le  Gouveroemeat  réaliserait  l'économie  d'une 
sommç  considérable  que  coûte  annpéllement  la  réparation 
des  fusib  de  l'armée.  Les  divers  organes  de  la  pressée  ayant 
donné  las  détails  les  plus  précis  sur  le.  système*  de  M.  Fon- 
tenau  et  sur  ses  avûttagès ,  nous  nous  abstiendrons  de 
rappeler  ici  ce  que  tout  le  monde  cbtlnaît. 

4ux  nombreux  témoignages  d'approbation  qu'areoueil- 
Us  M»  Fontenau,  la  Société  Académique  de  Nantis  a  voulu 
joindre  le. sien,  en  lui  décernant  une. médaille  d'argent. 
Elle  a  pensé  que,  dans  cette  circonstance,  M!  Fontenau 
apprécierait  l'intention  plutôt  que  la  valeur  intrinsèque  de 
la  récompense,  et  que  cptte  expreasron  de  la.  sympathie  de 
ses  concitoyens  lui  serait  plus  ch^re  que  des  distinctions 
plus  bril^ntes,  venues  d'ailleurS. 

Leanombreju0^  applications  industrielles  de  la  houille  v 


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qui  font  draibdra  avec  raison  quô,  dhm  VtttMiT\  les  mines 
qui  nous  foliniissent  ce  précieux  combustiUe  ne  viennent 
à  a'épuisef,  lui^  assurent  d^  débouchés  &ciles  et'  fondent 
très-fructueuse  son  exploitation.  Néatimoins^  dans  cer- 
taines localités  où  le  terràib  ^ofatlkfr  est  neoooveri  par  des 
couches  a^ifôres  d'une  grande  puissance /et,  pa^s  iné- 
puisables par  les  moyens  ordinaires  j  de  grands  sacrifices 
d'argent  sont  nécessaires  avant  qtie  des  bénéfiees  puissent 
'  être  réalisés.  Cette  difiiculté  avait  été  lèvéelen  paftiè  par  le 
procédé  Triger,  qui  a  peur  basé  remploi  de  Tafr  oonipriitté; 
mais  le  danger  que  courent  les  ouvriers  à  respirer  son  la 
pression  dé  trois  athmosphères  et  plus,  était  un  inconvé- 
nient des  plus  sérieux. 

H.  WolAi  a  fésohï  hi  question  au  moyen  d'un  ptùoèié  à 
la  fois  simple  et  économique,  qui  ne  fait  pas  cfourir  le 
moindre  danger  aui  ouvriers,  et^iui  peut^  s^appKqtier  à 
tra^rs  tous  lés  terrains  et  à  toutes  les^profendeiir^  Dans 
votre  dernière  séance,  un  rapport  de  M.  Btibierre  ¥0us a 
exposé  les  inooBtestabiés  avantages  du  procédé  inventé  par 
notre  coUèguey  et  qui* vient  d'être  appliqué  po*.  hiaifec 
succès  dans  le  t^ratif  bouiller  de  ]iiiii6««t^  Loire. 

Il  me  resfis  à  vous  parler  ici  des  visitées  dites  par  le  Jni- 
reau  delà  Société  cbe2 HH.  Lotz  père  et  fils.  Le^prelfticr 
nous  a  mis  sovs  les  yeitic  le  modèle  en^  boisd'im  pontde 
biais ,  destiné  à  b  gare  dû  ebenrin  de  fer,  modèle  gui  doit 
avoir  sa  place*  au  Conserviatoire  des  Arts  et  Hétîer&  On 
concevira.  l'intérêt  qui.  s'attache  à  uppaseil  travail  «  si  on  se 
rappelle  que  le  modeleur  aa  boie  est  rintèrmédialre  obligé 
entre  le  mécanicien  ou  Tiiigénieuk*  et  le  fonéeur  :  de  la 
bonne  ou  vicletise  oonfsction  du  modttfe  dépend  la  réunite 
ou  rinsucoès  de  toute  l'entreprise. 


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-  585  — 

]|l.  Iiots  Vk  BOUS  a  &ii  assister  à  l'assat  d'une  nmcdme  à 
broyer  Ul  canoë  à  siu^re ,  dont  nous  avçns  pU  admirer  la 
force  et  l*exceU(^te  ^écution. 

Votfe  Section  de  Médecine  a  continué  de  Aiarcber  dans 
la  voie  laborieuse  où  elle  est  entrée  depuis  longten^)s.;  de 
nombreux  et  importants  travau^s  soi\t  venus  témoigner  de  sa 
cooptante  activité.  Déj^,  dans  une  de  vos  séances  n^ensiielles^ 
H.  le  docteur  de.  Rivas  vous  en  a  fait  connaître  une  partie 
dans*uu  consciencieux  compte-rend^,  auquel  j'emprun- 
terai fréquemment  dans  la  revqe  que  j'en  vais  faire  ii. mon 
tour,  • 

Ifi.  SallioQ,  en  cesasipt  les  fonctions  de -président,  a 
adressée  ses  collègues  une  allocution  dans  laquelle,  jetant 
un  coup^d  œil  rétrospectif  sur  les  travaux  de  Tannée  écou- 
lée ,  il  a  &it  ressortir  Timportance  des  associations  de  mé- 
decins,  soit  pour  protéger  la  dignité  de  la  profession,  soit 
poijir  développer  les  études  pratiques,  et,  en  particulier, 
celle  de  la  topographie  médicale. 

M.  Piban-Dufeillay^  élu  président  pour  1850^  s*est  atta- 
ché à  mettre  en  ^lumière  l'importance  toujours  croissante 
des  $ciéi),oe8  accessoires,  et  a  engagé  la  Section  à  leuV 
consacrer  une  part  de  son  attention. 

A.  Aubinais  a  terminé  cette  année  la  lecture  de  son  tra- 
vail  sur  1^  supplice  de  la  guillotine.  Sans  suivre  l'auteur 
dans  les  développements  qu'il  dpnue  à  sa  pensée ,  nous  fe- 
rons ressortir  son  intention  fondamentale  :  plaider  en  &- 
veur  de  l'abolition  de  la  pein^.de  mort.  Certes,  le  vœu  si 


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—  556  — 

bien  formulé  par  M.  Aubinais  ne  peut  manquer  de\roQver 
de  l'écho  dans  tous  les  cœurs  généreux;  il  n'est  personne 
qui  ne  souhaite,  comme  lui,  que  bientôt  (es  progrès  de  h 
civihsation  rendent  imitile  à  la  société  l'exercice  de  ce 
droit  barbare,  dont  jusqu'ici 'pourtant  de»  hommes  non 
moins  connus  pour  leur*  humanité  tpi'éminents  par  leur 
savoir,  n'ont  pas  pensé  qu'elle  pût  sans  inconvénient  se 
dessai^r.  ^ 

M..Âubinais  a  également  continué  ses  importantes  com- 
munications sur  l'obstétrique ,  par.  ua  mémoire  sur  les 
fièvres  intermittentes  étudiées  dans  leurs  rapport?  avec  la 
gestation.  Les  &its  ctfrieux  qu'il  rapporte  fournissent  une 
nouvelle  preuve  de  la  filcheuse  influence*  que  les  contrées 
marécageuses  exercent  sur  la  santé  de  l'homme. 

Votre  Secrétaire  général  a  communiqué  à  la  Section  uae 
note  sur  Futilité  de  la  belladone  dans  le  traitement  de  la 
colique  dé  plomb. 

Parmi  les  moyens  qu'emploie  la  chirurgie  pour  réunir 
les  parties  molles  divisées,  iPen  est  un  ,'la  suture,  dont 
les  anciejis  faisaient  un  -grand  usage.  Plus  tard  et  surtout 
du  temps  de  Desault ,  on'  limita  l'emploi  de  la  suture  à 
un  petit  nombre  de  cas  «spéciaux.  Grftce  à  de  nouvelles 
études,  elle  a  repris  faVeur  de  nos  jours. 

M.  Gély  ,  notre  honorable  président ,  qui  a  déjà  publié 
un  mémoire  sur  un  procédé  de  son  invention ,  pour  la 
réunion  des  blessures  de  Tintestin,  vient  de  reprendre  ce 
sujet  sur  un  plan  plus  vaste.  Les  premiers  chapitres  de  son 
ouvrage ,  dont  il  nous  a  donné  lecture ,  sont  consacrés  à 
rhistoire  de  cette  curieuse  partie  de  l'art  chirurgical.  L'au- 
teur ne  s^est  point  contenté  de  faire  de  l'érudition  sur  la 


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—  S57  — 

foi  d'autruî ,  H  est  remonté  aux  ftources  ;  et ,  appréciant 
avec  Ifrsévérité^de  logique  qui  lui  est  babitiielle*^  les  do- 
coroeQts  souvent  trop  rares  et  parfois  contradictoirps  f\\xil 
a  trouvés  sur  sqd  chemin,  il  a  éclairci  plusieurs  pojnts 
obscurs,  et  rétabli,  nutant  que  possible,  ia  chaîne  entre 
l'époque  moderhe*et  les  temps  les  plus  jreculés/   . 

Si  nous  en  jugeons  par  ce  que  M,  Gély  nous  a  fait  con- 
nahre,  nous  ne  doutons  point  que  son  Kvre  ne  prenne 
rang  parmi  tes^pl^s  impoptantes  publicationide  Is  presse 
médicale<  contemporaine.  ;     '  .  '  ' 

If.  Hélie  a  mis  sous  les  yeux  de  1^  Section  une'  admi- 
rable ppparation  anatomique ,  à  propos  d'un  cas  d'otite 
interne  qui  savait  donné  lieu  à  l'abolition  complète  dp  sens 
de  l'ouïe. 

M.  Sallion  père  ji  lu  une  remyquablp  observation  de 
hernie  diaphragmatique ,  accompagnée  d'un-  dessin  repré- 
sentatif de  ce  cas  rare  de  pathologie^. 

M.  Marcé  s'est  fait  écouter  avec  intérêt  dans  le  récit 
d'une  curieuse  ot>serv«tion  de  rétention  des  n^enstrues  causée 
par  rimperforatipn  de  l'hymen, 

Pour  achever  ce  qui  regarde  la  àection  de  Méd^ine , 
il  me^este  à  Qientionner  le  rapport  de  H.  Bonamy  sur 
l'épidémie  du  choléra.  La  connaissance  que  vous  avez  tous 
du  zèle  laboiieux  et  de  la  consciencieuse  exactftudè  de 
l'auteur,  me  dispense  de  vous  faire  l'éloge  de  s^n  mé* 
moire:  je  me  bornerai  à  emprunter  les  lignes* suivantes 
au  compte-rendu  <{e  H.  de  Rlvs^  : 

y.  Bonamy  n'a-  pas  voulu  achever  son  travaik'sans  rap- 
peler la  belle  conduite  des  docteurs  Waizinski,  Caiileteau, 
Villeneuve  et  de  l'élève  Jalaber,  qui  sont  aHés  porter  des 


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-  558  - 

secoui^  médicaux  aux  cb*o]ériques«sur  différeiHs  points  de 
notre  déi)acteinei)t,  et  qyi.se  sont  acquittés. de  leur  UcIm 
avec  un  zèle  et  un  dévouement  dignes  des  éloges  et  de  la 
reconnaissapc^  de  leurs  concitoyens. 

Mais  ce  que  M.  Bonamj  n'a  pas  dit  et  ce  que  nous  vous 
dirons,  ç  e$t  le  courage  et  l'abnégation  dpnt  il  a  fait  preuve 
lui-pième  duràpt  cette  cruelle  épfdémie.  pès  1834,  lors  de 
la  première*  invasion  dU  choléra ,  il  obtint  une  médaille 
d'argent  pour  être  allé  secourir  les  malades  de  Saint- 
Naz^ire.  La  même  année  et  la  suivante  ^  il  fut  délë^^ 
dans  plusieurs  communes  de  nôtre  départeinent  pQiirHx>m' 
battre  une  dyssenterie  épidémique  qui  y  causait  une  ef- 
frayante miJirtalité.  .  * 

Tant  de  dévouement  devait  appeler  sur  lui  1  attention 
de  Fautorité  supérieure;  aussi,  le  27  février  1846,  fut-il 
nommé  méd.ecin  des  épidémies  de  1  arrondissement  de 
Nantes ,  sur  la  prés^tdtionde  M.  Touré,  qui  en  remplis- 
sait les  pénibles  fonction^  depuis  40  aqnées.. 

Devenu  po'ssess^r  '  du  titré  officipL  Jkl.  Bonamy  n'en 
déploya  que  plus  d'activité ,  et  bientôt  il  dut  parcourir  les 
commui^es  de  Sucé  et  de  la  Boissière-du-Doré  pour  com- 
battre la  fièvre  typhoïde^  de  la  Cbapelle-Bas$e*Mer  pour 
là  scarlatine,  du  l^roux-Bottereau  pour  la  dyssenterie,  de 
Carquefou  pour  Tangine  <:ouenneuse,  etc.  ^nfin,  sa  belle 
conduite,  lors  de  répidcmie  de,  1849,  lui  a.  valu. sa  no- 
mination dans' Tordre  de  la  Légion-d'Honneur,  distinction, 
certes,  bien  due  à  tant  d'éminents  services. 

Si  je  m'arrête  plus  longtemps  à  vouà^  parler  du  terrible 
fléau  dont  nous  QsOns  à  peine  nous  croire  délivrés ,  ce 
n'e^  pas  que  je  me  plaise^  rappeler  de  tristes  souvenirs; 


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-  m  — 

noais  Je  ne  puis  in'empécher,|{'cxprimerc(mibien  je  mis  fier 
d appartenir  à  un  corps,  dont,  pas  un«mombre,  au  môme&t 
du  dangoi',  n*a  failli  à  son  devoir.  Jalouse  de  réconi|ynsér 
le  zèle  des  médecins ,  et  ne  pouvant  s'adresser  à  chacun 
en  particulier ,  l'autorité  a  v.oiilu  honoi^er  le  corps  tout 
entier,  dans  la  personne  d'uii  de. ses  membres  les  plus 
recoramand^ble^.  La  croi»  de  U  Légion-d'Uonneur  à  été 
décer^née  à  M.  le  docteur  Marion  de  Prcfté  ,  à  qui  seë  qua- 
lités éminentes,  soit  comme  'Jiomme  ,«soit  comme  mé-^ 
decin ,  avaient  dès  longtemps  valu  la  haute  considération 
dont  il  est  entouré  ;  dans  la  circonstance  présente  il  se 
trouvait  tout  naturelleçieiit  désigné  à  J'attention  du  Pou* 
voir.        .    • 

•    - 

L'étude  des  sciences  naturelles  a  un  charme  entraînant , 
dont  la  séduction  n'est  bien  comprise  que  de  ceux  qui  s'y 
sont  livrés  avec  ardeur.  Ne  craignez  j^as ,  Messieurs,  que 
ce  d^but  vous  annonce  une  description  pompeuse  des  beau- 
tés de^la  ;aature,  j'aurais  peur  de  rester  au-dassous  d'au 
pareil  sujet;  mais,  iUfaut  bien  le  dire,  celui  qui  s'est  une 
fois  épris  de  cette  enchanteresse,  ne  connaît  plus  ni  peine, 
ni  fatigue,  s'il  espère  pouvoir  lui  dérober  quefqu'un  de  ses 
merveilleux  secrets.  Nous  en  avons  la  preuve  ^fos  l'activité 
incessante  de  M.  l'abbé  Delalande,  qui  nous  a  donné,  cette 
année,  la  fin»de  son  aicellente  nôticp  sur  lest  î'^^  d'Houat 
etd'Hœdic.    ,  •  ..  • 

Je  ne  reviendrai  pas  sur  cette*œuvrQ.dotU  le  mérite  vous 
a  été  signalé  des  l'annéf  dernière;  mais. je  tiens  à  vous.&ire 


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-  560  — 

savoirqud  M.  Delalaiide  n*a  pas  hésité  à  Caire,  sur  ces  deux 
'tl6ts,une4)ouvelleçtCursion,  poar  vérifier  Tauthentieilé  et 
l'exs^tîtude'dé  ses  documents. 

M.  F.  Cailliaud  a  communiqué  à  la  Section  un^émbire 
ayant  pour  titre  :  De  la  perforation  des  pierres  par  les 
mollusques.  H  démontre  que  Tôpinion  de  M.  Deshates , 
sur  ce  sujet,  est  beaucoup  trop  absolue,  et  qu'on  ne  peut 
reiiisër  à  certaine  mQllusques  la  feculté  de  percer  les  pier- 
res mécaniquement.  Il  appris  une  valve  de  pholade,  et 
opérant  dans  Teau,  il  a,  dans  l'espace  d'une  demi-heure, 
creusé  par  frottement  des  rainures  -profondes ,  à  la  surface 
dii  la  roche  d'où  était  sorti.ranimal. 

Quoique  je  n'aie  pas  à  vous  mentionner  d'autres  tra- 
•vaux  de  la  Section  des  Sdtenoes  naturelles,  il  ne  but 
pas  croire  qlie  l'ardettr  studieuse  de  ses  membres  se  soit 
refroidie  :  on  ne  marche  *qu'avec  lenteur  dans  la  voie  de 
Tobservation  ;  des  mois  et  même  des  années  peuvent  s'é- 
couler, avant  qu'on  ait  atteint  un  résultât  digne  d'être  livré 
à  la  publicité. 

Nous  rappellerons  que  ^  dès  l'année  flernière ,  des  *  me- 
sdres  avaient  été  prises  pour  la  compositiop.de  l'herbier 
du  département.  Les  botanistes  de  .là  Section  s'occupent 
activement  de  cette  tâche  qu'ils  ont  à  cœur  d'accomplir. 

•ccAoïi  des  Ketipes^aclcnceii  et  Arts* 

Ici ,  Messieurs ,  l'eQibarras  redouble  pour  'votre  Secré- 
taire; un  vaste*  champ  s'ouvre  devant  lui ,  il  y  jvoit  une  riche 
et  abondante  meisson ,  et  H  ose  à  peine  y  porter  la  main 
de  peur  d'abuser  de  vos  instants.,Rèsserré  dans  d'étroi- 


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~  S6i   - 

ttt  limites  Y  il  sent  i}a'il'  ne  pourra  manquer  <rétre  in- 
ccKiiptet.     •         * 

M.  Simon  a  continué  ses  communications  sur  la  Littéra- 
ture persane.  Cette  fois,  ce  n^  plus  l'épopée;  le  poème 
sérieux  ei  régulier,  c'est  le  chant  lyrique,  le  chant  popu- 
laire que  nous  allons  entendre.  Sur  la  scène  s'avance  un 
bandit  tiircoman\  nommé  Kourrouglou ,  dont  la  carrière 
«ventureu3e  représente  parfaitement,  par  se§  accidents  va- 
riés, k  vie  et  le  caractère  de  la  race  à  laquelle  il  appairfient. 
Poète  en  même  temps  que  guerrier^  il  chante  ses  propres 
exploits,  chaque  événement  excite  son  enthousiasme  et 
sa  verve,  et  les  vers  coulent  de  sa  bouche* comme  de 
source.  Ce  sont  ces  chants  improvisés  qui  ont  été  recueil- 
lis ,  et  qui ,  disposés  par  ordre ,  sous  le  nom  de  rencontres , 
ont  transmis  sa  mémoire  à  la  postérité,  {i'éducation  du 
héros' et  celle  de  son  merveilleux  coursier,  les  hauts  'fiiits 
qui  signaient  la  première  raoitfé  de  sa  vie ,  les  revers  qui 
viennent'  plus  tard  l'accabler,  et^  en  dernier  lieu,  $a  fin 
malheureuse ,  tout  cela  est  retracé  avec  cette  richesse  de 
couleurs,  cette  surabondance  d'images,  cet;te  harmonie  qui 
caractérise  les  langues  de  l'Orient. 

Ce  n'est,  après  tout,  qu'un  brigand  que  ce  Kourrouglou,  qui 
tue  sans  pitié,  et  qui  s'enrichit  dùfruit  de  ses  rapines  ;IéTécit 
de  ses  aventures  est,  d'un  bouta  l'autre,  empreint  d'exagé- 
ration ;  mais  cette  forfanterie  a ,  pourtant  au  moins  dans 
son  expression,  quelque  chose  de  grand  et  de  majes- 
tueux. 

Quittons  les  régions  lointaines  et  febuleuses  de  la  Perse, 
et  rentrons  en  Occident,  à  propos  des  études  sur  la  litté- 
rature française  au  XVII.*  siècle,  que  nous  devoQS  à  H.  Ch. 


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—  m — 

Livet  Qv^nd  on  remopte  «  Torigiiiede  l*klk>nie^«e  now 
parlons  f' on  voit  que  deux  éléments  ont  prkicipalenant 
contribué  à  sa  formation,  l'élément  giéoo4atin  et  Télément 
gaulois.  Tous  deux,  avant  .d^arrirer  à  se  fondre  poor  con- 
stituer la  langue  telle  qu,*eUe  axiste  aujourd'hui,  se  ioiit 
longtemps  disputé  Tinfluence  prépondérante.  A  tontes  les 
époques ,  les  littérateurs  de  notre  pays  ont  été  comme  di- 
visés en  deux  eamps,  dont  ('un  écmaîl  sur  son  drapeau? 
Imitation  de  Tari,  antique  ;  et  Tautre:  Liberté  de  Vesprit 
gaulois.  Dans  la  première  catégorie ,  'il  fiwit  comprendre 
tous  les  classiques  proprement  dits;  dao&  la  seconde,  ncius 
trouvons,  entre  autres,  Rabelais,  Molière,  Lafontaine, 
Béranger^  qui  sont  bien,  dans  leur  intraduisible  origina- 
lité ,  les  représentants  de  l'esprit  national. 

M.  Livet  a  arrêté  son  attention  swr  QBtte  époque  où  le 
langage,  .qui  avait  jusque-là  flotté  entre  des  tendances 
diverses  «  allait  enfin  se  %ier,  grflce  i  Imstitatton  de 
TAcadémie  française,  fondée  par  le  cardinal  de  Richelieu. 
A  partir  de  làVinfluencede  Tart  antique  a  dominé  généra- 
lement, malgré  quelques  heureuses  et  b^illaptes  prêtes- 
tation^. 

Parmi  les  défenseurs  de  Tesprit  national ,  M.  Lîvet  nous 
&i^  connaître  Saint- Amant,  Tun  des  premier^  membres 
de  l*Académie,  qpi  l'avait  chargé  de  la  partie  de  son  dic- 
tionnaire relative  au  style  bufleaqu^.  Ce  poète,  trop  vive^ 
ment  critiqué  par  Boileatf,  mériterait  bien  quelques  re- 
proches pour  ses  mœurs  plus  que  faciles,  et  pour  ,1a 
négligence  qu'il  apportait  dans  ses  compositions;  mais  on 
ire  peut  lui  refuser  de  la  verve ,  ni  même  de  la  grandeur. 

Malgré  les  progrès  du3  aux  travail  d^  TAcadémie,  la 


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—  563  — 

plus  grande  partia  ûe  la  nation  française  S6 -servait  encore 
d'un  langage  inculte  ei^  où  se  reflétaient  tes  mœurs  licen- 
cieuses do  temps.  Une  société  d'élite  se  donna  en  quelque 
sorte  la  mission  de  polir  et  de  réformer  à  la  fois  ie  lan- 
.gage  et  les  mœurs.  Réunie  à  l'hôtel  de  Rambouillet ,  sous 
les  auspices  d'une  femme  d'esprit  et  de  goût,  el(è  s'atta- 
cha* à  proscrire  tous- tes  mots  cûpables«de  blesser  l'oreille , 
ou  contraires  aux  règles  de  la  plus  sévère  bienséance.  Hais 
ce  '  rigorisme*,  poussé  jusqu*à  réxagération ,  ne  tarda  pas  à 
donner  prise  -è^  la  critique,  et  ce  fiit  lui  qui  fôunfit  S  Mo- 
lière le  texte  de  sa  eoinédie  des  Pr^iemes  ridicides. 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  ne  pent  nier  l'influence  que  cette 
compagQie  distinguée  a  exercée  sur  notre  langue  :  c'est 
elle  qui  lui  a  imposé  l'sir  dé  bon  ton  qui  la  caractérise 
quand  elle  est  parlée  pur^me&t,  ei  qui  a  préparé  aux -grands 
écrivains  du  siècle  de  Louis  XlV  Ilnstrument  dont  ils 
ont  su  faire  un  si  brillant  usage. 

Nous  ne  devons  pas  oublier  de  motionner  Ici*  un  livre 
publié  par  un  auteur  nantais,  mademoiselle  Elisa  Morin^ 
qui  s'est  aussi  Mi  connaître  par  de  gracieuse  poètes. 
Supprimer  d'un  seul  coup  toutes  <le^  règles  embrouillées 
des  participes  cassée ,  et  les  rem^^cer  par  un  principe 
aussi  simple  à  appliquer  que  facile  à  concevoir ,  tel  est  le 
mérite  de  ae  consciencieux  itwmïl  d'érudHion. 

Sur  *le  terrain  de  la  littérature  nous'  retrouvons  H.  Cal- 
laud.  Vous  saVeir  déjà  quelle  part  il  a  prise  ^Itx  travaux 
d'une  autre  Section  ;  j'ai  à  v<Tus  entretenir  maintenant  de 
son  talent  pour  la.  poésie.  L'analyse  d*un  p^ète^  c'est  chose 
assez  difficile  à  £i«fe,  etsuirtout  pei»  attrayante  à  écouter: 
choisissant  doDo  parmi'  les  charmafites  Mies  que  fauteur 


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—  S64  — 

a  lues  à  la  Société,  je  le  kiaserar  parler  hii-méine;  j'y  ga- 
gnerai à  coup  sûr  et  mes  auditeurs  aussi. 

Le  VIc^TC» 

Un  Fleute  parcourut  une  vaste  contrée  *, 

De  ses  flots  orgueilleux  Y 
A  chaque  source  d'eau 'qu'il  avait  rencontrée , 

S'écriait  dédaigneux  : 
Eh-!  quoi,  faible  ruisseau,  vers  moi .4u  vien$  encore 

Apporter  te  tribut? 
Tu  viens  baiser  l^spied^  du  mattre  qui  t'honore , 

Ton  refuge  et  ton  but  !  .     • 

A  d'autres  il  disait:  0  rivière  indolente, 

A  l'ombre  des  roseaux 
Tu  viens  mftler  ton  onde  à  ihon  onde  puissante  : 

Pour  recevoir  tes  eaux. 
Je  suis  bon  tl 'écarter  et  d*o\ivrJr  mes  rivages  ; 

Va ,  va ,  porte  plua  loin 
Cette  eali  tant  désirée  en  des  lieux  plus  sauvages. 

Et  dont  je  n'ai  besoin. 
Il  en  dit  tant ,  qu'enfin  ^  lassé  de  sa  sottise  ,• 

Quelqu'un,  en  cheminant, 
Répond  :  Tout  beau,  ^Seigneur,  &ut-il  donc  qu'on  te  dise 

'  Ce  qui  te  fait  si  grand  7 
C'est  npus*,  quLremplissons^tôa  lit  profond  et  large 

En  nous  mêlant  à  toi.  ' 
Le  moindre  des  fardeaux  dont  tu  portes  Ja  charge 

Serait  trop  lourd,. crois-moi, 
Si  tu  te  promenais  seul,  fims  ta.  longue  course, 


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—  565  — 

Dont  io  semblés  srfier. 
Et  rhumble'  filet  d'eau  qui  jaiUit  à  ta  source . 
Ne  verrait  pas  la  mer.  * 

M.  Drio!Iet  a  écrit,  pour  une  publication  pittoresque  sur 
Nantes  et  la  Loire-Inférieure,  une  curieuse  notice  sur 
Tarchitecture  nantaise  au  XVIU.«  siècle.  Cette  intéres- 
sante composition  étant  dans  le  domaine  public,  nous 
n*avonç*  point  à  nous  y  arrêter  ici.  J'appellerai  au  con- 
traire voire  attention  sur.  le  mfémoire  dix  même  auteur 
concernant  la«salubrité  des  logements  d'ouvriers.  C'est,  en' 
effet,  une  question  dotit  la  solution  est  urgente.  .Tandis 
que  notre  vHle  s'embellit  chaque  jour,  que  de  gracieuses 
et  élégantes  constructions  s'y  élèvent  de  toii^tes  parts, 
nW-il  pas  douloureux  de  penser  (^ue^  dans  certains  quar- 
tiers, des  familles  entières  sont  condamnées  par  l'étroiiesse 
et  la  malpropreté  de  leurs  lojgements ,  à  vivre  dans  une 
atmosphère  dont  la  respiration  les  expose  à>  une  foule  de 
maux.  Si  cotte  plaie  n'a  pas  atteint  chez  nous  la  terrible  gra- 
vité Qu'elle  présente  ailleurs,  elle  n'en  appelle  pas  moins  un 
remède  prompt  et  radical.  Après  avoir  fait  connaître  l'é- 
tat de  la  question ,  ainsi  que  les  obstacles  qiii  empêchent 
de  réaliser  les  améliorations  reconnues  indispensables, 
H.  Driollet  expose  comment ,  au  moyen  d'un  système  de 
primes  sagement  accordées  aux  propriétaires^  on  viendrait 
à  bout  d'j  concilier  tous  les  intérêts.  Il  trouve  de  plus, 
dans  ce  système,  un  grand  avantajge  pour  la  salubrité  gé^ 
nérale  et  la  facilité  de  la  circulation  ;  c'est  d'arriver  bien 
plus  vite  à.  élargir  les  rues  et  à  en  régulariser  l'aligne- 
ment, -  .      ; 


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—  566  — 

A  ce  propos,  nous  fêliciterons  TAtlminislration  ma- 
nicipale  de  son  empressement  à  ejcécuter  la  nouvelle  loi 
promulguée  sur  cette,  matière.  Elle  a*  bien  (ait  voir 
toute  sa  sollicitude  {n>ur*les  classes  laborieuse  de  no- 
ire  cité^eA  remettant  leurs  intérêts  les  plus  chers  entre 
les  mains  d'hommes  dont  les  lumières  égalent  le  dévoue- 
ment. 

M.  deWismes  nous  a  adressé  une  brochure,  qui,  sojis 
le  titre  de  Résurrection  de  rArchiteclurc  gothiquie,  re- 
produit une  communicafion  orale,  faite  Tannée  dernière, 
par  Fauteur ,  au  Congrès  de  T Association  Bretonne  ,  en 
réponse  à  uAe  des  questions  du  programme  ^e  cette  So- 
ciété. 

La -pensée  fondamentale  de  l'écrit  dont  nous  parlons, 
c'est  que  chaque  genre*  d'architecture  correspond  à  une 
époque  de  la  ôivilisation  humaine ,  et  qu'il  en  exprime  à^sa 
manière  l'esprit  et  les"  mcBurs.  Une  revue  rapide  des 
transformations  de  l'art  depuis  les  temps  les  plus  re- 
culés jusqu'à  nos  jours,  montre  qiie^  chaque*  phase  du 
développement  de  THUmanitéa  eu  son  Système  architectu- 
ral ;  notre  époque  est,  jusqu'ici,  la  seule  qui  n'ait  pas  produit 
le  sien,  'froiâ  écoles  sont  en  présence:  les  partisans  du 
gothique,  ceux  dé  l'art*  gréco-romain,  ceux  de  la  renais- 
sance. Toutes  trois  ont  leur  raison  d'être,  parce  que  cha- 
cune d'elles  répond  à  des' besoins  divers  :  le  gothique  con- 
vient surtout  aux  églises ,  l'art  grécorromain  aux  palais  et 
aux  édHices  publics  de  toutes  sorteis.,  le  genre  de  là  renais- 
sance, au  contraire,  s'adapte  mieux  aux  mille  nécessités  de 
la  vie  privée.  Le  caractère  de  notre  époque,"  c'est  l'ecclec- 
tisme  dans  fart  ^mme  dans  là  science ,  comme  dans  la 


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-  867  •— 

pbilôsçplHe;  -  Hiftis  avec  ceHe  t^ndancer  on  Ae  ofeéê  pas  Je 
système^,  on  se  home  à  imiler  çà'et  là  iantyJt  un  style,  tan- 
t6t  faotre,  l'essential  e^  de  se  tenir  a^sévprès  de  son  mo- 
dètfe  potir  en  con^E^^r  Tesprit  et'I^  proportions.  *         '' 

De  nos  jOtfrs,  Icfs  éludés  historiques  SbsorbeYit  à  elles 
seaies  ujpe  gronde  part8e»effoHs  intenecCuéla;v<nre  Section 
des  «Lettres  n'est  point  restée  étrangère  à  ce  moutenient^ 
A  llM.'.Vâpdier^t  Tflbdt  sent  dues  dlnt'éressantc?  étales 
biogcaphiques.  Le  prenli^r,  à  propo!^  d'Alain  Chartier, 
poète  et  èiârirain  distingué  du  XT;*  sièeie,  dont  les  travaux 
ont  contribué  à  la  formalipu  du  langage  R'ainçais,  Aoiiè  a 
p»éseMé  le  tableau  de»Ia  acK^iété  de  ce  telhps-târ,      ' 

H.  Vandier*  emprunte  ses 'couleurs  &  un  drapie  d^Alain 
Gharti^D,  intitulé*  iV  €|irAi(,-^'e^t-ii«dire' le  Courtisan, 
copdfositimi  dftîis  laquelle  les  faits  réels  se  produisent  en 
partie  ^us  le  voilé  de  TaHégorie ,  et  où  sont  traitées  suc- 
ceêsîveniéiit  toutes  les  grandes  quQstfons  qui  s'agitaif^t 
aloTflb  Gltortîer  ihei  éii  seèn)g  tour  à  tour  chaque  ck^se  (le 
la  société >  critiqpe  sévëremenlf  Jes  vices  dé  tous,  et  ftrtt 
vair.qpHis  sontMa  sourbe  des  maux  de  'la  Prân,ce  qui 
étaient  à  leur  ogpibie^  àbrs  qtiè  l'invasion  étrangère  et 
les  diasensions  tntestinesselrédnissâient «pour  produire  cet 
affreiir  désordre  do^it  son  couvre  offre 'une  peinture  fidèle 
et  sans  exagération.  *  *      '        ' 

En«8ongean|'à  de  partais  désastre^,  ajbiitc  M.  Vândier*', 
on  voit  avee  peine  qu'à*  toutes  les  époques  de  notre  his- 
toire ^  les  mêmes  pesions  se  sont  reproduites, soùs  une 
formé  ou  cou»  l^tre  «  et  que  toua  nos  nvittieurâ  rtous  sont 
venus  Ue  la  èivision  et  delà' haine  des  partis.      • 

Déjà  le  XYr  'tàM%  avait  été  vrvenlent  agité  ptft  lei 

40 


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—  «as  — 

contrQyçrses  relig^uses  jiijui  (Jevaieot  ^boi^ir  au  XVI.*, 
à  ce  gcaad  schisme  auqfUel  oa  »  donoé  le  oom  <le.  Ré- 
fpripe^  Parini  les-nombreuses  sectes^qu'çD  tii  surgir,  celle 
des  anabaptistes  n'est  pas  une. des  moins*  céièbrea,  soit 
parla  sin^^ularité  de 'ses  doctridesj^soii  à  cause  «des  .flots 
de  sang  qu'elle  fit  v'ertèr.  M;  Talbot  vous  a  retracié  Ja  vie 
du  ^lu^  illustre  de  ces  Sectairêçi,  Jean  Boeoid  ou  Bpckel- 
sog-yplus  connu  sous  Je  «.omd^Jeaff'delieydiB.  ;  . 

Ce  fut  une  bizarae^destmée  que  celle  de  cet  hoipme, 
dont  la  célébftt;^  ne  pourrait  se  .coniprendra/  si  on- ne 
se  rappelait  quçl  délire  frépétiqife  possédait  ^alofs  les  es.- 
prits.  Naissaoie  lUégitiaie,  pauvreté  dans  sqîi  enfance, 
éducation ^ presque  nulle,  ei^erciee  d*un  uiétier  maniiel; 
mais  grande  intelligenoe ,  c)évelq|>pée*.pluç  tard  par  des 
voyt^es,  et'  rehaussée  par  des. avantages  physique ^  y&a- 
gmation  ardente^  talent  poétiqv^e^  jxioQurs  licepaie(ises, 
ambition  démesurée^:  tele^tie  tableau  heurté  et  plein  de 
contrastas  qi^e  présentent  la  vie  .et  le  paract^^  de  Jean 
Bocold.  .  * 

II  CQmmel^ce>sa  vie  publique  en  quittant  son  tiiétier  d^ 
tailleur  pour^lui  d'hôidier  etile  poète.^Dans  .cette  >iou* 
velle  position,  iL parvient  à  se  Êiire  des  habitués  (le  son 
hôtellerie  et  des  fidmirateur^  de  son  talent  -draoïatique 
uhe  foule  de  clients ,  qui ,  lorsqu'il  chercha  à  devenir  chef 
de  seqte-  rdigieose,  ^  traiisfocment  tout  t  coup  e*  dis- 
ciples. A  leur  tète  y  il  ooçrt  se  joindre  au^  aii^ibaptistes 
qui  fais^^nt  de  nombreux  prosélytes,  et  ne  tarde  pas  à  se 
placer  pacmi  les*  plus  infl^eata  d'entre  eus.,  AienUU,  s'em- 
parant  de  ^unster  dont  l'^v^que  Waldeok  avail  été  chassé, 
il  essaie,  mais  ei^'^yaiQi»  d'^rgaaieer  dans  cette  ville  une 


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—  S69  - 

sorte  de  RépuMiqne  ég^lîtah-é.  Irrité  par  tes'  obstacles ,  tl 
se  sett  de  son  fnflftenoe  religieuse  pour  s'emparer  du  pou* 
voir  absolu >  et  -s'abandonne  à  \ous  les  *  ex,cès  'de»  la  dé- 
bauche et  dé  la  cruatft'é,  jusqu'à  ce  que,  tcmibé  au  pou- 
voir de  ses  ennemis,  il  ^uffre,  sans  proférer  de  plaintes, 
les  toitures  qu'on  lui  fait  endurer.- 

M.  Taibot  Hembiné-'  par  (es  réflexions  suivantes  ': 
Le  .spectacle  que  néus  donne  la  vie  de  Jean  ftocold,  pour 
parler  avec  un  historien  de  ces  époques  fune$tes ,  fist  une 
tiaute  le^n  poiir  ce^  Hommes  qui  ne  craignent  pas  de 
s'avent(in»r  dans  la. voie*  des  réformes,  sans  cbihptèr  ce 
qae  rôn*  doit  à  ta  mélnoire-du  'passé;  et  sa'ns  chercher 
d'aiHre  *  appui,  pouf  réfaire  le  *  monde  ;  .que  le  conseil  de 
leurs  fealculs  personnels,  ou  de  leurs  inspirations  plus 
trompeuses  encore.  Les  intenfions  de  quelqûes#mis  peu- 
vent être  louables,  leur  âMe  grande  ainsi  que  leur' cou- 
rage ;  maiiL  leurs 'plans  sont  creulc  et  leur  tridMphe  é{{lié- 
mère,' parce  que* leur*  intelligence  des  besoins  de  llidma'^ 
nité  n'est  pis  compIëte.,Impuissan($  à  résumer  en  eux  les 
idées  compflefles  de  la  société  j  ils  damuen^  ce  qu'ils  ne 
peuvent  comprendre,  et,  à  lear  idsû^Hs  se  détachent  du* 
possible,  peur  habiter  tes  sphères  étroites  de  Torgùeil^ 
de  l'égotsme,  deMa  passion  repue  d'or  6t^qu6iquefdis'*de 

Ce  même  siècle,-  si  fécond  en* événements^  a*  fourni  à 
M.  Grégoire  le  sujet  d*unè  importante  é(«desur.  la  Ligne 
en  Bretagne,  ^loift  H  no'ùë  a  communiqué  un  fragment.  "  ' 

L'auteur  rappelle  d'abord  les  circonstances  qui  avaient 
amëhé  la  réuhion  du  ducbé  de  Bretagner.à  la  courqtpmixle 
Frlinte  y  et  fiiit  voir  que  si  ^  d^ns  eettè  conji>ncture,  leà 


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-  5f  0  — 

souverains  s'éftacbt  n^  d'abc^,;ltt  fW}Ctt  n'avaieal  pas 
faU  de  mèQie.  Les  esprits -de  la.  nuqorité  des^BcetODs 
étaient  restés  Iipstiles  à  la  Fcaacé  ;  les  Mités,  n'avaiefit  pa, 
en  un  inataol,  &ire  disparatlre  l?e^it*nflti<iiai;.ea  on 
mot  j  les  populations  de  la  Bretagne  n'étaiefift  point  epoore 
devenues  françaises.  Qii*on-  tienne  compte ^  après-  cek^  de 
fattachenaent  Aes  Bretons  à  la  religioâ  tathôlkiae ,  on 
concevi^  €|tfilaaienl  quels  germes  de  rébeHîon  ezârtaieiit 
dans  lt'proYio<i9;etcopiment,  ens^adrèssanfrà  Ifr  foîsatti 
souvenirs  tk  Ui^tionalité  et  aux  croyances  religteusee,  H 
devepiait  bcile  d'ébranler  Tautorité  royale  encore  mal  af- 
ferniie..  RieA  n'était  Jonc  plus  naturel  que  renthmsiasme 
avec  lequel  une  -partie  des  Bretons ,  ^croyant  sa  foi  me- 
nàeée\  lûdbéra  à  la  Sainte-^UniW  La  ^  faiblesse  et  les  ter* 
giversatioos  de  Hcjpri  III  éfiieùl  peu.  foites  pour-iee  hsso- 
rer  ,*  et  ils  ne  pouvaieta  aeï^epter  la  pem^Mivë  d'obéir  à 
un  prince  étranger  et  héréCque ,  torsquos  par  bi  morC  du 
duc  <f  Ânjou^  Bent i  de  Navarrç  fut  devenu  rhéntier  légi- 
time, du  royaume  de  F/ aùce.   .  • 

M.  firégôine,  en  déroulant  *(e  tableau  de  «e^  temps  de 
^liscordâi,  ^rappelle*' javTivalilé  existant  entre  Nantes  et 
Rennes  à  propos  du  siégo dii  Paiieq^ent «  rivalilé  qui. ^en- 
traîna la  première  dans  le  parCi^  de  la  Ligue,  tahdis  que 
la  seconde  resta  fidèle  au  Roi.  H^trace  le  portrait  du.  duc 
de  Mercoebrf^  cet  homme  aï  4iver9eiBent  appréeié  par  les 
lUstoriens^  qui  aurait  peutétreiétabli  Ji  son  profit  Tindé- 
pendance  bétonne»  s'il  avait  eu  dana^l^.-cavaetère'plusde 
fiermeté  etde^décisidn.  Mercosur,  devenu  <^ef de  la  Ligue 
eii.' Bretagne ,  y. soutint  la  guerre,  pendant  dix* ans;  an 
grand  détriident  dû  pays  qbe  tous  hs  iéaax  «ccablèrent  à 


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-  57i  - 

b  Ibis.  Il  sasouiiît  è'iienri  IV ,  aprèf  que  celui-^i  eàt  4lb-', 
îufé  lapnUaitanlûmet  ^,'*  de  te  jour,  ia  réunien  Jie  \n 
proviftciç  à*  la  'Jtrmtm  &t  défMitiv^. 

Noos  terniaoas  iwtte  analvBe  e&  /Bxprioi«it  le  âéêk  que 
r«Biiirrtf  êm  iL.  ÛrégQÎra  soit'  bienièt  mise  au  joar^.'et  Qu'elle 
oblMene  le«aiiQcès  qu'aUe»  nous  a  pàra^inèriter .  ^       .  » 

DaM  aa  bqssîûa  le  1848.,  le  CcMOgiè^  de  f  As^ocurtmn 
Breloone  avait*  fNlBd  une  quealiokî  relative  mt  Saints  de 
Bralagne^  cai  ^a  été.traîtée,  an  pqint  de  vfte  historique  , 
par  M«.  k.fèe  ia  Boaderia^  nanbre  correspondant  de  la* 

Pi»mr,  bien  ooHipreadffé  te  rôle  hiatoriqve"  desJSaints  de 
Bretagne,  i^  dia  «notre  «vaAl  coUègue ,  tl  faut  sb  faiiV 
une  idée  exacte  de  re  qu'a  été  Tocoùpatioa  deÏA  péninsule 
armoffleane  pa»  les  Iretona  ôisuiaires  épiigrés.  Ce  ne  fut 
poin  Wa  aonqufttê  gueirièrez-eoBimecertaiils  historiens 
Tout  avaaq^;  anats  les  popoialiona  cbtétieimeÀ  de  la  Gam^ 
bri»,  aaaa  (Sessa  rafpuléea  par  réfpée'  dea.  Sanoaa,  «don^ 
teura  4>'0diB.,  veipient  mettre  leurs  per^MlDes.etlettr  tulle 
en  aûielèaua  le  cominent.  fëinigrtkti^ki  a  diHré'  plusieara 
sièelea,  et  s'est  iiilo<,  non  en  masse,  m^is  suçoessivèment 
et  par  juwxMi  plus  ou  moins,  nombreuses,  guidées,  lapin- 
paat-da  lerap%^  p^  des^ebèfe  spirituels.  U  est  constant 
que  les  Bmiatta.  sésont  fixée  dans  les  «partieslas  phis  sau- 
vages de*la*fMres4U'f)ev  qui*  ie  trouvait  alcnr?  en  grande 
partie  dé^raa^^Sur  quelques  points,  des  restes  de  popula- 
tions gauioîaas  ^leiit.«eneoré  sovmises  aiï  druidisme ,  ^ui 
résidla  longtemps  *  et  atee:  ofAoifttreté  à  la'  propagande 
Qkfétieaae^  Cas  cirèonstanoea  eapliquâat  l'action  à  la  Ims 
apdaiaK4ue'at>ci«tUeatriGedes  Saints  de  Bretagne  :  partout,* 


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~  578  — 

enm^e  temps  qu*i|B  pc^henl,  l%fm§iifùi  oa  In  voit 
abatl|nt  les  fo(éta,  défrid^qi  la.terre'tfoodaBt'dei  éooks; 
plustard^  adoucissant,  par  leur  eienqrie  et,' an  besoin, 
par  leui:s  énergiques  remontrances,  le  caiMtàre  Ciraiicbe 
des  cbefe  et  des'  vois  bretons  ;  ^nfin ,  enseignanfc  fc  leurs 
concitoyens  les  moyens  les  plus. efficace^  pour  résialer  à 
leurs,  ennemis  et  maiatenir  rindépendance  natiooye,  si 
souvent  menacée  par- lés  Fraiiks  leurs  votsins. 

C*est  ici  le  lieu  de  nqppeler  un  ouvrage  en  conra  de  pa- 
•blicatiûo,  destiné  .a  conso^ver  Ja  mémoire  de  tous  les 
enfiints  de  la  Bretagne,  doht  la  vie  a  eu  quelque  éoiat^ 
nous  vouloQS  fiarler^ie  la  Biograpbie'Bret^uiedo>M,  Levol, 
qtii  compte  parmi  se»  collaborateurs  plusieurs  membres 
de  notre  Société..'  .       ■    . 

L'«rt,avoHSrno)isdUplus  baut,  re^ésenle,  eii  qadque 
sorte,  l'esprit  et  la  civilisation  de  Tépoque  qui  l'a  produit: 
nous  en  trouvons  une  expression  bien  autrement  fimppante 
dittabwlég«slaiioO«  L'ëiamen  pai^aHèle  .des  fiùta  bntoriqiies 
et  dos  cbangemea^  successifs  qnelu  temps  amtee  dans  le 
Code  des  peuplea,  moou*e'  eliUre  les  uoa  .et  les  aoferas  une 
parfaite  corrélation.  C*.est  là  «un  sujet  d'étude  des  plu&atta- 
cbants,  auquel  M.  .Cplombel  conmcre  les  lolairs/pie  lui 
lais^^t  ses  nombreuses  occupations  puhli4tte8  el  pavées; 
et  il*  y  trouve  la  matière  (fimportantetf  comoMmicatioos 
qa^k-vous  éyxMitez  toufours  avec  un  nouvel  iméadt. 

LIannée  dernière^  M.  Colombel  vous  avait  ejqiosé  les 
vices  des  diffîi«nts  systèmes  e6niemporati9,  donk  le  com- 
moittsme  eet  la  dernière  eoft8éqttettce;petle  fois,  â  reoher- 
cbe  l'origine  de  l'idée  eommoniate ,  et  oommeose  par 
démontrer  «qu'elle  n'e^ûsteit  pas  dans  i'airtiqinté<*L'îi 


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—  5T5  — 

ikm  ée  Fesdavage  et  rextension-doBnée  à  \fL  puissanee 
paleiiidle  présenraient  lès  ^sociétés  anciennes 'des  causes 
dé  désordre^  quU  de  nos:  joaraf  t)ht  leur  source  dans  le 
prolétariat  V  d*uqe  part^  et  de  Tautrê,  ^dans  l'esprit*  re* 
maan t  ^le  ia  jeunesse.  On  ^nçoit ,-  dès-lcm  i  l'application 
poasiUe  des  théories ptiiloaophiques ,  par  exemple,  de  lu 
Répobliqu^de  P]aton«  pour  une  société  d'élite,  qui  trou-. 
vaitp  daqs  l'eaclavage  un  moyen  de  dégagement  qui*  nous 
mamqsé  aujourd'hui;  mais  ^le  rêve  spéculatif  de  «Platon 
n'eet-poinf  du  communisme ,.  les  «esclaves  restaient  Hors  )a 
loi^  pMr  lea  anciens,  c'étaient  des  hommes. d'une  espèce 
in^earn.  .      «  * 

L'Église,  en  affranchissant  .les  esclaves,,  a  créé  le  pau- 
périsme et  le  prolétariat;  nmis  a-t-el|e  prêché  Je  commu- 
nisme? Assurément  non.  Elle^  recommande  Taumône,  le 
renoncement  f(ux  biens  de  la  terré  ;  m^is  elle  consacre  la 
tégitimîté do k prbpriét^V  ep.  indiquant  ses  source^,  Thé- 
rédité  ei  le  travail. 

'Les  Pères  de*  l'Église-  étaient  des  moralistes  qui^  ne 
prétendaient  point  à  la  science  économique  :  les  citations 
^'on  -leu*  a  lemprantées  pour  étâyer  les  théories  cc^m- 
rounautairesv  n'ont  point  la  signification  qu'oh  a.'vôûlu 
leur  attribuer.  Enfin ^  les  essais  tentqs  au*XVL'  siècle -et 
sur  lesquels  on  veut  s  apguyep,  ne  s'appliquaient'  qo'à  des 
associations  limitées,  et  ne  mènent  point  à  une  solution 
géndraler  de  la  qdestion.. 

Le  secbnd travail  de  M.«Coldmbel  est  ^un  etailien  de  la 
législation  des  Valois,  résumée  dan3  le  Code  BrissoQ. 

Au  XYL*  sièole,  dit^fauteûr,  la  juridiction  royale  avait 
presque  partodt  rempkcé  les  justices  seigneuriales,  tom- 


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-  S7À  — 

bées  en  discrédit*  l^s  jcoîs  de  Fnmce  am^,  <te  \Kmaa 
heure,  seaii  le  daog^  de  ûàss&c  le  droit  pobKQ  wt  ■mâhs 
d'une  foule  d^  particuliers,. ^ui  ponvaieot  «bvaar  4e  lepir 
pouvoir,  et  ils  ayaiént  travaillé  avec.éDari^e  ,et  perBévé* 
rauce  à.  j^ssaisic  les  lambeaux  de  puissaoce  dont  leur» 
grands  vassaux  étaîent.en  posaesaioii.  De-nofnbreuaeaor- 
dônnanees  v)yales  témoignent  .des  cpn^tes^ 
du' pouvoir  oentrâl,  et  sont  destini^à  les  ooasacror. 
oea  ordoonaiAces  ne  soo4  point  liées  entrç  elte$  pat  iioe 
peasée  d'ensemble,  liées  cb^une à preip^'d^im'fiâtbéler- 
aûn2«  elles  réunissent  souvent  les  objets  le^plii^^ispaiatiis, 
et  présentant  un  pêle-mêle  auquel  Henri  IIÎ  voui^  fêtaé- 
di^r  en  les  codifiant. 

Ce  qa'(^  fit  alors  Xvec  avan^ge  pour  le  droit  p^ic, 
on  n'osa  te  tenter  pour  Je  droit  civil.  L*étai  des  biens  et 
des  perstQoes  continua  d'être  légi  par  la  ootitunn^  féodale, 
avec  toutes  les' variations  <iu*elle  {Késantaii,  suivait  les  lo- 
calités :,  c'était  un  droit. dç  sang,  un  d^(Ht  de  fiiaiiUe, 
trop  respectable  pour  qu'on  osât  y  porter  là  oaaiia«  Le 
roi  n'exerçait  sur  «tes  matières  «qu'un  droit  de  surveillance 
qui  avait  trait  à  la  forme ,  mais  n'^tieîgnait  p^  1^  fond. 
IlfaH.ait  la  Révolution  de  93  pour  qu'on  pût  réalûserce 
dont  on  sentait- {Mirtout  le  besoin  , 'radoptioa4'ttii\.GQde 
civil  uniforme,  pour  toute  l«étendue  du  paya»   . 

Ne  pouvant ^suivae  M.  Golombel  dans  l'afqirépiatâaQ  des 
vices  que  présentaient,  au  XVI. ^  siècle,  le6  lois^  péaates  et 
la  procédure crio^oelie ,  nous.ae.  devons^  onUier  d'a- 
jout^ ^que  partout  il^  a.  su,  {^ai;  la  clarlé  de.rexpoaiiioD 
et  l'attrait  de  la  forme  littéraire^  i^jouter  à  rioCécéld^ si 
grand  de  son  sujets  «  * 


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—  875  — 

.  Efi  giiMval,  «tt'*Qe  dlôl  pas  aaser  ce  que; les  recher* 
cbes  d*éradition  exigent  de  patieqt  labeur ,  de  conaais- 
saaces  prctf^iifdea'^  èV  variéiek  Ope  de  vdlleâ  coûtent  par- 
Iqn.  ai&/nifaiita'lB  fixation' d'une  ^aClD  ou  ia  dél^mina-* 
IMH  d'ttD  poitit  de  la  ^iograpltie  aneienne  IQue  d'eiitfiiiis 
et  séaVftnt  de  déoeptbns ,  avant.de*  pouveir  réunir  les 
éURH)|Qfls  6p«rs  dfwe  démonstration  J  Ce  n*e$t  i^S/trop 
de  tfii^n  netie  recontoaiamiee  |)ou^  oe&  travaax  qui  hou^ 
rendent  l'^étude  facile,  et  ^our  iés  boçofties  qui  sy  pansa- 
oreAt  \fHfi  ^Miere^  Castrée  que.  fait  depuis  longtemps  M. 
Ittxeu) ,  qtti  nous  a  dopaé.  miette  année  deuK  cârieux  mé-* 
meigeo  sur  Jlaatéa.'  Le  premier^  intiiUilé  de  Vuifkientu  ea^ 
pitj^  de  MamnèU9s  étahUt  d'ude  m^ère  inoontestafile  » 
pwr  de  iNiinbre«]L  téttie^àagesv  que  cette  .capitale  n'était 
pwit  sHaée  a»  lieu  que  Baates  occupe  au|ottrd'bui.  Miis 
quelle  était  donc  cette  capitale  ?  C'est,  ce  que  routeur  ae 
pvopese.de  nous  £iire«c«nnaitf'e  plus*  tard. 

Le  deuMèmé  mtoooice  est  une  analyse  Critique  du  ma* 
nuscrit  laissé  par  JPoiiraiery  ancien  \oyer  de  la  ville;  sur 
les  aaAiqfi&éa  de  NanliQ3.  Pour  en  foire*  sentir  le  mérite, 
il  flw  suffira  de  direque  le  BMnitserit'de  Fouraier^oon- 
tient- la  descâptftHi  detaus  leâ  mondments'anoieos  dont 
l'étede  peut  jeter  quelque  jour  ifuf  les  premiers  temps  de 
rbtstoice  de  rîraportanre  cité  que  nous  habitons.    : 

L'érudition  et  la  bibliographie  sa  tiennent  de  près  :  la 
première  a  souvent  besoin  que  la  seconde  lui  aplanisse 
les  çbstacles  et  les  cjRffieultés.  Que  de  mipes  fécondes  sont 
négligées  faute  d'un  guide  pour  1^  parcourir  sûrement. 
On  tte  peut  guère  consulter  une  collection  un<peu  consi- 
dérable, sans  une  table  bien  feile;  et  souvent  on  laisse 


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—  576  ^ 

dé  côté  des  documents  d'une  grande  valeur,  dai»  la  crainte 
de.  perdre  inutilement  «son  (ertips.    •  "^ 

C'est  donc  uAe  œuvre  touaUe  et  digne  d'0ire  racou- 
ragée  qu'a  entrepris  M.  A.  Guéraud^  en  ■  eoraposani,  avec 
le  plus  grand  soin,  pour  la  coVection  de  nos  Annales  ^  tieis 
tables  r d'après  trois  'points  de  vue  différents  :  tablé  analy- 
tique ,  labié  méthodique  et  table  alphabétique.  I^r  là , 
chacun  de  nous  sera  mis  à  même  de  mieux  cotiaattre  ia 
passé  ^e  la. société  et  d%n  d^utre  ce  .qii'îl  hii  restée 
faire  dans  l'avenir  ppur  defoeurér  fidèle -à  s6ti  prmdpe^ 
l'utilité  gâiérale.  C'est  cette  pensée  qur  a  guidé  M.  A: 
Guératid  et  qui  Ta  selitena  dans  i'aeeompKsiemeilt  *de*sa 
laborieqse  tiftehe  ;  ear  il  he*s'est-pas  dissimulé  qu'u»  ti^ 
vail  de  cette  nature  «ne  donne  jamais  à, son  acrteur  une 
réputation  propertionnée  à  ce  qu'il  liii'  if  ooàté'  de  Tetiks 
et  de  (ahorieuse  application.  * 

Ce  rapide  aperçu  des  traVàux  âtkiempU;  par  tes  fnem- 
bres  la  Société  Académique;  pendant  FannéeiSSO,  pronve 
suffisamment  que,  loin  de  4ais$er*lefiF  activité  se  ralentir , 
ils  s'asseoient  de  toutes  ieurs  forces  au  mouvéAient  qui 
entraine  toutes  lés'  intelligences  vers  l'étude  des  questions 
fntéressantes  pocfr  Thumanîté  ;  et  que^  chaque  aunée^  ils 
font  de  taouveaux  effortB-)!>our  mMter^f  estime  et  l'appro- 
balioft*  de  leurs^  conèiteyens.    -      *  >      '      • 


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9  * 


-   :  RAPPORT 

suB  xe;> 

MÉMOIRES  ENVOYÉS  AD  CONCOUftS 

POUR  l'awnéb  f850  ; 


PAR  M.  E,  TALBOT.    .       , 


Messieurs,, 


•  A 


'•Aq  miUeu  du  troiilile  ialeUectuel  où  s'agile  ift  société 
mederee,  bu  travaihd^an-  monde  iiouveati ,  selon  iç8  uns , 
en  proi^  anx  convBbions  de  l*agoniQ>  selon  les  aotres , 
c'est  un  spectacle  confiant  de  voir  les  âmes  gén^euses  de 
tolis  'lea  parttir  se  ràliict  autour  de  Tidée  l^pluS  sublime  du 
db^e  chrétien  :  la: charité,  âiocère  ^4>u  décvvantte,  il  n'est 
pas,  de  nos  jours,  une  seule  école  politique  ou  soeiale,  qui 
Re>  prétende  fi!9hder  le  'bien-être  dii.  peuple,  améliorer  la 


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—  578  — 

condition  de  ceux  qui  souffreot  et  transformer  la  société 
en.  une  fiiniille  où  régnent  la  concoide  et  le  bonheur.  Rêve 
chiniétique,  peut-être;  mais  dont.  Tillusion  salutaire  a  Cnt 
naître,  à  côté  des  témérités^ks  plus  aventureuses  et  des  sys- 
tèmes les  plus  radicaux,  ijuelqvas  bienfiiita  sérieux,  un  en- 
semble d'institijtîons  praticables/  en  «partie  ^éitUsées ,  et 
perfectibles  encore  soys  l'œil  d^  T9tTg4(ienc%  et  du  pn^pës. 

Compo^  d^bommes-,  non  seulement  voués  aux  scien- 
ces spéculatives,  mais  intelligents  des  besoins  de  leur  épo- 
que, et  pi;éaccupés/des  moyens  possibles  d!en  aUéger  les 
maux^  la  Société  Acadéftiique  de  la  Loire-lnfiérieure  a 
v<#ulu ,  eHa  «i(ssi,^  a|ip0rt^  s%  t^  d*ei|PQi|ff»fe«iep^à  laei 
travayx  d'amélioration' progressive,  qui  seront  plus  tard 
l'honneur  de  notre  siècle  .et  j'excuse  do  tant  d'erreurs.  Cette 
vive  inspiration  de  charité ,  qui.(k>nduit  les  eœbr»  sensés 
à  la  pratique  du  «bien,  et  qui  donne  aux  utopiea  elles- 
mêmes  qaelqtie  ombre  de  raison,  lui*  a  (ait  rechercher  la 
solution  d'un  des  problèmes  les  plus  dignes ,  par  leur  iai^ 
portapce  tout  actuelle,  d'attirer  les  regards  des  hommes  de 
théorie,  de  provoquer  Iç  dévouement  et  d'enfiammet  le 
zèle*  des  hommes  d'action.  £|lle  a  mis  an  eoncours  une 
question,  quk^  rattache  à  ce  vaste  projet  d'assistance  publi- 
que^ doût  .la  réâliaatioot  tani4te  êain  Musayée,  a.toifaiirs 
soulevé,  ^soulever  eoisore  dest  grpndes  diftettHéaf^niMa  tt'-ea 
est  pas  moins  une  des  nécessités  ifa^iérieuaes  ib  0oti» 
époque  tdwmeatée. 

Votoi  les  leroM^  ^a  la  qutetion,  àrja  sblotiOD  4c  laj|ueHe- 
étart  pcopoiéev  cMSfl^e  f^/  une  médaille  d'er  Nie  u^i^ 
ceotsimias:      ,      . 

«  Qtttk  aeraieat  les  moyens  les  pHifl  efBeaoea  «t-  en 


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—  979  - 

siémelâoips  les  plus  écoDomiqaeftd'orgaoiser  la  médecine 
4(88  ^aiivjM-  dfiDs  les  viHes  et  dtns  les  ctmpagnês  ? 
«  Faire  J'histôrique  des  essais  tentés  jusqa'à  ce  jour.  » 
L'empretoeihent  des  travaiileors  a  r^ndb  à  la  gra- 
iPÎtéde'l'Qelnrrê^erte  à  iears  éflbrts.  Sehee  mémoire»  ont 
été  adressés  à  notre  Secrétaire  général.  D'après  les  termes 
du-règlèment^  une  commiâ^ion,  ciMoposée  3e  neuf  mem- 
bl«9«(t),ti  été  chargée  d'en  apprécier  lar  valeur.  C'est  le 
réaiiltal>dtt  travail  auquel  dfe  s'est  liviéé,  et^de  la  résolu- 
tion qui  en  a  été  la  suite  ^  que  sort  rapporteur  vous  pré- 
seate  «ujomtVbui.  *     ^ 

.  Avam  4ô  komméùcer  l'e^men  A»  travam  soumis,  à 
sM  jugMi«it,'lA  esoiQiîssioD  a. cru  nfeeAaii^^  sthon  de 
Iher  préoisémeol  le  cadre  et  la  forme  d'ob  mémoire,  tel 
qu'elle  souh^ltaîr  de  le  voir  eiLécuter ,  au  moin»  de  -s'en 
tracer  à  elle-même  une  sorte  de  crajon  et  d  en  détarmi- 
ncr  lés  potnls  principaux.  Or,,  le' sentiment  individuel  de 
chaevn  de  ses  ai6iMbres'nou9  a  paru  se  confondre  dfns 
Vopifirioneolle^ttve'que.naus  reproduisons. 

Selon  nmis,  Meafienrs,  pour  obtenir  vos  sufeiges ,  {)eur 
mériter  rbonûrable  diatinciion  d'une  récompense,  décernée 
dans  votre  séance  sorenneHe,  (e  mémoire  présenté  à  la 
Soeiété*AGadéniiqiie,/en  réponae  «à  la  quertièo  qu'elle  a 
préposée,  devail  tout  d'abord  en  embrtssw  la  teneûi*  côm- 
plète^  pivsen  dévelof^per  8ueoessivemebt^utes*les  don- 


Ci)  MM,  ÉtarifSte  Col<>iiibel,  Mareschal,  TbibetQ4,  H^noul, 
Foulon^  L.  GhMipisiftiièite,  .Hulgatl,  B.  Bôntaij,  Talbot,  ra^- 


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néeâ,  sans  omission,  sans  lacune»  En  eonsêqvcdce,  le 
travail  devait  se  diviser  tia  trois  parties  ntettem^t  tran- 
chées: 

1;®  Histoira  critiqae  des  essais  tentés  jns^'à*  ce  )Oor , 
poo^  organiser  la  médecine  des  pauvrcs  dan»  4é8  villes  et 
dans  les  campagnes. 

%•  État  actuel  de  cette  organisation. 
*  3.^  Solution,  pratique  offerte  par  Tauteur ,  en  vue  de 
la  pltlb  grande  économie  «t  de  la  •  plus  pnissame  effi- 
cacité. :         , 

Tels  étaient,  nous  1è  pensons,  les  trots  diapitres 
natùr^Pemem  indi<|aés  par  le  sujet  oMm.  A  cette  qualité 
d'une  divisîen  Andple  ^'méthodique  darafts'afottte^- le  mé- 
rite d*un  style  dair  ,  rapide ,  pnécis,  cortime  est  celui  db 
tonte  œuvre  destinée  «à  passer  de  ia  spéculation  à  Vap- 
plièa|k)n.  "       -    •  . 

A  ceux  qui  trouveraient  ce  plan  exclusif  t>tt  avtiîùaife 
noya  ferons  observer  que  noçs  n^  présentons  pas  4'idée 
comme  bonne ,  mais  comme  nôtro  ;  et  qu'il  nous  a  filfci , 
afin  d  asseoir  et  de  motiver  notre  jugeaient ,  ^blir  cer- 
tains points  de  repère ,  qui  servissent  à  diriger  notre  erî- 
tique  et  à  éclairer  |ior  décisions; 

Tous  les  méimoires' qui  nous  ont  passft-sôus  les  yeux 
nous  oioît  paru  Tœuyt^'^d'bommes  conseisnâeux,  éprîs  du 
désif  de  bien  firire  et  de  servir  la  6iuse  de  rbumanité  ; 
mais  les  auteurs  n'ont  pas  également  réussi ,  aoit  à  dispo- 
ser dans  des  proportions  convenables  ^  le  fond  de  leur  tra- 
vail, soit  à  donner  à  l'expression  de  leur  pensée  assez 
d'élégance 'et  même  de^eorrectioDi!s.'La«commis8ioo  a 
donc  été  contrainte  d'en  éliminer  un  certain  nombre;  vfin 


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~  584  — 

<k  cmemtxêv.  son  e^imoM.  sur  ceux  qui  ae  r^pprooliaieut 
deiesp^^le  modèle  qu'elle  s'éuilr»  pour  ainsi  dire, 
créé.  \  •    .  ' 

*  Vwm  ces  d«j^ier^t«i<*  y  eo  a  trois. qu'elle. a.*îugés 
dignes  d'iiiAér^t  «1  sur  lesquels  elle  a*  vouii».  appeler 
voire  «tientioa,  tout  en  étam  d'avi»  de  ne.  pas  leur  ac- 
corder d'autre   &veuc   :  *ce  jsoi^i  les  numéros -6.,- 15 

hs  mémoite  Jtt*"  T^est  éort^.par  uo  fldédaeiû,  qui  pa* 
V9H  vers^  depuis  lopglamps.tlans  la  pratique  de  son  art  : 
il>notta  le  dii^  hii^m£me«  et  son  travail  en  &it'  foi.  11  dé-< 
note  vm  esprit  ,net,  positif ,  ami  de.ia  méthode,  mais 
ttft  peu  dogo^liqoe  et  trop  porté  à  réduire  des.  idées  , 
parfok  ceioteslables,wen.eede  définitif  et  en*.lé(uklion 
formulée,  £a  rovfiuûbe ,.  Tauteur  eotre  dans  dep  détails 
fort  «înièressanta  et  tcës  circonstanciés,  sur  l'organisation 
des  dispen^ires  établis  dans  le.dépaHement  jde  Saôno'^t^ 
Lait^s^Y  aifi^  que  daea^oidui  daRbAoe,^t  notamment  sur 
1^  dispensaire  géoéral  de  Lyon, ,.  -  *  %  .  , 

Spvkfsmd,^  o^tfè  que  la  partie  historique  etft  com- 
pUrtemeot  .négligée  et  que  le  .tableau  de  Tétut,  actuel  de  la 
médeetoe  des  pauvres  est  restreint  à  deux  Iqealités ,  Tgr-^ 
gamsationfuroposéepar  Fauteur. pour  le  service  pédical 
des'ciampagaes  a  paru  très  ia^parfiut^  i^  la  commission. 

ijfi  oaépioîrô.  o.''  15>  qui  prend  pour  base  de  son  tra- 
vail le  système. adopté  par  je  congrès  médical  de.  1845  « 
ne^oaiMMlveiMtô  démérite  :  ilcontieiit  «  ^ire  autres  bonnea 
ét|id^«.une  critique.iuotivéeib  tinatitiitioqdes*médeeins 
ca^oaux  et  de  conacieoQfeuses  recherches  de. statistique 
aucia^QfiiiUtîoniwIJt^te*  Ëu^'outi^  l'auteur,  oonvaÎMu 


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—  5«fi — 

saoft<ioiit0^f|ue  les  ffim  belkfrtiiéoii^soiiltMl  à  iÎMtsI^ 
rites,  si  elles, ne  vi^imeDt  à.  se  produira  dans  le 
réel,  c'eât- à-dire  à  s*appuyer  sur  des  opérations  fit 
ciàn^,  est  dfi|vis  4|ue'xI]Miue(9Dq;«piiiM)t,  où  t*orgMiift  lé 
secviped^  la  médeetue  dea^paavtee,  prélève  in<kii]i*«e»- 
time  anr  le  aaoataht  4es  ^«lie  eoatriMtioiM'  en  çriscipal, 
pour.sttbfieiiir  aux  traifeniKDlsdesiiiédecioseiaiix  fraiédis 
reinè(^s  prescrits.  11  présume  que  ce  mode  de  répartitiaB 
laispenit  oéamnoMis.aux  p^aoanes  bieniMifiitea  4e  dvoit 
de  sliaiposer  €fU^«4iiémts ,  pour^U^^ir  l'ioipAideaaatieSf 
et  amènerait  la  fusion  ai  désivaUe  dei'asBistance  iég^  «i 
de  la  çhM^é  privée.  .  '    *  *   * 

Ce  aotat  là ,  vom  la  TOfsr  i.Mêseieankt  4es  àdéee  qw 
nemaoqueât  pas  d'une  ceataiee^vaWwpnvtifiie»  Ausaiest^ 
Eleheittfat  dès»  redites,*  des  loogueiua^t  de  gravée  eni»- 
sione  dépateat  les  qualités  que  obacan  4e  moi  »'cst  plu  à 
recenàattre  4aiie  oe  travail. 

•  Le  munére  6  >se  reaowisandeptr^  une  «apoaitiiNi  de 
sujeti  dont*  nous  avons  appro^ivéla  méthode.et  la  fitiei^ 
sioR.  Lliuteur-.divifiesoetnKraîl  en  trah^nrtieedielNMles  : 
lepfissé,  le  piésentet  ra!fenir,'de»itié|De  qu'il  veitdaes 
toute  oBgàoisatioii  iiiédieale  tedis  éléttrala  ^aamtkh  z»  ks 
médacios,  leaYaédicana|ils«et  Jes  seips.^  Piirtait  de  èaita 
donnée, iLeo  aait,  «a quelque «Maûèie^ le  film  èlreivisles 
sièdeai  etil  essaie  d'abppdd'es^VPseçi'liistoicedeceqaiaAé 
&it  jusqu'ici  pourla  santé  du  peuple  :  on  peut  dire  même 
qu'il  a  tfeaooolré'^uelqeas  traitoasses  àeurîpesL;  p»reueMpiip, 
lorsqu'appès  aveir  parlée  de  ^la  8ci^noe.m4dieete  a»  moyen-* 
âge,  il  appvécie etregrette  avec  justesse  les  biealiitsées 
menaMèros  et  des  ordfeaMUgieuxAl'égefd  de» i 


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vret ÛÊiÊimHfÊgnÊiy  fHfmiemè^ dotitie  viàb  neftcufit'poiiit 
Q0WUé>;^  m  ^em.  kMqiilt  vetniqeliAi^Mtâire  des 
»  M  utage.  MttM,  dans  ce»  deux  ejLposéa; 
1«»  ^iii  iiftfimn  laty  iomyaoti  à  rgfyit  des  aai^liei»-  <te 
Vw$IÈ^r^%&  èifcirt  ftft  JOMÇiK»  sa  omci|io  «  téfthetessB* 
Ailleurs,  il  se  jaitei-daWfinit-'Jîj^seioji  -^foettsa  $kit  les 
oihiirirdi  Mile,  d^ni  il  «Miftte  avw  MgVjonr  âlnaiiiisMiee  ; 
puii  iiiMi^pMir'tMl^ooMhiMOii^,  par  itonner-aon  aasen* 
lîiiiant.aifipkMi MM  réaerveii  TtaMiMlflB  dés-mMeem» 
cipMuMii^.-Or^liMi^ewoiib^lihialoitt  qiieMe  eoniiafiQe  on 
doil  aiMi  dioa<ïad|)ralèaief  déjètiatèu  en:  bitelie'pttr  le 
oangfbfr  iwéiiiffal'vde  ttoyeiiibfB:  Wii. 

JkfMèaoifMMAi  iwpa>»eeaiflé»iw<es^  raieiésrtlH  coctodui^, 
iMia  tliwriillèii  avec  «l  iom  qu»  «a  déaUé  ia  <iomiiiis- 
aioaiè.tta  via»  pawnM^t^'Mit  à  fitii<M  (jubK  ;  vtemieht  afen 
ph^  Ipaiac^rjidat  lé'iaérile  ^ir  <ie  èeàucoajp>  snpénaar^H' 
oaM^:  q«af  aous  aiaons  ftiléa.  La  coriimieBiofi  taa  a  eiaa^ 
dans  wi-mét^pd»  p»kiifré*«rialive^.el4eur  a. teigné*à 
lAaaM. «9»<faBg/pi^>aa|i0ptté  •-taur  valeur,  ea  Mvast 
uMT  fi^gaacwati  aflccniiAinle..  €^  sont  lea  aamérçs  0,  8., 

*;  ai  fai  g*a*fiaaîl6  dafe  saMiMknla^et  r^esoeHanoe^dit  oobw 
lÊmoÊt  <aa> quaBiéi >  authaalis  -^mt  réim^  dhrts  un  e#ii^ 
oa••a^,•^a■lé|a^d■  Mmmro  p>»  '8  -ae  >%araft  éle#^  ifesiMms, 
àTaaedteprcMiiiyii  phee&*Sa  jeoaelse  nfiéaie^  n'aopait 
pas  été  liiv  obstacle  à  son  stf(fcèa,  e^a  ntniké  ée  Kratoa 
l'jBûtt  mmÊÊÊi^màè^fimymïmÊii*^mcQÊteM  l%atîne'  alfec- 
tuan»4a  sea^sM^paAriaiea^  «  Vik-  des  iandca  de  la*  Bre* 
tapie v^K^ii' au  éèbttt  de  son  tmvttH,  rpioeieurs  ibis^éanolfi 
dm aeet^^iUffaïahli  ëiii  nAyeapaysaiia joMîgéa  de  amiif r 

41 


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—  5«4  — 

MBS  sedMTt  médioiitt ,  fai  vétfiN  éê  lam  pipl  à  h 
àociM'  AeddMimqoe  d«  Mantes  des  i^éi»  qM*  Wr 
fées  ta  speolaele  d'un  piiMI  é|M  âm. 

et4^WàrMéa;^B0iià 

dleMl  rjréBefilée,  qa'ftn fcnmt(wilioiK  • 

Ce  «Mrt  làV'lfeweim,  é^Wanerai  byalM 
et  nous  lenion»  Il  tm  eileri«pifoei  fa'ÏBllai  eetiMl  ém  k 
hMebe  à'jitt  «elta-Hlfifmîer,  né  dm  ^el»  paye,  ^«i 
Jeuli^JHftMDe,  qui  n'a  -paa  erailiidcr  paanéra  aar.^paliaa^ 
de  tes  feaetioii9  défwiéèe  aeses  d^lanlpa,  fomt  fta»  effrir 
une  étude  conyenableaoj^'éerile; 
de  Mis,  el  atleelant  li»a  laâwM««fiéia  et 
U  fiwii  pëpendani  f  afooer  :  le  défini  dVnfiéeieiieeida 
avkeu^  se  irahil  eC.  dàpa  k  diipiailieii^  1-  dai 
*œwr«e  des  afatéekH»  quil  a  teMailis.  -  Laa^ 
*lk|iiee  se  Meal  dans  la  prolixe  des  dÉSailB,d  Isa» 
4\i'H  éniet  de  juslesi  et  sanies  Idées,  oyçoyiHe^'a  ait 
quelquefois  petdu  de^viie  le  sujet  qaM  se  |M|KMNi  de 
tiaitêr.  fjB  jsislesse  de  so^ esprit  le  lofce  fur  naaineuisd  7 
revenir;  mais  c'est  pour  rabandonner  et  Iq  lepwiudi^ 
eûcore..  Eu  luison  de  eea*  difeitts,  ia  GeÉsasiaâeiwi'utpa 
pluoer  ce  MfaiJi^une  plus  gsaude  kauleur, 

rrauirv  qv  ^no  10  nwvsw  vvptvoHBi*  mw  m  4S^ 

eendte  [usriee  à  Féurtuaitt  ^  d'eue  onm§»ee 
vuo  de  ess*'  sueoès  à  «enir^  *  "* 

ca  uMMifiie  qiN  nanqu^  uu  peeeeosua 
eeasinÉDde  tout  spéeialeuiênl  eeM-qui  f«fl^lu 
■oniBlé  de  ooeuv  et  de  réflnioB ,  iaitai  de 
duMins,  qtt'eM'volt  pei^se^  à 


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—  585  — 

cMWiOj  l'aillitfr;f|iM  n'èMl^ai médecin,  â  TUdmis  la  question 
dWHynlitliow  tnédlcalr  qûè  vous  avr^z  mise  tra  concours 
limMMtiieftt  ^  ftohner  gibîre,  ^omme  il  le  dît  fti'r-m^e, 
a«*  cbrtetîairiMlè  ]|Nitt!«}ue ,  et  sbrf  zèle  *  ft'a  pas  voulu  la 
\mmêf  éthapper.  ^In  |!gaA  sage  et  safVieinent  t^acé  le  conduit  ^ 
au*  ilMiions  siritanïes  :  '  *  *    » 

cr  SiMilî^ii'  et  cônlpanfisOTt  d«s  nîalades  pauv^es  des 
viHw  et  dwiAflifagnes: 

•  Nécessité  sociale  et  poKttique  d^uhe  orgamsalion  gêne- 
rai» d^  h  ittédecinetks  psrdvrés!  * 

'»  Bamia  tentée  jusque  ce  jour  pour  résoiidre  'lè  pro- 
blème, --i  Essais,  pa!^  les  €61isei!s  généhiux  et  lë^  Préfets. 
--^  fiiaaia  dina  lea  villes. —  E^is'  dans  ks  communes 
rilrftles.*  -^  ^éÊl/^è  par  les  étabHssement$  industriels. 

»  Nfeessiié  d^«n «Vstêflnre  d^eUsemblë*      •      ' 
'  j^'M&yenaqtie  nMspfopdsons/ 
>  j$*  0^tc/l^wm  él  réflflatSon.  w> 

•  Vantélir  développe 'entité  In  dh'ision  qu'il  a  ainsii 
Ov*»i«r,  aprèaavoit  passé  .en  revue  les  dtfl^renllk  établfs- 
seineDtt  die  bienfaisance  institués  dans  leé  villes  et  dans  les 
campagnes,  il  propbse,  outre  Firistitution  des  ifaédecins 
cattomMix,  une  aorte  d'assurance  mutuelle  de  Recours, 
feoéte  sur  ce  principe  que  la  mutoalité ,  ou  fraternité  en 
adMB-^.esl  ee  qu'il  finit'cbercher  àr  établir  en  tout  et  pSf-  * 
toan  9$wt  appsjw  eeMe  assertion ,'  il  tqpportc  des  preuves , 
prttées  à  ide  noMibreux  ouvrages  ^<:!He  des  documente  i  lai 
foumia^  psr*ba  correspondance  I  et'  groupe 'autour  de  ses 
idée»  de»  détails  de^  statistt^e,  qni  paraissent  précfis.  et 
ooiM^loanta^  •  ..•,--• 

tSlMtoplMNf'deè'tnédêeilis  oatitonabx,  la  com* 


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—  586  — 

misBioin  a  ti^ouvé  feu  de  oboces  gmrat  à  tnéim  à  cd«è* 
mo[r«,  dont, (a  lecture  est  agstebie rel*  fiml«i  rapnn^iÉi 
elle  est  tdmbée  d'aocord  sur  ce  •point,  que  iâ  partit  hia— 
torique  est  loin  devoir  été  siifiisanuMAl  tmké»»  4|u^  lea 
objectioos  présentées  par  l'auteur  à  toa  ^pt^ftte  ajvIlaÉ» 
sont  plus  fortes  que  les.  réfutations  qu'A  ^>pposa,  et  4|il'<ea- 
fin   rén.8eni)>le   du  projigt   ue   saiu&it  qii'à  >  déni    avx 
exigences  d$e  la  pratique;  terme 4léfinM(,  c^  vousvauliag, 
Messieurs,  TOtr  aboutir  la  question.     *         •        *     *    . 

Des  idées-saines^  une  ridie  abondance  de  déUH!»,  uot 
connaissance  approfMdie  de  roi^nisatioii  des  liApilauK, 
des  aperçus  pleins  de  .JMStessfr  «sur  lesnoyaos  d'établir  aè-* 
rieuseoient  et  largement  *  la  médecine  d^a  pauvres ,-  telles 
sont  les  qualités  racommandaUea  du  vitittâàire .  o^»   18. 
Aussi  la  commission  Ta-t-elle  e^apné  a«ec.soia  et  avec 
un  vif. intérêt  Elle  s'est  «crupuieusemeut  attachée  è  sui- 
vre Fauteur  dans  les  développements  siaçeasifr  d«ft  piao 
^u*il* s'est  tracé,  et  elle  s'est  iustmite,  pa^îce^e  étude, 
d'un  grand  npmbr^  de  bits  qu'jr  ont  déposés  rexpécîeaoe 
et  le  travaH.         »  •   ,        .  ....... 

Voici  les  paints  généraux  établis  par>técrivaiu« 
Il  '  commence  par  .-une  revue  oritigue  des  dîver^ 
inMitutiens  chfiritables^  fondées  en -vue  des  saeouca  à 
^donner  aux  malades  indigents^  e'e$t-À-dire  les  bdpitaux, 
les  puceaux  de  bfepiaisance^les  coomuMpléa  reUgamiac 
et  Iqjs  médecine  cantonaux;  puis  il  examiiia  :qui^lles-aeut 
les*  conditions  essejQtielles  d'économie  et  d'effietaîté  j|tte 
doit  présenter  upe  bonne  organisa tion. de  la»aiéd<iaèBe  d^ 
pauvres.  Notez-le  bieri ,  Me^i^urs  ;  c'e^t  la  première  fi»is 
que  ces  deux  ipôU,  effieacilé  et  éceftemie,  lnamftwiem  à 


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—  5«7  — 

{NMltie  Hum  lérmémoiMs  doBt  n6ù&  vous  offrons  l'analyse. 
Il  sfmM»<|ve  iesauteutà,  conprènaot  nrâl  votre  pensée, 
n'en  aieât  point'  assez "teau  compte.  Le  mémoire  n;""  12  a 
llnportant  yvaatage  de  s'en  être  souvenu.  C'est  une  preuve 
tia  liaute  saj^esse  dont  il  fant  loi  savtrir  gré.  Le  même 
aaprit'sa  rencontre^an;  quelques  autres  propositions,  que 
la  commission  a  vivement  approuvées.  De"  ci  nombre 
■9Êiut  cea  prineipes  somnAires  :  que  l'exercice'  de  la  mé- 
deiine  des* pauvres  ne  peut  nullement  être  assimilé' à 
nvfi  ibnetitti  pifbtiqoe^  que  t^  médecin  qui  visi^  les 
pauvres  peut  avoir  droit  à  une  indemnité ,  mais  qu'tl  ne 
peol  recevoir  on  véritable  traitement; quelle  nom  de  mé^ 
dacîn  communal  est  le  phis  convenable  pour  désigner  cdui 
qai  est  charge  de  donner  gratuitement  des  sofhs  à  Tin- 
dlg^fit  malade i  enfin,  que  les  modes  d'organiairtidn  doi- 
vent être  appropriés  Aux  ditefses .localités  oà  ils -sont  ap- 
pâtés à  fonctionner.  .^  -  - 
'  Lorsque  de  ces  idées  générales,  extraites  Je  l'étude  des 
iuttilîiâonsen  viguem*^  rauteur  passe  à  ('exposé' dO  système 
qu'il  dérfre  faire  .prévaloir,  il  en  détermine  aihsi  les  bases 
fondamentales':                                        •     *       - 

a  i.\  Établissement  d1i6piUn»c  dans  les  vîMes-de  trois 
mfHe  ftmeaetr  dans  tous  les  èhefc-lieux  d'arrondissement 

'^t/"  Secoure  à  domicila  orgahi^és  sur  nine- liste  des 
paavifo établie  parle  Conseil  municipal,  qui' noomie,  en 
outre,  les* médecins -et  désigne  les  circonscriptions' médi- 
cales afleotées  à  :  leur  sérviee.  *    - 

a  CofoUaireê:  Attributions  des  médêcio^confimanaux; 
fixation  de  IHndemnité  qui  leur  est  allouée  ;  votes  de  fouds 
pMr  le  ConaaU  faumieipal^'le  Conseil  féiiérârl,  avec  inCér- 


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—  5««  — 

veoliop  de  r£Ui4:f<wriii(ipMs  da 
parun  pharmacien, s'il ^  a  Ueu,  yir  une  coagré§itiM  re- 
ligieuse, pur .  le»  médecins,  euirptees;  CftnHiigii—  ifvm 
comité  général  da  sunseiUMee  dMi^géde  iw^  «éoMter  le 
règkmant  ei.coniposé  4q  8oiis-|»réfet,  an  euré ,  cl» I 
habitants*  désignés  par  le  Gopseil  générai  et  de  ieois 
decias  élilB  par  leurs  confrères.  »•       • 

Vous  voyez,  llessiôiirs«  malgré  ja  séehcneiMy  de 
sorta  d'aoatomie  que  nous  faisons  subir  au  mémoire,  qu'il 
renferme  d'exceUents  aperçus  et  <fue  l'auteur  «  mùrem^ 
réflépbi  à  l'idée  gr^ve,  émanée  de  votre  Société.  La  ( 
mission  eât*  cependant  -désiré  trouver  dans  .cei 
quable,  travail  de^  frits  plus  conckiaots,  de^  driftcs  plus 
probai^ts^  on  plan  d'organisation  fondé  sur  une  discu» 
sioa  plp^- positive.' Elle  l'a  placé  haut  dans  souestînae,  et 
elle  appelle  sur  lui  votre.aitaotion  (^ttculiàra;  mais  elle  a 
cherché  ailleurs  l'osiivre  qui  méritait,  selon- elle,  le  prar 
mier  rang. 

Poursuivant  '^enc  ses  a|tpréciatiens  ,  eUe  4i  iMi  9n 
mémoire  n.*"*  |0  un  examen  sérieiik  et  détaillé,  pfovoqué, 
du  reste ,  par  un  travail  d'un  incontestable  .nsérito.*  Ce- 
pendant l'auleur  détnite  par  une  lacune  que  nous  avens 
jugée  tous  d'éutaat  plus  regrettable  qu'elle  es(  systématique. 
Sous,  prétralr  d'échapper  au  reproobe  àë  recberoilè,  de 
prétention, /d'érudition  inutile,  et  de  s aUlaeher ^aèut 
au 'passé  qi^'au «présent,  il  laisse  esprte  daînsuM  sotte 
d'arrière-plan  les  essais  d'organisation  médicale  ou  de  éy 
cours  antérieur^  àMa  société  aotoeUe.  Moua-eroiyQM,  lles- 
sieui9,.  que  e'es^  une  erveur. 

Qans  un    éieéHent   petit  livre  publié'  sur'  un  suîet 


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—  5W  - 

ià«aiiH  fM  vèM.svMfiopofté  aaiat  eonoiiQifiils^ 
M.  Lâut^  membre  4e  l'Académie  de&  sciences  politiques 
ék  moréUt^  a  «m  esatotiel.  au  contraire,  de  reqjKHiler 
aiui  yamwas  estais  d'ii|ilîltttioa  fondis.  <;iies  les  ançiâns^ 
pMr  le.  «oaiagafMn^-  ées  malades,  {hittinre^  Le  fMuisé ,  ta 
efts>  ert  la.  laçea  éé  ilaveajjr.  El  prendre  ia  dutrteé.eliré* 
tieope  à  sa. 'naissance,  .la  suivre  dans  les  âges  pom 
mmHaar  les  m^areiMetf  qtt'ieUe,^  a  enfimtéas ,  en  vue  d'jun 
grand  ioUpèt  fàbKCvdeiNiis  Fahîola  jusqu'à  Saint-Viocant 
de  Papd,  depuis  «Sainft^Vinoeot  de  Paiii.jus<(u'aw  décrets 
philanthropiques  do  la  première  Assemblée  /consUtuaate, 
enfin ,  dfp^  txe  dl^rels  «juaqié^  nés  iostiluiiona  mo- 
deraaa>  a'eal-ee  pas,  |M>ur  nous  sarrir  de  rbeureiidë 
exfÊ^mtmà^Ywa  des  candidats  ^fMrcourir  la  chidne-|le' 
bianfaita  qiu  ae^iftlaobe,  prolongée  à  traTers  les- siècles,  au 
berceau  même  du  Chr.istianiai|ie?  '     • 

Noua  afOM  donc  «vu  avm  pfsine,.  Hnsi^ursy  que  celte 
laeuMae  jMraaentâl  an  début  du  lyemtirqaible  mémoiae  que 
nowuiaoMà  |uger.     , 

LapaclfMlrà*ced4frut>dau8  le  plan,  m  peiytdiieque 
le  reste  eat  JEbrt  bien  diapeséw' 

L'ouvrage  86,  dmae  en  deux  fMartiea  âî^iqe^: 

i.*  Hédaeiaa  des  pauvres  dans  les  villes,  «recune'rf vue 
critiquées  tout  ce  qui  est  riialif  aux  instHutiqns  de  cbarilé, 
buneaM  de  Menfiûsanee ,' assoêmtipns  ixMitiialles  de  pré« 
voywiae,  dispensaires,  sociétés  matertieyes,  etc. 

2.'  Médaoim»  des  |)auvrc8  dans  les  camÎMigness  avec 
une  appréciatioa  succincte  de.  le  question  d^  médeeios  ca% 
tonaua.' 

iM  MhUfen  de  K^ulmm  ell ,  oottime  pour  le  ménoire  . 


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—  5W  — 


Uf  lé. .  ..... 

l^our  .les  vHies ,  il  cberche  ewtoui  à  4oo«âr  de  t*i»- 
Dite  à  .ia  diaU^Mtea  des  secioars  acHiclisoinii 
&n  les  naïades*  pauvres^,  ei  U  adnei  Um  les 
de  .bcmoe. folooté  a  soigiier  les  ffeuives  de  leurs  qnw- 
tîers^ 

•  -t^our  ks  ca'aifMigiies,  il  *rcfeUe  les  mède^sss  cantenainr, 
et  propose  qae  diaqse  niabdé  puisse.,  irppeler  eim  médb- 
citi ,  oonme  Ta  ^i  ssgemenl  décidé  le  «Coagtès  médical 
deiMS.  .  •  ^   • 

Quant  aux  moyens  iinanciei»,  faufeor  propose  ipie 
rÉialf  le  départeinedt  et  la  eomnione  icontritMeal  pMper- 
ttonneUemeot  aux  dépasses ,  et  il  laisse  au  Gonaeils  eao'- 
toBaiix  de^:8alabrisé  le  *  soin  défiler -les  ii)de«uuléa  ai  i^ 
compenses  affectées  aux  médecins. 

A  ces  voies-d»'apilMcatieD  ettle  piatiqqel>Mileiir  ajoiàt, 
pour  la  nàédecine  rurale  «.une  annexa  fort  inâéressaola  et 
fqrt  curieuse  de  flore  Indigène,  proposée  comme  iiiie«sn 
pèce  de  favda  uaturel.de  pbarmaoapée  éconoaiiqBe.  La 
commission  lui  a  su  gré  de  cette  beurettae  idée,  danlirifa 
seul  I&(^rivil^[^  €}ilre  tiMM^les  coocgrfems.  C'est  avec  an 
égal  iatérét.qtt'elle  a  lu  les  docuoieols  si.  préeis^etrai  abon- 
dants, fournis  par  l'auteur  suris  £aissetdesJ<eco«rs  «sut- 
tuels.de  Boulogne.  Ces  études*  attestent  des  iiabttudes  de 
travail  et  de  dévoueipent ,  «uxquelies  la,copnmissioo  4ewt 
aoeeeder  i|n  témoignage  tout  spéoial  de  son  egtima  :  elle  l'a 
pUoé  attseooad  ntng.  .    -     ^  .  ^     .  w 

Le  premier,  en  effet,  a  été  tonquis  par  un  ménuMn 
que  ia>oieid*élimination.suclessive  adoyilée  diiss  natie 


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—  591  — 

nff#rt|'%  MwÊB  étiwtiMfc  Mit-/  avMfeiBos  estons  ms 
riiân;:  BMSTotiIpiMparlerda  mémoire  insetit'Mras  leniH 
mé»  4fc-    ;  .  ••  - 

Obirt^  il^ua  médecin  -que  sa*  corrèspoiMkiiise  ikh»  a 
faM  cdimtlre  eonniteTun  de  ?08  compftfriotM ,  d'un;  pn-»-' 
ticîM  qui ,  depuis  près-de  vingt*  ans,  exerce  son  imnisiitre 
dcnrlee  earapagnes,  ce  travail  réiiptre-  d'uti  bont-l  Tàntre 
je  'ne  sais  qteiifbrfttm  de  probHé  ]o)«le^  d'expérience  pfo** 
foade,  de  sagacité  pénétrante  ^  de  eonvi<5tiôn  refigieèee^ 
dmute  aéttmtion  nous  a  gagné  teus.      *  .    '* 

l»  piaf  est  dHinç  èxtréinesimpHèité  <  et  répond  joift  à 
fiiii  à'  tSéée  que  la  commission  s'en  étak  tracée  :  séoieincnt 
Tautsar  «fait mieux  encore  ;*il  a  su  passef  des  MtagépéHMnc'  à 
uiMiapiriieati&n  partioiiAère;  qui  étergitpar  le  détiM^  \é  cadre 
qacf  notBtvidl»$desaiflé/ÀprèsavQ)reKposé  1'histerî<|M  delà 
qoestiondaiistepasséetaiit  époques  récentes,  ii  s'appiteài^tit 
sur  deux  points  qui,  selon  Iuk,  sont  la*  pierre  angulaire  de 
tottVt^édttee  :*d'Abordla  question  des  médecins  oatitonâut  ; 
enèmile'Korgaiteliott'de  deux  services  médicaux  qui  loi  pa- 
raissent avotr  réiBold  votrts.probtôme  :  à  skvoir  ie»  âi^pen- 
saiffBsde  Paris  ^  de  iyon  pour  la  médecioe^lrbtiiné ,  ^t 
l'organisation  médtoale  de  ranroffdisseit^nt  de  Laval  et 
.  de  eéM  de  Cfaàtetubfiant  pouf  ta  médecine  Vorale. 

Afin  de  bleo  apprécier  la  valeur  de  Tiristitulion  des  lAé- 
deaMeeMitMioit,  miiencbnt^èuae  déhominarion  qui ,  d*a- 
pMs  Mmear^  Ait  aa^^mgrès  médical  et'  à  la^  Clmmbre  des 
Pairs,  comme  une  pomme  de^^diseorde  ^brouillant  tdutes 
lesédées'  et  capable  de  dire  éobouer  les  meUiedfes.inten- 
tiess  f  *le  ^ge  pVaticfen  ne  s*est  pas  eontenté  de  ses 
réieftions^nonnelies;*iï  est  allé  adroit  aux  laits.  Il* s'est 


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-  59»  — 

adoeaié  iui^gnMid  aomhrft^e  iiéd<«M 
savoir. d*eaz  qfmA  biao-ils  powrMebC  prodom,  itiTiiwIii 
de  tootes  les  lettres  par  lui  reçues  et  annexées  à  «en  «lé** 
moire  f  oowttie  pièoea  )usiti6eativesi  ^'ili  na  |ii  iiàwitt*  , 
pour  oN^i'^oi^i^  4i^iwMui/naB«iriMi,f9iM»'Teila 
es4 Ja réiMoeequ'il »  re««e «ksi^tra^poiaiade  la Ftasia ; 
du  HiSrRhm  à  la  Gharante-teférieure ,  du  Noid  aux  Bon- 
clias-<ba-RiUM<.  jÇflmmwrt  ak—  s'anréiac  à  mnb  parciUe  îé« 
s(iiiili<^T  •    •  '     * 

Mais  que  mettra  ^  la  plaoe?^G*est€eqaaJ'aiiÉMr«aaia 
de  fioiié  dire.  Sera-ce  te  aentiç^  médical  par  aboMMMoft? 
On^l  a  tenté.  Il  ee|  imppisîblé  ainlelà  de  deux  «n  quatie 
kiloaièu^  da  il  régence  du  méd^Giik  U  se  fcMe  dooe 
que  las  médeaina  commusaiix ,  foiùft  liiMiaoartaîaea  fféaarvias^ 
et  eo  panapt  de  «qe  pfiainpe  ftudatfiertal  «  qila  l«  aarvica 
médical  ne  doit  pas  être  kméma  d^aa  tas  villas  que  dans  k^- 
caaqpagoesi  et  réciproqu^osept.  « 

Divisant  donc  •  cestta  saeooda  partie  de  son  iMfaM  oadgpx 
paragrajUies,  l'auteur étaUit  les  hases  id'unAtMrfaniaalieQ  de 
médecjtoe  rurale  atasi  qu'il  soie  ».  '    ^  ^     .     «    ^     ^    . 

i.""  Un  médecin  qui  oonsenle  à  tàr^  «en  i^aear  des  tndi- 
gentSt^cisacriâee  deJa  ilK>itié  de  sas  kononârea^;  '    ^ 

2.''  Une  ou  plusieurs  penontes  liicelaiianies,  ohwiImi* 
reat  de  bîeofeisaiice ,  ^u  un  Gonseii  municipal  qui  veuiHe 
bien  coiissoitirè  donner  des  bUtets  de  visite  e^degensyHa- 
tion  au  nialades  indigengi  qu'il  lett^  pWn  de  sa^iwit  el 
autant qWilievr plaira d'^s-délivrar;  . 

3.^  Qa  ou  'pluaiytrs  biltota  de  visites  at:de  coimillaiiaffs 
quireVianeei;4i4esme  moyen,  à  3,oû  À  ftunca.ehasnn, ai 
qui  BMl  renvoyés  à  la  fin^^^de  lanniadîa 


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-  5»«  — 

avec  le  oièMiie  détoiilé  i^QnlUDanl  léB  fMx  aidîMtr«  ol*l6$ 
prix  réduits  en  regard  ,  et  de  plus  des  notes  ^ur  hs  mal»* 
dies  el  fe  ilte«Uiii  du  troîlenwil. 

TeLiast  le  iééeaai«^  Wm  simple  espesé  par  l'aateitf 
pour  les  s^Mura^à  ddaner  aux  mab^  pauvres  des.  cam^ 
pagnes^  Il  anil«  «lAs  fiiri  .4#ttte,  ie  mérite  de  réoonoBiiè  à 
celui  de  l'efieacité:  il  dpmie  TeaBor  à  "^latjharitÀ  privée , 
et  il  a'aolrare  point  l'iater? eation  de  la  e^riié  légale.  Ufàn 
c'est  un  pliQ,  lioe  théorie,  uYie  oteptei  Oui,  Me8Bi^urs,  c'est 
uQa  utopie  i  mM  eomme  celle  de  Galilée*  Lenteur  peat 
s'éerôr  tMêfOWimiêUâ  m  maul  />L'arrondtsaMient  de  GIbA* 
teauMeut  est  la  ^pMre  4'activité  oà  foacliNiiine  cesyatèmede 
répartition  judicieuse  et  d'iflgénîeux  dévouefnttft.^  Pour 
toute  déOMiflitratien  t  11  sttflBt  de  lire  le  règlement  du^êr- 
vicediédMi  adopté  pour,  les  coitimanes  de  cette  ^insioi) 
delà  Loire^Ittf&rieure,  el  Ton  verra  que  les'viagt'*deiix 
articlasf  dont,  il  se  compose  ne  aaot  ^ue  l'expression  mèaoe 
des  bile  awasqtaeis  ik  s'appliquent  c  ainsi  le  doute  le  plus 
partial  doit  se  t^hanger  en  une'certitude  atoolue.» 

Da  kr médecine  deacampagneto^oùle  mal  est  sans  contre- 
dit plus  grand,  plus  mèuetrier,  et  appelle  en  conséquence 
de  plils  prompt^  6t  de  plus  actifr  romèdes,  lauteor  pass^ 
à  celle  des  .villes,  et  rechercfaé  <|nelle>érgaiiiaatien  pour-* 
rait  èlfa  înstîtuée  à  1^  place  dcTanafcliie  qui  paralyse  les 
fondations,  exeellentes d'ailleurs,  du  aervie^  ipédieslttrbèm. 

A  cal  égard ,  il  ne  trouve  rien  au- dessus  des  dispensai* 
res  ^  Farts  et  de  Lyeiâ,  qu'il  a 'visîléd,' étudiés  ésna  fes 
moindraa  détaite^  La  déolaxation  d'un  esprit ,  ai  érainam'^ 
ment  pratique ,  a  été  considérée  par  U  commîsskm  cràime 
le  dernier  mot  sur  cet  objet,  et  eHe  a  ôru  qu'il  fallait  s'en 


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—  8W  — 

tatkir  à  cette  ergamiiitiott ,  dont  les  beaneui  etéls  se  4mit 
obaqtie  jour  sentir. 

Elle  a  donné  le  même  assenlment  Hux  ehiffres  bodgé- 
taires  que  Tautetir  croit  indispensiMes  à  la  réaltsition  da 
système  qu'il  propose^  et  qui  lui  ont* f^ru  abaissés  à  des 
védoetions  U*o|i:8agesfMiuf  qu'il  fttt  possibie  de  les  disealer. 

Quant*. an  style  dv  méanoînev  il  a, -sans  être  brinaot, 
eeVélan,  cette  rerve^  cette  chaleur  qe'inspire  toujours  one 
conviction  ferme  et  arrêtées  Jà  phrase  estviv«^,  dégagée, 
entraînante,  plus  pleine  de  choses  que  de  mots*;  et  tft^ 
encore  un  des  mérites  sérieux  par  lesqueb  cette  œnrre 
T'Cnipdrte  sur  d'autres  mémoires,  qui^imlgté  leur  valeur, 
nous  ontparu  longs  et  dîfltas; 

-Ost  le,  Messieurs,  que  s'atrète  la  tâobr confiée  à  sod 
rapporteur  par  la  eommit^ion-qui  avait  été  chaînée  d*eia- 
miner  les  mémoires  o<n)courant  pour  le  prix ,  et  dont  Tap- 
pféciation  a  donné  lien  amc  propositions  suivantes  :  « 

Médailles  de  kronte  acbordées^pàr  ordre  dé  aaférite^  aux 
mémoires  lOy^iS,  3et8.   *    -         « 

MédaiUe  d'or,  accordée  au  ménurircA.''  16^  coimne  étant 
le  plus  substantiel ,.  le*  plus  complet  de  tons,  le  senl  répon* 
dant  fi  toutes  les  questions  pesées,  et  surlout  ayant  pour 
Initie  &it«conchiant<»  l'existence  d*ut¥  éervfce  médieal  or- 
ganisé danslavue.d'assnrer  au  peuple  la  santé  du 'corps, 
garantie  de  cdlc-de  l'ème.   >      *  '   -^ 

U^a  antre  question  avait  encore  été  ^proposée  par  vous, 
Mé^siaiirs,  conjointement  avec  celle  dont  vous  donnes  la 
réponse:  c'était  l'iristoire  de4'art«n  Bretagne;  mais  aucun 
mémoire  ne  noua  a*  été  adressé. 


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(•  • 


•  •     'SYSTÈME    .: 

DE  FONCEMÉNTBES  PUITS 

DAWS  LES  TÉRRAIJNS  AQUIFÈRES. 

IMOéniEVli  CIVIL.  ..     ■•  ^     . 


BAPPORT   FAIT   AU  IfOH  D^'CNE   COMllISSIOIf  ÇOyppSÉS     * 
Dfi   MM.    COTTIN  DE  MBLVILUB,  BSBTBAND-G^SL1I«  «  VABHEBBB, 
>       CALL4UD,  ADOUBE  BQBIEBBB,  /{apppr/acr. 


'  MiSflBOM.    * 


Voiis  id^ez  .  chargé    une  .Qinmnifaioi)  de  Vous   rwdrd 
compte  4u  systéioe  Uif eyt^  pir  If.  Wo)§Li,  dan^  te  buldet* 


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—  596  — 

foncer-des  puiU  dans  les  ternûos  reeoinrerU  par.  de  fortes 
couches  ^méables  et  inépuisables.  Aprè^  avoir  examiné  ce 
système  et  confié  les  avantages  qu'H  présente^  votre  Coin* 
mission  me  charge  de  vous  exprimer  l'opinioa^  résultai  de 
ses  études. .      ,  . 

Les  son^^es  effectués  dans  le  bassin  houiHer  de 
Maine-et-Loire  démontrent  qu'une  couche  pehnéable  de 
16  mètrf$  environ  de  prôÈM|deu^<,^t0rmée^  par  dés  allu- 
vions^  recouvre  le  terrain  de  transition.  Cette  coocbe,  com- 
posée de  sable,  de  cailloux  roulés  et  d'argile,  offre  de 
t^es  fecilif^  àt*jo|llrttiôii  des  .ewxqite  io  6moenieDl  or- 
dipstre  des  ptiits  y  devient  impi^ticaUe.  Jioiis  trouvons 
un  exenipie  de  ce  liit  dans  les  tentatives  faites,  à  la  con- 
cession de  Saint-Gerniainf-dès-Prés ,  où  le  directeur  ^ 
defonoer«un  puits'd'extractioq  en  pratiquant  Pépun 
au  moyen  de  thMS  pompes ,  et  où  il' était  loin  d'atteindre  la 
profondeur  des  ailovions. 

C'est  dans  le  but  d^  surmonter  de  si  graves  obstacles 
que. M.  Triger  appliqua  «  en  1840^*d«ins  la  charboooiàre 
de  Cbalonnes,  l'air  comprimé,  afin  de  tenir  en  suspen- 
sion  h  oolenne  d'eau  de  laoooche>perméable.  La  hauteur 
totale  dec^t^  colonne  étaot  environ  de  20  mètres,  lapr^ 
sion  de  l'aUnosphère  factice  où  travaillaient  les  oumers 
s'élevait  à  3  a^IlOsphères  1/2*  Le  rapport  entre  eercbiAes 
démontre  suffisamment  le  surplus  de  pression  nécessité 
par.  l'échappement  constant  qui  s'effectuait  au  moyen^des 
fissures  du  terrain ,  échappement  rendu  ti^maoifiBste*, 
d'eilieurs,  par  le  boutUonnement  constaté  Ji  la  surface  en- 
vîMjAnante.  Malgré  sa  eoQiplication ,  ce  procédé-  4ilors 
cmiqee  dans  ce  genre' dé  toavaux  ftit  appliqué  dans  I'^m- 


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—  5W  - 

de  jMfipy  BraqoegMs  ((MPfviiiee  àê  tbàtma). 
(AMWÊhd6.  dfit  TraRTMix  publics  de  Belgique.  ~  Année  1 847.) 

Ce^'oB  devait  piévoir  enrive.  Oope  tafda  pet  à  reeon- 
aeltM'^ne  des  ouvrkvt  foveés  de%  treveiller  diMs  «in  air 
etn3i.cooipviné<  devaient  être  Boasmis  à  ud  régime  etcoep^ 
lîaDiielt  et  que  »lfi  Invail  pvodiHir  était  moindrtf  que  dans 
les  cârooostencei  oiîlîBaîvea.  iia-cenatrnction  si  piovMen- 
tielleaient  délicate  des  organes  respiratoires  ei  acéqaii- 
fuea  iodi^ne  «.|N»terit  d'aiUenrs,  à  quek  acoidents\loit 
dootter  iieif  le  a^our  dans  an  air  cocnpri«ié  à  ptosieufs 
adBBOsplièraa  ;^tt8Bi  dans  la  mine  de  Chalonnes  hes  euftflers 
eoipke^ent4l8  15  à  20  minutée*  à  passer  graduelleiàent 
de  la  ^eesaîoB  ordinali'e  à  celle  de'trois"atni06pbères  i/ï, 
sous  fioftaeoee^de  laquelle  devett  s'exécuter  Ut  traveîl. 

GeB.oeDsidénitÎDBé  déiHiitrtni  aufiBBammeut,  IkMîeors, 
ûonaUeiy  ait  pareil  élal  de  eboaes  est  anotuÉM  eu  égard  à 
rhygiène  des  ouvriers.  '.  *       >   ^ 

LeLsyslèBede  M.Woialti  panit-*-indëpemlaniinentde 
sa  Baiae  eBrCMvre  «^  offinr  unesiMpUcilé  d'exécûtien  que 
?elne  Co^^maaiM  œ  seuiaît  méooBUaftre. 

Pour  traverser  les  terrains  aquifères,  on  comaieiea  pur 
eoioiicer  par  peseuasioB.  uo  tube  en  tAleY'dedéaxVnèûres 
OBviBOA  dadifirtaa ,  4  trairers  Ib  couobe  peméaUe,  en  dé- 
hlay9»i  riAtériem  aa  fat  el  à  Boeaura  du  tnvail  «  au  OM^eu 
d'uAeiseBA,  d'une- tarière el d'un  tubeà bonlel de  grande 
dhnffnaieo>  fca>  aeuk  pféaauiiou  qui  t end^  cette  ayéraëon 
diitoante  de l'eolaaûeBMBl  des  mbee-de  stitodage,  oon- 
siate  è  «asdie  élBMhaa  les  )oiiits.dea  trettçotoa  de  tubes 
iulredutla.       » 

GeHe  G^retioB.  effectuée  f  iLs^agit  dalier-^errgaMam 


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—  5M  — 

UQA  {MiiiiWi  impannéabîlîté  .-r  lé  Kibe  «vsq  le 

lîite,  et- c'est  ici  que  le  procédé  emplojé  par  M.  Wold^i,  à 

SaiâtrGeraiainrde8*Pré8,  apparatfcavèe  sas  atanteg». 

H.  Wakki  anptoie  uadaeaii  à  quatre  ailes  soolieiMi  au 
laojraA  d'àne  tige  dont  la  longaur  est  déienniaée  par  la 
profendeurde  ia  couche  iK>lide  à  entamer»  Ce  ciseau  est 
gui4é/dao3  ses  évolutions  -verticales  par  ud  appareil  aussi 
siasple  qu'iDgé^ietti* . ' 

Qu'on  .se  figure  deux  pièces  de  boia  disposées  horiaou- 
lalemeoi  CD  croix  etdeseendnes  dans  le  puits  à*raided^noe 
cluaideUe  verticale  fixée  au  point-  d'intenecUon  des  deux 
pièces.  Cette  croix,  d'un  diainèlre  un  peu  moins  considé- 
rable que  la  section  du  puits  «  porte  star  l'un  de  ses  bàis  une 
série  de  coinparttments  convenablement  disposés  et  dont 
chacun-  peut  recevoir  la  tige  senrant  à  Soutenir  la  ciseau. 
Un  ^Mivrier  {Itait  ainsi  faise.  danser  cet  instnmMii  tmc  &• 
ctlité,  et  en  imprimante  l'axe  de  la  croix  un.  aiouvement 
rotateî^e  herizoïital,  il  esteertàinde  décrire^sme  excora- 
tioo  circulaire  ayant  pouvirayon  la  distance  comprise  entre 
le  centre  de  la  crott^^  et  i'ôovertuae  où  passe^iaHîg^  suppar*- 
tant  leaiséauv. 

Ce*  qu'il  est  également  facile  de  oompeendae  4  c'est  que  le 
ciaeau,  après  avoir  oscillé  de  baïutèa  bas  paa  cbacane  des 
ouverlines  placées  dans.ia  longueur  «du  bras  de  la^  eniix>  a , 
en^aoïgnie,  déerit  une  série  dVfloavatîonsNMreuiaires  eooeen- 
triquet^i,  «confondueaies  unes  avec  les  autresi  par  4ear 
rapprochemelit,  ont  fienais  d'obtaiirfau  seinanémede  l'eau, 
un  forage  eitc^aaenreat-aégttlier.  Daas^le  bit  dfasaorer  l'e(^ 
ficacité  de  ce  travail,  on  fait  danser  verticalement  un 
iléeahr  le  bug  .de  k  paroi  dirçnlaire  «ertioile  4»  t^nain. 


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—  699  — 

lia  tijje  de  cet  alésoir  est  guidée  par  le  compartiment 
extrême  de  la  croix.  *  ,  . 

Cette  seconde  partie  de  Topération  effectuée  et  Taîésage 
terminé ,  on  descend  dans  le  puits  uile  pièce  que  l'auteur 
appelle  tiâbe-deff  et  dont  le  diamètre  est  un  peu  moins 
giand  que  celjai  du  premier  tube  dpnt  nous  avons  parlé. 
Lorsqu^on  s'est  assuré  que  ce  tube  tiescend  librement,  on 
le  relève ,  on  remplit  TexcavatioA  de  mortier  hydraulique, 
et  on  l'enfonce  de  nouveau  aif  moyen  d'une  croit  de  bois 
s'appuyant  sur  son  bord.  Cette  croix  est  maintenue  par 
une  chandelle  verticale^  sur  laquelle  s'effectue  la  per- 
çu^sioui 

JLors^u'on  juge  le  iportier  hydraulique  solidifié,  on  vide 
l'eau  du  puits,  on  enlève  tout  ce  qui  garnit  Tintérieur  du 
tube,  et  on  attaque  le  terrain  houilfer.  U  est  inutile  d'a- 
jouter qu'^  cet  instant  l'espace  annulaire  compris  entre 
le  uAe-def  et  la  paroi  du  puits .  est  rendu  imperméable 
sous  l'influence  du  mortier  solidifie. 

Le  cadre  de  ce  rapport  ne  po^et  pas  à  votre  Commis- 
sion, Messieurs,  d'entrer  dans  les  détails  techniques  de 
l'opération  '  du  cuvelage  d'un  genre  tout  particulier,  qui 
succède  à  l'emplçi  des  procédés  ingénieux  dont  nous  ve- 
nons d'esquisser,  la  description.  Nous  nous  bornerons  à 
constater  que  ce  cuvelage  est  pratiqué  de  deux  manières 
distinctes.  La  première  métliode  est  appliquée  pour  le 
revêtement  de  toute  ta  hauteur  où  k  rocher  pr^otaii  une 
grande  quantité  de  fissures  ;  ce  cuvei^ge  ^t  en  tôle^  sa 
section  passe  d'un  .cenole  un  .peu  plus  petit  %ue  c^liip  du 
tiibe«4def  à  un  ovale  assez  pconatu^é.  Cette  dispôsitiQn  est 
d'une  réalisation  beaucoup  plus  prompte  que  l'installation 

42 


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—  600  — 

d*un  cuvelage  ea  bois^  circoQStance  importante,  si  on  ré- 
fléchit que  le  suintement  continuel  de  Teau;  par  les  fissures, 
nécessité  un  travail. essentiellement  rapide. 

La  secpnde  méthode  est  appliquée  dès  qu'on  est  arrivé 
a  un  terrain  plus  solide,  et  que  le  grand  axe  de  Fovale 
s'est  trouvé  égal  à  la  longueur  d'un  rectangle ,  habituelle- 
ment employé  pour  déterminer  la  section  des  puits  ordi- 
naires. Qn  pratique  le  cuvelage  en  bois,  dont  la  section  se 
trouve,  tout  d/abord,  Un  dodécagone  inscrit  dans  lovak 
précité  et  arrive  enfin  au 'rectangle  définitif. 

L'eau  provenant  des  fissures  du  rocher  est  constam- 
ment enlevée  par  une  pompe,  mise  en  jeu  au  raoven  d*an 
moteur  à  vapeur,  très-simple  et  très-économique.  Ce  moteur 
consiste  en  un  cylindre  à  vapeur,  placé  au-dessus  de  la 
pompe ,  de  telle  sorte  que  les  tiges  de  pistons  de  ces  deux 
pièces  soient  directement  réunies.  L'entrée  et  la  sortie  de 
.  là  vapeur  sont  réglées  par  un  taquet  que  le  piston  lui-même 
met  en  jeu. 

Votre  Commission ,  Messieurs ,  croit  devoir  mettre  sous 
vos  yeux  le  prix  de  revient  du  procédé  Wolski ,  prix  basé 
sur  l'expérience  authentique  pratiquée ,  par  notre  hono- 
rable collègue,  dans  la  concession  de  Saint-Genuain-des- 
Prés.  • 

Diamètre*.. 2»<» 

«auteur 17    00 

Épaisseur  de  h  tôle. 0    008 

Soit,  8300  kilog.,  à  1  fr.  on 8,50011    b  c. 

À  reporter.. ..       8,500      • 


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-  601  — 

Report 9>500       » 

TVIKV  À  B01}LBT. 

Diamètre 0"  33 

Hauteur t     00 

Épaisseur  de  la  tôle.. 0    005 

Poids  avec  le  boulet,  etc.>  75  kilog., 
à  ifr -. 75       » 

GOLONnB   DBS    TI6SS. 

Longueur. ......  ^ 20  " 

Équarrissage. .  •     0"  045  sur  0  "  045 
[  70  de  raccords  J 

Poids,  320  k.,  dont  «3  fr.        |  345.    50 

197àOfr.  50.  ) 

Tourne  à  gauche ,  clef  de  retenue ,  etc.         1 20      » 

Deux  ciseaux^  pesant  60    kilog.,  à 
2  fr.  50 150      n 

Alésoir  m  fonte ,  fer  ^t  acier,  200  kif., 
à  Ifr ,.         J200       » 

Fournitures  pour  répftrations  d'outils.         300      » 

Guide  et  mouton  en  bois  et  fer 600      » 

Treuil  à  échappement «r  • .  •  550      » 

Machine  à  vapeur  de  4  chevaux,  ap-  • 
propriée  au  battage  '  du  cisea>i   ou  du 
iBouton,  et  nécessaire  pour  extraire  Teau 
pendant  le  cuvelage« • , 6i.000      » 

PERSORIfBL. 

Un  chauffeur-ajusteur,  à  5  fr.  par  jour 


A  reporter. ...     16,840    50 


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—  602  - 

RqK>rt 16,840  f.  50  c. 

pendant  3^  mois. .  • .%  n-  • 450 

Unforgéron.è  2fr i8p 

Un  aide  forgeron    et    2  aides 

chauffeurs,  à  1  fr.  50  •  v ....... .  40.5 

Deux  sondeurs,  A 2  fr. . .' 3$0. 

Deux  manœuvres >  à  1  fr.  50. . .  270 

Un  surveillant,' à  3  fr 270 

—    1,935       » 

MOBTIB&  HTDRAUUQTJB  BR  iPÂtfi,  î  COkPlfB  UB  CiKBRT  tetlADI. 

9  mètres  cubes,  à  30  fr.  le  mètre. . . .  270       • 

TtTBB-CLSF. 

Diamètre 1  ■  90 

Hauteur S     00      , 

Épaisseur  de  la  tdle 0    iG06 

Poids  avec  les  guides,  1000krlog.,i 
1  fr .* 1,000       • 

Chandelle  en  fer  et  hors  pour  la  croix- 
matière,  ultérieiiremetit  utilisable •    350      » 

Charbon  brûlé  pendant  le  battage  du 
ciseau  et  au  mouton, 'ainsi  que  pour  la 
forge,  300  hecno,  à  3  fr. '900       a 

Un  mois  de  perte  de  temps  pendant  la 
solidification  du  mortier : .  ; 64^       i 

Personnel  pour  foncer  au  pic,  à  3  re- 
prises différentes,  8  mètres,  de  profondeur, 
environ  80  jours. 

A  reporter* . .  •     21,940    50 


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—  603  — 

Report....     21,940 f.  50c. 

Pour  placer  4  élafes  de  ftCQUsses  picp^ 
tées,  composées  chacun  de  deux  r^nga, 
avec  Uur»  ecnrelages,  égalamM  80  joufs» 

En  tout  160  joujrs ,  soit^sa  ipois. 

Ce  travaj/  reviandra  à  : 

lin  ebauflCBur-mécaniçieç-aliasteur,  à  $ 
fr^  pwr  6  w  Djpis. . , ^....         9P0      i> 

Un  forgeron,  à  2  fr p         360      i> 

Un  aide  forgeron  et  deux  aides  chauf- 
feirs^liff.  50 810      » 

$ix  ouvriers  jp^ineurs,  i  2  fr.  &0 2,700      • 

Un  sQpveiilaDt,  à  3  i^r.  33 fiOO      » 

Sois  pour  quatre  étages  de  trousaeis  • 

doubles,  6  n^èf  res  cubes,  i  1  fr.  50,  tout 
IÛU9^ * •  •  •  900      » 

Trois  iuj[>es  de  cuvc^Iage  à  660  kilog., 
JB0HL  fin  |t<Mit  2^0  Jkilog.,  à  1  fr.. .  .^ .       2j900      » 

La  pompe  avec  son  bois  de  soutène- 
inent. .'. 1,363      » 

Xlharbon  consominé  à  la  machine  et  k 
la  fol-né. î,200      » 

33,773     50 
Imprévu 3,377     35 

Total...     37,150    «5 

Si,  pendant  l'exécution  du  travail  décrit  plus  haut,  des 
instruments  venaient  à  tomber  dans  le  puits,  M.  Wolski 
utilise,  pour  les  chercher  au  fond  de  l'eau,  un  appareil  de 


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-  604  — 

son  invention  qui,  en  raison  de  ses  nombreoses  applica- 
tions, sera,  de  la  part  de  notre  coUègne,  l'objet  d'sne 
communication  ultérieure. 

M.  WolsLi  a  soumis  à  l'appréciation  de  la  Goaimiasico, 
la  description  des  outils,  propres  à  remplacer  ceux  de 
Sainl-Germuin-des-Prés ,  dans  le  cas  où  l'oa  rencontre- 
rait des  terrains  calcaires  de  diverees  hatures  ,  ces  outils 
dénotent  un  esprit  d'invention  et  de  conAâissance  dès  ter- 
rains que  votre  Commission ,  Messieurs ,  se  platt  à  con- 
stater. 

En  résumé^  votre  Commission  pense,  Messieurs,  que 
le  système  de  ^ncement  des  puits ,  inventé  par  M.  Wokki. 
peut  et  doit  rendre  tle  signalés  services  là  où  le  fonceAient 
ordinaire  des  piiits^  devient  trës*coûteux ,  par  l'empicH  de 
fortes  machines  d'épuisement,  et,  à  plus  forte  raison,  k 
où  il  est  impossible.  Ce  système  est>  en  effets  applicable, 
indépendamment  de  Tâge  géologique  des  terrains  et  à  des 
profondeurs  bien  plus  grandes  que  celles  du  bassin  houiller 
de  Maine-et-Loire. 

Les  inconvénients  de  ta  métjiode,  dont  il  est  dit  quel- 
ques mots  au  commencement  de  ce  rapport,  et  qui  consiste 
à  faire  travailler  les  ouvriers  dans  un  air  comprimé  à  3  i/2 
atmosphères,  sont,  du  reste,  assez  graves ,  pour  que  tous 
les  moyens  de  les  éviter  soient  appréciés  à  leur  juste 
valeur. 

Votre  Commission ,  Messieurs,  vous  propose  de  donner 
a  M.  Wolski,  par  racfoption  de  ce  rapport,  un  témoignage 
de  Tintérêt  que  prend  TAcadémic  à  ses  utiles  travaux. 


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RAPPORT 


SUH 


LE  LIVRE  DE  M/"  MORIN, 

PAR  M.  CH.-L.  LIVET, 


LB8  PARTICIPES  PASSÉS  BÉDUITS  A  UNE   SEULE  RÈGLE   SANS 
EXCEPTION  )  PAR   mJ^*   ÉLISA   NORIN. 


L'Académie  me  permettra-t-elle  de  Tentretenir  d'un  ou- 
vrage de  grammaire?  —  Je  sais  que  nombre  d'écrivains 
modernes  traitent  cette  science  avec  un  orgueilleux  dédain. 
La  grammaire, disent-ils,  ne  peut  dissimuler  llabsence  de 
la  pensée  ni  la  pauvreté  de  Timàgination.  Non ,  sans  doute; 
ce  n'est  pas  h  grammaire  qui  multiplie  les  volumes,  mais 
ce  n'est  pas  elle  qui  les  ùài  oublier.  Racine  et  Voltaire  ont 
accepté  son  joug  sans  être  moins   élégants   ni   moins 


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—  606  - 

clairs.  Si  Messieurs,  —  je  ne  les  nomme  pas,  —  récu- 
sent ses  lois,  M.  Villemain,  M.  Ampère  ne  s'y  sont-ils  pas 
soumis  7 

Il  semble  que  ce  raépHs  de  nos  entrepreneurs  de  littéra- 
ture vénale  ait  agi  sur  Topinion  ;  si  les  copistes  sont  nom- 
breux, rares  sont  les  gràmmairieDS  originaux  qui  aient 
prolongé  le  sentier  frayé  par  Port-Royal,  Vaugelas,  Regnier- 
Desmarais,  Domergue  et  Beauzée:  nous  ne  citerons  ni 
M.  Poitevin ,  ni  môme  le  P.  Girard,  qui  ne  diffèrent  guère 
de  leurs  rivaux  que  par  une  méthode  plus  heureuse.  Pre- 
nons un  exemple  particulier.  Sur  Je  participe  passé,  quel  ou- 
vrage peut-on  nommer  qui  lève  les  diflScultés  qu'en  pré- 
sente remploi?  Domergue,  Bescher, Horel  soift  insuffisants. 
Aucun  d'eux  n'a  songé  à  rechercher^  dans  les  divers  exem- 
ples où  il  signale  la  variabilité  du  participe  passé,  le  prin- 
cipe général  sur  lequel  la  logique  doit  fonder  une  règle  gé- 
nérale ;  on  a  constaté  des  faits  :  Tindùction  n*y  à  jamais 
cherché  un  élément  commun. 

Un  livre  cependant  a  été  publié  sur  ce  sujet,  — à  Nantes, 
—  par  un  auteur  nantais,  tt.^^'  Rorin ,  une  des  plus  remar- 
quables émules  des  Élisa  Mercœur  et  des  Waldor,  a  daigné 
quitter  les  régions  poétiques  de  l'imagination  et  descendré 
dans  les  champs  arides  du  raisonnement  grammatical  :  là , 
elle  a  recueilli  une  moisson  nouvelle. 

M.''^  Morin  a  publié  le  résultat  de  ses  consciencieuses 
reclierches  dans  l'ouvrage,  intitulé  :  Les  Participés  passés 
réduits  à  une  seule  régie  sans  exception. 

Dire  que ,  dans  ce  travail ,  l'auteur  tient  fidèlement  la  pro- 
messe de  son  titre ,  et  réduit  à  un  principe  unique  les  mille 
et  une  règles  et  les  mille  et  une  exceptions  des  grammai- 


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—  607  — 

riens;  ajouter  qu  une  Ihéorie  par&itement  claire  du  verbe 
prépare  à  Tintelligence  de  la  règle  ^  et  que  de  nombreux 
exercices  à  la  fin  du  volume  la  confirment  et  Texpliquent; 
constater  enfin  l'ordre  et  la  simplicité  qui  régnent  dans  ce 
livre  f  c'est  rendre  justice  à  fauteur  et  reconnaître  à  son 
ouvrage  un  mérite  trop  ïèè\  poilr  (|ue  nous  en  fiEissions  au- 
trement réloge,  c'est  indiquer  le  livre  à  quiconque  veut 
avoir  sur  cet^te  partie  importante  de  la  grammaire  ^  —  la 
solution  <les*  diilBcùlté&  du  participe  passé-,  *—  ftut^e  chose 
que  de  vagues  théories;  c'est,  enfin,  le  recommander  au 
bienveillant  intérêt  de  l'Académie. 

20  oMobre  1810. 


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LISTE 
DES  MEMBRES  RÉSIDAISTS 

DE 

LA   SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE   DE   NAT9TES, 

PAR  OBDRE  DB   UtoBPTIOIl. 


Vottdatlott  en  ITtft. 

Fouré,  docteur-médecin,  directeur  de  TÉcole  de  Médecine 
et  président  du  Conseil  de  Salubrité. 

1799. 
Dttbochet,  chef  de  bureau. 

1807. 

Lafondf  docteur  en  chirurgie,  chirurgien  des  Hospices, 
professeur  à  TÉcoIe  de  Médecine. 

1813. 
Mareschal,  docteur-médecin,  médecin  des  Hospices* 


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—  609  — 

1815. 

Sallion^  docteur-médecin^  prof(^sseur  à  TÉcole  de  Méde- 
cine, médecin  des  Hospices,  secrétaire  du  Conseil  de 
Salubrité. 

Simonin ,  professeur  d'hydrographie. 

1818* 
Noaud ,  agriculteur. 
Marioo  (Calixte) ,  juge  au  Tribunal  civil. 

1819. 

Huette,  opticien,  adjoint  au  Maire  de  Nantes. 
Cailliaud  (Frédéric) ,  conservateur  du  Muséum  d'Histoire 
Naturelle. 

1820. 

Cottin  de  MelviUe ,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées. 

1821. 

Prevel,  pharmacien,  membre  du  Conseil  de  Salubrité. 
Bertrand-Fourmand  «  ingénieur-mécanicien. 

1823. 

Bertrand-Geslin ,  naturaliste. 

1825. 
Le  Ray,  doctear-médecio. 

1826. 

Esmein ,  docteur-médecin. 

1829. 

Démangeât  (Georges) ,  avocat ,  membre  de  la  Commission 
de  Surveillance  de  la  Bibliothèque. 


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—  610  — 

Favre  (Ferdinand),  ancien  Maire  de  Nantes,  représentant 

du  peuple. 
Verger  (François) ,  ancien  négociant. 

1830. 

Édelin  de  la  Praudière ,  agriculteui^. 
Mesnil  (Philémon)^  ingénietir-niécanicien. 

1831. 
Simon  (C.-G.) ,  littérateur. 

1832. 
Boucher  de  la  Villejossy ,  docteur-médedn. 

1834. 
Halgan  (Emmanuel) ,  trésorier  des  Invalides  de  la  Marine, 
membre  de  la  Commission  de  Surveillance  des  Prisons. 
Seheult  (Saint-Félix)^  architecte  du  département. 
Drioliet,  architecte-voyer. 

18S5. 

Allard  (Emile) ,  docteur-médecin. 

Barré,  docteur-médecin,  médecin  des  Prisons,  adminis- 
tratf  ur  des  Hospices. 

Boiscourbeau,  docteur-médecin. 

Bonamy  (Eugène) ,  docteur-médecin ,  nédecin  4les  Hos- 
pices, médecin  des  Épidémies,  membre  du  Conseil  de 
Salubrité. 

Danet,  phanoiacien,  pharmacien  de  THospice  général, 
membre  du  Jury  de  Médecine. 

Belamare,  docteur-médecin,  professeur  à  l'École  de  Mé- 
decine. 


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—  en  — 

Galicier,  lioettt^iiiédicîii. 

GautroDf  docteur-médecin. 

Gély,  docteur-médecin,  chirurgien  des  Hospices,  profes- 
seur à  rÉcole  de  Médecine,  administrateur  des  Hospices. 

Héiie,  docteur-médecin^  médecin  des  Hospices,  profes- 
seur à  l'École  de  Médecine. 

Hignard,  docteur-médecin,  médeciQ  des  Hospkices, 

Leroux  (D.) ,  docteur-médecin ,  cbirargiep  des  Hospices. 

Mabit,  doûleur*>œédecin. 

Haguero,  pharmacien. 

Mahot,  docteur-médecin,  médecin  dès  Hospices. 

Maisonneuve  (ils,  docteur-médecin. 

Malherbe,  docteur-médecin^  médecin  des  Hospices,  meoi- 
bre  du  Conseil  de  Salubrité. 

Marcé,  docteur-médecin,  tnédecin  des  Hospices,  profes- 
seur-suppléant à  rÉcole  de  Méderàne. 

Marchand,  docteur-^iûédeeâo ,  chirurgien  des  flos|iio69, 
professeur  à  TÉcole  de  Médecine. 

Mauduit,  docteur-médecin. 

Menard,  docteur-médecin. 

Monceau ,  docteur-médecin ,  membre  du  Conseil  munici- 
pal, administrateur  des  Hospices* 

Moisan,  pharmacien. 

Padioleau ,  docteur-médecin. 

Pihan-Dufeillay, docteur-médecin,  professeur-suppléant  à 
rÉcole  de  Médecine. 

Saillant,  pharmacien,  membre  du  Conseil  de  Salubrité. 
Thibeaud,  docteur-médecin,  médecin  des  Hospices,  pro- 
fesseur à  rÉcole  de  M^ecine ,  membre  du  Conseil  de 
Salubrité. 


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—  612  — 
Vallin,  doctear-médecin ,  chirargieD  desftMpiees. 

1836. 

Besnard  de  la  Giraudais,  avocat. 
De  Commeqaiers,  littérateur. 

1837. 
Pacquetaa  père,  juge. 
Leboterf ,  avocat  et  botaniste. 

NeveU'Derotrie,  avocat,  inspecteur  d'agriculture  du  dé- 
partement. 

1838. 

Gourdon,  docteur-médecin. 
Puysé«2ur,  professeur  de  bettes  lettres. 

1839. 

DanieULacombe,  avocat. 

Gftche  (Vincent) ,  ingénieur-mécanicien. 

1840. 

Lequerré,  docteur-médecin. 
Bertin ,  pharmacien. 

1841. 

Thomas  (Louis),  sculpteur. 

1842. 
Cuissart  (Pttre). 

Grégoire,  professeur  d'Histoire  au  Lycée. 
Braheix  (Frédéric) ,  négociant. 
Goupilleau,  banquier. 
Varsavaux  (Charles) ,  agriculteur. 


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_  615  - 

1843. 

Foulon  (Joseph) ,  docteur-médecin. 
Dugast-Mattifeux ,  littérateur. 
Colombel  (Évariste) ,  avocat ,  maire  de  Nantes. 
Lecour ,  négociant  ^  ancien  capitaine  au  long-cours. 

1844. 

Gatterre,  docteur-médecin. 
Vandier,  littérateur. 
Aubinais,  docteur-médecin. 
Sallion  fils,  docteur-médecin. 

1845. 
Ménard  (Antbiinè)^  avocat. 
De  Wismes  (  baron) ,  littérateur. 
Laurent,  littérateur. 
Anizon ,  docteur-médecin. 

1846. 
Deluen  (Ludovic) ,  docteur-médecin. 
De  Rostaing  de  Rivas  (Eugène) ,  docteur-médecia. 
Callaud,  mécanicien. 

Cbenantais ,  docteur-médecin,  chef  des  travaux  anatomi- 
ques  à  l'École  de  Médecine. 

1847. 
Wolski ,  ingénieur  civil. 
De  Boissy,  naturaliste. 

De  la  Tour  du  Pin  Chambly  (baron) ,  naturaliste. 
Impost,  naturaliste. 
Ducoudray-Bourgault,  naturaliste. 
Auge  de  Lassus,  naturaliste. 


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—  614  — 

Thomas,  naturaliste. 

E.  Pradal,  naturaliste. 

Delalande  (l'abbé) ,  professeur  d'Histoire  Naturelle  au  petit 

Séminaire. 
Blanchet,  doetçur-médeciq. 
Sesmaisons  (Olivier  de),  propriétaire. 
E.  Talbot,  professeur  au  Lycée. 
Lemonnier ,  professeur  au  Lyoée. 
Goullin  de  la  Brosse  (Henri). 

1848. 
Lemoine,  professeur  au  Lycée. 
Dauban,  professeur  au  Lyoée. 
Guéraud  (Armand) ,  archéologue  et  Utt&rBteur. 
De  Cornulier  (Victor) ,  membre  du  Conatil  général. 
D'Audiffret,  receveur  général. 
Rouxeau,  docteur-médecin. 
Chevallier  (Pttre) ,  littérateyir. 

De  Valori  (Gharies),  UUératdur. 
Livet  (Charles) ,  littérateur. 
^uia,|>réfet4le  la  Loive-lol^we- 
Lucas-Championnière,  avocat 
Bochet,  ingénieur  des  mines. 

1850. 
Carissan,  littérateur. 
Champeqois,  docteur-médecip. 
Bizeul  fils ,  docteur-médecin. 
Foumier  (l'abbé),  curé  de  la  paroisse  Saint-Nicolas. 
Huret  (Charles) ,  proviseur  du  Lypée. 
Voruz  atnéf  fondeur,  adjoint  au  Maire  de  Nantes. 


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TABLE 
DU  VINGT-ET-UNIÈME  VOLUME, 

TOME  1."  DE  LA  TROISIÈME  SÉRIE 


Admission  des  étrangers,  dispositions  réglementaires, 
520. 

Architecture  à  Nantes  au  XVIII.»  siècle,  par  Irf.  Driollel, 
139. 

AtMnais ,  D.-M.  —  Sa  participation  aux  travaux  Je  la 
Section  de  Médecine ,  398. 

Axiqé  de  Lassus.  —  Rapport  sur  les  titres  de  M.  Renou, 
386. 

Beriin.  —  Des  Engrais  et  de  Timportaoce  de  leur  choix 
pour  assurer  Tabondance  des  récoltes,  18. 

Bizeul.  —  Voie^romaine  de  Rennes  vers  le  Mont-Saint- 
Michel,    140.  —    De  Tancienne   capitale  des  Namnèles, 

43 


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—  616  — 

499.  —  Antiquités  de  Nantes,  analyse  du  manuscrit  de 
Fournier,  522. 

BizetU  fils,  D.-M. —  Son  admission,  262. 

Bobierre.  —  Son  admission ,  252.  —  Rapport  sur  un 
Système  de  Foncement  de  Puits,  par  M.  Wolski,  595. 

Bonamy,  D.-M.  —  Vice-Président  de  la  Section  de 
Médecine,  16.  • —  Sa  participation  aux  travaux  de  la  Sec- 
tion de  Médecine ,  402. 

Callatid,  —  Membre  de  la  Section  d'Agriculture,  Com- 
merce et  Industrie,  139.  —  Histoire  de  la  Dimion  du 
Temps,  suite  :  des  Horloges,  441.  —  Rapport  sur  k 
perfectionnement  apporté  par  M.  Fontenau  aux  armes  à 
percussion,  511. 

Carissan,  —  Son  admission,  138. 

Champenois j  D.-M.  —  Son  admission,  252. 

Changement  de  local,  138,  250. 

Charyau,  D.-M.  —  Démissionnaire,  17. 

Colombel  (Év.).  —  Rapport  sur  les  titres  de  M.  labbé 
Fournier,  387.  —  Communisme  au  XVL«  siècle,  497. — 
Législation  des  Valois,  527. 

Compte  rendu  des  Travaux  de  la  Section  des  Sciences 
naturelles  pendant  Tannée  1849,  par  H.  de  Rostaing  de 
Rivas,  secrétaire,  19. 

Compte  rendu  des  Travaux  de  la  Société  pendant  Tan- 
née 1850, par  M.  Malherbe,  secrétaire  général,  544. 

Concours,  dispositions  réglementaires,  250. 

Delalande.  —  Houat  etHœdic,  histoire,  mœurs  et  pro- 
ductions naturelles ,  259,  263. 

De  Rostaing  de  Rivas  ^  D.-M.  —  Compte  rendu  des 
Travaux  de  la  Section  des  Sciences  naturelles  pendant  Pan- 


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-  617  - 

née  1849,  19.  —  Rapport  sur  les  Travaux  de  la  Section 
de  Médecine,  l.«»  semestre  de  1850,  394.  —  Secrétaire 
de  la  Section  de  Médecine,  16.  —  Membre  du  Comité  cen- 
tral, 529. 

Discours  d'installation  prononcé  par  M.  Gély,  président, 
séance  du  9  janvier  1850,  14. 

Discours  prononcé  dans  la  séance  publique  du  24  no- 
vembre 1850,  par  M.  Gély,  D.-M.,  président ,  53 1 . 

Dubochet.  —  Membre  résidant,  137.  —  Canalisation 
latérale  de  la  Loire,  496. 

Ducrest  de  Villeneuve.  —  Mémoire  sur  le  Heu  de  la  nais- 
sance de  Duguesclin,  187.  —  Supplément  au  précédent, 
208. 

Duguesclin,  lieu  de  sa  naissance,  par  M.  Ducrest  de 
Villeneuve,  187,  208.  —  Par  M.  Habasque,  198. 

Duplessix  (A.).  —  Démissionnaire,  17. 

Driollet.  —  Architecture  à  Nantes  au  XVIII.*  siècle , 
139. —  Salubrité  des  logements  d'ouvriers,  501. 

Élections  de  la  Société  pour  1851 ,  529. 

—  de  la  Section  des  Lettres  pour  1850,  17. 

—  de  la  Section  de  Médecine  pour  1850,  16. 

—  de  la  Section  des  Sciences  naturelles  pour 
1850,  136. 

Foumier  (l'abbé).  —  Son  admission ,  387. 

CéJy^D.-M.  —  Discours  d'installation,  14.  —  Notice 
nécrologique  sur  M.  Souët  d'Ermigny,  383.  —  Président 
de  la  Société,  14.  —  Sa  participation  aux  travaux  de  la 
Section  de  Médecine ,  402.  —  Discours  prononcé  dans  la 
séance  publique  du  24  novembre  1850,  531. 

Grégaire.  —  Vice-président,  14.  —  Études  sur  la  ligue 


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—  618  — 

cj)  Bretagne,  382,  393.  —  Président  de  la  Société,  529. 

Guéraud  (A.).  -  Histoire  et  Bibliographie  de  la  So- 
ciété Académique,  522. 

Guéraud  (L.).  —  Démissionnaire,  17. 

Habasque*  —  Réponse  à  quelques  objections  de  H.  Du- 
crest  de  Villeneuve,  sur  le  lieu  de  naissance  de  DugoescUn, 
198.     . 

Histoire  de  la  Division  du  Temps,  des  Horloger,  par 
M.  Callaud,  441. 

Historique  et  état  actuel  de  la  question  des  Fourneaux 
fumivores,  par  M.  Wolski,  32. 

Houat  et  Hœdic,  histoire,  morars  et  productions  natu- 
relles, par  M.  Delalande,  3f>3. 

Huret,  —  Son  admission ,  523. 

Lambert.  —  Discours  d'installation  et  d*adieux ,  5.  -- 
Membre  correspondant ,  137. 

Leborgne^  D.-M.  —  Membre  résidant,  500. 

Légal —  Sa  démission,  17. 

Ligue  (la)  en  Bretagne,  par  M.  Grégoire,  382. 

Liste  des  membres  résidants  de  la  Société,  608. 

Littérature  française  au  XVIl/  siècle ,  par  M.  Ch.  Livet, 
382. 

Littérature  persane,  par  M.  C.-G.  Simon:  le  Livre  des 
Bois,  chap.  VIII,  214.  —  Kourroglou,  137,  139,  497, 
522. 

Livet  (Ch.).  —  Études  sur  la  Littérature  française  au 
XV11.«  siècle,  382.  —  Rapport  sur  le  Traité  des  Parti- 
cipes passés,  605. 

Malherbe,  D.-M.  —  Rapport  sur  Tadmissiou  de  M.  Bo- 
bierre,  252.  •*—  Sa  parlicipation  aux  travaux  de  la  Section 


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—  619  — 

de  Médecine,  400.  —  Compte  rendu  des  Travaux  de  la 
Société  Académique  pendant  Tannée  1850^  544*  —  Vice* 
président,  529* 

Mouvement  comparé  de  la  Population  des  Villes  et  des 
Campagnes  en  France,  par  M.  Benoul,  407. 

Perfectionnement  des  armes  à  percussion ,  par  M*  Fon- 
tenau,  rapport  par  M.  Callaud,  501. 

Pihan-DufeUlay.  —  Président  de  la  Section  de  Méde- 
cine, 16.  —  Sa  participation  aux  travaux  de  la  Section  de 
Médecine,  396. 

Problèmes  d'Agriculture,  par  M.  Neveu-Derotrie ,  rap- 
port par  M.  Ch.  Varsavaux ,  503. 

Procès-verbaux  des  séances,  5,  135,  249,  381 ,  495, 
519. 

Questions  proposées  pour  les  concours  de  1851  et  de 
1852,  528* 

Rapport  sur  le  Concours  de  1850  ,  par  M.  Talbot,  se- 
crétaire adjoint ,  577. 

Rapport  sur  le  Traité  des  Participes  passés  de  M."' 
Élisa  Morin,  par  M.  Ch.  Livet,  605. 

Rapport  sur  les  Travaux  de  la  Section  de  Médecine, 
1.*'  semestre  de  1850,  par  M.  de  Rostaing  de  Rivas, 
D.-M.,  secrétaire,  394. 

Rapport  sur  le  Concours  pour  les  médailles  décernées 
aux  artistes  et  aux  industriels,  par  M.  de  Wismes,  106. 

Benou.  —  Son  admission ,  386. 

Renoui.  —  Mouvement  comparé  de  la  Population  des 
Villes  et  des  Campagnes  en  France,  407. 

RouiUard^  D.-M.  —  Sa  démission,  17. 


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—  620  — 

Rouxeau ,  D.-M.  —  Rapport  sur  les  titres  de  M.  Cham- 
penois, 252. 

SoIItonpère,  D.-M.  — Sa  participation  aux  travaux  de 
la  Section  de  Médecine ,  395. 

Salubrité  (de  la)  des  logements  d'ouvriers,  par  H.  Driol- 
let,  501. 

Séance  publique  annuelle,  527. 

Serre,  —  Membre  correspondant,  495. 

Simon  (C.-G.).  —  Proposition  relative  aux  Concours, 
17.  —  Littérature  persane.  Livre  des  Rois,  chap.  VIII, 
214.  —  Kourroglou,  137,  139,  497,  522. 

Spiritualisme  (du)  dans  l'Art,  par  M.  E.  Talbot,  99. 

Souet  d'Ermigny.  —  Notice  nécrologique,  par  M.  Gély, 
383. 

Talbot.  —  Spiritualisme  dans  l'Art,  99.  —  Rapport 
sur  l'admission  de  M.  Carissan,  138.  —  Rapport  sur  les 
Travaux  de  la  Section  des  Lettres,  500.  —  Rapport  sur 
la  présentation  de  M.  Huret,  523.  —  Essai  historique 
sur  Jean  Bocold ,  500.  —  Secrétaire  général ,  529.  — 
Rapport  sur  le  Concours  de  1850,  577. 

Vandier. —  Membre  du  Comité  central,  14.  —  Créa- 
tion d'une  Caisse  agricole,  170.  —  Rapport  sur  la  pu- 
blicité des  séances,  500. —  Rapport  sur  l'admission  des 
étrangers,  520. 

Varsavaux  (Charles).  —  Rapport  sur  le  Livre  de  M. 
Neveu  -  Derotrie ,  intitulé  :  Problêmes  d'Agriculture, 
503. 

Voie  romaine  de  Rennes  vers  le  Mont-Saint-Michel ,  par 
M.  Bizeul,  140. 

Wisffnes  (baron  de).  —  Rapport  sur  le  Concours  pour 


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les  médailles  décernées  aux  artistes  et  aux  iodustriels, 
106. 

Wolski.  —  Historique  et  État  actuel  de  la  question 
des  Fourneaux  fumivores ,  32.  —  Foncement  des  puits , 
595. 


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